Taux, prêts aux PME, QE: la potion anti-coronavirus attendue de la BCE

Pressée d’agir face à l’épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait dégainer jeudi une série de mesures pour calmer les marchés financiers et soutenir les secteurs les plus touchés.

Voici les principales actions envisagées.

– Baisser un taux

Comme la BCE maintient son principal taux à zéro depuis mars 2016, elle ne dispose pas des marges de manoeuvre de la Réserve fédérale américaine, qui vient de descendre le sien de 0,5 point pour le porter dans une fourchette de 1% à 1,25%.

Mais les gardiens de l’euro pourraient abaisser leur « taux de dépôt », qui s’applique aux liquidités que les banques choisissent de leur confier faute de les distribuer sous forme de crédits.

Déjà négatif, à -0,50%, ce taux pourrait être porté à -0,60%, tout en laissant la possibilité de nouvelles baisses, pour inciter encore plus fortement les banques à prêter aux ménages et aux entreprises.

– Soulager les banques

Consciente que ce taux négatif rogne les marges des banques, la BCE exonère une partie des liquidités en excès, selon un système dit « two-tier » inauguré en septembre et élargi en novembre.

Selon Eric Dor, de l’Institut d’économie scientifique et de gestion, l’institut pourrait encore relever la proportion des dépôts dispensés de ce prélèvement: il pourrait désormais représenter « dix » fois les réserves obligatoires constituées par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients, contre « six » actuellement.

La mesure profiterait principalement aux banques allemandes et françaises, aujourd’hui les plus pénalisées par les taux négatifs.

– Soutenir les PME

Depuis octobre, la BCE mène sa troisième campagne de prêts géants aux banques (dits TLTRO), à des taux très avantageux, à condition que les banques prêtent à leur tour aux ménages ou aux entreprises.

Comme elles empruntent au niveau du taux de dépôt, soit -0,50%, les banques recourant au TLTRO sont de fait rémunérées par la BCE quand elles prêtent de l’argent.

Il semble difficile d’assouplir encore ces conditions à quelques jours d’une nouvelle vague, mais la BCE pourrait concevoir un nouveau type de prêts ciblant « les entreprises non financières les plus touchées par la crise », en particulier les PME, selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

La Banque d’Angleterre vient d’ailleurs de faire de même mercredi, en même temps qu’elle abaissait son principal taux.

– Augmenter les rachats de dette

La BCE a réactivé depuis novembre ses rachats de dette publique et privée, sa puissante arme anti-crise baptisée « QE » (« Quantitative Easing », « Assouplissement quantitatif »), déjà déployée entre mars 2015 et fin 2018.

L’institution détenait fin février 2.623 milliards d’euros de dette à son bilan, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Mais le conseil des gouverneurs de la BCE était apparu divisé comme jamais en septembre, au moment de décider la reprise de ces rachats de dette à raison de 20 milliards d’euros par mois.

La BCE pourrait toutefois augmenter le rythme de ses achats, à 30 milliards par mois selon les observateurs, en accentuant par exemple la part de la dette d’entreprise rachetée.

Elle pourrait aussi modifier les règles qui limitent le rachat de dette souveraine, voire envisager le rachat de dette ou d’actions de banques si la crise s’aggrave, avance Florian Hense, analyste chez Berenberg.

Mais la contestation n’est pas près de s’éteindre en Allemagne, où la Cour constitutionnelle doit se prononcer le 24 mars sur la validité du « QE ». Des eurosceptiques veulent faire établir qu’à travers cet outil, la BCE viole l’interdiction de financer directement les Etats.

Coronavirus: Trump suspend tous les voyages de l’Europe vers les Etats-Unis pour 30 jours

Le président américain Donald Trump a annoncé mercredi la suspension pour 30 jours de tous les voyages depuis l’Europe vers les Etats-Unis afin d’endiguer l’épidémie de nouveau coronavirus qui a de nouveau affolé les marchés financiers.

« J’ai décidé de prendre des actions fortes mais nécessaires pour protéger la santé et le bien-être de tous les Américains », a annoncé M. Trump lors d’une allocution solennelle depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche

« Pour empêcher de nouveaux cas de pénétrer dans notre pays, je vais suspendre tous les voyages en provenance d’Europe vers les Etats-Unis pour les 30 prochains jours », a-t-il ajouté, déplorant que l’Union européenne n’ait pas pris « les mêmes précautions » que les Etats-Unis face à la propagation du virus.

Cette mesure, qui entrera en vigueur vendredi à minuit (04H00 GMT samedi), ne concernera pas le Royaume-Uni, a précisé le milliardaire républicain.

Au cours de son allocution de dix minutes, le président de la première puissance mondiale a qualifié le nouveau coronavirus de « virus étranger ».

Il y a quelques jours, le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo avait provoqué une polémique, et l’ire de Pékin, en parlant de « virus de Wuhan ».

Le 45e président des Etats-Unis a achevé son discours en martelant sa conviction que l’avenir des Etats-Unis restait « plus radieux que personne ne peut l’imaginer ».

Le président américain est accusé par nombre d’élus démocrates de vouloir minimiser à tout prix l’ampleur de la crise sanitaire à venir et d’envoyer des messages confus, parfois en contradiction avec ceux des autorités sanitaires.

« Cela va disparaître, restez calme », avait-il encore déclaré mardi. « Tout se déroule bien. Beaucoup de bonnes choses vont avoir lieu ».

– « L’Europe est la nouvelle Chine » –

M. Trump a par ailleurs appelé le Congrès américain à adopter rapidement une réduction des taxes sur les salaires pour aider les ménages américains à surmonter l’impact économique de l’épidémie de coronavirus.

Cette proposition faite par son administration en début de semaine n’a pas eu un écho très favorable auprès des élus, y compris de son propre parti.

Le président a aussi annoncé le report de la date butoir de paiement des impôts pour certains individus et entreprises, qui devrait permettre selon lui de réinjecter 200 milliards de dollars de liquidités supplémentaires dans l’économie.

Wall Street a connu une nouvelle séance noire mercredi: le Dow Jones Industrial Average s’est effondré de 5,87%, à 23.550,74 points, et le Nasdaq a perdu 4,70%, à 7.952,05 points.

Quelques heures avant l’allocution présidentielle, le directeur des Centres de détection et de prévention des maladies (CDC) Robert Redfield avait estimé que le principal risque de propagation de l’épidémie pour les Etats-Unis venait d’Europe.

« La vraie menace pour nous, c’est désormais l’Europe », avait-il affirmé. « C’est de là qu’arrivent les cas. Pour dire les choses clairement, l’Europe est la nouvelle Chine ».

Début février, Washington avait provisoirement interdit l’entrée aux Etats-Unis des non-Américains s’étant récemment rendus en Chine. Le président Trump a longtemps invoqué cette décision drastique pour assurer que la propagation de l’épidémie était sous contrôle sur le territoire américain.

Le département d’Etat a aussi recommandé aux ressortissants américains d’éviter les voyages non indispensables en Italie, un avertissement aux voyageurs susceptible d’être au moins partiellement étendu au reste de l’Europe.

Les Etats-Unis ont dépassé mercredi la barre des 1.200 cas d’infection au nouveau coronavirus, et 38 personnes en sont mortes, selon les statistiques de l’université américaine Johns Hopkins.

Le Congrès américain bride l’action militaire de Trump contre l’Iran

Le Congrès des Etats-Unis a définitivement adopté mercredi une résolution visant à limiter une action militaire de Donald Trump contre l’Iran, un camouflet pour le président américain, qui devrait toutefois y opposer son veto.

Le texte présenté par l’opposition démocrate avait déjà été approuvé mi-février par le Sénat, grâce au soutien d’une partie des membres du camp du milliardaire républicain qui dominent la chambre haute. Il a été adopté mercredi par la Chambre des représentants, qui est elle à majorité démocrate, par 227 voix contre 186.

Là aussi, six républicains ont joint leur voix à celles des démocrates.

Il doit maintenant être soumis au président Trump pour promulgation, mais la Maison Blanche a déjà fait savoir qu’il y opposerait son veto.

Selon cette résolution, le président des Etats-Unis ne peut pas engager ses militaires dans des « hostilités contre la République islamique d’Iran » ou « toute partie de son gouvernement ou de son armée » sans « autorisation explicite » du Congrès, sous la forme d’une déclaration de guerre ou d’un feu vert spécifique.

Il s’agit d’une réponse parlementaire aux tensions entre les deux pays ennemis, qui avaient atteint leur paroxysme lorsque Washington a tué le 3 janvier, dans une frappe ordonnée par Donald Trump, le puissant général iranien Qassem Soleimani.

Les démocrates et certains républicains avaient exprimé leur inquiétude de voir l’escalade dégénérer en confrontation militaire directe. Mais après une riposte de Téhéran qui a tiré des missiles sur des bases utilisées par l’armée américaine en Irak sans faire de mort, la tension extrême était quelque peu retombée.

– Nouvelle escalade en Irak –

L’administration Trump affirme que sa « campagne de pression maximale » contre Téhéran, avec des sanctions sans précédent, ainsi que la frappe du 3 janvier, ont « rétabli la dissuasion à l’encontre de la République islamique ».

Mais les attaques contre les forces américaines en Irak, le plus souvent attribuées par Washington à l’Iran ou à ses alliés locaux, n’ont pas totalement cessé.

Des tirs de roquette contre une base militaire en Irak ont même fait mercredi pour la première fois trois morts, dont deux soldats américain et britannique.

Aussitôt après cette attaque –la plus meurtrière recensée contre une base abritant des soldats américains depuis plusieurs années–, des raids aériens ont visé des positions de supplétifs de l’Iran à la frontière entre l’Irak et la Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Cette nouvelle escalade pourrait représenter un test pour la volonté de contrôle du Congrès.

Pour l’élu démocrate Steny Hoyer, « dans de nombreux pays au monde, une seule personne » décide s’il convient d’envoyer des jeunes à la guerre: « ce sont des dictateurs ». « Nos pères fondateurs n’ont pas voulu que des dictateurs dirigent l’Amérique », a-t-il lancé avant le vote.

« Pendant des années, le Congrès a abdiqué ses responsabilités en matière de guerre. Mais maintenant une majorité transversale au Sénat et à la Chambre a clairement statué que nous ne devrions pas nous engager dans des hostilités avec l’Iran sans un vote du Congrès », s’est félicité dans un communiqué le sénateur démocrate Tim Kaine, auteur de la résolution.

Il a souligné que son texte permettait au président de défendre les Etats-Unis en cas d’attaque.

Selon lui, « si le président Trump est sérieux au sujet de sa promesse de mettre fin aux guerres sans fin, il promulguera cette résolution ».

Or, l’ex-homme d’affaires new-yorkais avait prévenu avant le vote du Sénat qu’une telle loi lancerait « un très mauvais signal » pour la sécurité des Etats-Unis. S’il confirme son veto, le Congrès ne devrait pas réussir à réunir la majorité qualifiée nécessaire pour passer outre.

L’élu républicain Mike McCaul lui a fait écho en estimant que les « ennemis » de l’Amérique suivaient ce débat de près. « Il faut qu’ils aient bien à l’esprit que s’ils tuent des Américains, ils vont en payer le prix », a-t-il lancé sous les applaudissements nourris de son camp, après avoir salué la mort de Qassem Soleimani.

Au Mali, le tombeau des Askia, patrimoine mondial, va être réhabilité

Le tombeau des Askia à Gao (nord-est), un des quatre sites au Mali inscrits au patrimoine de l’Unesco, va être réhabilité, ont indiqué mercredi les autorités maliennes et une organisation de sauvegarde des monuments en zone de conflit.

Le plan de réhabilitation, qui s’étend sur deux ans jusqu’en 2022, doit permettre de sauvegarder « un témoignage spectaculaire de la richesse du patrimoine malien », a déclaré à l’AFP Valery Freland, directeur de l’Aliph, organisation qui finance à hauteur de 500.000 dollars le projet en collaboration avec l’Etat malien.

Le site du tombeau des Askias, construit en terre en 1495 par l’empereur songhoy Askia Mohamed, comprend un tombeau pyramidal et une mosquée. Celle-ci, l’une des plus grandes de la ville, est encore utilisée par les habitants.

Le site ne présente pas de signe flagrant de dégradation, mais le risque est structurel.

« Il faut restaurer certains piliers, notamment », a déclaré le directeur du patrimoine malien, Moulaye Coulibaly, lors d’une visite sur place. A cela doit s’ajouter une réfection du mur d’enceinte et de la mosquée attenante au tombeau, entre autres.

Classé au patrimoine mondial en 2004, le site a été ajouté en 2012 sur la liste du patrimoine en péril, en raison du conflit armé qui commençait alors à affecter le Mali et qui se poursuit aujourd’hui.

Cette année-là, quand un groupe jihadiste avait occupé Gao pendant dix mois, la population de la ville s’était levée pour protéger ce patrimoine, l’un des principaux héritages de la culture songhoy dont le peuple régna sur un large empire ouest-africain entre le 15e et le 16ème siècles.

« Nous avons craint que les jihadistes fassent comme à Tombouctou » où ils avaient détruit plusieurs mausolées, explique Mahamane Hameye, membre de la société civile et parmi les fondateurs du mouvement des « Patriotes » qui défendit le tombeau.

La menace jihadiste s’est éloignée du fait de la présence de forces maliennes, françaises et onusiennes.

Créée en 2017 sous l’impulsion de la France, l’Aliph est une organisation internationale de sauvegarde du patrimoine en zone de conflit. Huit pays en sont donateurs, parmi lesquels la France, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite.

Irak: des tirs de roquettes font trois morts dont deux soldats américain et britannique

Des tirs de roquettes contre une base militaire en Irak ont pour la première fois fait trois morts mercredi, dont deux soldats américain et britannique, marquant une escalade dans les tensions entre Washington et ses alliés d’une part, et Téhéran et ses supplétifs de l’autre.

