Les gagnants et les perdants du 1er tour des municipales

Le premier tour des élections municipales a vu les électeurs accorder globalement une prime importante au sortant, avec les challengers bien souvent à la peine.

Les gagnants…

. Anne Hidalgo (PS) – Paris

Alors que certains sondages ces dernières semaines donnaient sa rivale Rachida Dati (LR) en tête pour quelques points, la maire socialiste a largement distancé à la fois l’ancienne garde des Sceaux et Agnès Buzyn (LREM). Anne Hidalgo émarge ainsi à environ 30% selon des estimations, avec Rachida Dati en deuxième position à 23%, et Agnès Buzyn troisième avec moins de 18%. La maire sortante peut ainsi envisager le second tour avec une certaine sérénité et engager les négociations avec les écologistes, en position de force.

. David Rachline (RN) – Fréjus

L’une des meilleures prises du parti de Marine Le Pen en 2014, Fréjus, a réélu David Rachline dès le premier tour avec un peu plus de 50% des voix selon des résultats provisoires.

L’ancien sénateur conserve donc la ville varoise tandis que sa victoire réaffirme le département comme l’un des bastions du RN.

D’autres figures du parti ont également réalisé de très bons résultats comme Steeve Briois à Hénin-Beaumont, réélu de même dès le premier tour, et Louis Aliot à Perpignan, en ballotage favorable pour le second tour.

. Stéphane Le Foll (PS) – Le Mans

Le maire sortant arrive en ballottage très favorable pour le premier tour avec des estimations de résultats qui le placent à plus de 40%, loin devant l’ensemble de la droite. Au second tour, l’ancien ministre de l’Agriculture de François Hollande sera d’ailleurs opposé à une candidate divers gauche, l’actuelle députée socialiste Mariette Karamanli, qui a obtenu un peu plus de 13%.

Tout comme Stéphane Le Foll, le maire sortant à Dijon François Rebsamen est en bonne position pour le second tour. L’ancien ministre du Travail est en tête avec 38% des suffrages, devant Emmanuel Bichot (LR) qui obtient 15%.

. Gérald Darmanin (UDC) – Tourcoing

Le ministre de l’Action et des Comptes publics avait été accusé ces derniers jours d’avoir délaissé son portefeuille au profit de sa campagne à Tourcoing (Nord). Gérald Darmanin a finalement été élu dès le premier tour avec plus de 60% des voix.

Ce n’est pas le seul membre du gouvernement élu facilement puisque le ministre de la Culture Franck Riester, et le ministre chargé des Collectivités territoriales Sébastien Lecornu ont été élus également dès le premier tour, respectivement à Coulommiers (Seine-et-Marne) et Vernon (Eure). Ce dernier n’était cependant pas tête de liste.

… et les perdants.

. Sébastien Chenu (RN) – Denain

La ville du Nord était l’une des cibles principales du RN mais le porte-parole du Rassemblement national n’a pas réussi à mettre la maire sortante Anne-Lise Dufour-Tonini (PS) en difficulté. Celle qui est en fonction depuis 2011 a ainsi été réélue dès le premier tour.

. Cédric Villani (DVC) – Paris

Le mathématicien a clairement perdu son pari dans la capitale puisqu’il émarge à peine au-dessus des 5%. Le dissident LREM n’a pas donné d’indication sur une possible fusion de ses listes au second tour, mais il ne devrait pas peser autant qu’il pouvait l’espérer il y a encore quelques semaines.

. Alain Carignon (LR) – Grenoble

Celui qui fut maire de la ville iséroise de 1983 à 1995 ne devrait pas retrouver son fauteuil le maire sortant, l’écologiste Eric Piolle ayant obtenu plus du double (44,6%) des voix d’Alain Carignon (20,5%).

. Laurent Hénart (DVC) – Nancy

Alors qu’au niveau national les maires sortants ont particulièrement bien réussi, la deuxième place au premier tour du maire de Nancy, Laurent Hénart (DVC) peut être perçue comme une déception. Avec un peu moins de 35% des voix, il arrive derrière le candidat divers-gauche Mathieu Klein qui a récolté près de 38% des voix.

Benny Gantz, main de fer et gant de velours

Ancien chef de l’armée ayant débarqué il y a un an en politique, le centriste Benny Gantz se veut pragmatique et rassembleur, deux qualités dont il aura besoin pour tenter de former un gouvernement, après sa désignation par le président israélien lundi.

A 60 ans, le chef de « Bleu-Blanc », formation qui rassemble des élus des deux bords, a reçu le soutien de 61 élus, plus que l’inamovible Benjamin Netanyahu, Premier ministre depuis plus d’une décennie.

La mission de M. Gantz, désormais: mettre fin à la plus grave crise politique de l’histoire d’Israël.

Ce père de quatre enfants, à l’attitude décontractée et abordable, n’avait aucune expérience politique lorsqu’il s’est jeté dans l’arène il y a un an pour former Kahol Lavan -« Bleu-Blanc » en français, les couleurs du drapeau israélien.

Mais en fédérant les opposants à M. Netanyahu, il a réussi à rivaliser aux législatives d’avril, puis à celles de septembre 2019.

Lors du 3e scrutin du 2 mars, son parti a paradoxalement reculé, obtenant 33 sièges contre 36 pour le Likoud du Premier ministre sortant, mais Benny Gantz a reçu au final le soutien de 61 députés, contre 58 pour M. Netanyahu.

Son but est clair: chasser Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption et dont le procès, repoussé pour cause de pandémie mondiale, est désormais prévu dans deux mois.

« Le monde doit savoir que nous sommes pragmatiques et voyons uniquement le bien de l’Etat sans se préoccuper d’intérêts personnels », argue M. Gantz, disant vouloir restituer un sens de « l’honneur » à la fonction de Premier ministre.

Pur « sabra » –terme désignant les juifs nés en Israël–, ce fils d’immigrants rescapés de la Shoah est né le 9 juin 1959 à Kfar Ahim, un village du sud.

En 1977, il rejoint l’armée. Parachutiste, il gravit les échelons et obtient le grade de général en 2001 avant de devenir chef d’état-major de 2011 à 2015.

Dans un pays où l’armée est fédératrice, cet homme de 1,95 m aux yeux bleus bénéficie d’une aura conférée par ses faits d’armes et son rang d’ancien commandant des armées.

« Il n’a pas laissé de traces indélébiles dans l’armée, mais a conservé une image de stabilité et d’honnêteté », selon Amos Harel, journaliste spécialiste des affaires militaires au quotidien Haaretz.

S’il propose une vision plus libérale de la société que M. Netanyahu, et souhaite mettre en place un gouvernement laïc favorable au mariage civil, ce qui n’est pas d’usage en Israël, il soigne, comme le Premier ministre, son image de faucon.

Il affirme vouloir conserver le contrôle militaire israélien sur la majeure partie de la Cisjordanie occupée, annexer la vallée du Jourdain et mettre fin aux attaques à partir de Gaza.

Lors de la dernière guerre dans l’enclave contrôlée par les islamistes palestiniens du Hamas (2014), c’est lui qui était aux commandes et s’est targué du nombre de « terroristes » tués dans un clip de campagne, sans évoquer les victimes civiles.

Il a accusé le gouvernement actuel de « faire trop de concessions » et promis d’imposer « une politique de dissuasion » contre le Hamas à qui Israël a livré trois guerres depuis 2008.

Cultivant son image de « dur à cuire », M. Gantz a multiplié les appels du pied en direction de l’électorat de droite, poussant M. Netanyahu à le qualifier de « pâle imitation ».

Benny Gantz est titulaire d’une licence d’histoire de l’université de Tel-Aviv, d’un master en Sciences politiques de l’université de Haïfa (nord) et d’un master en gestion de ressources nationales de la National Defense University aux Etats-Unis.

Soutenu à la fois par la Liste unie des partis arabes israéliens et par le nationaliste Avigdor Lieberman, qui a par le passé refusé de participer à un gouvernement soutenu par les partis arabes, M. Gantz arrivera-t-il à former un gouvernement stable?

L’ancien militaire avait un temps écarté un scénario: celui d’un gouvernement d’union avec Benjamin Netanyahu à sa tête, l’inculpation du Premier ministre sortant le disqualifiant à ses yeu. Avant de finalement l’appeler à le rejoindre dans le gouvernement qu’il entend former.

Patrick Le Lay, un patron emblématique au tempérament inflexible

A la tête de TF1 pendant 20 ans, artisan de la privatisation de la chaîne rachetée par le groupe Bouygues en 1987, Patrick Le Lay, décédé mercredi à l’âge de 77 ans, a laissé l’image d’un patron énergique mais aux propos controversés.

Entré chez Bouygues en 1981, cet ingénieur en travaux publics est nommé trois ans plus tard pour mener la diversification du groupe. Après l’annonce de la prochaine mise en vente de TF1, Patrick Le Lay prépare pendant un an, avec minutie, le dossier de candidature de son employeur, ignorant la rumeur qui donne favorite la maison d’édition Hachette de Jean-Luc Lagardère.

Lorsque Bouygues rafle la mise, ce Breton austère découvre les moeurs flamboyantes de la télévision, très éloignées de celles du BTP. La plupart des stars quittent TF1 pour la Cinq, le navire tangue.

Peu à peu, avec le vice-président du groupe Etienne Mougeotte, il redresse la barre et transforme TF1 en machine à faire de l’audience et engranger les recettes publicitaires.

La chaîne s’installe comme leader incontesté de la télévision en France, une position qu’elle conserve encore aujourd’hui malgré une concurrence démultipliée.

Grâce à une gestion rigoureuse et un incontestable savoir-faire en matière de programmation, privilégiant les programmes populaires et réservant une place de choix à la télé-réalité, il laisse en 2007 à son successeur Nonce Paolini une société en excellente forme financière, réalisant une part d’audience de 31,6%.

Au sein de la rédaction, c’est « un homme de poigne » dont les seuls contacts avec les journalistes de base ont eu lieu « pendant l’existence éphémère de la Société des journalistes », rapporte un ancien journaliste de TF1.

Aux protestations de la SDJ après la coupure brutale, par la publicité, d’une conversation entre deux Prix Nobel lors d’un 20H00 en octobre 1992, il répond par le poétique: « Je me fous de vos cartes de presse. Aujourd’hui, même les putes sont encartées ».

Et personne n’a oublié ses paroles sur « le temps de cerveau disponible », des déclarations sorties de leur contexte, s’était-il ensuite défendu.

– Attaché à la Bretagne –

« Très grande tristesse d’apprendre la mort de Patrick Le Lay. Un vrai patron, un concurrent redoutable », a réagi mercredi sur Twitter le président du directoire du groupe M6 Nicolas de Tavernost.

« C’était un homme de conviction, parfois rude mais toujours attaché aux autres », a déclaré pour sa part sur le même réseau le PDG du groupe Bouygues, Martin Bouygues.

L’actuel PDG du groupe TF1 Gilles Pélisson a salué dans un communiqué « un visionnaire pour le monde de la télévision moderne, un grand chef d’entreprise et un entrepreneur audacieux ».

Les erreurs de jugement de Patrick Le Lay sont peu nombreuses. Mais en 2002, il jugeait « quasi nulles » les chances de succès de la télévision numérique terrestre (TNT), qu’il qualifiait de projet « marxiste ».

TF1 a donc fait des débuts timides dans la TNT, privilégiant au départ la télévision payante avec TMC rachetée avec AB Groupe et NT1 (devenue TFX).

Le groupe français laisse également passer en 2003 l’occasion de s’implanter en Allemagne, lors du démantèlement de l’empire de Leo Kirch.

Enfin, dans la lutte qui l’opposait à Canal+ dans le domaine de la télévision payante, c’est Canal+ qui a remporté la mise en rachetant fin 2005 TPS, l’ancien bouquet satellitaire détenu alors majoritairement par TF1.

Sa gestion sera seulement mise en cause lorsqu’il est personnellement condamné en appel, en 2013, pour avoir abusé des contrats à durée déterminée de mai 2002 à mai 2003, une première pour un patron de l’audiovisuel français.

Après son départ de TF1 en 2010, Patrick Le Lay s’était allié avec son ami François Pinault et dirigé le fonds d’investissement Serendipity spécialisé dans les paris sportifs. Très attaché à la Bretagne, il avait aussi présidé le club de football du Stade Rennais au début des années 2010.

A Paris, le coronavirus met un coup d’arrêt à l’animation du week-end

Berges de Seine fermées, Montmartre vidée, grandes artères exsangues… La vie dans les rues parisiennes a connu un coup d’arrêt au premier week-end de confinement contre la propagation du coronavirus, à l’exception des commerces autorisés, dernières poches d’activité visibles.

La Place de la République et son ballet quotidien de skatteurs, vélos et autres promeneurs s’est transformée en grande dalle vide, parfois perturbée par des passants, alpagués par les policiers leur demandant leur attestation de déplacement dérogatoire.

« D’habitude, le week-end avec ma copine, on va voir des amis, on mange dehors, on sort dans des bars, on se balade sur les quais… On aime bien passer notre week-end dehors », raconte Charles Colle. Ce samedi, ce sera lecture, films et cuisine.

« On fait des plats plus élaborés, d’habitude, on est moins créatifs », poursuit le jeune homme. « Hier j’ai fait un curry vert, là je vais préparer un ragoût à base de porc », détaille-t-il alors qu’il s’apprête à aller faire ses courses.

Les enseignes alimentaires, autorisées à rester ouvertes, constituent les principales poches de vie extérieure restantes dans la capitale. Les habitants s’y dirigent, le pas plus ou moins pressé, certains portant des masques et en ayant en tête la « distanciation sociale » de vigueur en temps de propagation du virus.

Avec la règle du mètre de distance à respecter entre chaque personne, certaines files d’attente atteignent des dizaines de mètres.

« J’en ai pour deux heures d’attente là », témoigne Christopher Andrain, développeur informatique, venu récupérer des oeufs et d’autres produits frais commandés en ligne auprès d’une enseigne spécialisée dans les produits fermiers.

-« Du jamais vu »-

A Barbès, quartier populaire du nord de la capitale (18e arrondissement), l’accès au marché est filtré. Les policiers contrôlent un par un les attestations de déplacement et réclament un justificatif de domicile pour s’assurer que les personnes vivent bien dans le quartier.

« 30% de la clientèle de ce marché vient de très loin, on essaye de casser cette dynamique. Dorénavant, il y a une seule file pour accéder au marché et il n’y a que les étals alimentaires », explique une fonctionnaire de la préfecture de Paris.

« L’objectif est de préserver ce marché populaire qui est le plus fréquenté de Paris », ajoute-t-elle. En temps normal, près de 5.000 clients y affluent.

« Heureusement que le marché reste ouvert, j’ai un budget limité et si je fais mes courses ailleurs je le dépasse, je ne peux pas me le permettre », confie Hassan, qui vient une fois par semaine faire ses courses.

Au niveau du canal Saint-Martin (10e arrondissement), noir de monde il y a encore une semaine, seuls quelques joggeurs s’aventurent désormais sur les quais.

« Mesdames, messieurs en raison de l’épidémie du coronavirus, nous vous demandons de ne pas rester sur les lieux et de rentrer chez vous », martèle un agent de la sécurité municipale muni d’un mégaphone, en passant en voiture aux abords du canal.

Autour des Buttes-Chaumont, des dizaines de jogggeurs courent le long des grilles du parc fermé. Entre les coureurs, Richard, 55 ans, impassible, poursuit sa séance de Tai-Chi: « normalement, je la fais plusieurs fois par semaine dans le parc mais je ne peux plus, donc j’essaye de m’en rapprocher le plus possible pour garder l’ambiance des Buttes et sa nature », poursuit-il, son attestation dans la poche.

