En Bosnie, l’immense désarroi des parents d’enfants handicapés

Des photos montrant des enfants handicapés attachés au radiateur ont choqué récemment la Bosnie mais surtout mis en lumière le désarroi de familles abandonnées par l’Etat, contraintes de se débrouiller seules ou de les placer dans des établissements indignes.

Après la publication en novembre par Sabina Cudic, députée de l’opposition, de clichés d’enfants aux mains ligotées dans un centre spécialisé proche de Sarajevo, le parquet a ouvert une enquête et son directeur a été limogé.

Dans ce pays de 3,5 millions d’habitants, l’un des plus pauvres d’Europe, environ 3.000 mineurs vivent dans ce genre d’établissements, selon l’ONG Sumero, spécialisée dans l’inclusion. Ils sont « l’ultime solution » pour des parents à bout, livrés à eux mêmes.

Le frère de Muamer Kulelija souffre de problèmes mentaux et habite dans l’établissement incriminé depuis une vingtaine d’années. L’enquête du parquet, qui porte aussi sur les présumés détournements de fonds, n’est pas terminée mais pour Muamer, les problèmes du centre tiennent en particulier au manque de personnel compétent.

« Quand je réagissais, mettant en cause la compétence du personnel, on menaçait de mettre mon frère à la porte », raconte Muamer, 41 ans, à l’AFP.

D’après la presse locale, seule une trentaine d’employés, sur 150 au total, travaillaient directement auprès des 350 enfants du centre.

En Bosnie, les enfants souffrant de troubles du développement « naissent, grandissent, vivent et meurent isolés, en marge » de la société, dénonce Aleksandra Ivankovic, experte judiciaire pour les droits des personnes handicapées.

– Pas de chiffres –

Il n’existe aucune estimation officielle du nombre d’enfants handicapés en Bosnie mais les autorités ont promis un registre.

Les parents voudraient que l’Etat partage le fardeau afin de pouvoir garder leur enfant auprès d’eux.

Mirsada Begovic, 52 ans, lutte depuis des années, avec d’autres mères, pour l’ouverture de centres de jour où les enfants pourraient être admis durant leurs heures de travail. Aucune structure de ce type n’existe à Sarajevo.

Cette mère passe 24 heures sur 24 avec son fils Ilhan, 17 ans, atteint de graves troubles moteurs et cognitifs.

Ilhan n’a jamais parlé. S’il parvient aujourd’hui à faire quelques pas, c’est grâce à la détermination de sa mère et à des heures d’exercices quotidiens.

« Nous n’avons aucun soutien public. Personne ne vient en aide aux parents et ils finissent par sombrer », dit Mme Begovic.

Son mari gère un petit magasin de batteries de voiture et ils ont pu financer des traitements pour Ilhan.

– « Entraînés à dire +non+ » –

Mais beaucoup de parents n’ont pour survivre qu’une allocation mensuelle d’enfant handicapé allant de 150 à 400 marks bosniens (75 à 200 euros).

« L’épuisement mental, physique et financier » des parents « délaissés par l’Etat » a pour conséquence la séparation de plus de 70% des couples concernés, constate Ines Kavalec, présidente de l’association « Donnez-nous une chance ».

Son association fournit un soutien psychologique et une aide concrète à 600 familles.

« Les parents ont la possibilité de nous confier leur enfant le temps d’une consultation médicale, pour aller au cinéma, voir un ami, faire du sport », dit cette mère d’un adolescent atteint de paralysie cérébrale.

Après le choc subi en apprenant l’autisme de son fils, Saudin Hrnjic a rapidement compris les limites du système public. Il « ne vous propose rien » sinon un diagnostic, résume cet homme de 49 ans.

Il a délaissé sa carrière de designer industriel pour s’occuper d’Anur, sept ans.

« Le manque de personnel hospitalier compétent est effarant ». Très vite les parents « commencent à devenir fous » en côtoyant le personnel administratif entraîné à dire +non+ », raconte-t-il.

– « Un peu de charité »-

Muamer Kulelija explique qu’il se bat « sur deux fronts », pour son frère mais aussi sa fille de 10 ans, qui souffre d’une déficience auditive.