Aussitôt après cette attaque –la plus meurtrière recensée contre une base abritant des soldats américains depuis plusieurs années–, des raids aériens ont visé des positions de supplétifs de l’Iran à la frontière entre l’Irak et la Syrie, a indiqué à l’AFP le directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane. Ces raids ont notamment visé des factions armées irakiennes.

Ces tirs de roquette sont la 22ème attaque depuis la fin octobre contre des intérêts américains en Irak. Ils n’ont pas été revendiqués mais Washington –qui dirige la coalition internationale antijihadiste en Irak– attribue régulièrement ces attaques aux factions irakiennes pro-Iran.

Après les raids aériens, qui semblent être des représailles, le spectre de nouvelles violences plane en Irak, où les tensions entre les deux grands alliés du pouvoir à Bagdad, Téhéran et Washington, ont déjà dégénéré ces derniers mois.

– « Dix explosions » –

Deux soldats, l’un américain et l’autre britannique, ainsi qu’un sous-traitant américain ont été tués mercredi soir dans le tir de dix roquettes sur la base irakienne de Taji, au nord de Bagdad, a indiqué à l’AFP un responsable militaire américain.

Plus tôt, un responsable de la coalition internationale antijihadiste emmenée par les Etats-Unis avait affirmé à l’AFP que l’attaque avait fait plusieurs blessés, certains légèrement touchés et d’autres grièvement atteints.

Le responsable n’avait pas précisé leur nationalité. La coalition compte des dizaines d’Etats membres, dont les Etats-Unis qui ont déployé 5.200 soldats sur diverses bases militaires en Irak.

Quelques heures plus tard, « dix explosions » ont secoué une zone au sud de la ville syrienne de Boukamal, frontalière de l’Irak, a rapporté à l’AFP M. Abdel Rahmane.

« Trois avions probablement de la coalition internationale ont visé des positions iraniennes et des factions armées alliées, dont le Hachd al-Chaabi irakien », a indiqué le directeur de l’OSDH, en référence à cette coalition de paramilitaires désormais intégrés aux forces régulières irakiennes.

Les attaques à la roquette contre des soldats, des diplomates ou des installations des Etats-Unis en Irak ont déjà tué un sous-traitant américain et un soldat irakien par le passé.

– Marasme politique –

Régulièrement, une ou plusieurs roquettes s’abattent sur des bases accueillant des soldats américains ou sur l’ultrasécurisée Zone verte de Bagdad où siège l’ambassade américaine. Mais le nombre de roquettes tirées mercredi est particulièrement élevé.

Deux jours après la mort d’un Américain dans les tirs de 30 roquettes sur une base militaire irakienne à Kirkouk (nord) fin 2019, l’armée américaine avait frappé cinq bases, en Irak et en Syrie, d’une faction armée pro-Iran, les brigades du Hezbollah, faisant 25 morts dans ses rangs.

Les tensions s’étaient ensuite accentuées entre Washington et Téhéran, menant à l’assassinat à Bagdad du puissant général iranien Qassem Soleimani et de son lieutenant irakien dans une frappe américaine, ainsi qu’à des bombardements iraniens de bases irakiennes abritant des soldats américains en représailles.

La coalition internationale formée contre le groupe Etat islamique (EI) en 2014 continue de combattre et d’apporter un appui aérien aux troupes irakiennes car si l’EI a perdu son territoire, il conserve des cellules clandestines toujours capables de mener des attaques.

Dimanche, deux soldats américains ont été tués dans des combats contre des jihadistes dans le nord irakien, alors même que la coalition avait annoncé suspendre ses activités en Irak en raison des tensions entre Téhéran et Washington.

Le Parlement irakien a récemment voté l’expulsion des 5.200 soldats américains du pays, une décision qui doit encore être appliquée par le gouvernement. Mais l’Irak est plongé depuis des mois dans le marasme politique et est en proie depuis début octobre à un mouvement de contestation antigouvernemental inédit.

Le gouvernement démissionnaire depuis décembre n’a toujours pas été remplacé faute d’accord au sein du Parlement le plus éclaté de l’histoire récente de l’Irak.

Harvey Weinstein ou la chute d’un producteur de cinéma visionnaire

Il était un producteur de cinéma visionnaire, faiseur d’Oscars, donateur du parti démocrate. Sa condamnation mercredi à 23 ans de prison, deux semaines après qu’il eut été reconnu coupable d’agressions sexuelles par un jury new-yorkais, scelle la descente aux enfers d’Harvey Weinstein, devenu l’incarnation du prédateur sexuel pour le mouvement #MeToo.

L’accession au gotha d’Hollywood de ce fils d’un diamantaire new-yorkais avait pris des années, il devint paria en quelques jours. En octobre 2017, le New York Times et le New Yorker publient les témoignages de femmes, actrices ou mannequins pour la plupart, accusant le producteur de les avoir agressées sexuellement, puis de les avoir parfois payées pour se taire.

Trois semaines après, plus de 80 femmes, dont des célébrités comme Ashley Judd, Angelina Jolie, Salma Hayek ou Léa Seydoux, l’avaient accusé de harcèlement ou d’agressions allant du baiser forcé au viol, à New York, Los Angeles, Cannes, Paris, Londres ou Toronto, sur plus de trois décennies.

Harvey Weinstein, qui aura 68 ans le 19 mars, marié deux fois et père de cinq enfants, a eu beau maintenir que ses relations étaient toutes consenties, #MeToo était né: ce mouvement a dénoncé les abus sexuels présumés de centaines d’hommes de pouvoir.

Celui qui était la coqueluche des festivals du 7e art est banni de l’Académie du cinéma qui remet les Oscars. Les plaintes contre lui au civil se multiplient.

Le 25 mai 2018, il est inculpé à New York, pour deux agressions seulement, une en 2006 et l’autre en 2013. Les images du producteur menotté font le tour du monde.

En liberté surveillée jusqu’à son procès, il fait profil bas pendant des mois.

Peu avant le début des audiences en janvier, il donne une rare interview, qui suscitera un tollé.

« J’ai fait plus de films réalisés par des femmes et sur des femmes que n’importe quel producteur (…) J’étais le premier! J’étais le pionnier! », déclarait-il au New York Post.

Il n’a pas témoigné à son procès, mais lors du prononcé de sa peine vendredi, il s’est présenté comme une victime du mouvement #MeToo.

« J’étais le premier exemple et maintenant, il y a des milliers d’hommes accusés », a-t-il fait valoir. « Je suis inquiet pour ce pays ».

Il a aussi plaidé auprès du juge qu’il ne « verrait peut-être jamais plus ses enfants ».

– Roi des Oscars –

Beaucoup d’accusations contre Harvey Weinstein datent des années 1990 ou du début des années 2000, les grandes années de Miramax, le studio qu’il créa en 1979 avec son frère cadet Bob (Mira pour leur mère Miriam, Max pour leur père).

Après « Sexe, mensonges et vidéo », de Steven Soderbergh, encensé par la critique en 1989, Miramax produit le premier succès de Quentin Tarantino, « Pulp Fiction » (1994), puis « Le Patient anglais » (1996, neuf Oscars) ou « Shakespeare in Love » (1998, sept Oscars).

Les frères Weinstein revendent Miramax à Disney dès 1993, mais y travaillent jusqu’en 2005, année où ils lancent The Weinstein Company, qui produira encore de grands succès, comme « Inglourious Basterds » de Tarantino (2009), « Le Discours d’un roi » (2010) ou « The Artist » (2011).

De 1990 à 2016, le producteur, surnommé « Harvey les ciseaux » pour ses interventions féroces au montage, décrocha 81 fois les célèbres statuettes d’Hollywood.

Lors de la cérémonie des Golden Globes en 2012, Meryl Streep le qualifia, en riant, de « Dieu ».

Aujourd’hui, s’il inspire Hollywood, c’est comme personnage maléfique: un thriller inspiré du scandale, « The Assistant », est sorti fin janvier et au moins un autre est en gestation, produit par Brad Pitt.

Un temps, sa fortune était évaluée entre 240 et 300 millions de dollars, et il contribuait généreusement aux campagnes de candidats démocrates, dont Barack Obama et Hillary Clinton.

Mais il a vendu depuis deux ans cinq de ses propriétés, pour 60 millions de dollars, selon l’accusation.

La Weinstein Company a disparu: mise en faillite, ses actifs ont été rachetés par le fonds d’investissement Lantern.

Ses avocats ont négocié un pré-accord de 25 millions de dollars pour solder la plupart des plaintes déposées contre lui au civil, sans qu’il ait à verser un centime, mais ses frais d’avocats se chiffrent en millions.

Il doit payer les pensions alimentaires de ses ex-femmes — la deuxième, la styliste Georgina Chapman, l’a quitté après le scandale.

Après 10 jours d’hospitalisation, pendant lesquels on lui a installé un « stent » (extenseur cardiovasculaire), il a passé les derniers jours à la prison de Rikers Island. Il devrait maintenant être transféré dans une autre prison de l’Etat de New York.

Le procureur de Los Angeles l’a également inculpé pour deux agressions sexuelles. Et ses avocats, qui ont toujours affirmé que la médiatisation de son dossier le condamnait d’avance, devraient faire appel.

La Finlande arrête un Sierra-Léonais pour des exactions pendant la guerre au Liberia

Un homme soupçonné de meurtres, viols et d’utilisation d’enfants soldats pendant la guerre civile au Liberia il y a une vingtaine d’années a été arrêté en Finlande, a déclaré la police mercredi.

Ce Sierra-Léonais, né en 1969, est accusé d’avoir commis « des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité aggravés » quand il était un haut responsable du Front révolutionnaire uni (RUF), une armée rebelle sierra-léonaise qui a participé de 1999 à 2003 à la guerre civile du Liberia.

L’homme, qui vit en Finlande depuis dix ans, est soupçonné de crimes, notamment « d’homicide et de violence sexuelle, ainsi que de recrutement et de déploiement d’enfants soldats », a expliqué le commissaire Thomas Elfgren du Bureau national d’enquête de Finlande, cité dans un communiqué.

La justice présume qu’il a, à la fois, commis ces crimes et incité d’autres personnes à les commettre, a indiqué la police.

L’ONG Civitas Maxima, qui défend les victimes de crimes de guerre, a dans un communiqué identifié cet homme comme étant Gibril Massaquoi, lieutenant-colonel et porte-parole du RUF.

La guerre civile au Liberia, l’un des plus atroces conflits du continent africain, a fait quelque 250.000 morts entre 1989 et 2003.

Elle a été marquée par des massacres commis par des combattants souvent drogués, des mutilations, des actes de cannibalisme, le recrutement forcé d’enfants soldats.

La police finlandaise avait ouvert en 2018 son enquête, interrogeant plusieurs dizaines de personnes au Liberia et en Sierra Leone.

Les juges du tribunal de Tampere (ouest) doivent décider jeudi du placement ou non de cet homme en détention provisoire.

Attentat de Lockerbie: une commission écossaise ouvre la voie à un procès en révision

Plus de huit ans après la mort du seul condamné dans l’affaire de l’attentat de Lockerbie, qui avait fait 270 morts en 1988, le dossier a franchi mercredi une étape décisive vers une possible réhabilitation posthume d’Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi.

Saisie par la famille du Libyen, la Commission écossaise de révision des condamnations pénales (SRRC) a décidé de saisir la Haute cour de justice d’Edimbourg, a-t-elle annoncé dans un communiqué.

Il reviendra à cette dernière de décider ou non d’ordonner un procès en révision pour déterminer si Ali Mohmed Al Megrahi, qui a toujours clamé son innocence, a été victime d’une « erreur judiciaire », a expliqué Gérard Sinclair, directeur général de la SRRC, cité dans le communiqué.

Megrahi, agent des services de renseignement libyens, avait été condamné en 2001 à la prison à vie, avec un minimum de 27 ans derrière les barreaux, pour l’attentat à la bombe contre le Boeing 747 de la Pan Am. L’appareil, qui effectuait la liaison Londres-New York, avait explosé le 21 décembre 1988 au-dessus de Lockerbie, tuant 243 passagers, 16 membres d’équipage, ainsi que 11 habitants du village écossais.

Il s’agit de l’attentat le plus meurtrier sur le sol britannique.

L’explosion en vol de l’avion avait été provoquée par une bombe dissimulée dans un bagage enregistré en soute.

Un premier appel d’Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi avait été rejeté en 2002. Une première fois saisie, la SCCRC avait estimé en 2007 qu’il devait pouvoir bénéficier d’un nouveau recours mais le condamné y avait renoncé en 2009.

Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi avait été libéré en 2009 pour raisons médicales et est mort en 2012 à l’âge de 60 ans dans son pays, où il avait été accueilli en héros.

– Eléments « solides » –

Le régime de Mouammar Kadhafi avait reconnu officiellement sa responsabilité dans l’attentat, et a payé 2,7 milliards de dollars de dédommagement aux familles des victimes.

Dans sa décision rendue mercredi, la Commission a retenu deux des griefs exposés. D’une part le « verdict déraisonnable », car la Commission a souligné la faiblesse des preuves produites pour retenir la culpabilité de Megrahi.

D’autre part, elle a considéré que l’accusation aurait dû fournir à la défense un témoignage et un rapport de police, éléments qui l’ont privé « d’une véritable chance d’acquittement », selon la SRRC.

La Commission a également regretté le silence de l’accusation, lors du procès, sur la récompense versée par les autorités américaines à un témoin clé, le propriétaire du magasin où ont été achetés les objets qui se trouvaient dans la valise. Cela conforte sa conclusion que Megrahi a été « privé d’un procès équitable », a-t-elle expliqué.