Les lieux plus touristiques de la capitale sont aussi à l’arrêt. Les Champs-Elysées affichaient un grand calme samedi à la mi-journée et les berges de Seine, fermées pour le week-end, étaient totalement désertées.

Le calme plat ressenti sur les grandes artères de la ville tranche avec les bruits habituels de circulation et de vie sociale animée.

Si la plupart des habitants ont dû se contraindre à changer drastiquement leurs habitudes, certains y voient des bons côtés. Pour François, retraité et habitant de Montmartre, « ça a quelques avantages. Je retrouve mon quartier, vidé de ses touristes, du jamais vu. C’est calme et agréable ».

we-al-bur-meh/blb/dlm

Coronavirus: les nouvelles mesures en vigueur en France

De nouvelles mesures destinées à lutter contre la propagation du coronavirus sont entrées en vigueur mardi en France. Voici les principales:

– Urgence sanitaire et sanctions –

Un « état d’urgence sanitaire » entre en vigueur pour une durée initiale de deux mois.

Une loi publiée mardi au Journal officiel permet au gouvernement de restreindre ou d’interdire la circulation, d’adopter des mesures de confinement ou de quarantaine, de limiter les rassemblements, d’ordonner la fermeture provisoire d’établissements et d’entreprises, de contrôler les prix de certains produits et de réquisitionner les personnes, biens et services nécessaires pour lutter contre la pandémie.

Ces mesures sont assorties de sanctions sévères: amende de 135 euros en cas de non-respect des règles de confinement, portée à 1.500 euros en cas de récidive « dans les 15 jours ». Dans le cas de « quatre violations dans les trente jours », la peine est portée à « 3.700 euros d’amende et six mois de prison au maximum ».

– Déplacements –

En vertu d’un décret publié également mardi, tout déplacement de personne hors de son domicile est interdit.

Des exceptions sont prévues pour:

– les trajets domicile-travail et déplacements professionnels ne pouvant être différés

– les déplacements pour effectuer les achats de première nécessité ou nécessaires à l’activité professionnelle

– les déplacements pour motifs de santé qui ne peuvent être différés

– les déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance aux personnes vulnérables et pour la garde d’enfants

– l’exercice d’une activité physique individuelle, dans la limite d’une heure par jour et dans un rayon maximal d’un kilomètre autour du domicile

– les promenades entre personnes vivant au même domicile ou pour les besoins des animaux de compagnie, également limitées à une heure par jour et dans un rayon d’un kilomètre

– les déplacements pour répondre à une convocation de la police, de la gendarmerie, de la justice, ou pour participer à des « missions d’intérêt général » à la demande de l’administration.

Quiconque prétend bénéficier d’une de ces exemptions doit se munir d’une attestation.

– Transports et livraisons –

– Dans les autobus comportant plusieurs portes, les voyageurs ne peuvent monter par la porte avant. La vente de billets à bord est suspendue.

– Des règles d’hygiène et de « distanciation sociale » strictes sont fixées pour les transports de marchandises. Les livraisons sont également encadrées: pas de contact entre les personnes, pas de signature d’accusé de réception, les colis doivent être laissés devant la porte du destinataire, etc.

– Jusqu’au 15 avril, sont interdits les voyages en avion entre la métropole et La Réunion, Mayotte, les Antilles et la Guyane, sauf dérogations.

– Jusqu’au 15 avril, les navires de croisière et les navires transportant plus de 100 passagers ne peuvent plus faire escale dans les ports français, sauf dérogations.

– Marchés –

« La tenue des marchés, couverts ou non et quel qu’en soit l’objet, est interdite », précise le décret.

Les préfets peuvent toutefois autoriser certains marchés alimentaires répondant « à un besoin d’approvisionnement de la population » s’ils accueillent moins de 100 personnes simultanément.

– Cultes –

Les lieux de culte peuvent rester ouverts mais tout rassemblement en leur sein est interdit, à l’exception des cérémonies funéraires dans la limite de 20 personnes.

– Masques et gels –

Le décret limite les prix des gels hydro-alcooliques et réquisitionne les masques de protection respiratoire détenus par « toute personne morale », pour en garantir l’accès prioritaire aux professionnels de santé.

Un arrêté précise que des masques issus du stock national peuvent être distribués gratuitement aux professionnels de santé et aux personnes intervenant auprès de personnes âgées ou handicapées.

Foot: Michel Hidalgo en bref

Michel Hidalgo, décédé jeudi à l’âge de 87 ans, en bref:

Nom: Hidalgo

Prénom: Michel

Nationalité: française

Date de naissance: 22 mars 1933

Lieu de naissance: Leffrinckoucke (Nord)

Discipline/poste: football/attaquant, puis entraîneur

Carrière de joueur: US Normande (1947-1952), Le Havre (1952-1954), Reims (1954-1957), Monaco (1957-1966)

Equipe de France: 1 sélection

Unique sélection: 05/05/62, France-Italie (1-2)

Palmarès de joueur:

3 Championnats de France (1955, 1961, 1963)

2 Coupes de France (1960, 1963)

Finaliste de la Coupe d’Europe des clubs champions (1956)

Carrière d’entraîneur: Monaco (réserve, 1967-1968), Menton (1968-1969), Monaco (réserve, 1969-1970)

Carrière de sélectionneur: Equipe de France (adjoint, 1972-1976), Equipe de France (1976-1984)

Palmarès de sélectionneur:

1 titre de champion d’Europe (1984)

Quatrième place de Coupe du monde (1982)

Keir Starmer, nouveau visage modéré et europhile de l’opposition britannique

En portant Keir Starmer à leur tête, les travaillistes britanniques ont choisi une figure modérée et europhile, un ancien avocat spécialisé dans la défense des droits de l’Homme, pour mener l’opposition dans le Royaume-Uni de l’après-Brexit.

Elu à une large majorité samedi, cet homme de 57 ans au visage carré a réussi à rallier les centristes du parti, tout en parvenant à conserver le soutien des partisans de son prédécesseur, le très à gauche Jeremy Corbyn.

Keir Starmer a réussi ce pari en ne jetant aux orties ni le programme – qui prévoit des nationalisations massives – ni le radicalisme de l’ancien chef de parti travailliste, qui a subi aux élections législatives du 12 décembre une défaite sans commune mesure depuis 1935, notamment en raison du manque de clarté de sa position sur le Brexit.

Chargé depuis 2016 au sein du parti de cette question qui a déchiré le pays pendant plus de trois ans, Keir Starmer s’est nettement démarqué de la ligne attentiste de Jeremy Corbyn, en se prononçant pour un nouveau référendum et surtout pour le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne.

Juste après le vote qui a vu le « leave » l’emporter à 52% en juin 2016, il a fait partie du mouvement de rébellion au sein du Labour contre Jeremy Corbyn, étrillé pour sa molle campagne pour le maintien dans l’UE.

Keir Starmer devra rassembler et mener à la victoire un parti éclaté par les divisions, qui a perdu les clés de Downing Street au profit des conservateurs depuis dix ans.

Il devra aussi assainir un parti gangréné par l’antisémitisme, que Jeremy Corbyn est accusé au mieux de ne pas avoir assez combattu, au pire d’avoir laissé complaisamment prospérer. C’est d’ailleurs l’un des engagements qu’il a pris sitôt élu, s’excusant de cette « tache » sur le parti.

Ni corbyniste ni blairiste (du nom de l’ancien Premier ministre Tony Blair, au libéralisme assumé), Keir Starmer déclarait en décembre au Guardian : « Je n’ai pas besoin du nom de quelqu’un d’autre tatoué sur le front pour savoir ce que je pense ».

« Starmer va être le bureaucrate compétent, celui qui fait les choses. (…) Il demandera au gouvernement de rendre des comptes », estime Steven Fielding, professeur d’histoire politique à l’université de Nottingham, interrogé par l’AFP.

– Défenseur puis accusateur –

Selon Andrew Rawnsley, éditorialiste de l’hebdomadaire de gauche The Observer, « beaucoup s’interrogent sur sa capacité à inspirer ».

Sérieux, parfois même décrit comme terne face à un Boris Johnson, au pouvoir depuis juillet, et haut en couleurs, Keir Starmer a plus un profil de juriste que de politique pur jus.

Il n’est d’ailleurs membre du Parlement que depuis 2015, élu dans la circonscription de Holborn et Saint-Pancras à Londres. Dans la foulée de la démission d’Ed Miliband après la défaite des travaillistes – la pire depuis 1987 – les proches de Keir Starmer le pressent de se lancer dans la course à la tête du parti. Faute d’expérience, il refusera et apportera son soutien à Andy Burnham, battu par Jeremy Corbyn.

Né le 2 septembre 1962, Keir Starmer avait pour camarade d’école le DJ Fatboy Slim, avec qui il prenait des cours de violon.

Son père était tourneur-ajusteur, sa mère, infirmière souffrant d’une grave maladie auto-immune, ce qui l’a amené à fréquenter les hôpitaux depuis sa jeunesse. Son épouse, avec qui il a deux enfants, travaille pour le NHS, le service public de santé britannique, qui a été au coeur de sa campagne.

Après des études de droit, à Leeds puis Oxford, il devient avocat et se spécialise dans la défense des droits de l’Homme. C’est ainsi qu’il mènera des batailles judiciaires contre la peine de mort dans les Caraïbes ou défendra des salariés de McDonald poursuivis pour avoir critiqué l’enseigne.

En 2008, il passe de défenseur à accusateur, en prenant la tête du parquet d’Angleterre et du Pays de Galles, poste qu’il occupera jusqu’en 2013.

Pendant cette période, il mène les poursuites contre des députés abusant de leurs frais de mandats, mais essuie des critiques pour avoir initialement refusé d’engager des poursuites contre un policier dans l’affaire de la mort d’un vendeur de journaux lors des manifestations de 2009 lors du G20 à Londres.

Fan d’Arsenal, il est passionné de foot, et joue tous les week-ends.

GB: les précédentes allocutions d’Elisabeth II

La reine Elisabeth II, qui s’est exprimée dimanche soir lors d’une allocution télévisée exceptionnelle à propos de la crise du nouveau coronavirus, s’est très rarement adonnée à cet exercice durant son règne.

Voici les précédents, hors allocutions de Noël:

– 1991: guerre du Golfe –

Le 24 février 1991, la reine s’adresse aux Britanniques à la mi-journée, sur toutes les radios et télévisions, pour la première fois en temps de guerre, afin d’évoquer la « fierté de la Grande-Bretagne en ses forces combattant dans le Golfe ».

« Au moment où, avec nos alliés, elles (nos forces) sont confrontées à un défi nouveau et plus difficile, je souhaite que nous puissions unir nos prières pour que leur succès soit aussi rapide qu’il est certain, et qu’il soit obtenu avec aussi peu de pertes en vies humaines et de souffrances que possible », dit-elle, souhaitant « que leur courage soit alors récompensé par une paix juste et durable ».

– 1997: hommage à Diana –

Le 5 septembre 1997, un jour avant les funérailles de la princesse Diana décédée dans un accident à Paris, la reine lui rend un hommage appuyé à la télévision dans une allocution en direct depuis le palais de Buckingham.

Cette intervention avait été annoncée la veille, après une virulente campagne de presse lui reprochant de ne pas s’associer à la douleur de ses sujets.

« Je veux rendre hommage à Diana elle-même. C’était un être humain exceptionnel et talentueux. Dans les bons comme dans les mauvais moments, elle n’a jamais perdu sa capacité à rire et à sourire, ni celle à insuffler aux autres sa chaleur et sa gentillesse », dit-elle notamment à propos de la « princesse du peuple », avec qui ses relations étaient notoirement difficiles.

– 2002: le décès de la reine-mère –

Le 8 avril 2002, la reine Elisabeth II se dit « profondément touchée » par l’hommage rendu à la reine-mère, décédée le 30 mars, par les dizaines de milliers de Britanniques qui ont défilé devant son cercueil depuis plusieurs jours.

Dans un message enregistré au château de Windsor (ouest de Londres), retransmis en début de soirée par les télévisions et les radios, elle remercie ses sujets pour leur soutien.

« Depuis que ma chère mère est décédée il y a plus d’une semaine, j’ai été profondément touchée par le débordement d’affection qui a accompagné sa mort », explique la reine, vêtue de noir.

« Je vous remercie également de tout mon coeur pour l’amour que vous lui avez porté pendant sa vie et pour l’honneur que vous lui faites aujourd’hui dans la mort », ajoute-t-elle.

– 2012: jubilé de diamant –

Le 5 juin 2012, la reine s’exprime dans un message pré-enregistré, à la télévision et à la radio, au terme de quatre jours de festivités, pour témoigner de sa « profonde » émotion face à l’immense élan populaire suscité par les cérémonies de son jubilé de diamant.

« Je me suis sentie humble face aux événements auxquels j’ai assistés à l’occasion de mon jubilé de diamant (60 ans de règne, NDLR). Cela m’a profondément émue de voir ces milliers de familles, voisins et amis faire la fête dans cet esprit de liesse », déclare-t-elle.

En robe bleu pâle, elle s’exprime depuis une pièce du palais de Buckingham, avec en arrière-plan un portrait officiel du prince William, deuxième dans l’ordre de succession, avec son épouse Kate.

Jacques Calvet, le patron médiatique qui a sauvé PSA de la faillite

Jacques Calvet, décédé jeudi à l’âge de 88 ans, a dirigé le constructeur automobile PSA (Peugeot, Citroën) durant 14 ans, sauvant le groupe de la faillite dans les annés 1980 au prix de dures restructurations qui ont forgé sa notoriété.

En 1985, Jacques Calvet, homme au caractère entier, réputé inflexible, est une star des médias. Arrivé à la tête de Peugeot et Citroën trois ans plus tôt, il a sauvé un pilier de l’industrie française que beaucoup pensaient condamnés, grâce à des voitures emblématiques.

Du côté de la marque au lion, la citadine 205 et bientôt la berline 405 sont des succès retentissants. Le logo aux chevrons renaît avec la BX.

Ce diplômé de l’ENA, où il a côtoyé Jacques Chirac, devenu son ami, et Michel Rocard qu’il tutoie, est alors l’un des patrons les plus médiatiques du pays. Il est un des rares hommes d’affaires à être invité sur les plateaux des grandes émissions télévisées. Il aura même droit à sa marionnette dans l’émission des Guignols de Canal Plus.

L’homme qui a commencé sa carrière comme auditeur à la Cour des comptes en 1957 puis, deux ans plus tard, au cabinet de Valéry Giscard d’Estaing, alors secrétaire d’État aux Finances, est aussi un haut fonctionnaire et un politique qui a bataillé contre la gauche au pouvoir en France à partir de 1981.

Directeur général, puis PDG de la banque BNP à partir de 1979, après avoir quitté l’administration au moment de l’élection de Giscard d’Estaing comme président de la République, il est évincé en février 1982 par la gauche qui nationalise l’établissement financier.

Il est appelé par la famille Peugeot et arrive à la tête du constructeur au moment où celui-ci traverse la plus grave crise de son histoire.

Son passage se résume simplement, souligne Jean-Louis Loubet, historien et spécialiste de l’automobile: en 1982, le groupe a 30,5 milliards de francs de dettes, lorsque Jacques Calvet le quitte en 1997, elles ont été divisés par près de dix et PSA s’est imposé comme l’un des grands acteurs du marché européen.

« Il réussit à restructurer avec une politique efficace avant tout financière », résume M. Loubet.