Il a fallu plus deux ans après la naissance pour poser un diagnostic: « Les médecins nous disaient qu’elle entendait bien mais qu’elle était paresseuse ».

Aleena a droit tous les trois ans à 550 marks bosniens (280 euros) pour l’achat d’un appareil auditif alors qu’un appareil adapté coûte au moins 1.300 euros, raconte son père, employé de supermarché.

Les associations tentent de combler les carences, comme « Colibri », fondée par Saudin Hrnjic et son épouse Aida.

Ils organisent des ateliers pour une centaine d’enfants. C’est aussi un lieu d’échanges pour les parents.

En attendant son fils, une jeune maman, amère, explique avoir obtenu un rendez-vous pour une IRM (imagerie à résonance magnétique) mais dans six mois seulement.

Pour toute la Bosnie, il n’y a que deux neuropédiatres, souligne Aida Hrnjic.

« Pour le système, nos enfants méritent un peu de charité et c’est tout. Il ne compte pas sur eux », constate, amer, son mari.

A La Mecque, les pèlerins se protègent du coronavirus et s’en remettent à Dieu

« Nous sommes entre les mains de Dieu »: en pèlerinage à La Mecque, Nadia Bitam dit ne pas avoir peur du coronavirus. Comme les autres fidèles arrivés dans la ville sainte juste avant la suspension jeudi des visas par les autorités saoudiennes, elle prend toutefois ses précautions.

Arrivée d’Algérie cinq jours avant la décision de Ryad de suspendre l’octroi de visas pour la Omra, le petit pèlerinage, Nadia, la cinquantaine, se considère « chanceuse ».

Elle se trouve à quelques mètres du sanctuaire le plus saint de l’islam, la Kaaba, une structure cubique enveloppée dans une étoffe noire brodée d’or et vers laquelle les musulmans du monde entier se tournent pour prier.

« Je n’ai pas peur (…) Nous prenons des précautions », dit-elle en désignant les masques blancs couvrant le bas de son visage et celui de sa soeur qui l’accompagne.

Le royaume qui n’a pas encore été touché par l’épidémie de coronavirus, a annoncé jeudi suspendre « temporairement » l’entrée des pèlerins se rendant dans la ville sainte, une décision d’une ampleur sans précédent destinée à prévenir « l’arrivée » du nouveau coronavirus qui s’est propagé dans le Golfe, affectant particulièrement des personnes revenant d’Iran, pays le plus lourdement touché après la Chine.

Les sols de la Grande mosquée sacrée sont lavés quatre fois par jour, quelque 13.500 tapis de prière ont été retirés, d’autres ont été désinfectés, selon les autorités. Chaque année, La Mecque accueille des millions de fidèles pour la Omra.

Parmi eux, Hossam Eldin Ali, un jeune Turc de 21 ans qui étudie la loi islamique -la charia-, à l’université d’Al-Azhar au Caire. « Comment pourrait-on avoir peur dans la maison de Dieu? », s’interroge-t-il. « Même si j’étais infecté, je mourrais en martyr ici. »

– « Pertes importantes » –

Robina Mahmoud guide un groupe d’une centaine de pèlerins venus des Pays-Bas. Elle dit s’assurer en permanence que tous portent un masque, boivent de l’eau et se lavent les mains régulièrement.

« Cela nous protégera certainement, mais le reste est entre les mains de Dieu », lance la jeune femme qui, sous ses lunettes, porte elle-même un masque.

Avec des centaines de milliers de fidèles en pèlerinage, les masques ont été pris d’assaut dans les pharmacies adjacentes à la Grande mosquée.

« La demande au cours des deux derniers jours est sans précédent. J’ai vendu 200 boîtes en trois jours, notre stock pour tout le mois », indique un pharmacien syrien.

Les affaires sont en revanche moins bonnes pour les hôteliers. « Des groupes entiers (de pèlerins) ont annulé leurs réservations à cause de la suspension des visas », déplore Mahfouz, un expatrié égyptien qui loue des chambres dans plusieurs hôtels de la ville sainte.

« Je compte toujours mes pertes, elles sont importantes », se désole-t-il.

