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Slovaquie: Igor Matovic, leader bouillonnant de l’opposition

Lancé à fond dans la dénonciation de la corruption des élites en Slovaquie, l'auto-proclamé "homme du peuple" Igor Matovic, 46…

Lancé à fond dans la dénonciation de la corruption des élites en Slovaquie, l’auto-proclamé « homme du peuple » Igor Matovic, 46 ans, est un homme politique versatile et bouillonnant, qui bouscule l’ordre établi.

« Nous chercherons à former le meilleur gouvernement que la Slovaquie ait jamais eu, avec l’aide des autres leaders de l’opposition démocratique », a-t-il dit aux journalistes à l’annonce des résultats du sondage sortie des urnes, selon lesquels un électeur sur quatre avait voté pour son parti OLaNO (Gens ordinaires et personnalités indépendantes).

Ses partisans voient en lui un non-conformiste doué pour l’autopromotion, tandis que pour ses adversaires l’homme politique est imprévisible, adorant les feux de la rampe et voulant tout contrôler.

Après des études de gestion de finances, Matovic, marié et père de deux filles, avait fondé une maison d’édition qui a bien grandi et contrôle aujourd’hui des dizaines de journaux régionaux.

Il avait aussi possédé un patrimoine immobilier important dans sa ville natale de Trnava, dans l’ouest de la Slovaquie.

Quand il est entré en politique il y a une dizaine d’années, il a transféré tous ses biens et affaires, estimés à plusieurs millions d’euros, à sa femme Pavlina.

Il a fondé alors son mouvement baptisé Gens ordinaires et personnalités indépendantes pour combattre la corruption dans la fonction publique. Mais, après avoir obtenu plusieurs sièges au Parlement, il a vu plusieurs députés quitter sa formation pour cause de conflits internes.

« Il dirige l’OLaNO comme un dictateur », a affirmé lors d’un débat télévisé Michal Truban, chef du parti libéral Slovaquie progressiste et partenaire de coalition potentiel.

Mais, comme pour démentir cette observation, Matovic a mis à la tête de la liste OLaNO un enseignant peu connu, et a réservé la dernière place pour lui-même.

OLaNO a attiré plusieurs candidats hauts en couleurs et populaires, dont un joueur de tennis professionnel et un comédien.

– Singeries politiques –

Les critiques de Matovic ont souvent accusé l’ancien patron de presse d’aimer trop les caméras et de transformer les débats parlementaires télévisés en one-man show.

Certes, il a souvent pratiqué les effets spéciaux en politique. En 2013, il a apporté au Parlement une silhouette en carton du Premier ministre Robert Fico, accusant le chef du parti au pouvoir Smer-SD (gauche) d’être trop proche d’oligarques locaux. « Il a offert la Slovaquie aux riches », pouvait-on lire sur la figure en carton.

Fico a dû démissionner en 2018 après l’assassinat du journaliste Jan Kuciak, tué par balles alors qu’il enquêtait sur la corruption dans les hautes sphères.

Il est aussi arrivé à Matovic d’arborer au Parlement une chemisette avec l’inscription « Fico défend les voleurs ».

Il a eu recours à une tactique semblable en se montrant en direct sur Facebook en train de placer à Cannes (France), sur la clôture d’une villa, des panneaux la déclarant « propriété de la République slovaque » et accusant le propriétaire, un ex-ministre Smer-SD, de frauder les contribuables.

« Je veux faire de la politique comme je le sens, et pas de manière correcte », a-t-il dit au quotidien Dennik N, tout en admettant craindre que ses gestes ne le fassent passer « pour un clown ».

– « Imprévisible » –

Ses amis et des analystes le considèrent comme un homme politique doué, mais difficile.

Le décrivant à l’AFP sous le couvert d’anonymat, un ancien collaborateur de Matovic le qualifie de « phénomène ». « C’est un communicant extrêmement habile. Il est effréné et sincère – parfois trop sincère », dit-il.

« Sa force, c’est son instinct politique et son don pour le marketing politique », pense l’analyste Juraj Marusiak. Cependant, « son caractère imprévisible fait de lui un partenaire problématique ».

« Il est bon pour présenter des problèmes complexes d’une manière très simple », a dit à l’AFP l’analyste de Bratislava Pavol Babos « Mais il est toujours difficile de prévoir s’il tiendra les promesses qu’il fait ».

A l’approche des législatives, Matovic a lancé sur internet un sondage, encourageant les gens à choisir la politique du futur gouvernement en établissant un ordre de priorités parmi les sujets proposés.

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