– Adversaire des socialistes –

La potion est amère, tant pour la famille Peugeot qui voit son contrôle dilué après trois augmentations de capital, que pour les salariés, dont il réduira le nombre de plus de moitié, au terme de fermetures de sites accompagnées de grèves dures.

Il échoue cependant à faire de PSA le numéro un en Europe et laisse filer chez Renault un projet du constructeur Matra qui donnera naissance à l’Espace, un modèle qui fera pendant de longues années le bonheur de la marque au losange.

L’homme ne fait pas l’unanimité. Il est vu comme quelqu’un d’intransigeant. Roland Peugeot, alors président du conseil de surveillance, le décrit comme n’étant « pas souple de nature ».

Dans le sauvetage de PSA, il affronte le gouvernement socialiste de l’époque. « Vous êtes mon plus dangereux adversaire », lui glisse le président François Mitterrand.

Il se heurte aussi aux syndicats, notamment pendant les grèves de 1989 pour des augmentations de salaires. La publication de sa rémunération par Le Canard Enchaîné en pleine paralysie des usines n’arrange pas les choses.

« C’est bizarre, ce besoin de toujours gouverner avec la haine », dira de lui Raymond Lévy, alors PDG de Renault.

Dans les années 1990, il se lance dans une croisade politique contre la monnaie unique européenne. En 1995, celui qui se revendique conservateur évoque même la possibilité de se présenter pour devenir président de la République. Souvent tenté par la politique, il n’aura finalement jamais franchi le pas, ce qu’il regrettera plus tard.

Son engagement politique, assorti de propos très clivants contre les technocrates de Bruxelles, auront tout de même poussé la famille Peugeot à prendre ses distances et à bloquer son accession au conseil de surveillance du groupe en 1997.

« L’homme a trois facettes, à défaut d’avoir eu trois carrières: haut fonctionnaire, patron et homme politique », résume M. Loubet.

Issu d’une famille intellectuelle parisienne et protestante -son père normalien enseignait la philosophie au lycée Henri IV-, Jacques Calvet a eu trois enfants avec son épouse Françoise.

Donald Trump sème la confusion

Donald Trump voulait rassurer, fixer un cap, démontrer sa capacité à diriger. Il a échoué.

Messages contradictoires, approximations, vantardises, contre-vérités: depuis plusieurs semaines, le président des Etats-Unis sème la confusion sur le coronavirus. Sa prise de parole, mercredi soir depuis le Bureau ovale, n’a fait qu’alimenter un peu plus les inquiétudes, des investisseurs comme des autres.

Lors d’une allocution décousue de dix minutes, oscillant entre la reconnaissance de la gravité de la crise et sa volonté d’en minimiser la portée, le dirigeant de la première puissance mondiale a mis en avant des initiatives économiques inabouties. Et annoncé, avec plusieurs erreurs qui ont du être rectifiées par ses équipes a posteriori, des restrictions de voyage.

Le principale mesure, la fermeture pour 30 jours des frontières des Etats-Unis à tous les voyageurs en provenance d’Europe (à l’exception des Américains), a suscité de vives interrogations sur son efficacité face une pandémie qui a fait plus de 4.600 morts à travers le monde et affolé les marchés financiers.

Les critiques sont venues de ses adversaires démocrates, mais aussi de la communauté scientifique et même de son propre camp.

Thomas Bossert, son ancien conseiller à la sécurité intérieure, n’a pas caché ses réserves. « Dans deux semaines, nous regretterons d’avoir perdu du temps et de l’énergie sur ses restrictions de voyage », a-t-il tweeté, estimant qu’il aurait été infiniment préférable de se concentrer sur la « préparation des hôpitaux » et des communautés particulièrement touchées.

Le Royaume-Uni, épargné par la décision présidentielle, a également critiqué la mesure visant les ressortissants de l’espace Schengen. « Nous ne pensons pas que c’est ce qu’il faut faire », a lâché, laconique, le ministre britannique des Finances Rishi Sunak sur la BBC.

– « Dangereusement court-termiste » –

« +L’Amérique d’abord+ est une réponse dangereusement court-termiste face à une crise mondiale de cette ampleur », a réagi Iann Bremmer, fondateur du think tank Eurasia Group.

Au-delà de ses décisions, le choix des mots a aussi fait grincer des dents. Dès le début de son allocution, Donald Trump a parlé, à dessein, du « virus étranger ».

Or ce président qui, en, campagne, stigmatisait les Mexicains « violeurs », n’en est pas, loin s’en faut, à son coup d’essai sur ce thème.

« Construction en cours. Nous avons plus que jamais besoin d’un mur! », tweetait-il 10 mars en réponse à un autre tweet mettant en garde contre la propagation du « virus de Chine »

Pour Richard Haass, président du Council on Foreign Relations, le discours de mercredi soir était d’abord remarquable par sa « xénophobie ».

L’appel au rassemblement formulé par l’ancien homme d’affaires de New York n’aura par ailleurs duré que quelques heures. « Nous avons un ennemi commun, l’ennemi du monde, c’est le coronavirus », tweetait-il mercredi, appelant les médias, qu’il attaque sans relâche, à l’unité.

Dès jeudi matin, il replongeait dans son exercice favori: citer sur Twitter des présentateurs de sa chaine préférée, Fox News, critiquant ses adversaires, en l’occurrence Nancy Pelosi, présidente démocrate de la Chambre des représentants.

– « Virus et leadership » –

Quelques heures avant l’allocution présidentielle, Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des maladies infectieuses et figure emblématique de la recherche aux Etats-Unis, avait, devant le Congrès, fait une série de mises en point.

Ses réponses précises, simples, directes – « basées sur la science », a-t-il insisté – ont sonné comme autant de rectifications aux approximations présidentielles sur le virus qui fait trembler la planète.

Interrogé en particulier sur les affirmations du tempétueux locataire de la Maison Blanche selon lesquelles l’arrivé du printemps signerait probablement la fin du virus, il a remis les choses calmement en perspective.

« Nous ne savons pas ce que ce virus va faire », a-t-il martelé. « Nous espérerons qu’avec un temps plus chaud il ira en diminuant. Mais nous ne pouvons travailler sur la base de cette hypothèse. Nous nous devons de prendre comme hypothèse de travail que cela va devenir de pire en pire ».

Dans un éditorial intitulé « Virus et leadership », le Wall Street Journal, peu suspect d’anti-trumpisme primaire, s’inquiétait lui de l’incapacité du milliardaire républicain à relever le défi de cette crise sanitaire mondiale.

« Lorsque le président Trump identifie une menace, son instinct est de la nier, de s’arc-bouter et de riposter. Cela souvent été efficace politiquement, mais dans le cas du nouveau coronavirus, cela a nui à sa capacité à diriger ».

Inquiets après l’annonce de Trump, des touristes américains veulent rentrer d’Europe

Fin de vacances dans la confusion: de nombreux touristes américains qui craignent d’être bloqués en Europe se sont précipités jeudi dans plusieurs aéroports européens pour rentrer au pays, après l’annonce surprise de Donald Trump d’interdire l’entrée des Etats-Unis aux Européens pour endiguer le coronavirus.

« C’est confirmé, on a des sièges ? », s’enquiert à Roissy auprès de sa mère Kate Mendhan, une Américaine de 22 ans venue passer une semaine de vacances à Paris pendant le « spring break ». Cette étudiante en droit devait initialement regagner Minneapolis dimanche, mais elle a avancé son départ à vendredi matin.

Aux yeux de Carole Mendhan, la mère de Kate, « si Donald Trump fait ça, c’est juste pour être réélu » en 2020. « C’est politique, c’est tout », dit-elle à l’AFP, dépitée de raccourcir son voyage sans avoir eu le temps de « voir Versailles ».

En cause: l’annonce surprise de Donald Trump d’une suspension pour trente jours de l’entrée aux Etats-Unis des voyageurs ayant récemment séjourné en Europe, afin d’endiguer la pandémie de coronavirus que le président américain a qualifié de « virus étranger ».

La mesure entrera en vigueur vendredi à minuit heure de Washington (04H00 GMT samedi).

Elle s’appliquera à toute personne ayant séjourné dans l’espace Schengen au cours des 14 jours précédant leur arrivée prévue aux Etats-Unis, mais fait une exception pour les Américains et les résidents permanents.

Cela a pourtant semé la confusion parmi les touristes américains, dont des dizaines ont afflué quelques heures après l’annonce dans plusieurs aéroports européens.

« C’est un peu décevant. Il y a plusieurs personnes ici pour qui c’est la première visite à Paris, ça va être triste », déplore ainsi Michelle, touriste originaire de Salt Lake City, qui devait séjourner à Paris et Londres.

– « Repartir tout de suite » –

A l’aéroport londonien d’Heathrow, de longues files d’attente s’étaient formées devant les comptoirs des compagnies American Airlines, Virgin et Delta – qui ont toutes plusieurs vols par jour en direction de villes américaines.

« On vient de sortir de l’avion et on va repartir tout de suite, c’est pas croyable ! », lance Tiara Streng, 29 ans, originaire du Colorado, qui fait la queue pour réserver un vol avec trois amis. « C’est vraiment ridicule », peste-t-elle à propos de l’annonce de Trump.

Son groupe d’amis a voyagé depuis le Colorado dans la nuit pour un séjour de dix jours en Europe, notamment une excursion en Irlande à l’occasion de la Saint Patrick et qui a été annulée.

« On a reçu tous ces messages seulement lorsqu’on a atterri… », témoigne une autre touriste, Brooke Ward, 32 ans. « On s’est demandés si on devait rester. Evidemment, on n’a aucune envie de repartir, mais on s’est dit que c’était préférable… ».

Son compagnon de voyage Deepi, 28 ans, ajoute: « notre famille, British airways, en fait tout le monde nous a conseillé de rentrer; ils disent que c’est mieux », soulignant qu’il craignait aussi que les Etats-Unis « annoncent demain qu’il faut qu’on rentre tous à la maison ».

– « Le plus vite possible » –

« Nos employeurs nous ont déjà dit que l’on devrait être en quarantaine en rentrant », confie Streng, qui voyage avec ses amis Brooke et Deepi. Ils travaillent tous les trois dans un hôpital.

Ils espèrent que la compagnie British Airways échangera leurs billets sans frais.

A l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, des passagers tentaient aussi jeudi de trouver un vol pour les Etats-Unis – certains portant des masques -, faisant notamment la queue devant le comptoir de la compagnie néerlandaise KLM.

« Je devais aller voir ma famille à New York lundi, mais maintenant, je ne sais pas ce que je vais faire… », lâche Morena, 30 ans, qui vit à Rotterdam.

De son côté, Tristan Jensen, 20 ans, originaire de Detroit, explique qu’il essaie de « rentrer chez lui « le plus vite possible ». « Nous devions rester (aux Pays-Bas, NDLR) jusque dimanche, mais il nous faut rentrer ».

A Roissy Charles-de-Gaulle, la fréquentation a déjà chuté à environ 100.000 passagers contre 200.000 à 260.000 habituellement, selon une source aéroportuaire. L’annonce de Trump impacte en particulier quatre compagnies aériennes: Delta, American Airlines, Air France et Norwegian, a précisé cette source.

Plus de 20.000 personnes ont été contaminées par le coronavirus en Europe, et 930 en sont mortes, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles mercredi à 17H00 GMT.

Les Etats-Unis sont aussi touchés avec plus de 900 cas recensés et au moins 28 morts.

Des touristes français, qui devaient se rendre prochainement aux Etats-Unis, se renseignaient aussi à Roissy, décontenancés. « On avait prévu de partir sur New York et voilà (…) On va se renseigner là pour avoir plus d’informations », lance Didier, touriste français, dont le fils étudie à New York.

« Le monde ne va pas s’arrêter de tourner à cause d’une maladie », soupire de son côté à Roissy Melvin Taylor, guitariste de blues renommé qui se produit régulièrement en Europe. Assis face à un tableau d’affichage des vols, guitare à ses pieds, il attend des amis de Chicago. Lui-même a prévu de rester en France jusqu’au 29 mars.

« On ne va pas changer nos plans », assure-t-il, estimant que Donald Trump fait « semblant d’agir » mais qu’il n’a pas de réelle stratégie. Un de ses amis, également musicien, ironise: « Qu’est ce qui peut se passer ? Rester en France ? C’est bien la pire chose qui puisse nous arriver ! ».

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Dans une Italie au ralenti, mode d’emploi à l’heure du coronavirus

Plus de coiffeurs ni de visites chez ses parents, plus de café au comptoir, le jogging est toléré mais en solitaire : mode d’emploi d’un quotidien bouleversé par le coronavirus pour 60 millions d’Italiens.

– Se déplacer –

– Les Italiens peuvent sortir pour le travail, pour des soins de santé ou acheter de la nourriture et des produits de première nécessité. Mais ils doivent justifier leurs déplacements en brandissant une déclaration sur l’honneur, susceptible d’être vérifiée par la police.

– Il n’y a pas de postes fixes pour bloquer les mouvements des personnes, mais des contrôles dans les rues silencieuses, effectués par des policiers dûment équipés de masques. Jeudi, le nombre des patrouilles avait été revu à la hausse à Rome. Giuliano, 68 ans, lisait comme à son habitude le journal devant le Panthéon à Rome. Contrôlé, il a dû rentrer chez lui, a constaté l’AFPTV.

– Les transports en commun et les taxis ne sont pas soumis à des restrictions, mais ils étaient encore plus vides jeudi après la fermeture de la plupart des commerces.

– Aucune limitation pour le transport de marchandises, le transport d’animaux, l’acheminement de paquets, qui s’apparentent à du travail.

– On a le droit de faire de l’exercice dehors, mais seul, pas en groupe. Les promeneurs de chien ont un excellent alibi pour sortir.

– Travailler, étudier –

– Les casaniers sont à l’honneur car rester chez soi est « pour le bien de tous », selon le gouvernement. Le télétravail est donc vivement conseillé si possible, tout comme la prise de jours de congés.

– Les usines et les artisans continuent à produire normalement, à condition d’appliquer des précautions d’hygiène strictes.

– Les services administratifs publics restent ouverts, mais le gouvernement conseille d’utiliser les services en ligne.

– Ecoles et universités sont fermées et sont incitées à proposer un enseignement à distance.

– Communiquer –

– Confinés chez eux, les Italiens téléphonent désormais « tout au long de la journée » à partir de leur réseau fixe, qui a enregistré une hausse des communication de 70%, selon le patron de Telecom Italia Luigi Gubitosi.

– Et quand ils ne téléphonent pas, ils regardent la télé : le groupe Mediaset a enregistré une progression « sensible » de son audience.

– Visiter –

Les voyages de tourisme sont « absolument à éviter ». Les vacanciers italiens ou étrangers déjà en Italie doivent limiter leurs déplacements à ce qui est nécessaire pour rentrer chez eux. Encore visibles mercredi, ils étaient très rares jeudi à Rome.

– Sortir –

– Bars, pubs et restaurants sont tous fermés depuis jeudi. Agron, un employé du café Da Claudia à Rome, en profite pour nettoyer la devanture : « La fermeture est-elle logique ? Je ne sais pas, je fais ce qu’on me dit », a-t-il commenté, « mais le plus important c’est la santé ».

– Toutes les manifestations culturelles, sportives, religieuses ou festives sont suspendues. Pas de Calcio donc. Les compétitions organisées par des organismes internationaux se dérouleront à huis clos. La foire du livre jeunesse de Bologne, le plus grand salon de ce genre en Europe, décalée à mai a été finalement annulée.

– Les lieux de culte restent ouverts, à condition de respecter la distance d’un mètre. Mais les cérémonies religieuses (mariage, baptême, funérailles, prières musulmanes du vendredi) sont interdites. Des participants à un cortège funéraire en Sicile ont ainsi été les premiers à s’être vu infliger une amende. Des dizaines d’autres personnes ont depuis été verbalisées et ont dû payer jusqu’à 200 euros.