« Au moins 20 chambres sont annulées quotidiennement. Malheureusement, cela se produit pendant la saison haute de la Omra », confirme un employé d’un hôtel près de la Kaaba.

– « Sécurité des personnes » –

Les autorités saoudiennes, appuyées par les plus grandes institutions musulmanes comme l’Université al-Azhar, martèlent que leur décision est justifiée.

« Nous avons chaque mois des centaines de milliers de pèlerins de toutes les régions du monde. Si (le virus) arrive ici et se propage, ce sera une épidémie mondiale », explique un responsable saoudien qui a requis l’anonymat.

Pour le royaume, qui observe une application très strict de l’islam, « la sécurité des personnes est plus importante que la pratique de la Omra », assure-t-il.

En 2003, l’Arabie saoudite avait suspendu l’octroi de visas pour la Omra mais seulement à certains pays d’Asie, en raison du syndrome respiratoire aigu sévère (Sras), qui avait fait 774 morts dans le monde, bilan largement dépassé par le nouveau coronavirus.

En plus du visa pour le petit pèlerinage, Ryad a décidé de suspendre l’octroi de visas touristiques au ressortissants de sept pays, dont ceux particulièrement touchés par le virus, tels que la Chine, l’Italie et la Corée du Sud.

Les autorités saoudiennes ne se sont pas encore exprimées sur d’éventuelles mesures de précaution dans l’organisation du hajj, le grand pèlerinage de La Mecque qui doit avoir lieu cette année entre fin juillet et début août. Il avait rassemblé quelque 2,5 millions de fidèles en 2019.

L’ex-président angolais échappera-t-il au grand ménage anticorruption ?

Son fils Jose Filomeno pointe depuis deux mois dans le box des accusés d’un tribunal pour avoir vidé 500 millions de dollars des caisses de l’Angola. Et sa milliardaire de fille Isabel vient d’être inculpée pour en avoir détourné au moins le double.

Mais, loin de ce fracas politico-judiciaire, l’ex-président Jose Eduardo dos Santos, 77 ans, coule une retraite paisible en Espagne.

S’il est accusé d’avoir largement livré les ressources nationales à la cupidité d’une poignée de proches, le maître absolu du pays pendant trente-huit ans a échappé à l’opération « mains propres » menée par son successeur Joao Lourenço.

Au moins provisoirement.

« S’attaquer à dos Santos lui-même serait politiquement très risqué », explique l’analyste Paula Cristina Roque, de l’université britannique d’Oxford. « Ses enfants ne disposent que de peu de soutien au sein du MPLA (le parti au pouvoir) », note-t-elle, « mais c’est une toute autre histoire avec lui ».

A son arrivée au pouvoir en 2017, la volonté manifestée par Joao Lourenço d’éradiquer la corruption qui gangrène le deuxième producteur de pétrole du continent africain n’a guère suscité que des haussements d’épaules.

Le MPLA au pouvoir, l’opposition et la population n’ont alors vu dans les propos de l’ex-ministre de la Défense que des promesses de campagne sans importance.

Alors c’est peu de dire que le limogeage systématique des patrons d’entreprises publiques, hauts fonctionnaires ou militaires proches de l’ancien régime a déstabilisé l’establishment angolais.

Symboles du système népotique reproché au père dos Santos, ses enfants n’ont pas été épargnés.

– « Persécution » –

Un temps patron du puissant fonds souverain du pays, Jose Filomeno a été arrêté et emprisonné six mois. Il risque désormais plusieurs années de prison.

Première femme milliardaire d’Afrique, sa demi-sœur Isabel a été débarquée de la tête de la compagnie pétrolière nationale Sonangol, ses avoirs angolais ont été gelés et elle vient d’être inculpée d’une flopée de crimes financiers.

Le mois dernier, une enquête du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a enfoncé le clou en accusant Mme dos Santos, preuve de ses montages financiers à l’appui, d’avoir « siphonné les caisses » du pays.

De son exil forcé de Londres et Dubaï, celle que les Angolais ont baptisée la « Princesse » nie et crie à la « persécution » politique.