Lors d’une conférence de presse à Glasgow, l’avocat de la famille Megrahi, Aamer Anwar a estimé ainsi disposer d’éléments « solides » pour un procès en révision. Si la justice décidait effectivement d’ordonner un tel réexamen, les premières audiences de procédure pourraient se tenir avant la fin de l’année et les audiences sur le fond du dossier l’année prochaine.

Il a rappelé que l’Iran avait depuis longtemps été désigné comme responsable de l’attentat, et que Megrahi avait été condamné à tort.

Mais l’Iran a démenti les accusations selon lesquelles il aurait décidé de l’attentat et financé un groupe armé palestinien en représailles à la mort de 290 passagers d’un avion d’Iran Air abattu par la marine américaine cinq mois plus tôt au-dessus du Golfe.

Cet Airbus de la compagnie nationale Iran Air avait été abattu peu après son décollage par deux missiles tirés de ce navire de guerre américain, l’équipage ayant affirmé avoir pris l’avion pour un avion de chasse iranien aux intentions hostiles.

Pétrole: Saoudiens et Emiratis accentuent la pression, les prix replongent

L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, deux alliés majeurs au sein de l’Opep, ont accentué la pression dans la guerre des prix pétroliers qu’ils livrent à la Russie, en annonçant qu’ils pourraient inonder les marchés mondiaux d’or noir, dont les cours replongeaient mercredi.

L’Arabie saoudite, chef de file de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), fait pression pour que la Russie — deuxième producteur mondial mais non membre de l’Opep — accepte une réduction de la production mondiale de brut afin de compenser une baisse de la demande provoquée par l’épidémie de nouveau coronavirus.

Depuis le refus la semaine dernière de Moscou, Ryad a procédé à la plus forte baisse de ses prix en 20 ans, s’efforçant de capter des parts de marché de Moscou et déclenchant un séisme sur les marchés financiers, qui affecte tout particulièrement la Russie.

Au lendemain d’un rebond sur les places boursières, le géant pétrolier Saudi Aramco a annoncé mercredi qu’il envisageait d’augmenter sa capacité de production de pétrole d’un million de barils par jour (bpj), pour la porter à 13 millions.

« Saudi Aramco annonce avoir reçu une directive du ministère de l’Energie visant à augmenter sa capacité maximale durable de 12 à 13 millions bpj », a déclaré l’entreprise publique dans un communiqué publié sur le site internet de la Bourse saoudienne.

Mardi, le premier exportateur mondial de brut avait déjà décidé d’augmenter sa production d’au moins 2,5 millions de bpj pour atteindre un niveau record de 12,3 millions bpj à partir d’avril.

Les cours ont encaissé lundi leur pire chute en près de 30 ans, en plongeant d’environ 25% avant de rebondir le lendemain. Mercredi, après l’annonce de Saudi Aramco, les cours du pétrole sont repartis à la baisse.

– « Un accord est essentiel » –

Mercredi, vers 08H22 GMT, le baril de « light sweet crude » (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en avril, cédait 0,42 dollar, soit 1,22%, à 33,94 dollars, dans les échanges électroniques.

Le baril de Brent, référence européenne, pour mai, perdait de son côté 0,32 dollar, soit 0,86%, à 36,90 dollars.

De leurs côtés, les Emirats, quatrième producteur de l’Opep et proche alliés de Ryad dans le Golfe, se sont aussi dits prêts à augmenter leur production en pétrole de plus d’un million de baril par jour (bpj).

« Conformément à notre stratégie de croissance de la capacité de production (…), nous sommes en mesure d’approvisionner le marché avec quatre millions de barils par jour (bpj) en avril », a indiqué Abu Dhabi National Oil Company (Adnoc) dans un communiqué.

« Par ailleurs nous allons accélérer notre objectif de capacité à cinq millions bpj », a renchéri l’entreprise publique émiratie, qui produit jusque-là environ trois millions de bpj.

« Les opérateurs des Emirats disposent d’une capacité de production importante qui sera rapidement mise en service compte tenu des circonstances actuelles », a prévenu le ministre émirati de l’Energie, Souheil al-Mazrouei, sur Twitter.

Mais son pays est « convaincu qu’un nouvel accord (entre l’Opep et la Russie) est essentiel pour soutenir un marché équilibré et moins volatile », a-t-il ajouté.

– Russie « renforcée », selon Poutine –

Les annonces des Saoudiens et des Emiratis ne semblent toutefois pas avoir fait plier Moscou. Le président russe Vladimir Poutine s’est montré confiant lors d’une réunion avec des investisseurs, se disant « certain » que l’économie russe sortirait « renforcée ».

« Je suis certain que la Russie traversera cette période turbulente avec calme et dignité », a assuré le chef de l’Etat, déjà confronté en interne à d’énormes défis économiques et à une contestation contre sa révision constitutionnelle lui permettant de se maintenir au pouvoir après la fin de son mandat actuel.

Mardi, le ministre de l’Energie Alexandre Novak avait déclaré ne pas « fermer la porte » aux négociations avec les pays de l’Opep. Le récent désaccord de Moscou « ne signifie pas qu’à l’avenir nous ne pourrons plus coopérer », avait-il ajouté.

Le royaume saoudien affirme avoir une capacité de production de 12 millions de bpj, mais il reste difficile de savoir si ce rythme sera viable à long terme.

L’Arabie dispose également de dizaines de millions de barils de brut stockés dans des réserves stratégiques censées être utilisées en cas de besoin et pourrait s’en servir pour fournir les barils supplémentaires.

Coronavirus: l’Iran annonce 63 nouveaux décès, portant le total à 354 morts

L’Iran a annoncé mercredi la mort de 63 personnes supplémentaires infectées par le nouveau coronavirus, portant le total à 354 morts dans ce pays, l’un des plus touchés au monde.

« Malheureusement, au cours des dernières 24 heures, nous avons rapporté 63 décès et au total 354 personnes ont perdu la vie », a dit le porte-parole du ministère de la Santé, Kianouche Jahanpour.

Les autorités ont également recensé, selon M. Jahanpour, 958 nouveaux cas de contamination, portant à quelque 9.000 le nombre de personnes infectées en Iran.

La propagation du nouveau coronavirus est l’une des plus meurtrières en dehors de la Chine, où la maladie est apparue.

Téhéran, la capitale, a connu 256 nouveaux cas de contamination suivie par la province d’Ispahan (centre), avec 170.

L’Iran a annoncé son premier décès de coronavirus, dans la ville sainte chiite de Qom, le 19 février.

Il n’a pas encore imposé officiellement de quarantaines, mais les autorités ont appelé à plusieurs reprises les habitants à s’abstenir de voyager. Ils ont fermé des écoles et les universités et ont eu recours à la fermeture d’hôtels et d’autres logements touristiques pour décourager les voyages.

Dans ce contexte, le président Hassan Rohani a lancé mercredi un nouvel appel aux Iraniens, les invitant à limiter leurs mouvements afin de contenir le virus.

– 44 morts par intoxication –

« Les mouvements doivent être réduits au minimum », a déclaré M. Rohani lors d’une réunion du gouvernement, flanqué de ministres arborant tous un masque.

« Tout le monde doit être prudent afin que la propagation du virus puisse être contenue », a-t-il ajouté.

Le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a annulé le discours qu’il tient chaque année à Machhad (nord-est de l’Iran) pour le Nouvel An persan, à cause du nouveau coronavirus, a annoncé lundi son bureau.

Outre les décès directs, 84 personnes sont mortes d’une intoxication au méthanol en Iran après des rumeurs selon lesquelles boire de l’alcool pouvait aider à guérir ou à protéger contre le virus.

Un dernier bilan sur ces intoxications faisait état mardi de 44 décès.

Dans certaines provinces comme le sud-ouest du Khouzestan, le nombre de décès dus à l’intoxication est plus élevé que celui du coronavirus.

Depuis l’apparition du nouveau coronavirus en décembre, 119.711 cas d’infection ont été recensés dans 110 pays et territoires, causant la mort de 4.351 personnes, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles mercredi à 09H00 GMT.

La Chine continentale, où toutes les personnes arrivant de l’étranger à Pékin sont désormais placées 14 jours en quarantaine, dénombre 80.778 cas, dont 3.158 décès et 61.475 personnes aujourd’hui guéries.

Les pays les plus touchés après la Chine sont l’Italie (10.149 cas, 631 décès), l’Iran (9.000 cas, 354 décès), la Corée du Sud (7.755 cas, 60 décès) et la France (1.784 cas, 33 décès).

La gestion du nouveau coronavirus s’est par ailleurs invitée dans la polémique entre l’Iran et les Etats-Unis: face à la menace de cette épidémie, les Etats-Unis ont appelé mardi l’Iran à « libérer immédiatement » tous les ressortissants américains « injustement détenus ».

Téhéran a accusé pour sa part Washington de « prendre en otages des prisonniers iraniens » et s’est dit inquiet pour leur santé en raison de ce qu’il a appelé la mauvaise gestion par le président Donald Trump du nouveau coronavirus.

Algérie: Karim Tabbou, figure de la contestation, condamné à six mois de prison ferme

Karim Tabbou, une figure de proue du mouvement de contestation en Algérie, a été condamné mercredi à un an de prison dont six mois ferme, a indiqué à l’AFP Saïdi Salhi, vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’Homme (LADDH).

« Il s’agit d’une condamnation, cela s’inscrit dans la logique de durcissement de la justice. Le verdict est lourd », a estimé M. Salhi, en précisant que M. Tabbou serait « libéré le 26 mars ».

Placé en détention une première fois le 12 septembre après avoir été inculpé « d’atteinte au moral de l’armée » par un tribunal de Tipaza, à l’ouest d’Alger, il avait été remis en liberté le 25 septembre. A nouveau arrêté dès le lendemain, il avait été inculpé cette fois d' »incitation à la violence » et une nouvelle fois incarcéré.

Chef d’un petit parti d’opposition non enregistré, l’Union démocratique et sociale (UDS), M. Tabbou, 46 ans, est « accusé d’incitation à la violence » et est en détention provisoire depuis fin septembre.

Plusieurs dizaines de personnes restent en détention dans le cadre du mouvement de contestation, selon les organisations de défense des droits humains, leur nombre précis étant difficile à établir en raison des remises en liberté et des interpellations qui se succèdent.

Après avoir obtenu la démission du président Abdelaziz Bouteflika en avril 2019, le « Hirak » exige le changement du « système » en place depuis l’indépendance en 1962.

Indépendante depuis 30 ans, la Lituanie lutte encore contre les traumatismes du passé

Fière d’avoir été, il y a trente ans, la première république soviétique à proclamer son indépendance, et d’avoir déclenché la désintégration de l’URSS, la Lituanie cherche toujours à dépasser les traumatismes du passé et à rendre justice aux victimes.

Auksute Ramanauskaite Skokauskiene a passé son enfance sous un autre nom pour éviter que les autorités soviétiques ne retrouvent son père qui a dirigé la résistance armée contre le régime communiste après la Seconde Guerre mondiale.

Capturé en 1956 et exécuté l’année suivante, Adolfas Ramanauskas n’a eu des obsèques nationales qu’en 2018, après que son corps avait été identifié dans une fosse commune.

« J’ai toujours été très troublée par le fait que les Soviétiques ont calomnié mon père et d’autres combattants pour la liberté. Pour moi, il était toujours très important que j’aie une tombe où je puisse me recueillir », a déclaré à l’AFP Ramanauskaite Skokauskiene, ancienne députée et ingénieure à la retraite.

Le retour à l’indépendance de la Lituanie de l’URSS le 11 mars 1990 a déclenché une année de troubles qui ont contribué à l’effondrement de l’Union soviétique en décembre 1991.

Alors que les Lituaniens ont depuis connu une croissance économique impressionnante, notamment après leur adhésion à l’UE et à l’OTAN en 2004, la nation balte de 2,8 millions de personnes est aux prises avec des taux de suicide, d’alcoolisme et d’émigration parmi les plus élevés d’Europe.

Certains critiques attribuent ces maux à la pauvreté et aux fortes disparités des revenus. Mais d’autres y voient également des symptômes d’un traumatisme intergénérationnel causé par un « passé non digéré ».

« Se pourrait-il que notre société soit malade et que le nom de la maladie ne soit pas coronavirus? L’une des raisons pour lesquelles les Lituaniens sont déprimés pourrait être notre histoire difficile et compliquée », a déclaré Laimonas Talat Kelpsa, haut responsable du ministère des Affaires étrangères lors d’une récente conférence à Vilnius ayant réuni psychothérapeutes et diplomates.

Des participants ont souligné que l’injustice historique et le fait d’ignorer les besoins des victimes ont un impact énorme sur les sociétés hantées par leur histoire.

Selon Simon Wessely, professeur de médecine psychologique au King’s College de Londres, reconnaître le passé est important à la fois pour l’individu et la collectivité.

« Parfois (le passé) est trop douloureux pour le reconnaître, mais il faut le faire », a déclaré Wessely.

– Histoire turbulente –

À l’instar des deux autres pays baltes, la Lettonie et l’Estonie, la Lituanie a été annexée par l’URSS pendant la Seconde Guerre mondiale, puis occupée par l’Allemagne nazie, reprise par l’URSS et enfin profondément marquée par les déportations de centaines de milliers de personnes en Sibérie et en Asie centrale dans les années 1940 et 1950.

Les trois pays sont restés sous la coupe de Moscou pendant des décennies. Puis des fissures sont apparues après l’arrivée de Mikhaïl Gorbatchev au Kremlin en 1985.

Le 11 mars 1990, les députés lituaniens, y compris les rebelles du Parti communiste, ont voté massivement pour l’indépendance.

Moscou ne l’a reconnue qu’après un coup d’État manqué des extrémistes communistes dans la capitale soviétique en août 1991.

L’URSS a été officiellement dissoute quatre mois plus tard.

Depuis, les États baltes entretiennent des relations difficiles avec Moscou. L’une des raisons sont des perceptions radicalement différentes de la Seconde Guerre mondiale et de l’époque soviétique.