– Consommer –

– Restent ouverts depuis jeudi les pharmacies et les magasins vendant, outre des biens alimentaires, des produits indispensables, comme le matériel d’éclairage, les articles d’hygiène, l’électroménager, les équipements de télécommunications, les téléviseurs, les journaux, ainsi que les opticiens, les laveries, mais aussi… les bureaux de tabac.

– Tous les autres commerces, jugés non indispensables, vendant par exemple des vêtements, sont fermés, tout comme salons de coiffure. Dès jeudi matin, des chaînes spécialisées dans les vêtements incitaient leurs clients à commander sur internet.

– Dans les supermarchés, dont les entrées sont filtrées pour éviter les foules, le personnel est équipé de gants et de masques.

– La famille –

– Manger chez ses parents n’est pas considéré comme un déplacement nécessaire : c’est donc en théorie interdit. En revanche, les couples divorcés peuvent se déplacer pour voir leurs enfants s’ils sont mineurs. S’occuper de personnes âgées est autorisé, tout en évitant le plus possible les contacts physiques.

Virus: les restrictions américaines, « coup de massue » pour le secteur aérien

La décision américaine d’interdire l’accès des Etats Unis aux Européens est un nouveau « coup de massue » sur une liaison phare pour le secteur aérien, d’ores et déjà l’un des plus éprouvés par la pandémie de nouveau coronavirus.

+ Qui est concerné par l’interdiction?

Toute personne ayant séjourné dans les 26 pays européens de l’espace Schengen au cours des 14 jours précédant leur arrivée prévue aux Etats-Unis, à l’exception des Américains et des résidents permanents aux Etats-Unis. La mesure entre en vigueur pour 30 jours samedi à 03H59 GMT.

C’est aux compagnies aériennes de vérifier qui peut ou non embarquer. Si un passager se voit refuser l’entrée sur le territoire américain, c’est à la compagnie aérienne de le rapatrier à ses frais.

+ Que représente le trafic entre Etats-Unis et Europe continentale?

Le marché nord-américain est crucial pour le trafic long-courrier des compagnies aériennes qui se bousculent, notamment vers la destination reine, New York, alléchées par la régularité du trafic et la part importante de passagers en classe affaires, plus rentable.

Les Etats-Unis représentent par exemple 8,1% du trafic accueilli dans les aéroports parisiens en 2019 (8,7 millions de passagers) contre 2,1% pour la Chine.

+ Quel impact pour les compagnies aériennes et les aéroports?

Les compagnies aériennes sollicitées jeudi s’efforçaient encore d’évaluer l’impact de la décision américaine.

« Nous ne savons pas encore si cela signifie que tous les vols de KLM seront impactés », a déclaré le patron de KLM Pieter Elbers. « Mais il est indéniable que les conséquences sont extrêmement importantes ».

En Islande, qui fait partie de l’espace Schengen, Icelandair a annoncé des restrictions qui « toucheront considérablement les plans de vol ». Elle devait assurer 490 dessertes depuis et vers les États-Unis au cours des 30 prochains jours.

L’interdiction américaine constitue « un nouveau coup de massue pour les compagnies aériennes », affirme Charlie Roberson, économiste en chef chez Renaissance Capital à Londres.

Au point de fermer des aéroports? En Italie, placée en confinement, l’un des deux aéroports de Rome, qui accueille essentiellement des compagnies low cost, fermera à partir de vendredi, l’autre verra son activité réduite.

A Francfort, d’où partent 480 vols par semaine vers les Etats-Unis, l’opérateur aéroportuaire n’évoque « pour le moment aucun plan concret de fermeture des terminaux », tandis qu’à Paris des discussions sont en cours sur l’éventuelle fermeture d’un des terminaux de Charles-de-Gaulle.

+ Quelles conséquences financières?

Les compagnies aériennes européennes Air France, IAG (British Airways) et Lufthansa plongeaient toutes en Bourse jeudi.

L’association internationale du transport aérien (Iata) avait estimé le 5 mars, avant la décision des Etats-Unis, que les pertes de chiffre d’affaires des compagnies pourraient atteindre 113 milliards de dollars si le coronavirus continuait à se répandre.

« Il y a deux questions essentielles, l’une qui est la fin de la crise sanitaire et l’autre qui est comment l’économie va tenir le choc », a commenté Olivier Fainsilber, expert en transport aérien au cabinet Oliver Wyman.

Dans un secteur fragile qui a vu en Europe la faillite récente de plus d’une dizaine de compagnies, le coronavirus risque de faire des dégâts supplémentaires. Pour être rentable, un avion doit voler avec un taux de remplissage d’au moins 70 à 80%.

« C’est la catastrophe (…). Au total, entre les voyages à forfait (hébergement+vols) et les prestations sèches (vols principalement), on estime qu’il y a 100.000 clients concernés au niveau des tour-opérateurs français sur mars et avril », a déploré René-Marc Chikli, président de la fédération française de ce secteur.

+ Y a-t-il eu des précédents?

En septembre 2001, le trafic aérien à destination des Etats-Unis avait été complètement interrompu pendant trois jours.

Au plus fort de l’épidémie de SRAS, qui avait principalement touché la Chine, Hong Kong et Singapour, les revenus des compagnies opérant dans la région Asie-Pacifique avaient chuté en mai 2003 de 35%.

La crise financière avait fait plonger dans le rouge les compagnies aériennes en 2008 et 2009.

Et lors de l’éruption du volcan islandais en avril 2010, plus de 100.000 vols avaient été annulés en 6 jours en raison de la clôture de l’espace aérien européen. Cela s’était traduit par une perte de chiffre d’affaires de 1,8 milliard dollars pour le trafic aérien mondial.

Visite du chef de la diplomatie française à Alger

Le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian s’est rendu jeudi à Alger pour discuter des questions bilatérales et régionales, notamment de la Libye, un dossier sur lequel l’Algérie s’est montrée active ces dernières semaines.

Cette visite –la deuxième de M. Le Drian à Alger depuis la fin janvier– a eu pour cadre un comité mixte algéro-français de coopération économique (Comefa), selon un communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères.

« Cette réunion a été l’occasion de faire le point sur l’ensemble des dossiers concernant la coopération économique et commerciale liant les deux pays », précise le communiqué qui évoque des « projets de partenariats bilatéraux dans le domaine des finances et de l’investissement, l’industrie automobile, l’industrie pharmaceutique, l’agriculture et l’agroalimentaire ou encore les secteurs des nouvelles technologies et du tourisme ».

Au cours d’un entretien avec son homologue algérien, Sabri Boukadoum, M. Le Drian a également évoqué le dossier libyen, la question du Sahara occidental, la situation au Sahel et au Mali et les derniers développements au Moyen-Orient, selon l’APS.

L’Algérie, qui partage près de 1.000 km de frontière avec la Libye, s’est récemment montrée très active pour tenter d’oeuvrer au règlement politique d’un conflit qui menace la stabilité régionale.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a proposé en janvier d’accueillir un « dialogue » entre toutes les parties libyennes afin de favoriser des négociations visant à sortir la Libye de la crise.

Un ex-ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a été pressenti pour remplacer l’émissaire de l’ONU en Libye, Ghassan Salamé, démissionnaire, selon des sources diplomatiques européennes et africaines.

L’Irak inquiet après la mort de deux Américains et 26 combattants pro-Iran

Trois membres de la coalition internationale, dont deux Américains, ont péri dans une attaque en Irak avant que des raids ne tuent 26 paramilitaires irakiens pro-Iran à la frontière syrienne, de nouvelles violences qui inquiètent jeudi Bagdad et l’ONU.

La mort de deux soldats, un Américain et un Britannique, et d’un sous-traitant américain dans une attaque à la roquette est sans précédent depuis des années en Irak.

Il s’agit aussi du plus lourd bilan pour une attaque visant les paramilitaires irakiens pro-iraniens, avec 26 morts.

Fin 2019, des bombardements aériens américains à la frontière irako-syrienne avaient fait 25 morts dans les rangs des supplétifs irakiens de l’Iran en riposte à la mort d’un sous-traitant américain dans une attaque contre une base du nord du pays.

Mais cette fois, un porte-parole de la coalition antijihadistes, menée par Washington, a affirmé à l’AFP que ni la coalition ni l’aviation américaine n’avait mené de raid mercredi soir contre les combattants pro-iraniens à la frontière syro-irakienne.

Durant l’été 2019, les pro-Iran en Irak avaient accusé Israël de frapper régulièrement leurs bases.

– « Défi sécuritaire » –

L’attaque contre la base en Irak, comme 21 autres contre des intérêts américains dans ce pays depuis la fin octobre, n’a pas non plus été revendiquée.

Mais Washington attribue généralement ce type d’attaques aux factions irakiennes pro-Iran qui, elles, promettent régulièrement de « venger » leur chef, assassiné en janvier à Bagdad par Washington aux côtés du général iranien Qassem Soleimani.

Jeudi, les brigades du Hezbollah, l’une des factions pro-Iran les plus radicales d’Irak, ont salué « ceux qui ont mené cette opération contre les forces d’occupation américaines » sans toutefois la revendiquer. Elles ont appelé à plus d’attaques anti-Américains.

Signe que ces derniers développements inquiètent au plus haut point, le commandement militaire irakien chapeauté par le Premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi a dénoncé l’attaque contre la coalition, qui constitue « un défi sécuritaire très dangereux ».

Le président Barham Saleh et le chef du Parlement Mohammed al-Halboussi ont également condamné l’attaque.

De son côté, la mission de l’ONU en Irak a appelé à « la retenue maximale », estimant que « le risque d’actes voyous de groupes armés est une inquiétude permanente » en Irak qui « n’a vraiment pas besoin de devenir une arène pour les vendettas et les batailles venues d’ailleurs ».

Les autorités irakiennes sont dans une position délicate face à la coalition: elles continuent à mener des opérations avec ses troupes contre les jihadistes mais le Parlement a récemment voté l’expulsion des 5.200 soldats américains du pays et le gouvernement doit maintenant faire appliquer cette décision.

Et alors même que la coalition avait annoncé suspendre ses activités en Irak en raison des tensions entre Téhéran et Washington, dimanche encore, elle a perdu deux hommes –des Américains– dans des combats contre des jihadistes dans le nord irakien.

Dans un Irak en plein marasme politique, au budget mis en danger par la chute des cours du pétrole et qui doit faire face à une épidémie du nouveau coronavirus, les autorités n’ont pas identifié les responsables de l’attaque contre la coalition.

A chaque fois, l’armée irakienne assure retrouver rapidement la base de lancement des roquettes mais les enquêtes ne mènent jamais jusqu’aux auteurs des tirs.

– « Rendre des comptes » –

Deux soldats, l’un américain et l’autre britannique, ainsi qu’un sous-traitant américain, ont été tués mercredi soir dans cette attaque contre la grande base de Taji, dans la banlieue de Bagdad, a indiqué à l’AFP un responsable militaire américain.

La coalition internationale a recensé 18 roquettes tirées au total, faisant également état de 12 blessés, sans préciser leur nationalité.

Quelques heures après, « dix explosions » secouaient une zone au sud de la ville syrienne de Boukamal, frontalière de l’Irak, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) qui avait dit que l’attaque était probablement menée par le coalition.

Au moins « 26 combattants irakiens » du Hachd al-Chaabi ont été tués, selon la même source.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo et son homologue britannique Dominic Raab ont exigé que les auteurs des attaques contre la base « rendent des comptes », selon le département d’Etat américain.

Italie: face au virus, le sud engagé dans une course contre la montre

C’est une course contre la montre qui s’est engagée à l’hôpital Cardarelli de Naples où est montée une nouvelle unité de soins intensifs: le sud de l’Italie est jusqu’à présent relativement épargné mais beaucoup s’inquiètent de la fragilité de son système sanitaire si la pandémie de coronavirus devait s’étendre à cette région pauvre.

Dans le bâtiment M, rebaptisé « Aile coronavirus », ne restent que quelques brancards qui laisseront bientôt la place à du matériel, des équipements et des médicaments plus sophistiqués dont l’objet sera de sauver des vies.

En Campanie, la région de Naples, l’ambiance est radicalement différente de celle de Milan, dans le nord du pays. Une seule personne y est décédée contre 827 dans l’ensemble du pays, et 154 cas y ont été détectés (sur près de 12.500), selon un bilan publié mercredi. La Calabre, à la pointe de la botte, a recensé 19 cas, la Basilacata voisine huit.

Mais les spécialistes préviennent que le sud n’est pas à l’abri.

Samedi, quelques heures avant l’annonce officielle, les mesures de confinement prises pour le seul nord de l’Italie, ont fuité dans les médias. Des milliers d’Italiens originaires du sud sont alors rentrés en catastrophe chez eux, autant de véhicules potentiels de contagion.

Or dans le Mezzogiorno, les infrastructures hospitalières sont autrement plus fragiles qu’en Lombardie. Si même dans cette région riche qui pèse pour plus de 20% du PIB du pays pour 10% de la population, les structures sanitaires sont sur le point de craquer, comment pourront faire face celles du sud, épuisées par des années de restrictions budgétaires?

– ‘Prix fort’ –

« Le sud est moins préparé et pourrait le payer au prix fort », prévient le directeur de l’hôpital Cardarelli de Naples, Giuseppe Longo 63 ans. « L’Etat nous dit de nous préparer. Nous embauchons des centaines de nouveaux médecins, d’infirmières et de personnel soignant », poursuit-il dans un entretien avec l’AFP.

Les sept régions du sud et les îles (Sicile et Sardaigne) disposent de 1.582 lits en soins intensifs sur les 5.400 du pays, selon un décompte du quotidien La Repubblica. Mercredi, le Premier ministre Giuseppe Conte, a promis des efforts pour la production et la distribution d’équipement spécialisé dans les hôpitaux.

Si les services spécialisés devaient être saturés, l' »aile coronavirus » de Cardarelli entrerait en action. Huit lits de soins intensifs et 12 pour la haute dépendance y sont prévus.

S’ils devaient être occupés à leur tour, d’autres ailes seraient converties. Près des urgences, une tente a été dressée. C’est là que seront faits les tests pour les patients qui se présenteraient avec des symptomes inquiétants.

– ‘Ni les ressources, ni l’équipement’ –

« Le nord a été pris par surprise alors que nous avons eu un peu de temps pour nous préparer. J’espère que cela suffira… », dit à l’AFP Maria De Cristofaro, 65 ans, cheffe du service de soins intensifs de Cardarelli. Les médecins des services de soins intensifs ont été « décrits comme des héros », « mais nous ne pouvons pas faire de miracles », prévient-elle.

A ses yeux, il est « difficile de justifier » la décision de rentrer chez eux prises par nombreux méridionaux travaillant dans le nord, au risque de « ramener le virus dans leurs maisons, directement à leurs proches ».

Mais à Naples, la plupart comprennent ce réflexe. « Si j’avais été là-bas, j’aurais essayé de revenir », dit Cristina Agosto, 22 ans, venue sur le front de mer regarder le Vésuve de l’autre côté de la baie.

Roberta Fusco, une influenceuse de 26 ans se promène avec sa mère. Elle est récemment revenue de Milan. Elle explique qu’elle s’est isolée une semaine, mais n’en pouvait plus de ne pas voir la mer. « Nous sommes inquiets, mais nous savons qu’il y a beaucoup de gens qui ont lancé des opérations de crowfunding (financement communautaire) pour les hôpitaux, et ça va aider », assure-t-elle.