Avec elle, les critiques de Joao Lourenço ont relevé que certains proches de l’actuel chef de l’Etat, à commencer par l’ancien vice-président Manuel Vicente, avaient été opportunément oubliés par les juges.

Le porte-parole du procureur général, Alvaro Joao, dément toutefois tout traitement de faveur.

« Le parquet s’intéresse à ces deux enfants (…) car il a mis au jour leur mauvaise gestion des deniers publics », justifie M. Joao, en rappelant que bien d’autres potentats ont eux aussi subi les foudres de la justice angolaise.

Sélectif ou pas, le grand nettoyage opéré par Joao Lourenço bénéficie en tout cas d’un large soutien dans le pays.

– Son heure viendra –

« La corruption est un mal qui corrompt la société angolaise depuis la mise en place du régime (du MPLA en 1975) », rappelle l’avocat Salvador dos Santos, à la tête d’une ONG. « Au plus haut niveau (de l’Etat), personne ne vit de son salaire ou de revenus légaux, tout n’est que triche et fraude ».

Dans ce pays resté un des plus pauvres de la planète malgré sa manne pétrolière, la rue non plus ne cache pas sa satisfaction de voir tomber la famille dos Santos.

« Je n’ai pas de mots pour qualifier Isabel », lâche le mécanicien Tayson Madrugada, 20 ans, dans son garage de la capitale. « Elle s’est servie de notre pays et a fait des affaires qui n’ont pas créé d’emplois pour les jeunes d’ici ».

Le parquet affirme aujourd’hui ne pas envisager de s’attaquer à Jose Eduardo dos Santos.

« A l’heure actuelle, il n’existe pas de preuve suggérant que l’ex-président ait commis d’infraction », assure Alvaro Joao. En rappelant que M. dos Santos reste constitutionnellement protégé de toute poursuite criminelle par son statut jusqu’en 2022 – cinq ans après la fin de son mandat.

Inlassable pourfendeur des turpitudes de l’ex-famille régnante, le journaliste Rafael Marques veut croire que, passée cette date, le chef tombera lui aussi dans les mailles du filet.

« Beaucoup de ceux qui ont déjà été inculpés l’ont cité », détaille-t-il, « des enquêtes sont en cours (…) il va devoir répondre à certaines questions ».

C’est ainsi le cas dans « l’affaire » Jose Filomeno, où l’ancien gouverneur de la Banque centrale Valter Filipe da Silva, lui aussi sur le banc des accusés, a expliqué avoir utilisé les fonds détournés sur ordre de l’ancien chef de l’Etat.

« Dos Santos n’échappera pas à la justice, son heure viendra », assure Rafael Marques, « la seule question est de savoir si sa santé ne le trahira pas d’ici à 2022 ».

Handicap: des Centrafricains de la clinique au terrain de basket

Soudain, les joueurs s’élancent. Passe. Esquive. Feinte. Ce pourrait être un entraînement de basket comme un autre, mais ici, le bruit des chaussures de sport est remplacé par le glissement des roues sur l’asphalte brûlant.

Autour du ballon, se livre un ballet de fauteuils virevoltants emmenés par les bras d’acier de leurs propriétaires. Demi-tour à pleine vitesse, en équilibre sur une roue…

En Centrafrique, le basket est un sport national. Malgré le manque de moyens dans un des pays les plus pauvres du monde, l’équipe handisport n’est pas en reste: elle est même devenue vice-championne d’Afrique de basket handisport en 2001.

Idriss Feissal, membre de l’équipe nationale depuis 2003, coache les cinq sportifs à l’entraînement sur ce petit terrain égaré dans la capitale.

« Allez ! Plus long! » harangue ce quadragénaire aux biceps d’haltérophile, cloué à son fauteuil depuis qu’il a cinq ans. Ses élèves redoublent d’efforts. « Quand tu travailles le physique, ton handicap change », insiste-t-il.

Un handicap particulièrement difficile à vivre dans ce pays où les infrastructures manquent. Pour se rendre à l’entraînement, les joueurs et joueuses doivent parcourir plusieurs kilomètres sur des avenues constellées de crevasses et des allées de terre défoncée, sous un soleil écrasant.