En 2016, la Lituanie a déclaré un ancien responsable du KGB coupable de génocide pour son rôle dans l’arrestation d’Adolfas Ramanauskas. La Cour européenne des droits de l’homme l’a approuvé en appel.

L’année dernière, plus de 60 anciens responsables soviétiques ont été condamnés par contumace en Lituanie pour la répression en 1991 du mouvement indépendantiste ayant fait 14 morts et plus de 700 blessés.

La Russie refuse de reconnaître la prise de contrôle des États baltes par l’URSS comme une occupation.

La Lituanie n’a jamais obtenu ni excuses ni réparations.

– « La grande menace » –

La Lituanie et d’autres États d’Europe centrale autrefois dominés par les Soviétiques ont récemment critiqué la Russie pour ce qu’ils considèrent comme des tentatives de minimiser les crimes de l’époque communiste et de réécrire l’histoire à des fins politiques.

Le président lituanien Gitanas Nauseda considère la Russie comme la « plus grande menace à long terme » pour son pays et s’est engagé à « repousser toute tentative de fabriquer l’histoire ».

Mais la Lituanie a elle aussi été critiquée pour ne pas avoir suffisamment reconnu le rôle des collaborateurs locaux des nazis allemands à l’heure de l’Holocauste.

La reconnaissance des victimes et des bourreaux n’est qu’une première étape dans la guérison des traumatismes historiques, a dit Danute Gailiene, professeur de psychologie à l’Université de Vilnius.

« Nous ne pouvons pas dire que nous sommes une société saine et mature. Il y a un long chemin à parcourir, mais nous y sommes engagés », a-t-elle déclaré.

Biden loin devant, les démocrates attendent la décision de Sanders

Joe Biden voit se profiler un duel face à Donald Trump lors de la présidentielle américaine, mais le clan démocrate attend désormais avec fébrilité de savoir si son rival Bernie Sanders se retirera pour favoriser le rassemblement.

L’ancien vice-président de Barack Obama a remporté mardi lors des primaires une série de victoires convaincantes, dans le Mississippi, le Missouri, l’Idaho, mais surtout le Michigan, prise chargée en symboles.

Désormais archi-favori pour l’investiture, il pourrait, dans un scénario inimaginable il y a encore 15 jours, se retrouver bientôt seul en piste pour se préparer à affronter le milliardaire républicain le 3 novembre.

Mais « Bernie », qui a, comme il y a quatre ans, su électriser les foules autour de ses promesses d’assurance-maladie universelle et d’études gratuites, n’a pas encore dit un mot sur ses intentions.

Et les jours à venir s’annoncent périlleux pour le parti démocrate, hanté par le souvenir de 2016 où l’acrimonie entre ses équipes et celles d’Hillary Clinton lui avait coûté cher.

Bernie Sanders se retirera-t-il de la course avant le débat prévu dimanche pour amorcer un rapprochement? Joe Biden saura-t-il trouver les mots pour séduire les électeurs de Sanders – souvent jeunes – qui déplorent son manque d’audace ? Reprendra-t-il à son compte des mesures – fortes ou symboliques – mises en avant par le sénateur du Vermont ?

Pour Julian Zelizer, professeur d’histoire à l’université de Princeton, les deux septuagénaires devront faire un pas l’un vers l’autre.

« Oui, il sera crucial que Sanders mobilise sa base électorale derrière le candidat. Mais Biden devra faire un geste envers le mouvement enthousiaste de Sanders. Cela demandera des efforts réciproques », soulignait-il sur Twitter.

Certaines personnalités, telles que l’étoile montante démocrate Alexandria Ocasio-Cortez, soutien actif de « Bernie », pourraient jouer un rôle d’intermédiaire.

– Obama toujours silencieux –

« C’est plus qu’un +come-back+, selon moi », a affirmé Joe Biden mardi soir, « c’est un +come-back+ pour l’âme de la Nation », qu’il a promis de « restaurer » en l’emportant sur l’ancien homme d’affaires de New York.

Louant l' »énergie » et la « passion » des troupes du sénateur socialiste, il a tendu la main à ce dernier. « Nous avons le même but et ensemble, nous battrons Donald Trump, nous rassemblerons ce pays ».

L’ancien « VP » de Barack Obama a confirmé sa capacité à s’imposer très largement dans le Sud des Etats-Unis et auprès des Afro-Américains, un électorat-clé pour les démocrates.

Mais sa large avance dans un bastion industriel du Midwest comme le Michigan est aussi encourageante pour les démocrates qui espèrent s’y imposer en novembre face à Donald Trump pour retrouver la Maison Blanche.

Après plus de trente-cinq ans comme sénateur et huit ans comme bras droit de Barack Obama, « Joe », connu pour se gaffes à répétition et ses faux-pas, devra cependant faire taire les interrogations sur son état de santé. Car Donald Trump a déjà prévenu: il l’attaquera sans relâche sur ce thème.

Barack Obama reste, pour l’heure, très discret. Selon toute vraisemblance, il devrait attendre que sa famille politique ait désigné son champion pour sortir du bois et peser de tout son poids sur la prochaine échéance électorale.

Une autre inconnue pèse sur le long marathon électoral à venir: l’évolution de l’épidémie de coronavirus aux Etats-Unis.

Par mesure de précaution, Joe Biden et Bernie Sanders ont dû annuler leurs meetings prévus mardi soir dans l’Ohio.

L’équipe de Donald Trump, qui a jusqu’ici plutôt minimisé la menace, a de son côté annoncé un rassemblement le 19 mars dans le Wisconsin baptisé « Les catholiques avec Trump ».

Interrogé mardi sur ce thème, le vice-président Mike Pence est resté évasif: « Je suis convaincu que l’équipe de campagne prendra en compte toutes les informations disponibles et prendra les meilleures décisions possibles ».

De son côté, Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des maladies infectieuses, a souligné combien il était impossible, face à une situation « qui évolue en permanence », de faire des recommandations pour les meetings de campagne des mois à venir.

Italie: la grande fuite des touristes

Ils sont les seuls touristes devant la majestueuse cathédrale de Florence: ce couple croulant sous les valises s’apprête à quitter l’Italie, où les mesures limitant sévèrement les déplacements ont accablé un secteur touristique déjà en berne.

« Tout est fermé, nous rentrons à la maison », soupire Alex Gross, un Allemand de 32 ans, pendant que sa fiancée vérifie nerveusement le statut de leur vol sur son portable. « Enfin, si notre vol n’est pas annulé! »

Beaucoup de vacanciers avaient déjà pris la poudre d’escampette au début de l’épidémie dans la péninsule, où le coronavirus a infecté à ce jour plus de 10.000 personnes et fait 631 morts, notamment dans le nord, son poumon économique.

Le ciel est bleu et le soleil brille des Alpes à la Sicile, mais les quelques touristes encore présents n’ont plus que deux options: rester dans leur hôtel et dévaliser le mini-bar, ou alors tout simplement rentrer chez eux.

« 90% de nos réservations ont été annulées », se désole Nicola, directeur d’un hôtel florentin qui n’a pas souhaité donner son nom de famille.

Du Colisée à la Tour de Pise, le gouvernement a fermé les portes de tous les musées et monuments, ordonné la fermeture des bars et restaurants dès 18H00, et demandé aux 60 millions de quitter leur domicile seulement cas de strict nécessité, et ce jusqu’au 3 avril.

– « Etrangement calme » –

Une flopée de compagnies aériennes ont décidé de suspendre leurs liaisons avec l’Italie, dont Air France, Ryanair, Easyjet et British Airways, et de nombreux pays ont imposé des restrictions de voyage.

« Je ne sais pas si on peut partir de Milan. Personne ne semble vraiment comprendre ce qui se passe », se lamente Nick Manager, un Texan au regard perdu errant autour de l’immense gare centrale de la capitale lombarde.

Fini les foules sur la place Saint-Pierre à Rome, le long des canaux à Venise ou sur le site archéologique de Pompéi près de Naples.

Un silence pesant règne sur la place romaine Campo de’ Fiori, qui bourdonne habituellement du matin au soir avec son marché en plein air et ses bars fréquentés par les étudiants étrangers.

Stefano Ruggiero, 48 ans, qui gère une parfumerie près du Ponte Vecchio à Florence, est sous le choc: « Jamais la rue n’a été aussi calme » depuis l’ouverture de son établissement en 1911, dit-il. « Même après la terrible inondation de 1966, quand la boue (déposée par les eaux débordant du fleuve Arno) avait tout dévasté, il y avait plus de gens ».

Les musiciens de rue ont eux aussi plié bagage: « C’est étrangement calme ».

Selon l’Association professionnelle des hôteliers italiens Federalberghi, les réservations ont chuté de 80% au niveau national, soit une perte évaluée à 2,5 milliards d’euros.

Et ce chiffre n’inclut pas les pertes enregistrées dans les autres maillons du secteur touristique, qui englobe aussi les transports, les restaurants et les commerces.

Représentant 13% du PIB, ce secteur emploie environ un million de personnes, qui craignent désormais pour leur emploi.

– Sacrifices –

Le gouvernement a débloqué des milliards d’euros pour affronter l’impact de l’épidémie sur l’économie, mais le Premier ministre Giuseppe Conte a annoncé ce week-end à ses compatriotes qu’ils devraient faire de gros sacrifices pour endiguer le virus et empêcher l’effondrement du système sanitaire italien.

Pour Nicola, le directeur d’hôtel de Florence, cela signifie que la plupart des hôtels vont être contraints de fermer, « bien qu’il soit possible qu’on demande à certaines grosses structures comme la nôtre de rester ouverts au cas où on leur demande de pallier le manque de lits dans les hôpitaux ».

Agostino Ferrara, 52 ans, propriétaire du restaurant Spada dans le centre de Florence, explique qu’il a été contraint de mettre une grande partie de son personnel en chômage technique face à la chute du nombre quotidien de couverts de 140 à 20.

« Je n’ai jamais vu une situation pareille », confie-t-il, entouré de son personnel désoeuvré.

« Je reste quand même optimiste, parce qu’on sait que les gens ont tendance à oublier les choses horribles », ajoute-t-il en souriant. « J’espère qu’on va s’en sortir et que dans quelques semaines, dans quelques mois, les touristes reviendront en Italie, encore plus nombreux qu’avant. »

Japon: commémorations modestes pour le tsunami de 2011

Le Japon a sobrement commémoré mercredi le souvenir du grand tsunami du 11 mars 2011 qui a aussi entraîné la catastrophe nucléaire de Fukushima, l’épidémie de coronavirus ayant conduit à l’annulation des principaux hommages publics dans le pays.

« C’est le moment de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter la propagation du virus sur notre sol », a déclaré le Premier ministre Shinzo Abe lors d’une petite cérémonie dans ses bureaux à Tokyo.

Le Premier ministre a aussi exprimé ses condoléances aux victimes et renouvelé sa promesse de poursuivre la reconstruction des régions touchées par le désastre, toujours sinistrées neuf ans après.

La télévision japonaise a montré des images de familles venues se recueillir mercredi dans plusieurs endroits de la préfecture de Miyagi, particulièrement touchée par la catastrophe, qui a fait au total environ 18.500 morts et disparus dans le nord-est du Japon.

Comme chaque année, le pays a observé une minute de silence à 14H46 (05H46 GMT). Le moment exact où, il y a neuf ans jour pour jour, un terrible séisme sous-marin de magnitude 9,0 a secoué l’archipel avant qu’un gigantesque raz-de-marée ne s’abatte sur les côtes nord-est du pays.

Sous une pluie fine au parc Hibiya, dans le centre de Tokyo, des passants, pour la plupart arborant des masques chirurgicaux, se sont rassemblés pour prier en silence devant un autel entouré de fleurs de cerisiers.

Naoya Matsuoka, employé dans une entreprise financière, a jugé important de braver le coronavirus pour venir rendre hommage aux victimes. « Nous sommes confrontés à de nombreux problèmes et nous entendons beaucoup d’incitations à ne pas maintenir d’événements, mais la catastrophe (du 11 mars 2011) est quelque chose que nous ne devons pas oublier, donc c’est pour cela que je suis là », a-t-il expliqué.

En raison du coronavirus, le gouvernement japonais a annulé cette année la grande cérémonie nationale qui avait lieu tous les ans à Tokyo depuis 2012 en présence du Premier ministre, de membres de la famille impériale, d’élus locaux, de diplomates et de proches de victimes.

Le tsunami a entraîné la plus grave catastrophe nucléaire depuis celle de Tchernobyl en avril 1986 en URSS.

L’accident de la centrale nucléaire de Fukushima a forcé 160.000 personnes à fuir la région, face aux radiations.

« Plus de 40.000 résidents n’ont toujours pas pu retrouver leur foyer », a rappelé mercredi dans un communiqué le gouverneur de la préfecture de Fukushima, Masao Uchibori, exhortant la population du pays à maintenir son soutien aux sinistrés.

« Derrière l’intérêt faiblissant et les rumeurs nocives, il y a des enfants qui continuent de vivre des moments douloureux, et des résidents qui souffrent de solitude », a-t-il souligné.

Si le démantèlement complet de la centrale nucléaire n’est pas attendu avant quatre décennies, l’Etat espère mettre en avant lors des Jeux olympiques de Tokyo cet été les efforts de reconstruction accomplis jusqu’à maintenant.

Le relais de la flamme olympique au Japon doit notamment démarrer symboliquement le 26 mars de la région de Fukushima.

Russie: Poutine « pour toujours »? Soutiens et opposition se mobilisent

Les fidèles du Kremlin comme les opposants se mobilisaient mercredi après un nouveau coup de théâtre de Vladimir Poutine, qui a ouvert avec une réforme constitutionnelle la voie à son maintien à la présidence jusqu’en 2036.