Lancée par une étudiante en médecine de 23 ans, Federica De Masi, une campagne de ce type a permis de lever plus de 350.000 euros pour l’hôpital Cotugno de Naples, spécialisé dans les maladies infectieuses. « Nous devons nous entraider, parce que nous n’avons pour le moment ni les ressources ni l’équipement nécessaires », résume la jeune femme sur le site gofundme.

Au Maroc, des féministes et associations se mobilisent contre les violences virtuelles

Quand son ex-fiancé a diffusé des photos intimes d’elle sur les réseaux sociaux pour se venger, Loubna, Marocaine de 27 ans, s’est sentie « coupable », sa famille l’a ostracisée, elle a dû démissionner. Et elle a finalement renoncé à poursuivre son harceleur.

Comme elle, au Maroc, sept sur dix victimes de « violences virtuelles » (cyberharcèlement, extorsion en ligne d’actes sexuels, « revenge porn », cyberdiffamation, etc.) préfèrent se taire par honte et peur du rejet social, selon un rapport publié début mars par le réseau « Mobilising for rights associates » (MRA) après plusieurs mois d’enquête.

Pour « briser le tabou », les militantes de Tahadi, une des associations ayant participé à l’étude, viennent de lancer une campagne de sensibilisation et d’aide aux victimes, avec des ateliers d’information pour les mères au foyer et les élèves des quartiers populaires de Casablanca.

Car les violences virtuelles, apparues comme ailleurs avec la popularisation des smartphones et des réseaux sociaux, deviennent « de plus en plus inquiétantes », selon Bouchra Abdou, présidente de Tahadi.

Au Maroc, plus d’une femme sur deux (54%) dit avoir été victime d’une forme de violence, et dans 13,4% des cas de violences liées aux nouvelles technologies, selon des statistiques officielles publiées en mai 2019.

« En réalité, il suffit de poser la question dans une assemblée de femmes pour se rendre compte que ce chiffre est largement sous-estimé: chez les jeunes, on est plutôt autour de 90% », estime Saïda Kouzzi, du réseau MRA.

La campagne « stop au numérique » lancée par Tahadi vise à informer les victimes sur leurs droits, inscrits dans une loi adoptée en 2018 contre les violences faites aux femmes.

Le texte sanctionne le harcèlement sexuel dans les espaces publics, mais aussi dans l’espace virtuel (téléphone, courrier électronique, messages sur les réseaux sociaux, envoi d’images à caractère sexuel ou diffusion d’images portant atteinte à la vie privée). Les peines prévues pour les violences liées au numérique vont jusqu’à trois ans de prison de ferme.

– Blâmée, coupable –

Comme beaucoup, Loubna ignorait les dispositions de cette loi, par ailleurs très critiquée par les mouvements féministes pour ses lacunes. Et personne, dans son entourage, ne l’a encouragée à saisir la justice.

Car dans une société imprégnée de traditions et valeurs religieuses, les femmes violées ou harcelées sont souvent considérées comme les premières coupables: les réactions des familles sont ainsi « le plus souvent faibles à nulles, suivies de sanctions punissant la victime », selon l’étude de MRA.

« Je me disais que tout le monde avait vu les photos, je n’ai pas osé sortir dans la rue pendant des jours, ma famille ne m’a pas soutenue, je me blâmais comme si je méritais ce qui m’arrivait », se souvient Loubna.

Conseillée par l’association « Tahadi », elle a fini par se décider à déposer une plainte contre son ex-fiancé qui avait publié ses images intimes pour « se venger » car elle l’avait quitté. Il a été arrêté mais elle a finalement renoncé aux poursuites « de peur qu’il ne se venge en publiant d’autres photos ».

Rares sont celles qui saisissent les autorités –une sur dix, selon le rapport de MRA–, car le risque est grand d’être soi-même poursuivie.

L’article 490 du code pénal marocain punit en effet d’emprisonnement les relations sexuelles hors mariage et son abrogation n’est pas à l’ordre du jour, malgré la mobilisation des défenseurs des droits humains en ce sens.

Les photos ou vidéos piratées présentées par des victimes qui portent plainte peuvent donc se transformer en preuves de culpabilité si le harceleur n’est pas leur époux.

– « Ne pas se taire » –

Une des victimes suivies par Tahadi en a fait la cruelle expérience: cette jeune femme de 26 ans a enduré pendant des mois un chantage financier et sexuel qui a finalement détruit sa vie.

L’homme qu’elle fréquentait l’a menacée de publier des vidéos intimes filmées à son insu pour la forcer à lui céder. Elle a dans un premier temps déposé plainte pour viol, mais il a convaincu la justice qu’elle était consentante. Tous deux ont été condamnés à une peine d’emprisonnement avec sursis pour « débauche ».

Pour l’aider, l’association Tahidi lui a conseillé de déposer une nouvelle plainte pour chantage. La procédure est en cours. En attendant, sa famille l’a expulsée, elle a été obligée de quitter son emploi et a préféré déménager dans une autre ville.

Selon l’étude menée par MRA dans une quarantaine de villes marocaines, les conséquences des violences virtuelles sont tout aussi graves que celles des violences « réelles », avec des cas de suicides, de dépression ou de marginalisation sociale en cas de rejet familial.

Loubna a « fini par se convaincre que ce n’était pas de sa faute » après avoir « eu la chance de bénéficier d’une aide psychologique » grâce à l’association Tahabi. Elle a décidé de participer à la campagne et « conseille à toutes les victimes de ne pas se taire ».

Quand un rescapé de la Shoah se lie d’amitié avec un « gosse de nazi »

L’un est juif et a miraculeusement échappé à la Shoah, l’autre se dit « gosse de nazi », pétri de culpabilité. Deux Belges éprouvés par la tragédie de la Seconde guerre mondiale témoignent désormais côte à côte de leur histoire et de l’amitié profonde qui les unit.

Simon Gronowski et Koenraad Tinel, 88 et 85 ans, doivent recevoir cette année le titre de Docteur honoris causa des Universités libres de Bruxelles, la néerlandophone VUB et la francophone ULB.

« Leur amitié exceptionnelle est un puissant symbole d’espoir, de bonheur et de paix », explique-t-on à la VUB.

Diamétralement opposés au départ, les destins des deux hommes, l’un Bruxellois francophone, l’autre né dans une famille flamande de Gand, se sont croisés en 2012, lorsqu’un militant de l’Union des progressistes juifs de Belgique a eu l’idée de les mettre en contact, expliquent-ils lors d’une rencontre avec l’AFP.

Le jeune homme connaissait leurs deux histoires, dont chacun avait déjà livré un récit poignant.

Simon Gronowski, avocat à la retraite, a raconté dans un livre (« L’Enfant du 20e convoi », 2002) le geste incroyable de sa mère, qui l’a sauvé de la déportation en 1943 en le poussant d’un train en route vers Auschwitz. L’enfant juif, arrêté par la Gestapo à Bruxelles, a alors 11 ans.

Koenraad Tinel, sculpteur et dessinateur, a lui préféré le recueil de dessins (« Scheisseimer », « Seau à merde » en allemand, 2009) pour se décharger du fardeau de la collaboration, dont il a si longtemps porté l’énorme poids. Une oeuvre qu’il a ensuite lui-même transposée sur une scène de théâtre.

Le drame du premier est d’avoir perdu sa soeur et sa mère, jamais revenues des camps nazis. Tandis que le second a dû supporter pendant des décennies l’absence du moindre remords de la part de son père et de ses deux frères ayant combattu pour le IIIe Reich.

« Mon père avait deux idoles, le Christ et Hitler! Essayez de comprendre ça… », lâche Koenraad, les yeux rougis en témoignant au côté de Simon, chez lui à Gammerages dans la campagne du Brabant (centre-ouest).

– L’étreinte et le pardon –

Conséquence des sympathies paternelles: les deux grands frères Tinel sont envoyés, l’aîné sur le front de l’est, le second comme volontaire au côté des Waffen SS flamands.

Et en 1944, à la Libération, poursuit le Flamand, la famille doit fuir vers l’Allemagne: s’ensuivent près de deux années à « se cacher, camper en forêt, avoir faim ». Avant un retour en Belgique synonyme de prison et de dégringolade sociale.

Entre Simon le volubile, habitué à témoigner dans les écoles, y compris à l’étranger, et Koenraad l’émotif, davantage dans la retenue, la connexion a été immédiate lors du premier contact il y a huit ans.

« Quand je lui ai dit que les enfants des coupables ne sont pas coupables, il y a eu un déclic (…) Une grande amitié est née entre nous », dit Simon, qui décrit désormais Koenraad comme son « frère ».

Ce propos sur la culpabilité, « c’était un très beau message pour moi, ça m’a fait un énorme plaisir », souligne le Flamand.

En 2013, l’avocat-auteur et le dessinateur ont cosigné un ouvrage intitulé « Ni victime, ni coupable, enfin libérés ». L’histoire de Simon a aussi inspiré un opéra au compositeur britannique Howard Moody.

Chose encore plus inattendue: le lien noué entre Simon et Koenraad a fini par ébranler les certitudes d’un frère de ce dernier, l’ex « collabo » des SS.

A 88 ans, malade et proche de la mort, ce frère a imploré le pardon de l’ancien enfant juif, dont il avait lui-même été un des geôliers à la caserne Dossin à Malines (nord), d’où est parti le train vers Auschwitz.

Simon Gronowski décrit la rencontre: « il me disait +j’ai besoin de votre pardon pour mourir en paix+. Alors je l’ai pris dans mes bras, et je lui ai pardonné. Ce pardon lui a fait beaucoup de bien mais à moi encore plus ».

Bernie Sanders, politicien et chanteur dans ses jeunes années

A 78 ans, le candidat à la présidentielle américaine Bernie Sanders n’hésite pas à donner de la voix sur la scène de ses meetings. Mais en novembre 1987, lorsqu’il s’est mis devant un micro dans un studio de son petit Etat du Vermont, c’était pour chanter.

Alors maire de la petite ville de Burlington, il avait accepté de contribuer à un album folk désormais connu comme le « Bernie Project », avec 30 musiciens locaux.

Avec ses lunettes cerclées de noir et ses sweat-shirt à capuche, le maire de la gauche radicale, 46 ans à l’époque, allait chanter cinq chansons dédiées à la justice sociale.

Todd Lockwood — le propriétaire du studio local White Crow Audio, qui a vu défiler de nombreux groupe, dont Phish, durant ses 15 ans d’existence — avait demandé au maire militant s’il pouvait contribuer au projet.

« Il était très aimé et en fait plutôt efficace comme maire », a indiqué à l’AFP Todd Lockwood, 68 ans. « Il était vif, avec des opinions très marquées, mais c’était un battant ».

« Mais c’est seulement quand on a commencé à discuter que je me suis rendu compte qu’il ne voyait pas les choses comme moi » concernant l’album. « Il le voyait comme l’occasion de faire une déclaration plus importante sur la vie » en général.

– « Pas un chanteur » –

Si la vision de Bernie Sanders était claire, sa voix l’était moins.

« Ce n’est pas un chanteur », dit M. Lockwood, « il n’a pas du tout l’oreille musicale ». M. Sanders lui-même qualifiait alors ses répétitions devant un magnétophone d' »un peu effrayantes ».

« Ce n’est pas une belle voix que nous vendons ici », reconnaissait M. Lockwood devant des journalistes en 1987. « Nous vendons quelqu’un qui a des convictions. »

La solution? Demander au maire de faire du « blues parlé », « une espèce de version reggae » des chansons folk et spirituals telles « This Land is Your Land » et « We Shall Overcome. »

« On peut voir ça comme une espèce de folk rap », dit M. Lockwood.

Comme d’autres vedettes à la voix très particulière — songez, à un autre niveau, à Bob Dylan ou Lou Reed — « Bernie » donna à ces classiques un tour unique.

« L’album fait alternativement rire et pleurer », selon M. Lockwood. « Les gens réagissent avec émotion… surtout les gens qui ont vécu la bataille pour les droits civiques », dans les années 60.

« Mais en même temps, on entend son accent de Brooklyn et ça fait rire », a indiqué le producteur, aujourd’hui portraitiste. « Tout un étrange cocktail d’émotions quand vous écoutez ça ».

– Art pour tous –

Dans sa difficile bataille pour la Maison Blanche, Bernie Sanders a obtenu les soutiens d’artistes très divers, allant de rappeurs comme Cardi B, Chuck D ou Lil Yachty, des stars de la pop comme Ariana Grande, Miley Cyrus et Jason Mraz, ou des légendes du rock comme Neil Young et David Crosby, et d’autres plus alternatifs comme Bon Iver, Vampire Weekend, The Strokes et Jack White.

Bernie Sanders est connu pour avoir encouragé les artistes pendant ses huit ans aux commandes de Burlington, supprimant notamment des ordonnances municipales qui limitaient la musique dans les espaces publics.

« C’est une des premières choses qui ont changé quand Bernie est devenu maire », se souvient M. Lockwood. « Du jour au lendemain, on a eu de la musique dans les parcs ».

La ville de 42.000 habitants compte désormais un festival de jazz respecté et son conseil municipal pour les arts, impulsés par Bernie Sanders.

L’ancien maire « voulait que les arts soient accessibles à tous les niveaux de la société », dit M. Lockwood, « il ne voulait pas que ce soit juste pour les gens qui peuvent se payer de coûteux billets d’entrée ».

Seules quelque 1.000 cassettes audio de l’album folk de Bernie Sanders furent distribuées à la fin des années 80 et le projet tomba dans l’oubli. Jusqu’à ce qu’il annonce sa candidature à la présidentielle de 2016.

M. Lockwood fit remastériser l’enregistrement, le publia en ligne et sous forme de CD… Et le sénateur, très populaire chez les jeunes, se retrouva même au classement des « Nouveaux artistes » du magazine Billboard.

« Nous n’avions jamais imaginé ça », dit Todd Lockwood. Mais ce n’était pas immérité, selon lui: « il a montré beaucoup de culot en studio ».

« A aucun moment il ne s’est inquiété en disant, +Est-ce que je vais avoir l’air idiot?+ Il a eu la confiance de montrer ça au public. »

« Nous commençons petit », disait Bernie Sanders de l’album en 1987. « Aujourd’hui, le Vermont, demain le monde entier ».

L’Irak inquiet après la mort de deux Américains et 26 combattants pro-Iran

Trois membres de la coalition internationale, dont deux Américains, ont péri dans une attaque en Irak avant que des raids ne tuent 26 paramilitaires irakiens pro-Iran à la frontière syrienne, une nouvelle escalade entre Téhéran et Washington qui inquiète jeudi Bagdad et l’ONU.

La mort de deux soldats, un Américain et un Britannique, et d’un sous-traitant américain dans une attaque à la roquette est sans précédent depuis des années en Irak.

Il s’agit aussi du plus lourd bilan –avec 26 morts– pour une attaque visant les paramilitaires irakiens pro-iraniens.

Fin 2019, les derniers bombardements aériens américains à la frontière irako-syrienne avaient fait 25 morts dans les rangs des supplétifs irakiens de l’Iran en riposte à la mort d’un sous-traitant américain dans l’attaque d’une base du nord du pays.

Peu de temps après, les Etats-Unis avaient assassiné en janvier à Bagdad le général iranien Qassem Soleimani et son lieutenant irakien.

– « Arènes pour vendettas » –

Ils n’ont pas revendiqué la dernière attaque contre les combattants pro-iraniens à la frontière syro-irakienne, mais une ONG syrienne a indiqué que la coalition internationale menée par Washington en était probalement l’auteur.