« Parfois, ils finissent par abandonner », déplore Idriss, qui a lui-même conçu un tricycle à pédales spécialement adapté aux handicapés. Mais bien peu d’habitants ont les moyens de s’offrir un de ces appareils.

– Handicapé par la guerre –

A Bangui, toutefois, existe une clinique discrète où les personnes atteintes de handicaps moteurs peuvent trouver du secours: le centre de l’Association Nationale de Rééducation et d’Appareillage de Centrafrique (Anrac), fondée en 1997. Une structure unique dans un pays ravagé par trois guerres civiles, où des milliers de personnes ont été victimes de séquelles post-conflit.

Assis sur un banc de bois à l’entrée de ce petit bâtiment, Eddy Ngalikossi, 40 ans, exhibe avec satisfaction la prothèse qui lui a sauvé la vie.

Ce commerçant en informatique s’apprêtait à quitter son magasin quand les rebelles de la Séléka, la coalition à dominante musulmane qui venait de s’emparer de la capitale en 2013, lui ont tiré dessus. Transporté à l’hôpital et amputé, il s’est retrouvé sans emploi pour nourrir ses enfants.

« Quand c’est arrivé, je savais que pour moi, c’était fini », assure-t-il.

A l’époque, le pays est plongé dans le chaos, et ses infrastructures de santé embryonnaires sont dépassées.

Mais depuis 2013, l’Anrac bénéficie du soutien du Comité international de la croix rouge (CICR), qui finance les équipements et la formation des personnels.

Juste derrière la salle d’accueil, se cache un atelier enveloppé de poussière blanche où une dizaine de techniciens poncent, découpent, et fixent des prothèses sur mesure pour les patients.

– Isolés par le handicap –

Vient ensuite le temps de l’apprentissage : marcher sur un terrain plat, accidenté, à monter un escalier, à s’assoir dans les minibus toujours bondés… « Aujourd’hui, je peux marcher avec une canne », se réjouit Eddy.

Mais ce travail de fabrication et de rééducation demande du temps. Et les 339 patients accueillis par le centre en 2019 sont une goutte d’eau au regard du nombre souffrant de handicaps ou de séquelles post-conflit identifiés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le pays : environ 30.000 personnes chaque année. Un chiffre qui pourrait encore être sous-estimé selon le docteur Godefroy Bombaïda, directeur du centre.

« Depuis la crise, le nombre de personnes amputées a triplé », assure-t-il.

Les problèmes d’infrastructures limitent la prise en charge des patients en province. Et à Bangui, rares sont les personnels assez formés pour assurer la construction des prothèses et le suivi des patients.

La construction d’un nouveau centre, avec une capacité d’accueil de 1.700 personnes, est prévue pour le mois de mai 2020. Celui-ci devrait aussi permettre d’assurer une prise en charge psychologique pour ces personnes souvent isolées socialement.

« La famille, c’est pas facile. Si tu as les moyens, ça va. Mais si tu en es dépourvu, qui s’approchera de toi? », s’agace Eddy. « Quand j’ai perdu ma jambe, j’ai pensé à me suicider. Et je connais plusieurs handicapés qui se sont suicidés, à cause de ce manque de soutien ».

Idriss, lui aussi, a vécu cet isolement. « Dans le quartier, tout le monde me négligeait. C’est grâce aux compétitions que j’ai rencontré ma femme, et fondé une famille », explique-t-il. « Maintenant, je voyage. Ceux qui me négligeaient, ils sont encore au quartier! »

Boom des colonies israéliennes sous le règne de « Bibi »

« La personne la plus vieille ici a 37 ans! », blague Ifat Lev devant la crèche d’une nouvelle colonie israélienne. Au cours de la « décennie Netanyahu », la population a bondi de moitié dans ces colonies qui s’ancrent en Territoires palestiniens.

Début 2017, le président américain Donald Trump, grand allié du Premier ministre Benjamin Netanyahu, s’installe à la Maison Blanche. A plus de 10.000 km de là, des familles de colons plantent leurs caravanes sur un terrain abandonné près de la mer Morte, en Cisjordanie occupée, donnant naissance à Kedem Arava.