Cet amendement à la loi fondamentale, ajouté mardi à la surprise générale à une réforme plus vaste, permettra à l’homme fort de Russie de « réinitialiser » son compteur de mandats présidentiels, afin de lui donner le droit de se représenter en 2024 mais aussi en 2030. La Cour constitutionnelle doit valider la manoeuvre, à la demande de M. Poutine.

Adoptée en troisième lecture mercredi par les députés, l’ensemble de la révision constitutionnelle, qui inclut aussi un renforcement des prérogatives présidentielles, des mesures sociales et des principes sociétaux conservateurs, doit être validé encore par la chambre haute du Parlement et un « vote populaire » le 22 avril.

Les alliés politiques du président se sont réjouis de la possibilité du maintien au pouvoir de M. Poutine, 67 ans, aux commandes de la Russie depuis 20 ans.

– Faire face aux ennemis –

Le loyal maire de Moscou, Sergueï Sobianine, a estimé ainsi qu’interdire à M. Poutine de se représenter en 2024, du fait de l’actuel limite à deux mandats consécutifs, était « un facteur déstabilisateur » pour le pays.

Il a fait valoir la « stabilité » du pouvoir face aux ennemis « intérieurs et extérieurs » de la Russie, qui « tentent de saper notre indépendance et notre économie ».

Le président de la chambre basse du Parlement, Viatcheslav Volodine, a estimé que la réforme « renforcera le pays ». La présidente de la chambre haute, Valentina Matvienko, a assuré elle que les élections de 2024 n’étaient pas pour autant « jouées d’avance ».

Du côté des détracteurs du pouvoir, cette mesure surprise prouve que M. Poutine a l’intention de rester indéfiniment au pouvoir, même s’il avait assuré le contraire par le passé.

Certains ont aussi dénoncé la décision mardi de Sergueï Sobianine de bannir les rassemblements de plus de 5.000 personnes, officiellement pour cause d’épidémie de coronavirus.

Cette annonce est cependant intervenue juste après que l’opposition a annoncé son intention de manifester courant mars contre M. Poutine à Moscou, théâtre cet été de vastes manifestations qui avaient été réprimées.

« 1) Vous annoncez que vous allez rester au pouvoir pour toujours. 2) L’opposition veut organiser des protestations. 3) Sous prétexte de lutte contre le coronavirus, vous interdisez les rassemblement à Moscou », a ironisé le populaire blogueur StalinGulag.

– Un « putsch » –

La figure de proue des opposants, Alexeï Navalny, a lui dénoncé une réforme qui permet à Poutine de briguer un mandat « comme si c’était la première fois ».

« Techniquement, ce qui se passe aujourd’hui est un putsch », a lâché son bras doit, Leonid Volkov.

Dès le vote en deuxième lecture mardi par les députés, une centaine de personnes s’étaient rassemblées près des murs du Kremlin pour protester contre l' »impensable ».

Une nouvelle action de protestation a commencé mercredi devant le Parlement.

Justifiant les amendements à la Constitution, M. Poutine a jugé mardi qu’un « pouvoir présidentiel fort est absolument nécessaire à la Russie » et estimé que la « stabilité (…) devait être prioritaire ».

Vladimir Poutine avait déjà pris tout le monde de court en janvier en annonçant qu’il voulait lancer une révision constitutionnelle, la première depuis l’adoption de la Constitution russe en 1993. Cette initiative avait immédiatement été considérée comme une manière de préparer l’après-2024.

La révision concerne à la fois le système politique, renforçant notamment les pouvoir de l’exécutif, mais donne aussi des droits socio-économiques tels qu’un salaire minimum garanti et une indexation des retraites.

Elle entérine aussi le virage conservateur de la Russie, dotant la loi fondamentale de la mention de « foi en Dieu », de la nécessité de politiques publiques natalistes ainsi que du principe d’un mariage possible uniquement entre un homme et une femme.

Pour les Angolaises, la double peine du changement climatique

C’était la corvée qu’elle redoutait le plus. Chaque fois que sa mère lui ordonnait de chercher de l’eau pour arroser les récoltes familiales, là-haut dans les montagnes du sud de l’Angola, Tehandjila Quessale se raidissait imperceptiblement.

Quitter l’école. Trois heures de marche. Se glisser dans la file d’attente au point d’eau. Et puis attendre pour remplir son seau, souvent jusqu’à la nuit. Une épreuve.

Et pour Tehandjila, 16 ans, le plus dur restait encore à faire. Regagner son hameau des alentours de Lubango, la capitale de la province de Huila. « J’avais peur des attaques de garçons », se souvient l’adolescente. Au moins deux filles qu’elle connaît ont été violées au retour du puits.

Comme si la sécheresse qui fissure la terre et la faim qui serre les estomacs ne suffisaient pas, les femmes de la province de Huila vivent aussi dans la peur de l’agression.

Ces dernières semaines, les pluies torrentielles qui ont lessivé la campagne des alentours lui ont apporté un peu de répit. Tehandjila peut désormais trouver de l’eau à une source toute proche de la petite maison de pierres qu’elle partage avec sa mère et ses six frères et sœurs.

Mais la pluie a aussi détruit la récolte de la famille et fait ressurgir le spectre de la famine.

Elle menace aujourd’hui 45 millions de personnes dans toute l’Afrique australe, selon les dernières évaluations de l’ONU.

Dans la province de Huila, les égarements de la météo ont poussé la plupart des hommes hors de leurs villages pour aller chercher du travail à Lubango. Et laissé aux femmes la lourde responsabilité de nourrir les enfants.

« Le changement climatique a un impact considérable sur la vie des femmes », résume Florbela Fernandes, du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP).

– Hommes absents –

L’ONU estime qu’elles constituent jusqu’à 80% des bataillons des déplacés par le réchauffement de la planète.

« A chaque crise, on constate que les groupes déjà les plus vulnérables sont ceux qui souffrent le plus », poursuit la représentante du FNUAP en Angola, « ces situations les exposent encore plus à la violence et aux abus ».

Les ONG opérant dans la province de Huila ont recensé plusieurs cas de femmes ou jeunes filles contraintes à des relations sexuelles en échange d’argent ou de nourriture.

Les pressions de l’environnement ne sont pas seules en cause. « C’est aussi une question de culture », estime Florbela Fernandes, « dans la plupart des pays africains, ce sont les filles et les femmes qui assument l’essentiel du travail à la maison ».

Le père de Tehandjila a trouvé un emploi de gardien à Lubango, mais il n’en fait guère profiter sa famille.

« Quand il revient à la maison, il est confronté à la faim. Alors il fait ce qu’il veut et moi, je me débrouille », lâche son épouse Mousaka Fernanda, 47 ans, en désherbant, les pieds dans la boue, son petit lopin de maïs.

« Les enfants ne demandent rien à leur père », ajoute-t-elle, « c’est à leur mère qu’ils réclament de quoi manger ».

Et ce n’est pas une mince affaire. Depuis des années que la sécheresse frappe la région, Mousaka Fernanda s’en sort en troquant son « macau », une liqueur locale qu’elle fabrique avec du sorgho, contre un peu de nourriture. Un gros kilo de maïs pour deux coupes de « macau ».

De quoi calmer la faim de la famille quelques jours seulement.

– Bouches à nourrir –

Alors quand sa fille aînée, Domingas, a appris qu’elle était enceinte, sa mère l’a pressée d’épouser le père de son enfant pour aller vivre avec lui.

« Ma mère ne voulait pas d’une bouche en plus à nourrir », explique la jeune femme de 19 ans, « moi j’étais contre ».

Le compagnon de Domingas Quessala a depuis quitté le foyer pour prendre un emploi dans la fabrique de jus de fruits de la ville voisine de Humpata. Désormais seule, la jeune maman confie elle aussi subir le harcèlement et les « agressions » des garçons pendant ses corvées d’eau.

« Les filles sont les premières victimes des séparations familiales », constate Anaina Lourenço, de l’ONG World Vision International. « Elles finissent par être obligées d’aider leurs mères et, très souvent, arrêtent leurs études ».

Dans un petit village de l’autre côté de la vallée, Cristina Canaino, 14 ans, a ainsi déserté les bancs de son école en 2018, lorsque son père a quitté sa famille de cinq enfants.

« Il est parti à la ville chercher du travail à cause de la sécheresse », raconte son épouse Ceu Jacinta, 32 ans, « on ne l’a pas revu depuis ». Elle n’a eu d’autre choix que de faire travailler sa fille Cristina dans un champ pour une poignée de kwanzas.

Ici aussi, les pluies ont récemment détruit une partie des récoltes de la famille et le ciel ne semble pas vouloir s’éclaircir. « S’il continue à pleuvoir, on ne pourra même pas ramasser un peu de maïs », redoute Ceu Jacinta.

Comble d’infortune, l’humidité a fait s’écrouler le toit de chaume de leur hutte. « Si mon mari était resté là », se lamente la cheffe de famille, « je ne pense pas que tout ça serait arrivé ».

Israël: Gantz va être placé sous protection rapprochée après des menaces

Benny Gantz, le principal rival du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, va être placé sous protection rapprochée de l’Etat à la suite de menaces sur internet, a annoncé le Shin Beth, le service de sécurité intérieure.

« Le Premier ministre a approuvé la recommandation du Shin Beth d’assurer une protection rapprochée de M. Gantz », a indiqué mardi le service de sécurité.

Cette décision doit encore être entérinée par une commission sécuritaire indépendante.

La protection de M. Gantz, chef du parti centriste « Bleu-Blanc », est jusque-là assurée par le service de sécurité du Parlement et avait déjà été renforcée après qu’il eut été insulté et menacé pour avoir dit vouloir former un gouvernement avec le soutien des partis arabes israéliens.

M. Gantz a relayé samedi sur Twitter un message disant qu’il devait « être assassiné comme Rabin », en référence à l’assassinat du Premier ministre travailliste Yitzhak Rabin en 1995 par un extrémiste juif, après une campagne haineuse contre lui d’une partie de la droite israélienne, alors menée par M. Netanyahu.

Benjamin « Netanyahu, arrête cette incitation à la violence, ne dis pas que tu n’étais pas au courant » des menaces en ligne, a commenté M. Gantz sur Twitter.

En Israël, seules sept personnes, dont le chef de l’opposition, reçoivent automatiquement la protection du Shin Beth.

M. Gantz, dont le parti est arrivé deuxième aux législatives du 2 mars après le Likoud (droite) de M. Netanyahu, n’est pas chef de l’opposition car ce titre ne peut être attribué qu’après la formation d’un gouvernement.

Or, Israël est dirigé par un gouvernement de transition depuis plus d’un an, deux précédents scrutins n’ayant pas abouti à la formation d’un cabinet.

MM. Gantz et Netanyahu mènent actuellement des tractations pour tenter de rallier des députés à leurs blocs car ni l’un ni l’autre n’est parvenu à obtenir l’appui de 61 parlementaires, seuil requis pour la formation d’un gouvernement.

« Tout maintenant est mort ici »: la frustration des habitants à la frontière gréco-turque

Dans son champ d’abricotiers en fleurs, à quelques encablures de la frontière gréco-turque, Dimitris Boudikas se désole de la fermeture du poste frontalier de Kastanies, qui a mis un terme aux va-et-vient constants avec Edirne, attraction locale en Turquie voisine.

« C’est la première fois depuis des décennies que Kastanies ferme. Je crains que ça dure des mois », déplore ce septuagénaire, qui souligne « l’amitié » entre Edirne et Kastanies, à 7 km l’une de l’autre, de part et d’autre de la frontière.

Pour faire pression sur l’Europe dans le conflit en Syrie, la Turquie a décidé fin février d’ouvrir ses portes au passage des migrants, malgré la déclaration de 2016 entre Ankara et Bruxelles, qui avait endigué les flux migratoires.

Première victime de la politique d’Ankara, le village de Kastanies, dont le poste frontière (Pazarkule côté turc) a fermé, théâtre récemment d’incidents violents impliquant les forces policières turques et grecques ainsi que les milliers de migrants piégés.

A 500 mètres du verger de Dimitris Boudikas, la clôture et les barbelés du poste-frontière. A l’horizon, on aperçoit le minaret de la mosquée de la ville d’Edirne (Adrianoupolis en grec), qui attire habituellement des centaines de Grecs frontaliers avides de ses produits bon marché.

« Nous avions l’habitude d’y aller tout le temps, il y a un grand marché, j’avais des collègues jardiniers turcs, c’était notre quotidien », raconte Apostolos Lymperidis, qui tient une pépinière, en face de la ferme de Boudikas.

Sur la place du village de Kastanies, Mary Rossi, propriétaire d’un café, les yeux rivés sur le téléviseur, suit les nouvelles.

« La situation est grave, je ne crois pas que le problème va se régler rapidement », estime celle qui répond aux nombreux médias locaux et étrangers venus couvrir les incidents à la frontière.

Les Turcs d’Edirne « venaient ici pour boire ou manger, nous avions l’habitude d’aller souvent en face pour faire des courses, maintenant que la douane est fermée, tout est mort ici », déplore-t-elle.

Une théière orientale en bronze orne le comptoir de son café, « le cadeau d’une femme turque venue récemment visiter Kastanies avec sa famille », explique-t-elle.

– Cible « facile » –

A l’extrémité du nord-ouest de la Grèce, Kastanies, qui compte 600 habitants, reste l’un des villages les plus isolés du département frontalier d’Evros, bordé par le fleuve éponyme.

Du côté grec, seul centre urbain à attirer les villageois, la ville d’Orestiada de 18.000 habitants se trouve à 18 km.

Plus au sud, Kipi, le second poste frontalier entre la Grèce et la Turquie, est pourtant resté ouvert depuis le début de la crise. Pour Athènes, les migrants étaient « poussés » vers Kastanies par la Turquie.