De même, les 22 attaques contre des intérêts américains en Irak depuis la fin octobre –dont elle de mercredi– n’ont jamais été revendiquées. Mais Washington les attribue régulièrement aux factions irakiennes pro-Iran qui, elles, promettent régulièrement de « venger » leur chef, assassiné par Washington aux côtés de Qassem Soleimani.

Signe que ces derniers développements inquiètent au plus haut point, le commandement militaire irakien chapeauté par le Premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi a dénoncé l’attaque contre la coalition, qui constitue « un défi sécuritaire très dangereux ».

Le président Barham Saleh et le chef du Parlement Mohammed al-Halboussi ont également condamné l’attaque.

De son côté, la mission de l’ONU en Irak a appelé à « la retenue maximale », estimant que « le risque d’actes voyous de groupes armés est une inquiétude permanente » en Irak qui « n’a vraiment pas besoin de devenir une arène pour les vendettas et les batailles venues d’ailleurs ».

Les autorités irakiennes sont dans une position inconfortable face à la coalition: elles continuent à mener des opérations avec ses troupes contre les jihadistes mais le Parlement a récemment voté l’expulsion des 5.200 soldats américains du pays et le gouvernement doit maintenant faire appliquer cette décision.

Et alors même que la coalition avait annoncé suspendre ses activités en Irak en raison des tensions entre Téhéran et Washington, dimanche encore, elle a perdu deux hommes –des Américains– dans des combats contre des jihadistes dans le nord irakien.

Dans un Irak en plein marasme politique, au budget mis en danger par la chute des cours du pétrole et qui doit faire face à une épidémie du nouveau coronavirus, les autorités n’ont pas identifié les responsables de l’attaque contre la coalition.

A chaque fois, l’armée irakienne assure retrouver rapidement la base de lancement des roquettes mais les enquêtes ne mènent jamais jusqu’aux auteurs des tirs.

– « Rendre des comptes » –

Deux soldats, l’un américain et l’autre britannique, ainsi qu’un sous-traitant américain, ont été tués mercredi soir dans cette attaque contre la grande base de Taji, dans la banlieue de Bagdad, a indiqué à l’AFP un responsable militaire américain.

La coalition internationale a recensé 18 roquettes tirées au total, faisant également état de 12 blessés, sans préciser leur nationalité.

Quelques heures après, « dix explosions » secouaient une zone au sud de la ville syrienne de Boukamal, frontalière de l’Irak, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

« Trois avions probablement de la coalition internationale ont visé des positions iraniennes et des factions armées alliées, dont le Hachd al-Chaabi irakien », a indiqué l’OSDH, en référence à cette coalition de paramilitaires désormais intégrés aux forces régulières irakiennes.

Au moins « 26 combattants irakiens » du Hachd al-Chaabi ont été tués, selon la même source.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo et son homologue britannique Dominic Raab ont exigé que les auteurs des attaques contre la base « rendent des comptes », selon le département d’Etat américain.

En Syrie, la guerre entre dans sa dixième année sans issue en vue

La Syrie entre dans sa dixième année d’une guerre dévastatrice, sans issue en vue pour ce pays devenu un terrain d’affrontements des grandes puissances, où les civils continuent de payer le plus lourd tribut.

Jamais les Syriens, descendus dans la rue en mars 2011 pour réclamer démocratie et liberté, n’auraient imaginé que leur « révolution » se transformerait en un conflit qui a fait plus de 380.000 morts.

Quant au président Bachar al-Assad, neuf ans après, il semble plus que jamais indéboulonnable.

Appuyé par la Russie, l’Iran et le Hezbollah libanais, son régime a repris plus de 70% du territoire, où un principal front demeure: la région d’Idleb, dans le nord-ouest, qui représente l’ultime grand bastion jihadiste et rebelle.

La guerre a laminé l’économie et rasé des dizaines de villes, provoquant l’exode de plus de 11 millions de personnes: des déplacés ou des réfugiés se pressant parfois aux frontières de l’Europe.

Il s’agit de la plus grande vague de déplacements au monde depuis la seconde guerre mondiale.

Et le pays reste l’échiquier où s’affrontent des puissances internationales et régionales, notamment la Russie et les Etats-Unis ou la Turquie, Israël et l’Iran.

« Ce n’est pas un simple conflit international », résume l’analyste Fabrice Balanche.

– « Destruction et exil » –

En mars 2011, c’est dans la ville de Deraa (sud) que l’étincelle de la révolte s’est allumée.

Une quinzaine d’adolescents, inspirés par le Printemps arabe en Tunisie et en Egypte, ont écrit sur les murs de leur école des slogans anti-Assad.

Le mouvement s’est étendu mais avec la répression, des factions rebelles ont vu le jour, financées et armées par certains pays du Golfe et soutenus par les Occidentaux. Le conflit s’est complexifié avec la montée en puissance des jihadistes, notamment du groupe Etat islamique (EI).

Des années d’offensives ont mis en déroute cette organisation, qui a fait régner la terreur au Moyen-Orient et mené des attentats sanglants en Europe.

Malgré l’éradication en mars 2019 de son « califat » en Syrie par des forces kurdes soutenues par une coalition internationale dirigée par Washington, l’EI mène toujours des attaques meurtrières.

Quand l’EI a conquis en 2014 sa province natale de Deir Ezzor (est), Omar Abou Leila a fui à l’étranger.

Fondateur du site d’information « Deir Ezzor 24 », ce jeune homme reproche à la communauté internationale de s’être focalisée dans la lutte antijihadistes, éclipsant l’objectif de la « révolution », à savoir la chute d’Assad.

Mais si le régime se maintient toujours, cinq armées étrangères continuent d’intervenir en Syrie.

Outre la Russie, l’Iran a déployé des forces, Téhéran cherchant à consolider son corridor vers la Méditerranée.

Malgré un retrait amorcé fin 2019, des troupes américaines sont toujours présentes dans le nord-est, où les Kurdes jouissent d’une semi-autonomie.

L’objectif pour Washington: sécuriser les hydrocarbures mais surtout enrayer l’influence iranienne.

Dans cette même optique, Israël mène régulièrement des frappes contre des positions du régime, de l’Iran ou du Hezbollah.

La Turquie voisine, qui soutient des groupes armés locaux et a déployé des troupes dans le nord, a lancé plusieurs offensives contre les forces kurdes.

Début mars, Ankara a négocié avec Moscou la suspension d’une offensive du régime contre la région d’Idleb, mais la trêve reste fragile.

– « C’est fini » –

L’assaut, relancé en décembre, a provoqué la fuite selon l’ONU d’environ un million de personnes, poussées vers la frontière turque, faisant craindre à Ankara un nouvel afflux sur son territoire.

Refusant ce nouveau fardeau alors qu’elle accueille déjà 3,6 millions de Syriens, la Turquie a annoncé fin février l’ouverture de ses portes à tous les demandeurs d’asile souhaitant rejoindre l’Europe.

A terme, Damas veut reprendre l’ensemble du pays. Mais pour des experts, la Turquie devrait préserver une bande de territoire dans le nord syrien, où seraient confinés les civils et combattants anti-Assad.

« L’année 2020 sera sans doute la dernière d’un conflit ouvert », pronostique M. Balanche, estimant que le pays sera partagé entre « un protectorat russo-iranien » et la présence turque.

« Assad va (…) être réélu en 2021 », estime l’expert. « Le régime va imposer une chape de plomb (…) car sa priorité est la restauration du système sécuritaire ».

Des ONG continuent de dénoncer les arrestations arbitraires parmi ceux soupçonnés d’être contre le régime. Selon elles, des dizaines de milliers de personnes ont été victimes de disparitions forcées par le gouvernement ou les factions armées.

Omar al-Hariri, qui s’est réfugié à l’étranger après la reconquête par le régime de sa province de Deraa en 2018, n’a plus aucune illusion.

« Si aujourd’hui vous demandez aux gens s’ils souhaitent revenir à l’avant 2011, la majorité vous dira oui. Mais de toute façon, il n’y a plus rien à dire, c’est fini ».

Syrie: les interventions militaires étrangères dans le conflit

La Syrie est le théâtre de plusieurs interventions de puissances régionales et internationales qui ont complexifié le conflit déclenché en mars 2011.

– Turquie –

La Turquie a été impliquée dans le conflit dès 2011, hébergeant l’opposition politique et les responsables de l’opposition armée au régime de Bachar al-Assad.

D’août 2016 à mars 2017, Ankara lance l’opération « Bouclier de l’Euphrate » dans le nord syrien, de l’autre côté de sa frontière, pour débarrasser la zone, selon elle, à la fois du groupe jihadiste Etat islamique (EI) et de la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG).

Partenaires des Occidentaux dans la lutte antijihadiste, les YPG sont considérées comme une organisation « terroriste » par Ankara pour leurs liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui mène une guérilla en Turquie.

L’opération permet à la Turquie d’établir un tampon entre les différents territoires contrôlés dans le nord syrien par des groupes kurdes.

De janvier à mars 2018, les forces turques et leurs supplétifs syriens prennent aux YPG l’ensemble d’Afrine (nord-ouest) à l’issue de l’offensive baptisée « Rameau d’olivier ».

En octobre 2019, la Turquie lance, à la faveur d’un retrait américain, une opération aérienne et terrestre, baptisée « Source de paix », visant les milices kurdes. Celle-ci lui permet de prendre le contrôle à sa frontière d’une bande de territoire d’une trentaine de kilomètres de profondeur.

Le 11 mars 2020, Ankara mène l’opération « Bouclier du Printemps » contre le régime de Damas, après des semaines d’escalade dans le nord-ouest syrien et en réponse à des attaques qui ont infligé de lourdes pertes à Ankara.

– Etats-Unis –

En 2014, après que des combattants de l’EI eurent saisi de larges pans de territoires en Irak et en Syrie, où ils ont profité du chaos provoqué par la guerre civile, Washington forme une coalition de plus de 70 pays.

Celle-ci commence à bombarder des positions de l’EI en septembre.

Principal contributeur, les Etats-Unis vont déployer 2.000 soldats, principalement des forces spéciales, et mobiliser d’importants moyens aériens et navals.

En octobre 2019, le président Donald Trump a annoncé le retrait de ses troupes de zones frontalières dans le nord syrien, un feu vert pour l’offensive turque contre les combattants kurdes.

Washington a par la suite annoncé garder 500 soldats pour assurer la protection des puits pétroliers tenus par les Kurdes.

– Russie –

En septembre 2015, Moscou, principal allié du pouvoir de Damas, entame une campagne de frappes aériennes en soutien aux troupes du régime, en grande difficulté.

Dès la fin août, la Russie disposait d’une base aérienne à Hmeimim, près de Lattaquié, fief d’Assad dans le nord-ouest. Elle s’est ajoutée à sa base dans le port de Tartous, à 220 kilomètres au nord-ouest de Damas.

L’intervention russe va remettre en selle le régime d’Assad, permettant à ses forces de reprendre de vastes pans du territoire et d’enchaîner les victoires face aux rebelles et aux jihadistes, au prix de bombardements meurtriers et de destructions massives.

Selon Moscou, 3.000 militaires sont déployés, en plus des avions, hélicoptères, navires de guerre et autres sous-marins. Plus de 63.000 militaires russes ont servi dans la campagne syrienne.

– Iran et Hezbollah libanais –

Dès le début de la guerre, l’Iran chiite, principal allié régional du régime de Damas, a volé au secours de Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite, une branche du chiisme.

Téhéran nie la présence de troupes régulières mais admet l’envoi de membres des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique iranienne, comme « conseillers militaires » des forces syriennes, et de milliers de « volontaires » venus d’Iran, d’Afghanistan ou du Pakistan.

Allié de l’Iran, le puissant mouvement chiite libanais Hezbollah a reconnu officiellement en 2013 son implication militaire au côté du régime syrien.

Son chef Hassan Nasrallah a déclaré en juillet 2019 avoir réduit le nombre de ses combattants, qui étaient entre 5.000 et 8.000, selon des experts.

– Israël –

Israël et la Syrie restent officiellement en état de guerre. Les tensions se sont avivées avec l’engagement du Hezbollah et de l’Iran, ennemis d’Israël, aux côtés du régime d’Assad.

Depuis le début du conflit, l’armée israélienne mène régulièrement des frappes en Syrie contre des positions militaires du régime, du Hezbollah ou des forces iraniennes.

La guerre en Syrie: une tragédie humaine

Plus de 380.000 morts, plus de la moitié de la population déracinée et un pays en ruines: déclenchée en mars 2011, la révolte contre le pouvoir en Syrie s’est muée en une guerre dévastatrice, impliquant groupes rebelles, mouvements jihadistes et puissances étrangères.

– Morts –

Plus de 380.000 personnes ont péri depuis le début de la guerre, selon un bilan donné début janvier 2020 par l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Parmi elles, plus de 115.000 civils, dont 22.000 enfants et 13.612 femmes, d’après l’ONG, qui dispose d’un vaste réseau d’informateurs à travers la Syrie.

– Handicapés –

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la crise syrienne représente l’une des situations d’urgence les plus graves et les plus complexes au monde, le conflit ayant considérablement affaibli le système de santé.

Dans certaines régions, les taux de handicap atteignent 30% de la population, soit le double de la moyenne mondiale (chiffres de mars 2019).

Au moins 45% des personnes blessées devraient vivre avec un handicap permanent nécessitant des soins spécialisés longtemps après la fin des hostilités.

– Déplacés, réfugiés –

La guerre a entraîné la plus grande vague de déplacements depuis la seconde guerre mondiale.

Plus de la moitié de la population d’avant-guerre a été déplacée à l’intérieur du pays ou a été contrainte de fuir à l’étranger. Selon l’ONU, le nombre de réfugiés s’élève à 5,5 millions et le nombre de déplacés internes à plus de 6 millions (février 2020).

La Turquie accueille sur son territoire le plus grand nombre de Syriens, soit 3,6 millions.

Et elle redoute un nouvel afflux de réfugiés, alors que depuis le début de l’offensive du régime syrien dans la région d’Idleb en décembre, près d’un million de personnes ont été déplacées, en grande majorité à sa frontière.

Le Liban dit héberger 1,5 million de Syriens (pour une population totale de 4,5 millions), dont moins d’un million sont inscrits auprès du Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR). La plupart vivent dans la précarité.

En Jordanie, plus de 650.000 Syriens sont enregistrés auprès du HCR. Amman affirme avoir accueilli environ 1,3 million de réfugiés. Suivent l’Irak (300.000 réfugiés syriens, dont la majorité kurdes) et l’Egypte (plus de 130.000 Syriens).

Des centaines de milliers de Syriens ont aussi afflué en Europe, notamment en Allemagne, où ils sont les principaux demandeurs d’asile.

– Emprisonnés, torturés –

Le régime a été accusé d’atteintes aux droits humains depuis le début du conflit et mis en cause pour de multiples cas de tortures, viols et exécutions sommaires.

Selon l’OSDH, au moins 60.000 personnes sont mortes sous la torture ou à cause des terribles conditions de détention dans les prisons. Un demi-million de personnes sont passées dans les geôles du pouvoir depuis 2011, d’après l’Observatoire.

En 2014, un ancien photographe de la police militaire syrienne, exfiltré sous le pseudonyme de « César », a révélé des photographies de corps torturés et suppliciés dans les prisons du régime entre 2011 et 2013. Il s’est enfui en 2013, en emportant 55.000 photographies effroyables.

En février 2017, Amnesty International a accusé le régime d’avoir pendu quelque 13.000 personnes entre 2011 et 2015 dans la prison de Saydnaya près de Damas.

Par ailleurs, « plusieurs milliers » de personnes ont péri dans les prisons de groupes rebelles et jihadistes (OSDH).