Pour Dimitris Boudikas, c’était plus « facile pour la Turquie d’inciter les migrants à venir aux portes de Kastanies », car la fermeture de Kipi ou du poste-frontière turc avec la Bulgarie, « passages habituels des camions routiers, aurait causé l’écroulement du commerce turc » avec l’Europe.

Compte tenu des bonnes relations entre Ankara et Sofia, la Grèce, qui a des relations historiquement délicates avec la Turquie voisine, apparaît pour beaucoup comme une cible facile pour Ankara pour faire pression sur Bruxelles.

Il y a toujours eu des groupes de migrants qui traversaient la frontière et n’étaient que « de passage de Kastanies, à destination de Thessalonique (métropole du nord de la Grèce) puis d’Athènes pour aller ensuite en France ou en Allemagne », raconte Mary Rossi.

Dimitris Boudikas se rappelle d’une dizaine de personnes noyées dans le fleuve Evros il y a quelques années « en tentant de le traverser ».

Mais maintenant, la situation « est plus dangereuse », renchérit Mary Rossi. « On dit qu’il y a des milliers de migrants qui attendent de passer et on ne peut pas y faire face ».

Mais la commerçante dit se sentir « en sécurité »: « Heureusement, il y a plein de policiers et de militaires envoyés pour sécuriser les frontières ».

Italie: l’Eglise aussi se met à l’heure du coronavirus

Des fidèles privés de messes, un pape qui s’exprime par vidéo, funérailles et mariages interdits: les catholiques se sont mis à l’heure du coronavirus en Italie, où tout type de rassemblement est désormais prohibé.

Pour montrer concrètement la solidarité de l’Eglise, le pape François a demandé mardi aux prêtres « d’avoir le courage de sortir et d’aller visiter les malades », « d’accompagner le personnel médical et les bénévoles » dans un pays où l’épidémie a déjà tué 631 personnes, selon le dernier bilan mercredi soir.

Le gouvernement italien a inclus la messe, les mariages et les funérailles parmi les rassemblements interdits, une mesure « fortement restrictive dont l’acceptation entraîne la souffrance et des difficultés » pour les prêtres et les fidèles, a regretté sur son site la Conférence épiscopale italienne.

La décision est particulièrement symbolique en Italie, dont une immense majorité de la population se dit catholique.

A en croire le panonceau sur la porte de la cathédrale Sant’Andrea à Portogruaro, en Vénétie (nord-est), les interdits sont respectés. Faute de messe proprement dite jusqu’au 3 avril, les fidèles sont appelés « à consacrer un temps raisonnable à la prière et la méditation » en suivant les offices retransmis à la télévision et à la radio.

Les inhumations des défunts ne s’arrêteront pas, les prêtres continueront d’assurer « la bénédiction du corps dans le cimetière », mais « dans la plus stricte intimité » et « sans célébration de messe ou autre liturgie », peut-on lire.

Pour avoir bravé l’interdiction et suivi un cortège funéraire dans une petite ville, une cinquantaine de Siciliens ont reçu des amendes et vont faire l’objet de poursuites.

A Sant’Andrea à Portogruaro, le bénitier a été vidé afin d’éviter toute contagion entre fidèles qui continueraient de s’en humecter le doigt pour faire le signe de croix.

– « On prie seul » –

Pourtant, à l’intérieur sont présents une dizaine de fidèles, dont un homme portant un masque, venus écouter la voix du père Giuseppe Grillo sortant des haut-parleurs alors que le prêtre célèbre la messe depuis la sacristie. A la fin, un autre prêtre donne même la communion, en évitant soigneusement de placer l’hostie directement dans la bouche des fidèles.

« Il faut éviter les rassemblements. Mais la cathédrale est assez grande pour que nous puissions célébrer ce type de messes en garantissant que les personnes soient séparées d’au moins un mètre », explique le père Grillo. « Nous célébrons une messe par jour, à l’intérieur de la sacristie, rien d’autre, pas même les funérailles. J’ai annulé trois baptêmes. Les mariages ce sera en mai, en fonction de la situation ».

Une fidèle, Beatrice Francescato, témoigne: « Pour être honnête, en ce moment, on oublierait presque de prier. Pas de messe le dimanche, pas de cérémonies dans la semaine. On prie seul à la maison. C’est une situation très désagréable. »

« Nous continuons de prier la Vierge Marie, en espérant qu’elle nous aidera parce que le monde traverse un moment difficile », confie une autre paroissienne, Mariagrazia Mazzarotto.

Mercredi, le pape tiendra sa traditionnelle audience hebdomadaire, mais par vidéo diffusée sur internet, depuis sa bibliothèque, et sa « papamobile » restera au garage.

Les fidèles catholiques pourront entrer dans la basilique Saint-Pierre pour prier, mais les touristes et leurs guides trouveront portes closes, jusqu’au 3 avril, « afin d’éviter la diffusion du coronavirus », a expliqué le Saint-Siège.

Le Vatican a également annoncé la fermeture de sa cantine réservée aux employés locaux, instaurant à la place un service de livraison des plats aux différentes institutions affectées par cette mesure.

Joe Biden, improbable archi-favori de la primaire démocrate

Raillé pour ses gaffes et les ratés de sa mémoire, Joe Biden semble pourtant sur le point de décrocher la victoire d’une carrière. Au soir d’une existence marquée par la tragédie, il peut incarner l’espoir des démocrates de faire tomber Donald Trump.

Il aura dû attendre ses 77 ans et sa troisième candidature aux primaires démocrates. Mais après des débuts de campagne difficiles et de premières humiliations dans les urnes, l’ancien vice-président de Barack Obama a signé l’un des retours les plus spectaculaires de l’histoire politique américaine.

Et semble bien parti pour défier le républicain Donald Trump en novembre.

« C’est plus qu’un +come-back+, selon moi », a affirmé Joe Biden après ses nouvelles victoires face à Bernie Sanders dans l’Etat clé du Michigan, ainsi que le Mississippi et le Missouri. « C’est un +come-back+ pour l’âme de la Nation », qu’il a promis de « restaurer » en battant le milliardaire après quatre ans d’âpres divisions.

D’un ton sobre, le candidat modéré, accompagné de son épouse Jill, a de nouveau dédié ses victoires « à tous ceux qui ont été mis à terre, ignorés, laissés pour compte ». Mais en tendant aussi la main, cette fois, à Bernie Sanders et ses partisans.

– Soutien d’ex-candidats –

Se présentant en rassembleur, Joe Biden martèle sans relâche depuis son entrée en lice, en avril 2019, qu’il battra « Donald Trump à plate couture ».

Sauf que ses deux premières cuisantes défaites aux primaires avaient profondément ébranlé ce message de « vainqueur » potentiel, tandis que le sénateur Bernie Sanders, bien plus à gauche, le doublait en position de favori.

Les moqueries sur sa forme et ses dérapages embarrassants –comme lorsqu’il se déclarait candidat « au Sénat »– avaient alors pris un écho décuplé, reprises notamment sur Twitter par Donald Trump, qui le surnomme à l’envi « Joe l’endormi ».

Choix de la raison ou option passionnée: après son retour fracassant opéré en Caroline du Sud, le 29 février, puis son avalanche de victoires lors du « Super Tuesday », le septuagénaire a finalement pris une avance déterminante mardi face au socialiste autoproclamé Bernie Sanders.

Fort du ralliement de nombreux ex-candidats modérés, il a démontré qu’il pouvait aussi bien convaincre les électeurs démocrates noirs que des ouvriers et des femmes. Trois groupes d’Américains qui ont joué un rôle clé dans la victoire de Donald Trump en 2016, certains en s’abstenant, d’autres en décidant de tourner le dos aux démocrates, se sentant ignorés.

– Encore des doutes –

Après plus de trente-cinq ans comme sénateur et huit ans comme bras droit de Barack Obama, Joe Biden devra encore répondre de nombreux chapitres de son épais bilan et faire taire les interrogations sur sa forme.

Il sera, sans doute, la cible des piques des républicains, qui l’accusent sans preuves, Donald Trump en tête, d’être « corrompu » et crient au conflit d’intérêt car son fils Hunter était entré au conseil d’administration d’une compagnie gazière ukrainienne lorsqu’il était vice-président.

C’est d’ailleurs parce qu’il avait demandé à Kiev d’enquêter sur ces liens que Donald Trump a fait l’objet d’une procédure de destitution, les démocrates l’accusant d’avoir utilisé son pouvoir pour salir son rival. Le président américain a été acquitté en février.

Le septuagénaire devra aussi faire face à des interrogations sur son approche « tactile ». S’il a assuré être « désolé d’avoir envahi » l’espace de femmes gênées par ses marques d’affection, il a aussi fermement défendu sa proximité avec les électeurs.

Et chez les stratèges démocrates, on s’inquiète de voir comment ce célèbre gaffeur, qui semble parfois perdre le fil de ses pensées, va pouvoir tenir la distance lors des débats contre Bernie Sanders et, peut-être, le tempétueux Donald Trump.

– Empathie –

Ses deux premières campagnes présidentielles, pour les scrutins de 1988 et 2008, avaient été rapidement avortées, entachées par des faux pas et des accusations de plagiat.

En 2007, il avait été accusé de racisme après avoir qualifié Barack Obama d' »intelligent » et « propre ». Joe Biden avait exprimé ses regrets, et, pas rancunier, le démocrate en avait fait son vice-président.

Une expérience devenue un atout de choix pour Joe Biden, l’ex-président restant extrêmement populaire chez les démocrates.

Son empathie, qui séduit des électeurs touchés par sa vie personnelle marquée par la tragédie, le sert aussi.

Un mois seulement après son élection au Sénat américain, à tout juste 30 ans, il avait perdu en 1972 sa femme Neilia et leur petite fille Naomi dans un accident de voiture.

Un nouveau drame l’avait frappé en 2015, quand son aîné Beau, devenu procureur général du Delaware, fut emporté par un cancer au cerveau.

Biden tend la main à Sanders: « Ensemble, nous battrons Trump »

L’ancien vice-président américain Joe Biden a tendu la main mardi à son rival dans la primaire démocrate Bernie Sanders, qu’il devance désormais confortablement après trois nouvelles victoires, notamment dans l’Etat-clé du Michigan.

« Je tiens à remercier Bernie Sanders et ses partisans pour leur inlassable énergie et leur passion. Nous avons le même but et ensemble, nous battrons Donald Trump », a-t-il lancé dans un discours assez sobre depuis Philadelphie.

Les électeurs démocrates de six Etats étaient appelés à départager mardi les deux candidats à l’investiture démocrate.

Selon les projections des médias américains, Joe Biden est arrivé largement en tête dans le Michigan, le Missouri et le Mississippi.

Les résultats de l’Idaho, du Dakota du Nord et de l’Etat de Washington restent inconnus, mais le sénateur socialiste Bernie Sanders risque d’avoir du mal à se remettre de ces défaites et à rester dans la course.

L’ancien bras droit de Barack Obama, désormais archi-favori s’est gardé de tout triomphalisme. « On dirait que l’on va passer une nouvelle bonne nuit », a simplement commenté Joe Biden, qui avait déjà engrangé une première série de victoires dans 10 des 14 Etats en jeu lors du « Super Tuesday » .

« Nous sommes un pas plus près de ramener la décence, la dignité et l’honneur à la Maison Blanche », a-t-il encore déclaré, en se disant engagé dans une « bataille pour l’âme » de l’Amérique.

Reprenant le crédo qu’il martèle depuis son entrée en lice, ce vétéran de la vie politique, de 77 ans, a estimé que l’élection se jouerait sur des valeurs.

« Nous avons besoin d’un leader présidentiel honnête, confiant, digne de confiance et stable. D’un leader rassurant », a encore ajouté ce candidat modéré.

Bernie Sanders ne s’exprimera pas avant mercredi, selon les médias.

A la demande des autorités sanitaires, les deux septuagénaires avaient dû renoncer à tenir des meetings à Cleveland dans la soirée, en raison du nouveau coronavirus.

Venezuela: la police disperse une manifestation de l’opposition

La police vénézuélienne a dispersé mardi à Caracas une manifestation de l’opposition contre Nicolas Maduro à laquelle avait appelé Juan Guaido, dans l’espoir de raviver le mouvement de protestation contre le président socialiste et exiger une nouvelle élection présidentielle.

En début de soirée, l’opposition a dénoncé l’arrestation d’un député d’opposition, Renzo Prieto, appréhendé par les FAES, un corps controversé de la police vénézuélienne, quelques heures après la manifestation. De même source, deux autres députés d’opposition ont été brièvement arrêtés puis relâchés.

Plus tôt dans la journée, quelques milliers de manifestants anti-Maduro s’étaient élancés d’une place dans l’Est de Caracas pour rejoindre l’Assemblée nationale, avec Juan Guaido en tête de cortège.

Mais peu de temps après le début de la manifestation, la Police nationale bolivarienne (PNB) a bloqué le cortège. Juan Guaido a tenté d’entamer un dialogue avec les agents qui ont alors tiré du gaz lacrymogène pour disperser la manifestation, selon un journaliste de l’AFP.

Certains manifestants ont répondu en lançant des pierres et des bâtons en direction des agents.

« Tout cela me fait mal, mais je me sens encore plus valeureuse, j’ai encore plus envie de continuer à protester », a dit à l’AFP Katherine Croquer, une manifestante de 54 ans.

Les manifestants comptaient se diriger vers le siège du Parlement pour exiger une nouvelle élection présidentielle et faire entendre leurs revendications sociales et économiques.

Le Parlement unicaméral est l’unique organe aux mains de l’opposition au président Maduro, mais ses décisions sont systématiquement annulées par la Cour suprême.

Juan Guaido a été réélu à sa tête en janvier avec les seules voix de l’opposition, mais le pouvoir chaviste n’a pas reconnu cette élection.