– Appauvris –

L’économie est dévastée par neuf ans de guerre.

Chômage, coupures de courant, pénuries de gaz domestique, 83% de la population vit aujourd’hui sous le seuil de la pauvreté, contre 28% avant la guerre, selon l’ONU. Et 80% des ménages peinent à assurer leurs besoins alimentaires de base, selon le Programme alimentaire mondial (Pam).

Le secteur pétrolier et gazier a subi depuis 2011 des pertes estimées par les autorités à 74 milliards de dollars.

Le coût des destructions dues à la guerre a été estimé par l’ONU à plus de 400 milliards de dollars. Des localités et des villes entières ne sont plus que des champs de ruines.

Et pour l’ONU, la situation dans la région d’Idleb représente « la plus grosse crise aujourd’hui dans le monde ».

Neuf ans de conflit en Syrie

Les étapes-clés de la guerre en Syrie qui a impliqué de multiples acteurs régionaux et internationaux et fait, depuis mars 2011, plus de 380.000 morts et des millions de réfugiés et déplacés.

– Révolte et répression –

Le 15 mars 2011, dans le sillage du Printemps arabe, un mouvement de protestation éclate en Syrie, gouvernée d’une main de fer depuis 40 ans par la famille Assad, Bachar ayant succédé en 2000 à son père Hafez.

De petites manifestations ont lieu à Damas et sont violemment dispersées. Mais c’est à Deraa (sud), où une quinzaine d’adolescents avaient été torturés peu auparavant pour avoir peint des graffitis antirégime, que le mouvement prend de l’ampleur.

Les manifestations, qui s’étendent à d’autres villes, sont réprimées.

En juillet, un colonel réfugié en Turquie crée l’Armée syrienne libre (ASL), composée de civils ayant pris les armes et de déserteurs de l’armée.

Le mouvement d’opposition se transforme en rébellion armée. Les rebelles vont conquérir d’importants bastions, notamment des secteurs de Homs (centre) ou des quartiers d’Alep (nord).

– L’aviation, atout du régime –

En mars 2012, l’armée prend le fief de la rébellion à Homs. D’autres opérations sanglantes avaient été menées, notamment à Hama (centre), après d’immenses manifestations antirégime.

En juillet, des rebelles lancent la bataille de Damas. Le gouvernement garde le contrôle de la capitale, mais des zones de sa banlieue passent aux mains des insurgés.

L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) et des militants dénoncent l’utilisation de « barils d’explosifs » remplis de TNT que l’armée largue à partir d’hélicoptères et d’avions militaires.

– Hezbollah, Iran –

Le mouvement chiite libanais Hezbollah reconnaît en avril 2013 son engagement aux côtés de Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite, une branche du chiisme. Il va envoyer des milliers de combattants.

L’Iran chiite soutient financièrement et militairement le régime en envoyant des « conseillers militaires » et des « volontaires » venus d’Iran, d’Afghanistan ou du Pakistan.

– Recul américain –

En août 2013, une attaque chimique imputée au régime dans deux zones rebelles près de Damas fait plus de 1.400 morts selon les Etats-Unis. Le régime dément.

Barack Obama, qui en avait fait une ligne rouge, renonce au dernier moment à procéder à des frappes punitives, scellant avec la Russie un accord de démantèlement de l’arsenal chimique syrien.

– Jihadistes –

En juin 2014, le groupe Etat islamique (EI) proclame un « califat » sur de vastes territoires conquis en Syrie et en Irak.

En septembre, une coalition internationale dirigée par Washington lance, après l’Irak, ses premières frappes contre l’EI en Syrie.

Les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG) et soutenues par la coalition, vont chasser l’EI de son fief à Raqa, puis s’emparer en mars 2019 de son ultime bastion syrien, Baghouz.

Le chef de l’EI Abou Bakr al-Baghdadi a été tué en 2019 lors d’un assaut américain dans le nord-ouest syrien.

– Poutine au secours d’Assad –

En septembre 2015, Moscou, principal allié de Damas, entame une campagne de frappes aériennes en soutien aux troupes du régime, en grande difficulté.

L’intervention de Moscou est un tournant qui va remettre en selle le régime. La rébellion subit revers après revers et sera chassée notamment d’Alep fin 2016, puis de la Ghouta orientale, près de Damas, en 2018, au prix de bombardements meurtriers et de destructions massives.

– Attaques chimiques –

En avril 2017, une attaque au gaz sarin, imputée au régime, tue plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (province d’Idleb).

En représailles, Donald Trump ordonne des frappes sur la base aérienne d’Al-Chaayrate (centre).

En avril 2018, les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni mènent des frappes conjointes de représailles contre des positions militaires du régime en réaction à une attaque chimique à Douma, près de Damas.

– Nouvelle opération turque –

Le 9 octobre 2019, la Turquie, qui a déjà mené deux opérations dans le nord syrien depuis 2016, et des supplétifs syriens lancent, à la faveur d’un retrait américain, une offensive aérienne et terrestre pour éloigner de la frontière la milice des YPG.

L’opération permet à la Turquie de prendre le contrôle à sa frontière d’une bande de territoire syrien de 120 kilomètres de longueur et d’une trentaine de kilomètres de profondeur.

– Bataille d’Idleb –

En décembre 2019, le pouvoir, appuyé par son allié russe, lance une nouvelle offensive dans le nord-ouest contre l’ultime grand bastion des jihadistes et des rebelles.

Les violences ont provoqué une catastrophe humanitaire, avec près d’un million de déplacés et de lourdes pertes pour la Turquie, parrain de groupes rebelles.

A Dakar, un rêve de Central park pour faire reculer le béton

Et si la vaste étendue de l’ancien aéroport international de Dakar devenait le grand parc qui ferait respirer cette métropole hyper-urbanisée d’Afrique de l’Ouest ? Un jeune Franco-Sénégalais en rêve.

Mamadou Sakho, 34 ans, a lancé en janvier une pétition pour transformer l’aéroport Léopold-Sédar-Senghor en un Central Park local où les Dakarois viendraient s’oxygéner.

Un projet à la fois personnel, citoyen et entrepreneurial. Il a touché une corde sensible chez bien des Dakarois mais devra surmonter des intérêts contraires: ceux de l’armée, qui occupe les lieux reconvertis en aérodrome militaire, et ceux de la promotion immobilière, qui capitalise sur l’explosion démographique dakaroise et ne manquerait pas de convoiter une telle manne foncière si elle se libérait.

L’initiative paraît illusoire. Pas de quoi décourager Mamadou Sakho pour autant.

« Ce qui me motive, c’est d’être un leader du changement et de créer une dynamique notamment auprès des jeunes », explique ce diplômé en marketing gestion des entreprises, créateur d’une société travaillant dans les espaces verts et la sensibilisation à l’environnement.

Début mars, sa pétition avait recueilli près de 20.500 signatures.

Vue du ciel, la presqu’île de Dakar, à la pointe occidentale de l’Afrique, est une mosaïque de rues et de bâtiments où dominent les couleurs grise et sable. Les rares portions inexploitées dans cette région autrefois appelée Cap-Vert en raison de sa luxuriante végétation sont prises d’assaut par les promoteurs immobiliers ou par l’Etat.

– Choc du retour –

De moins d’un million en 1976, la population de Dakar est passée à 3,5 millions en 2017 et devrait dépasser les 4,3 millions en 2025, selon l’Agence nationale de la statistique.

Mamadou Sakho, né en France, chérit le souvenir de la partie de son enfance qu’il a passée sur les plages dakaroises, au bord de l’Atlantique.

« Après quelques années à l’étranger, quand je suis revenu, je n’ai pas reconnu Dakar. On n’avait plus accès à la mer. La ville était polluée. Je n’avais plus cette sensation de la nature, ni des odeurs, ni des paysages », se désole-t-il.

Le constat a guidé son engagement environnemental et, récemment, le projet de végétaliser les pistes de Senghor.

Sur les images satellitaires, les trois pistes de l’aéroport Senghor et de leurs aires de dégagement, dans le quartier de Yoff, dessinent un ample « H » vert, rare exception dans la grisaille avec le parc forestier du quartier de Hann.

Ces 600 hectares sont sous-utilisés depuis l’ouverture de l’aéroport international Blaise-Diagne fin 2017 à une cinquantaine de kilomètres de la capitale. Ils n’accueillent plus que des vols militaires et de rares délégations officielles.

Mamadou Sakho s’est emparé de l’idée de parc avancée par certains Dakarois sur les réseaux sociaux, même si rien n’indique une volonté des autorités de changer l’affectation de la plate-forme.

– La voix de Kennedy –

« Cet aéroport a été confié par l’Etat à l’armée. Nous ne pouvons pas nous prononcer sur une pétition dont nous ne sommes pas informés », a indiqué à l’AFP le porte-parole des armées, le colonel Mactar Diop.

Mamadou Sakho peut se prévaloir de signaux encourageants émis par la municipalité. La maire Soham El Wardini, fervent soutien, a assisté fin février, avec des entrepreneurs, des officiels, des jeunes, à la projection du film qu’il a réalisé pour appuyer son projet.

« Si nous parvenions à avoir ce lieu et à en faire un parc de loisirs, de détente, ce serait formidable », assure Bamba Ngom, chef de la division des espaces verts à la mairie. La municipalité est prête à accompagner l’initiative, promet-il.

Ibrahima Mbengue, habitant du quartier de Ouakam, proche de l’aéroport, adhère « totalement ». « Dakar est devenu si étroit qu’il n’y a plus d’endroit où se promener, la ville n’a plus d’espace vert et même les trottoirs sont occupés. Un parc naturel serait le bienvenu », estime le jeune homme de 27 ans.

D’autres sont sceptiques. Malick Ka, la cinquantaine, cultive la nostalgie des années fastes, quand l’aéroport Senghor faisait vivre le voisinage. « Depuis la transformation en aérodrome militaire, tous les quartiers à proximité sont morts », regrette-t-il. Et puis « avec quelle eau va-t-on arroser les plantes de ce parc naturel ? Une bonne partie de la population a déjà du mal à accéder à l’eau potable ».

Mamadou Sakho, lui, entend « servir la communauté » et cite l’ancien président américain John F. Kennedy sur la nécessité de se demander ce qu’on peut faire pour son pays.

« Moi, je suis jeune, j’ai des idées, j’ai fait des études. Je me suis engagé parce que je veux du changement et les changements commencent par nous-mêmes ».

En Indonésie, le « mariage sans contact » est tendance chez les jeunes

Après plusieurs ruptures, Dwita Astari Pujiartati a renoncé aux relations amoureuses sans lendemain et décidé de passer directement de la case rencontre à distance au mariage. Une tendance en hausse chez les célibataires d’Indonésie attirés par un islam plus conservateur.

L’enseignante de 27 ans a échangé des CV avec plusieurs prétendants, aidée par un imam servant d’entremetteur, jusqu’au jour où elle a été contactée par un ami perdu de vue.

Pas de rendez-vous romantique ou de baisers. Pendant près d’un an, le couple a gardé ses distances, ne se parlant que par téléphone.

« Après avoir ressenti le déclic, (celui qui est mon mari à présent) s’est adressé à mes parents pour pouvoir me demander en mariage », a expliqué la jeune femme.

Cette pratique, connue en Indonésie sous le nom arabe de « taaruf », ou « présentation », peut sembler surannée et mieux adaptée aux pays conservateurs du Golfe qu’à une société plus libérale comme l’Indonésie.

Mais pour Dwita Astari Pujiartati, c’était un moyen pour abandonner les relations de courte durée et se comporter en musulmane pieuse, en évitant caresses et sexe avant le mariage.

« Pourquoi choisir quelque chose qui me fait perdre mon temps et déplaît à Dieu? », demande-t-elle.

Si le « taaruf » est encore marginal en Indonésie, la jeune femme est loin d’être la seule à avoir choisi cette voie.

Le mouvement « Indonesia Tanpa Pacaran » (L’Indonésie sans flirt) se développe dans ce pays d’Asie du Sud-Est où les jeunes nés dans les années 1990 forment plus d’un quart de la population de 260 millions d’habitants.

– Rupture par téléphone –

Encourageant les jeunes à ne pas tarder à se marier, il recommande que toute rencontre avant une union se fasse avec un chaperon, et considère les relations amoureuses pré-maritales comme une perversion occidentale.

Dwita Astari Pujiartati a pris du temps pour mieux connaître son mari à distance, mais beaucoup de jeunes dans cette mouvance se marient au bout de quelques mois.

Le mouvement a été lancé vers 2015 par La Ode Munafar. Ce leader de 29 ans a organisé récemment des sessions de « ruptures collectives » pour des couples qui se fréquentaient sans être mariés dans la ville de Kendari, sur l’île de Célèbes.

Sur scène, un jeune homme a rompu par téléphone avec sa petite amie, sous les applaudissements et les encouragements de plusieurs dizaines de personnes.

« J’ai étudié les relations hors mariage d’un point de vue scientifique et psychologique. Et c’est néfaste à tous points de vue », a-t-il expliqué après l’évènement.

– Bonheur conjugal sur Instagram –

Des histoires de mariages heureux après une relation à distance pullulent sur les réseaux sociaux.

Celui de Muhammad Alvin Faiz, le fils d’un religieux pro-polygamie, avec sa jeune femme de 19 ans, Larissa Chou, une catholique convertie à l’islam, est cité en exemple.

Le jeune homme tient en haleine 1,4 million d’abonnés sur Instagram avec des clichés de son bonheur conjugal.

Dans ce pays qui compte la plus importante population musulmane au monde, l’islam conservateur est en progression depuis la chute du dictateur Suharto en 1998 qui était plus répressif envers la religion.

« Cette ère de démocratie a ouvert un espace pour l’expression religieuse », note Sidiq Harim, sociologue de l’université Gadjah Mada. La piété devient publique et « le taaruf est l’une de ses formes ».

De nombreuses stars indonésiennes ont annoncé leur conversion à un mode de vie plus pieux.

– Piété publique –

Les promoteurs du taaruf avancent que cette pratique donne plus de liberté aux femmes pour choisir leur partenaire et que cela leur permet de se passer de la bénédiction familiale, à l’inverse des mariages arrangés.

Mais pour les détracteurs, ces mariages sont risqués, surtout pour les femmes.

« J’ai entendu beaucoup d’histoires d’abus par des conjoints », avertit Kalis Mardiasih, une activiste féministe musulmane.

« Ca peut arriver aussi dans d’autres types de relations. Mais il est essentiel de pouvoir évaluer l’attitude de quelqu’un aussi tôt que possible pour voir à quel genre de personne on a affaire ».

Et si cette pratique est devenue tendance, tous les Indonésiens ne sont pas convaincus.

« Je ne suis pas d’accord avec cette histoire de mariage rapide », remarque Azara Mahdaniar, une femme de 25 ans. « Il ne faut pas s’engager et se rendre compte plus tard que son partenaire est violent ».

La chute de l’Emir de Kano: symbole de la toute-puissance des politiques sur le pouvoir traditionnel

Un Emir « bavard comme une pie », délogé de son palais par des services de renseignement en armes, puis « banni » hors des frontières de son royaume: cela pourrait être l’intrigue d’une tragédie de Shakespeare. Mais la scène a bel et bien eu lieu lundi dans le nord du Nigeria.

Muhammadu Sanusi II, 58 ans, était une des plus grandes figures du pouvoir traditionnel au Nigeria, et son influence s’exerçait sur un vaste territoire de 10 millions de personnes dans le nord musulman.

Mais il a été « détrôné » manu militari lundi après un vote du Parlement de l’Etat de Kano, avec « effet immédiat » et délogé en hélicoptère.

La scène, aussi rare qu’inattendue, témoigne des inimitiés entre deux pouvoirs: le pouvoir traditionnel, religieux et millénaire, quasiment divin diront certains, et le pouvoir politique, moderne et mortel, fait d’alliances et de coups bas.

Depuis la colonisation britannique, qui a relégué les leaders traditionnels à un rôle honorifique au profit d’un système démocratique, les deux pouvoirs travaillent plus ou moins en accord, l’un n’empiétant pas sur la chose publique, et l’autre ne s’immisçant pas dans les affaires du religieux.

Mais depuis que Lamido Sanusi a remplacé son grand-oncle sur le trône en 2014, il n’a pas hésité à brouiller les cartes et à donner son avis négatif sur la gestion de l’Etat de Kano, voire sur les politiques économiques du pays.

Ancien banquier, il a été gouverneur de la Banque centrale du Nigeria avant d’accéder au trône, et n’a pas hésité, à cette fonction très exposée, à dénoncer des détournements massifs.

Cela lui avait déjà valu sa place, sous le gouvernement de Goodluck Jonathan, qui l’a presque aussitôt renvoyé. Mais, même en tant qu’Emir, Sanusi II n’a pas perdu son « amour pour la controverse ».

« Ce n’est un secret pour personne que nombre de nos hommes politiques sont ineptes et peu éduqués », écrit-il en 2017. « Les Nigérians le savent et attendent peu de leurs leaders », avait alors déclaré l’Emir.

– « Trop c’est trop » –

C’était oublier que les salaires des chefs traditionnels, et pour certains leur succession, n’est pas de l’ordre du divin, mais bien entre les mains des politiciens locaux.

Sanusi II s’est mis à dos l’homme le plus important de l’Etat de Kano, le gouverneur Abdullahi Ganduje, qui lui reproche d’avoir soutenu en sous-main le candidat de l’opposition aux dernières élections de 2019.

Il a depuis tout essayé pour affaiblir son rôle et ternir son image.

Il a divisé son Émirat en quatre territoires et la police anti-corruption a multiplié les enquêtes contre la figure royale.

Son excommunion lundi pour « irrespect » et « insubordination » a été le geste ultime d’une guerre ouverte entre les deux hommes. Une guerre que le pouvoir coutumier ne semble plus être en mesure de gagner.

« Le gouverneur a décidé que c’en était trop », remarque Adewunmi Falode, professeur d’histoire à l’Université de Lagos. « C’est le signal que le vrai pouvoir reste entre les mains du gouvernement », argue le spécialiste.

Ses prédécesseurs avaient pu compter sur le soutien populaire en de pareilles circonstances. En 1963, des milliers de personnes avaient protesté contre le renvoi de l’émir de l’époque (le grand-père de Sanusi II) par les autorités, puis en 1981, les manifestations avaient tourné au bain de sang lorsque le gouvernement avait tenté de détrôner Ado Bayero, son grand-oncle.

– Aura mystique –

Mais cette fois, les rues de Kano, capitale millénaire de l’Émirat, sont restés imperturbables, beaucoup ne se retrouvant pas dans ce chef moderne et très « occidentalisé ».

Les chefs religieux, particulièrement conservateurs et rigoristes dans cette région du Nord musulman, lui ont tourné le dos, lui reprochant ses critiques ouvertes et répétées contre l’influence de l’Arabie saoudite au Nigeria, jugeant les courants wahhabites et salafistes « intolérants ».

Son franc-parler, dont il s’est souvent targué, lui a aujourd’hui coûté sa place.

« Par tradition, l’Emir ne doit être ni vu ni entendu », confie un membre de sa Cour à l’AFP.

« Mais Sanusi n’a pas respecté cette tradition, s’exprimant sur tout et sur rien, bavard comme une pie (…) cela a affaibli l’aura mystique et le prestige qui doit régner autour de sa personne », poursuit-il.

« Il a détruit des murs de 500 ans d’âge pour les remplacer par des matériaux modernes et maintenant le palais ressemble à Buckingham Palace ».

Lamido Sanusi, qui reste toutefois très apprécié dans le reste du pays depuis son passage à la Banque Centrale, pourrait toutefois tirer partie de ce « détrônement », pour enfin s’exprimer autant qu’il le souhaite et faire une carrière politique.

« Quittez cette institution mourante où un homme qui sait à peine lire et écrire peut vous réduire au silence, et hissez vous à une place où vous pourrez avoir un impact global sur la société », résume le célèbre écrivain et avocat nigérian Elnathan John.

abu-joa-del-spb/jpc/jhd

La chute de l’Emir de Kano: symbole de la toute-puissance des politiques sur le pouvoir traditionnel

Un Emir « bavard comme une pie », délogé de son palais par des services de renseignement en armes, puis « banni » hors des frontières de son royaume: cela pourrait être l’intrigue d’une tragédie de Shakespeare. Mais la scène a bel et bien eu lieu lundi dans le nord du Nigeria.

Muhammadu Sanusi II, 58 ans, était une des plus grandes figures du pouvoir traditionnel au Nigeria, et son influence s’exerçait sur un vaste territoire de 10 millions de personnes dans le nord musulman.

Mais il a été « détrôné » manu militari lundi après un vote du Parlement de l’Etat de Kano, avec « effet immédiat » et délogé en hélicoptère.

La scène, aussi rare qu’inattendue, témoigne des inimitiés entre deux pouvoirs: le pouvoir traditionnel, religieux et millénaire, quasiment divin diront certains, et le pouvoir politique, moderne et mortel, fait d’alliances et de coups bas.

Depuis la colonisation britannique, qui a relégué les leaders traditionnels à un rôle honorifique au profit d’un système démocratique, les deux pouvoirs travaillent plus ou moins en accord, l’un n’empiétant pas sur la chose publique, et l’autre ne s’immisçant pas dans les affaires du religieux.

Mais depuis que Lamido Sanusi a remplacé son grand-oncle sur le trône en 2014, il n’a pas hésité à brouiller les cartes et à donner son avis négatif sur la gestion de l’Etat de Kano, voire sur les politiques économiques du pays.

Ancien banquier, il a été gouverneur de la Banque centrale du Nigeria avant d’accéder au trône, et n’a pas hésité, à cette fonction très exposée, à dénoncer des détournements massifs.

Cela lui avait déjà valu sa place, sous le gouvernement de Goodluck Jonathan, qui l’a presque aussitôt renvoyé. Mais, même en tant qu’Emir, Sanusi II n’a pas perdu son « amour pour la controverse ».

« Ce n’est un secret pour personne que nombre de nos hommes politiques sont ineptes et peu éduqués », écrit-il en 2017. « Les Nigérians le savent et attendent peu de leurs leaders », avait alors déclaré l’Emir.

– « Trop c’est trop » –

C’était oublier que les salaires des chefs traditionnels, et pour certains leur succession, n’est pas de l’ordre du divin, mais bien entre les mains des politiciens locaux.

Sanusi II s’est mis à dos l’homme le plus important de l’Etat de Kano, le gouverneur Abdullahi Ganduje, qui lui reproche d’avoir soutenu en sous-main le candidat de l’opposition aux dernières élections de 2019.

Il a depuis tout essayé pour affaiblir son rôle et ternir son image.

Il a divisé son Émirat en quatre territoires et la police anti-corruption a multiplié les enquêtes contre la figure royale.

Son excommunion lundi pour « irrespect » et « insubordination » a été le geste ultime d’une guerre ouverte entre les deux hommes. Une guerre que le pouvoir coutumier ne semble plus être en mesure de gagner.

« Le gouverneur a décidé que c’en était trop », remarque Adewunmi Falode, professeur d’histoire à l’Université de Lagos. « C’est le signal que le vrai pouvoir reste entre les mains du gouvernement », argue le spécialiste.

Ses prédécesseurs avaient pu compter sur le soutien populaire en de pareilles circonstances. En 1963, des milliers de personnes avaient protesté contre le renvoi de l’émir de l’époque (le grand-père de Sanusi II) par les autorités, puis en 1981, les manifestations avaient tourné au bain de sang lorsque le gouvernement avait tenté de détrôner Ado Bayero, son grand-oncle.

– Aura mystique –

Mais cette fois, les rues de Kano, capitale millénaire de l’Émirat, sont restés imperturbables, beaucoup ne se retrouvant pas dans ce chef moderne et très « occidentalisé ».

Les chefs religieux, particulièrement conservateurs et rigoristes dans cette région du Nord musulman, lui ont tourné le dos, lui reprochant ses critiques ouvertes et répétées contre l’influence de l’Arabie saoudite au Nigeria, jugeant les courants wahhabites et salafistes « intolérants ».

Son franc-parler, dont il s’est souvent targué, lui a aujourd’hui coûté sa place.

« Par tradition, l’Emir ne doit être ni vu ni entendu », confie un membre de sa Cour à l’AFP.

« Mais Sanusi n’a pas respecté cette tradition, s’exprimant sur tout et sur rien, bavard comme une pie (…) cela a affaibli l’aura mystique et le prestige qui doit régner autour de sa personne », poursuit-il.

« Il a détruit des murs de 500 ans d’âge pour les remplacer par des matériaux modernes et maintenant le palais ressemble à Buckingham Palace ».

Lamido Sanusi, qui reste toutefois très apprécié dans le reste du pays depuis son passage à la Banque Centrale, pourrait toutefois tirer partie de ce « détrônement », pour enfin s’exprimer autant qu’il le souhaite et faire une carrière politique.

« Quittez cette institution mourante où un homme qui sait à peine lire et écrire peut vous réduire au silence, et hissez vous à une place où vous pourrez avoir un impact global sur la société », résume le célèbre écrivain et avocat nigérian Elnathan John.

abu-joa-del-spb/jpc/jhd

Taux, prêts aux PME, QE: la potion anti-coronavirus attendue de la BCE

Pressée d’agir face à l’épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait dégainer jeudi une série de mesures pour calmer les marchés financiers et soutenir les secteurs les plus touchés.

Voici les principales actions envisagées.

– Baisser un taux

Comme la BCE maintient son principal taux à zéro depuis mars 2016, elle ne dispose pas des marges de manoeuvre de la Réserve fédérale américaine, qui vient de descendre le sien de 0,5 point pour le porter dans une fourchette de 1% à 1,25%.

Mais les gardiens de l’euro pourraient abaisser leur « taux de dépôt », qui s’applique aux liquidités que les banques choisissent de leur confier faute de les distribuer sous forme de crédits.

Déjà négatif, à -0,50%, ce taux pourrait être porté à -0,60%, tout en laissant la possibilité de nouvelles baisses, pour inciter encore plus fortement les banques à prêter aux ménages et aux entreprises.

– Soulager les banques

Consciente que ce taux négatif rogne les marges des banques, la BCE exonère une partie des liquidités en excès, selon un système dit « two-tier » inauguré en septembre et élargi en novembre.

Selon Eric Dor, de l’Institut d’économie scientifique et de gestion, l’institut pourrait encore relever la proportion des dépôts dispensés de ce prélèvement: il pourrait désormais représenter « dix » fois les réserves obligatoires constituées par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients, contre « six » actuellement.

La mesure profiterait principalement aux banques allemandes et françaises, aujourd’hui les plus pénalisées par les taux négatifs.

– Soutenir les PME

Depuis octobre, la BCE mène sa troisième campagne de prêts géants aux banques (dits TLTRO), à des taux très avantageux, à condition que les banques prêtent à leur tour aux ménages ou aux entreprises.

Comme elles empruntent au niveau du taux de dépôt, soit -0,50%, les banques recourant au TLTRO sont de fait rémunérées par la BCE quand elles prêtent de l’argent.

Il semble difficile d’assouplir encore ces conditions à quelques jours d’une nouvelle vague, mais la BCE pourrait concevoir un nouveau type de prêts ciblant « les entreprises non financières les plus touchées par la crise », en particulier les PME, selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

La Banque d’Angleterre vient d’ailleurs de faire de même mercredi, en même temps qu’elle abaissait son principal taux.

– Augmenter les rachats de dette

La BCE a réactivé depuis novembre ses rachats de dette publique et privée, sa puissante arme anti-crise baptisée « QE » (« Quantitative Easing », « Assouplissement quantitatif »), déjà déployée entre mars 2015 et fin 2018.

L’institution détenait fin février 2.623 milliards d’euros de dette à son bilan, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Mais le conseil des gouverneurs de la BCE était apparu divisé comme jamais en septembre, au moment de décider la reprise de ces rachats de dette à raison de 20 milliards d’euros par mois.

La BCE pourrait toutefois augmenter le rythme de ses achats, à 30 milliards par mois selon les observateurs, en accentuant par exemple la part de la dette d’entreprise rachetée.

Elle pourrait aussi modifier les règles qui limitent le rachat de dette souveraine, voire envisager le rachat de dette ou d’actions de banques si la crise s’aggrave, avance Florian Hense, analyste chez Berenberg.

Mais la contestation n’est pas près de s’éteindre en Allemagne, où la Cour constitutionnelle doit se prononcer le 24 mars sur la validité du « QE ». Des eurosceptiques veulent faire établir qu’à travers cet outil, la BCE viole l’interdiction de financer directement les Etats.

Italie: le blocus de Codogno est levé, les habitants restent inquiets

Cette petite ville lombarde était devenue le symbole de l’arrivée du coronavirus en Italie: placés 15 jours en stricte quarantaine les habitants de Codogno (nord) ont été autorisés à ressortir cette semaine et sont désormais logés à la même enseigne que les autres Italiens, mais l’angoisse est toujours là.

Dans les rues, peu de voitures; les bars et les restaurants restent pour la plupart fermés et au MacDonald, les clients se font rares; pour entrer dans les supermarchés, il faut patienter une demi-heure dans une file où les clients se tiennent à distance réglementaire, masque sur la bouche, les entrées se faisant au rythme des sorties.

« La situation ne s’est pas améliorée. Les gens sortent, mais ont toujours peur », dit Roberta Franceschini, 30 ans, employée du bar Mania. « A mes yeux, la situation reste la même qu’il y a quelques jours. Personne ne sort, c’est un désastre », dit Marino Boccardi, 67 ans.

Ces deux semaines de quarantaine entamées le 23 février, entourés d’un cordon étanche surveillé par la police, « ont été difficiles, cela a dicté les vies de chacun d’entre nous », raconte Antonio Zetti, un retraité de 58 ans. « L’avenir m’inquiète. Nous ne savons pas si la période nécessaire pour surmonter l’impact social » de cet isolement « relève du très long terme ou du long terme », poursuit-il.

La décision de rouvrir le périmètre étanche autour de Codogno avait été commentée comme une bonne nouvelle dans le pays, bien vite éclipsée par l’interdiction de rassemblement et la restriction des déplacements dans toute l’Italie décidées le lendemain par les autorités.

« Nous avons besoin d’exporter le modèle Codogno à toute la Lombardie parce qu’il a démontré qu’il fonctionne. Codogno est l’unique endroit de Lombardie où la contagion s’est réduite », s’est félicité mercredi le président de la région Lombardie, Attilio Fontana.

Des voix s’étaient toutefois très vite élevées contre cette levée de la quarantaine, mettant en garde contre tout optimisme démesuré. C’est vrai que Codogno est l’endroit « où les contagions diminuent, contrairement au reste de l’Italie », dit à l’AFP Roberto Burioni, professeur de virologie à l’université Vita-Salute San Raffaelle de Milan.

« Mais cela n’a pas de sens à l’heure actuelle de parler d’immunité de groupe, parce qu’on ne sait pas encore si un individu qui a contracté le virus, et qui a guéri, est définitivement protégé contre une infection ultérieure », poursuit le spécialiste.