-« Selfie »-

Empêchés de s’approcher du Parlement, Juan Guaido, des élus d’opposition et des sympathisants se sont finalement rendus sur une place à quelques centaines de mètres de là et ont organisé une séance de l’Assemblée nationale. Les élus ont approuvé un texte qui exige la tenue d’une nouvelle élection présidentielle, deux ans après le scrutin « frauduleux », selon eux, qui a permis à Nicolas Maduro de se maintenir au pouvoir.

« N’ayez pas peur », a lancé Juan Guaido à la foule.

Au même moment, plusieurs milliers de personnes s’étaient réunies à l’appel du pouvoir pour une « contre-manifestation » dans le centre de Caracas avec comme mot d’ordre la « défense de la souveraineté » du Venezuela face aux « agressions » économiques du président américain Donald Trump.

Washington, principal soutien de Juan Guaido à l’international, a pris un éventail de sanctions pour accentuer la pression sur Nicolas Maduro que l’opposant tente, en vain, d’évincer depuis un peu plus d’un an.

Diosdado Cabello, numéro deux du PSUV, le parti présidentiel, a ironisé sur les élus d’opposition dont la manifestation a été dispersée par la police. « Ils ont commis des actes de violence pour une photo. Ils pensent qu’en prenant un +selfie+ ils vont réussir à renverser le gouvernement révolutionnaire », a-t-il dit.

Avec cette nouvelle mobilisation, Juan Guaido, que près d’une soixantaine de pays reconnaissent comme président par intérim, comptait relancer le mouvement de protestation contre le chef de l’Etat qu’il qualifie de « dictateur ».

Ces derniers mois, ses appels à manifester ont rencontré un écho bien moindre que début 2019, lorsque des dizaines de milliers de Vénézuéliens se mobilisaient chaque semaine.

Il s’agit de la première manifestation d’envergure de l’opposition depuis le retour mi-février de Juan Guaido d’une tournée internationale au cours de laquelle Donald Trump et le président français Emmanuel Macron, entre autres, lui ont réitéré leur soutien.

De son côté, Nicolas Maduro a toujours l’appui de la Russie, de Cuba, de la Chine et de l’état-major de l’armée, clef de voûte du système politique vénézuélien.

« La situation (du Venezuela) est catastrophique. Les droits des travailleurs ne sont pas respectés, nous exigeons que cela change », a déclaré Ofelia Rivera, 58 ans, une éducatrice à la retraite interrogée par l’AFP avant le début de la manifestation à Caracas.

Le Venezuela traverse la pire crise de son histoire récente, avec, entre autres maux, des pénuries de médicaments et une hyperinflation qui a atteint 9.585,5% en 2019, selon la Banque centrale.

D’après la Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme Michelle Bachelet, 4,9 millions de personnes ont « abandonné » le Venezuela, qui compte 30 millions d’habitants, depuis fin 2015.

Kenya : l’unique girafe blanche femelle tuée par des braconniers

L’unique girafe blanche femelle répertoriée au Kenya, et son petit ont été tués par des braconniers dans une réserve de l’est du pays, a annoncé mardi une association locale. Ces animaux extrêmement rares n’ont été signalés dans aucun autre pays du monde.

Les corps des deux girafes aux peaux blanches en raison d’une pigmentation rarissime ont été trouvés « à l’état de squelette après avoir été tués par des braconniers » dans une réserve de Garissa, dans l’est du Kenya.

Après leur disparition, il ne reste en vie qu’une seule girafe blanche, un mâle, dont la mère était la femelle abattue par des chasseurs, a indiqué dans un communiqué l’association locale Ishaqbini Hirola, qui gère la réserve.

« Nous sommes la seule communauté au monde qui s’occupe de préserver la girafe blanche », a déclaré Mohammed Ahmednoor, le directeur de l’association.

« Cette tuerie est un coup dur pour les mesures importantes prises par la communauté pour préserver des espèces rares, et un appel à la vigilance pour un soutien continu aux efforts de protection », a-t-il estimé.

La girafe blanche a suscité un grand intérêt en 2017, lorsqu’elle a été aperçue pour la première fois dans la réserve kényane et lorsqu’elle a donné naissance à deux petits, le dernier né en août 2019.

Ces girafes blanches présentent les caractéristiques non pas de l’albinisme mais d’une condition génétique appelée leucisme, due à un déficit des cellules pigmentaires, que l’on retrouve notamment chez certains tigres blancs.

Deuxième cas mondial de guérison d’un patient atteint du VIH

Un patient atteint du VIH, ayant bénéficié d’une greffe de cellules souches, est désormais « guéri », ce qui en fait le deuxième au monde à se remettre de cette maladie, ont annoncé ses médecins mardi.

Près de dix ans après le premier cas confirmé d’un patient souffrant du VIH et qui s’en était débarrassé, ce deuxième cas, connu comme « le patient de Londres », n’a manifesté aucun signe du virus depuis 30 mois malgré l’arrêt des traitements antirétroviraux, selon les résultats publiés dans la revue The Lancet HIV.

En mars 2019, le professeur Ravindra Gupta, de l’université de Cambridge, avait annoncé que cet homme diagnostiqué séropositif en 2003 était en rémission, n’ayant montré aucun signe d’atteinte du virus depuis 18 mois.

Le médecin avait toutefois alors appelé à la prudence, insistant sur le terme de rémission et non de guérison, demandant plus de temps.

Un an plus tard, son équipe a franchi ce pas. « Nous suggérons que nos résultats représentent une guérison du VIH », écrivent-ils, après avoir testé des échantillons de sang, tissus, sperme.

« Nous avons testé un nombre assez considérable de lieux où le virus aime se cacher et pratiquement tout était négatif », hormis quelques restes « fossiles » de virus non actif, a expliqué à l’AFP le Pr Gupta. « C’est difficile d’imaginer que toute trace d’un virus qui infecte des milliards de cellules a été éliminée », s’est-il réjoui.

Comme le « patient de Berlin », l’Américain Timothy Ray Brown considéré guéri en 2011, ce « patient de Londres » a subi une greffe de moelle osseuse pour traiter un cancer du sang, et reçu ainsi des cellules souches de donneurs porteurs d’une mutation génétique rare qui empêche le VIH de s’implanter, le CCR5.

Le fait que la guérison du patient de Berlin soit restée isolée pendant près de dix ans laissait penser à certains que ce n’était qu’un coup de chance.

« Nos conclusions montrent que le succès de la transplantation de cellules souches comme traitement du VIH, pour la première fois rapportée il y a 9 ans pour le patient de Berlin, peut être reproduite », estiment les chercheurs qui espèrent désormais d’autres succès.

« D’autres patients ont bénéficié d’un traitement similaire, mais aucun n’est aussi loin dans la rémission (…). Il y en aura probablement d’autres, mais cela prendra du temps », a commenté le Pr Gupta.

– Procédure lourde et risquée –

En attendant, le patient de Londres a décidé de révéler cette semaine son identité dans un entretien au New York Times. « Je veux être un ambassadeur d’espoir », a expliqué Adam Castillejo, 40 ans, qui a grandi à Caracas, au Venezuela.

Mais les chercheurs reconnaissent que pour l’instant leur méthode n’est pas une solution pour les millions de personnes qui vivent avec la maladie dans le monde et la contrôlent grâce aux antirétroviraux à prendre à vie.

La procédure utilisée pour les deux patients guéris est très lourde et risquée, posant des questions « éthiques », souligne le Pr Gupta.

« Il faut mettre en balance le taux de mortalité de 10% pour une transplantation de cellules souches et le risque de mort si on ne fait rien », selon lui.

« Un travail tel que celui-là est important pour le développement de stratégies de traitement qui pourraient être applicables plus largement », a toutefois commenté le Dr Andrew Freedman, de l’université de Cardiff, pas impliqué dans l’étude.

D’autres scientifiques sont en revanche plus prudents. « Le patient de Londres est-il vraiment guéri ? », s’est interrogée Sharon Lewin, de l’université de Melbourne. « Les données (…) sont bien entendu excitantes et encourageantes, mais au final, seul le temps nous le dira », a-t-elle noté, estimant qu’il faudrait « plus qu’une poignée de patients guéris du VIH » pour évaluer la « probabilité d’une reprise tardive et inattendue d’une réplication du virus ».

Le « patient de Londres » va d’ailleurs continuer à être testé régulièrement pour surveiller une possible réémergence du virus.

Près de 38 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde, mais seules 62% bénéficient d’une trithérapie. Près de 800.000 personnes sont mortes en 2018 d’affections liées au VIH. L’apparition de formes de VIH résistantes aux médicaments représente aussi une préoccupation croissante.

MH17: la Russie tente « activement d’entraver » l’enquête, selon les procureurs néerlandais

La Russie tente « activement d’entraver » l’enquête sur le crash du vol MH17, ont dénoncé mardi les procureurs néerlandais, au deuxième jour du procès aux Pays-Bas de trois Russes et un Ukrainien accusés d’avoir provoqué l’explosion de l’appareil au-dessus de l’Ukraine en 2014.

Les procureurs ont notamment accusé la Russie de tentatives de piratage informatique à l’encontre d’enquêteurs et ont évoqué la crainte que Moscou n’essaye de retrouver des témoins.

« Il y a des indications claires que les services de sécurité russes tentent activement d’entraver les efforts pour établir la vérité derrière le crash du vol MH17 », a déclaré le procureur Thijs Berger devant les juges du tribunal de Schiphol, en banlieue d’Amsterdam.

Le Boeing 777 de la compagnie Malaysian Airlines, parti d’Amsterdam pour Kuala Lumpur le 17 juillet 2014, a été touché en plein vol par un missile BUK de conception soviétique au-dessus de la zone de conflit armé avec les séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine. Les 298 personnes à bord, parmi lesquelles 196 Néerlandais, ont été tuées.

« Les autorités britanniques et néerlandaises ont déterminé que des agents russes du GRU (le renseignement militaire russe) étaient impliqués dans des tentatives de piratage des systèmes des autorités d’enquête malaisiennes », a affirmé M. Berger.

Le procureur a également mentionné des tentatives de piratage visant le Bureau néerlandais d’enquête pour la sécurité (OVV), qui coordonnait initialement l’enquête sur la catastrophe. Pour lui, « ces informations jettent une ombre » sur le procès, qui s’est ouvert lundi malgré l’absence des suspects.

Les Russes Sergueï Doubinski, Igor Guirkine et Oleg Poulatov, ainsi que l’Ukrainien Leonid Khartchenko, quatre hauts gradés des séparatistes pro-russes de l’est de l’Ukraine, sont poursuivis par le parquet néerlandais pour meurtre et pour avoir délibérément causé le crash de l’avion.

Ces premiers suspects inculpés dans l’affaire sont accusés d’avoir convoyé le système de missiles anti-aériens BUK, avant que celui-ci ne soit tiré par d’autres personnes encore non identifiées.

Doubinski, Guirkine et Khartchenko seront jugés par contumace, tandis que Poulatov a choisi d’être représenté par un avocat néerlandais. Ils encourent la perpétuité.

Boudewijn van Eijck, l’avocat de Poulatov, a rejeté mardi les accusations des procureurs, qualifiant leurs remarques sur la sécurité des témoins de « prématurées ».

– « Craindre pour leur vie » –

L’équipe internationale d’enquêteurs, dirigée par les Pays-Bas, a établi en mai 2018 que l’avion avait été abattu par un missile provenant de la 53e brigade antiaérienne russe basée à Koursk (Sud-Ouest).

A la suite de ces révélations, les Pays-Bas et l’Australie, dont 38 citoyens ont péri dans le drame, ont ouvertement imputé à la Russie la mort de leurs ressortissants. Moscou a toujours nié avec véhémence toute implication et a rejeté la faute sur Kiev.

« Le tribunal a clairement indiqué que le gouvernement russe menait une campagne de désinformation. Et nous devrons être préparés à beaucoup plus de distorsion de la vérité au fur et à mesure que l’affaire avance », a regretté mardi auprès des journalistes Anton Kotte, qui a perdu son fils, sa belle-fille et son petit-fils dans la catastrophe.

Selon les procureurs néerlandais, il existe un « véritable risque pour la sécurité des témoins » dans cette enquête, dont certains donneront des témoignages anonymes.

« L’utilisation des services de sécurité russes pour découvrir l’identité des témoins dans cette enquête est un scénario très réel. Ces agences ont la capacité d’intercepter les communications et de surveiller les déplacements des gens », a avancé M. Berger.

« Plusieurs témoins dans cette enquête disent craindre pour leur vie si leur identité venait à être révélée », a-t-il expliqué.

Des « mesures spécifiques » ont notamment dû être prises pour protéger un témoin ayant déclaré que des militaires russes se trouvaient avec le missile BUK sur le site du lancement le jour du crash du vol MH17, ont ajouté les procureurs.

De nouvelles audiences en l’affaire reprendront le 23 mars.

Coronavirus: l’Espagne prend des mesures pour ne pas suivre le chemin de l’Italie

Interdiction des vols venant d’Italie, matches de foot à huis clos, écoles fermées: prise de court par le triplement des cas depuis dimanche, l’Espagne a multiplié mardi les mesures face à la propagation du coronavirus.

Avec 1.622 cas et 35 morts selon le dernier bilan communiqué mardi à la mi-journée par le ministère de la Santé, l’Espagne est désormais l’un des pays les plus touchés du monde et le plus touché en Europe derrière l’Italie. Dimanche, elle ne recensait que 589 cas.

Face à cette croissance exponentielle de la contagion, le gouvernement du socialiste Pedro Sanchez, qui avait adopté jusqu’ici une position plutôt attentiste, est passé à la vitesse supérieure mardi.

« Nous aurions aimé ne pas prendre certaines mesures et nous sommes conscients qu’elles altèrent le quotidien des gens. Mais croyez-moi, elles sont nécessaires », a insisté le ministre de la Santé, Salvador Illa à l’issue du conseil des ministres.

« Nous travaillons pour ne pas arriver à la situation italienne, toutes les mesures que nous prenons sont destinées » à cela, a-t-il ajouté. L’Italie, pays le plus touché après la Chine, a prié lundi soir ses 60 millions d’habitants de rester chez eux pour freiner l’épidémie.

– Le foot à huis clos –

Madrid a ainsi interdit du 11 au 25 mars tous les « vols directs entre tout aéroport situé en Italie et tout aéroport situé en Espagne ». Les deux pays sont très liés, plus de 240.000 Italiens vivent en Espagne et le trafic aérien en provenance d’Italie représente 9% du trafic international en Espagne.

Le gouvernement a par ailleurs ordonné que toute manifestation sportive se joue à huis clos dans le pays, y compris les matchs du championnat de football de première division dont les deux prochaines journées auront lieu sans public dans les tribunes.

Il a également incité les entreprises à aménager les horaires de leurs salariés ou les autoriser à travailler de chez eux. Le géant bancaire Santander a notamment demandé à ses employés madrilènes de faire du télétravail.

Dans les régions les plus touchées comme celle de Madrid, qui est de loin la plus affectée avec près de 800 cas et 21 morts, des mesures supplémentaires ont été prises comme la suspension de tous les évènements publics dans des espaces fermés regroupant plus de 1.000 personnes.

La région de Madrid, qui compte 6,5 millions d’habitants, avait annoncé dès lundi soir la fermeture de toutes les écoles et universités à partir de mercredi et pour deux semaines. Elle va aussi désinfecter tous les jours les wagons du métro, les bus et les trains de banlieue.

Des mesures similaires concernant les écoles ont été prises à Vitoria, la capitale de la région du Pays basque, et dans la région de la Rioja (nord), les deux autres zones du pays les plus affectées.

Le parlement espagnol a annoncé avoir repoussé d’une semaine sa prochaine séance plénière alors que l’un des dirigeants du parti d’extrême droite Vox, Javier Ortega-Smith, a été testé positif au coronavirus.

– Queues dans les supermarchés –

Dans ce contexte, les supermarchés ont été assaillis dans la région de Madrid par des habitants faisant des réserves.

« On est à bout, depuis hier soir, c’est massif », a confié à l’AFP, Clara Badena, une employée d’un supermarché Mercadona du nord de Madrid où certains rayons (conserves, papier toilette) étaient déjà à moitié vides.

Face à cette razzia, l’association représentant la grande distribution (ANGED) a assuré que l’approvisionnement des magasins était « garanti » et qu’il n’était « pas nécessaire de procéder à un stockage disproportionné » de denrées.

Le gouvernement espagnol a prévu de se réunir de nouveau jeudi pour analyser la situation et prendre de nouvelles mesures si nécessaire. Pedro Sanchez rencontrera lui ce jour-là les syndicats et les organisations patronales pour discuter d’un « plan d’urgence » économique sur lequel le gouvernement n’a donné aucun détail.

mg/pmr/sg

La vie brisée des femmes stérilisées à leur insu en Afrique du Sud

La terre s’est dérobée sous ses pieds il y a quatre ans, le jour où Bongekile Msibi, mère sud-africaine d’une adolescente de 15 ans, a appris la raison pour laquelle elle n’arrivait pas à avoir un deuxième enfant: elle n’avait plus d’utérus.

« Je ne comprenais pas ce que le médecin disait », se rappelle la mère de 32 ans, tentant de retenir ses larmes. « Comment était-ce possible ? J’avais un enfant, cela voulait dire que j’avais un utérus. »

Bongekile Msibi s’est alors lancée corps et âme dans une enquête pour comprendre l’inconcevable.

Ses investigations l’ont conduite naturellement à l’hôpital Chris Hani Baragwanath, un immense établissement public de Johannesburg où elle a donné naissance à sa fille en 2005.

Là, en 2016, un obstétricien lui a expliqué nonchalamment que son utérus avait été enlevé dans la foulée de son accouchement.

Bongekile Msibi fait partie des 48 femmes victimes de stérilisation forcée entre 2002 et 2015 en Afrique du Sud, selon une enquête publiée fin février.

Dans ce rapport accablant, la Commission pour l’égalité des sexes en Afrique du Sud (CGE) dénonce le « traitement cruel, barbare ou inhumain et dégradant » infligé à des femmes, toutes noires, au moment de leur accouchement par césarienne dans des hôpitaux publics du pays.

– « Ils se prennaient pour Dieu » –

La plupart étaient séropositives. Pas Bongekile Msibi. Mais elle avait 17 ans au moment de la naissance de son unique fille. Mineure, donc vulnérable.

Des personnels de santé « ont profité de la situation, ils se prennaient pour Dieu », dénonce la jeune femme dans un entretien accordé à l’AFP. « Ils se croyaient habilités à faire ce que bon leur semble, au moment où (…) on était allongée inerte ».

En 2016, l’obstétricien lui a affirmé que la stérilisation avait été décidée pour lui sauver la vie. Bongekile Msibi n’y croit pas.

Les lois sud-africaines interdisent la stérilisation de force, mais les médecins n’ont pas besoin de consentement du patient quand sa vie est en danger.

Dans la plupart des cas recensés par la CGE, raconte Tamara Mathebula, à la tête de cette commission, les professionnels de santé ont expliqué à leurs patientes que l’opération était nécessaire « parce que vous êtes séropositive, parce que vous avez la tuberculose, parce qu’on pense que vous avez trop d’enfants… et regardez-vous, vous êtes pauvre, on ne peut pas vous laisser continuer ».

Mais « ce ne sont pas des raisons pour (…) ligaturer des trompes ou enlever l’utérus », s’offusque Tamara Mathebula.

Des femmes auraient également été menacées de ne pas être soignées si elles ne signaient pas les documents autorisant l’opération irréversible, d’autres ont été contraintes de les signer dans des moments d' »extrême douleur », selon la CGE.

Mais pour Bongekile Msibi, il n’y a pas eu de consentement signé en 2005.

– Mutilée –

Déterminée à faire la lumière sur son infertilité, la consultante a engagé une longue bataille: elle a écrit aux autorités sanitaires, à des responsables politiques et organisé un sit-in.

Les autorités « manquent d’empathie. Elles sont totalement insensibles. Elles se comportent comme si elles venaient d’enlever un ongle et qu’il allait repousser », estime Bongekile Msibi, depuis son salon coquet d’une banlieue de Johannesburg.

« Je ne peux pas simplement m’asseoir et accepter de ne pas avoir d’utérus. Je ne sais même pas pourquoi », ajoute-t-elle, « j’ai ce sentiment de ne pas être entière ».

Après la publication du rapport de la CGE, le ministère de la Santé a accepté de rencontrer prochainement les plaignantes. Maigre consolation pour les victimes.

Sur ce sujet sensible, le ministère est peu loquace. « On attend une réponse de la CGE en vue d’un communiqué conjoint », balbutie sa porte-parole, Lwazi Manzi.

Les femmes stérilisées de force galèrent dans leur vie privée. Certaines ont été « abandonnées par leur mari car elles n’étaient plus utiles en termes de reproduction », explique Tamara Mathebula.

Peu après la découverte de son infertilité, Bongekile Msibi et son partenaire se sont séparés. « Il voulait des enfants, raconte la jeune femme. Je ne pouvais pas lui en donner ».

Le Michigan aux urnes, Biden espère creuser l’écart sur Sanders

Plusieurs millions d’Américains étaient appelés aux urnes mardi dans le Michigan et cinq autres Etats pour un nouveau rendez-vous des primaires démocrates qui pourrait permettre à Joe Bien de prendre un avantage décisif sur Bernie Sanders.

« Cela va être une MAUVAISE journée pour Bernie-le-dingue », a prédit Donald Trump qui suit avec attention, tweets moqueurs à l’appui, le processus qui désignera son adversaire pour l’élection du 3 novembre.

Fort de son spectaculaire rebond il y a une semaine et de sondages flatteurs, Joe Biden, 77 ans, ancien vice-président de Barack Obama, espère creuser son avance face au sénateur du Vermont, âgé lui de 78 ans.

Si son élan se concrétise, les primaires démocrates, largement éclipsées par l’épidémie du coronavirus, pourraient se décanter très rapidement.

Idaho, Mississippi, Missouri, Dakota du Nord, Washington: cinq autres Etats sont appelés aux urnes mais tous les yeux sont rivés vers le Michigan où Bernie Sanders où avait créé la surprise face à Hillary Clinton lors des primaires de 2016.

Au-delà des 125 délégués en jeu, le résultat dans cet Etat industriel de la région des Grands Lacs aura une forte dimension symbolique.

Si Bernie Sanders, qui prône une « révolution politique », parvient à renouveler l’exploit, il peut espérer se relancer. Mais si, comme le prédisent les sondages, il est vaincu dans cet Etat, il pourrait devoir dire adieu à ses rêves de Maison Blanche.

A Detroit, plus grande ville du Michigan, nombre d’électeurs avaient bravé le froid et la nuit pour se rendre tôt aux urnes lors de ce « Mini Tuesday », comme l’ont qualifié des médias américains en référence au « Super Tuesday » du 3 mars.

Cecilia Covington, artiste de 61 ans, première à voter dans l’école primaire de Chrysler, dans le centre de la ville, affichait un soutien sans faille à Biden.

« Nous devons chasser le 45e (président) du pouvoir », explique-t-elle à l’AFP, évoquant Donald Trump. « Je pense que Biden porte une vision et une promesse de rassemblement », ajoute-t-elle, se disant convaincue qu’il est le mieux placé dans le camp démocrate pour battre le milliardaire républicain.

– « Nouvelle génération de dirigeants » –

A l’exception d’Elizabeth Warren qui n’a pas fait connaître sa préférence, les anciens grands candidats se sont ralliés à l’ancien vice-président: Michael Bloomberg, Pete Buttigieg, Amy Klobuchar, Kamala Harris et Cory Booker.

Tous jugent qu’il est le plus à même de battre Donald Trump et appellent les démocrates au « rassemblement » pour éviter que le milliardaire républicain n’emporte un second mandat de quatre ans.

Le programme de gauche de Bernie Sanders, sur l’assurance maladie ou la gratuité des études, est perçu comme « révolutionnaire » aux Etats-Unis et l’establishment démocrate craint qu’il n’effraie les électeurs centristes.

A la veille du scrutin, « Bernie » et « Joe » ont sillonné le Michigan s’attachant à marquer leurs différences mais se gardant d’attaques trop frontales. L’un et l’autre se sont engagés à soutenir le vainqueur de la compétition contre Donald Trump, cible de leurs principales piques.

Conscient que son âge pouvait être un handicap, même si son adversaire est plus âgé que lui, Joe Biden s’est présenté comme un « pont » vers une nouvelle génération de dirigeants démocrates.

« Il y a une nouvelle génération de leaders que vous voyez derrière moi. Ils sont l’avenir de ce pays », a-t-il lancé en présence de Kamala Harris, Cory Booker et Gretchen Whitmer, la gouverneure du Michigan qui lui a apporté son soutien.

De son côté, Bernie Sanders, qui l’a remporté dans cet Etat face à Hillary Clinton lors de la primaire de 2016, a participé à une table-ronde sur le nouveau coronavirus, qui a contaminé plus de 600 personnes et fait au moins 26 morts aux Etats-Unis.

Epinglant les déclarations selon lui « stupides » du président sur le virus, il en a profité pour vanter ses promesses d’assurance maladie universelle qui donnerait à chaque Américain « un droit à la santé ».

Depuis le début de cette crise sanitaire, des écoles ont été fermées et de nombreux Américains placés en quarantaine, mais la campagne présidentielle n’a pas été affectée.

bur-jca/leo

Pakistan : « attaques coordonnées » contre la marche des femmes d’Islamabad, dénoncent ses organisatrices

Les organisatrices de la journée internationale des femmes d’Islamabad ont dénoncé mardi des « attaques coordonnées » d’islamistes contre la manifestation dimanche dans la capitale pakistanaise, qui avait été visée par des pierres, briques et autres bâtons.

« C’était une attaque coordonnée des forces patriarcales et de la droite (religieuse) contre le mouvement des femmes », a lancé Ismat Shahjahan, l’une des organisatrices de l’événement, lors d’une conférence de presse. « Nous demandons une enquête judiciaire indépendante », a-t-elle poursuivi.

La police d’Islamabad a ouvert dimanche soir une enquête contre 35 suspects, dont les organisateurs d’une contre-manifestation islamiste, pour avoir stimulé « les sentiments religieux » de leurs partisans afin qu’ils attaquent les participants de la Journée de la femme.

Ses organisatrices estiment toutefois que la police a volontairement minimisé la gravité de l’attaque qu’elles ont subi et minoré les chefs d’accusations retenus contre les suspects.

Une fine clôture, protégée par un mince cordon policier, avait été installée entre les deux rassemblements. D’un côté, de nombreux hommes et quelques femmes voilées proclamant leur « liberté de vivre selon la charia ».

De l’autre, une manifestation mixte et colorée réclamant plus de droits pour les femmes, dans un pays où les violences à leur encontre sont multiples. Les violences étaient survenues après plusieurs heures de coexistence de ces manifestations.

Les femmes se battent depuis des décennies pour leurs droits les plus élémentaires au Pakistan, où les violences commises contre elles sont « omniprésentes et insolubles », selon la Commission nationale des droits de l’homme.

Une grande partie de la société vit sous un code patriarcal permettant l’oppression des femmes qui tentent de s’en affranchir, en choisissant par exemple leur mari ou en travaillant hors de la maison.

Des centaines de Pakistanaises sont ainsi tuées chaque année, souvent par des proches, pour avoir insulté leur « honneur », selon des organisations de défense des droits de l’Homme.

Les opposants aux marches des femmes avaient tenté de les faire interdire, en vain, par la justice, à Islamabad et Lahore, la grande ville de l’Est, où des centaines d’entre elles se sont rassemblées dimanche.