Trois ans plus tard, leurs enfants y courent pieds nus, glissent sur un toboggan, se promènent en vélo entre des maisonnettes aux airs de containers.

Dans les Territoires palestiniens, existent deux types de colonies, toutes illégales aux yeux du droit international: celles reconnues par Israël et les autres, nommées « outpost » ou « colonies sauvages » comme Kedem Arava, la première de ce type fondée sous l’ère Trump.

Sans la reconnaissance du gouvernement, la quarantaine de familles sur place ne peut construire de maisons avec des fondations.

Ce jour-là, des ouvriers arabes équipés de mini-pelleteuses enrobent le bas des maisons temporaires de ciment pour leur donner un air pérenne tandis que l’un d’eux, la barbe charbonneuse, se tourne vers La Mecque pour prier.

Les colons de Kedem Arava ne se considèrent pas comme des « extrémistes », mais comme les résidents d’une nouvelle banlieue-dortoir à une trentaine de km de Jérusalem.

« Ici, c’est un paradis pour les enfants », dit Ifat, mère de 32 ans.

Un appartement de trois chambres lui coûte environ 1.400 shekels par mois (450 euros), trois fois moins environ qu’à Jérusalem.

– « C’est chez nous » –

Employé d’une firme high-tech, Ptachia Rechel fait l’aller-retour chaque jour, pour profiter des salaires plus élevés à Jérusalem sans tirer un trait sur la nature.

« Nous ne sommes pas ici par choix idéologique, mais parce que nous aimons le sentiment de communauté », dit ce grand gaillard, en sciant du bois pour ajouter une terrasse à sa modeste maison.

« Cette implantation est nouvelle, mais elle sera grande », assure Israël Rosenfeld, qui gère la colonie.

« C’est chez nous ici, nous n’avons pas d’autre endroit où vivre, c’est ici que j’ai grandi (dans les colonies) et que mes enfants sont venus au monde », dit ce jeune père qui ne voit « aucune différence » entre les colonies et Israël.

« C’est pourquoi nous devons être partie intégrante d’Israël », dit-il, plaidant pour l’annexion des quelque 130 colonies de Cisjordanie proposée par le plan Trump pour le Proche-Orient en janvier et défendue par M. Netanyahu.

Pour les législatives de lundi, ce dernier multiplie les annonces de constructions de logements dans les colonies, courtisant ainsi un électorat dont il a participé à l’essor.

Selon les autorités, plus de 450.000 Israéliens –dont la moitié a moins de 18 ans– vivent dans les colonies en Cisjordanie occupée parmi 2,7 millions de Palestiniens, soit une hausse de 48% en 10 ans.

Environ 20.000 unités de logements ont été construites pendant la décennie Netanyahu.

Le nombre d’unités approuvées à la construction a bondi de 90% sous l’ère Trump, selon les données de l’ONG israélienne anticolonisation « La Paix Maintenant », le gouvernement visant le million d’habitants dans les colonies d’ici la fin de la prochaine décennie.

« Nous ne donnerons pas un centimètre de la terre d’Israël aux Arabes, mais pour cela il faut y construire », a martelé jeudi le ministère de la Défense Naftali Bennett.

– « Ma patrie » –

Les petites colonies comme Kedem Arava deviendront peut-être un jour des villes comme Ariel, colonie disposant de centres commerciaux et d’une université, ou des mini-régions comme le Goush Etzion et son chapelet de colonies pavillonnaires, dans lesquelles naît une troisième, voire une quatrième génération de colons.

« Ici, ce n’est pas une colonie, c’est ma patrie. (…) Nous ne nous posons pas la question de savoir si nous devrions être ici. Nous sommes ici, point », lance Yehuda Leuchter, musicien à la barbe broussailleuse, qui a grandi et vit avec sa femme et ses cinq enfants dans le Goush Etzion.

Pour les Palestiniens, des pays européens et des ONG, la multiplication et l’ancrage des colonies complique, voire empêche, la création d’un Etat palestinien viable avec une continuité territoriale.

Eliaz Cohen, travailleur social, se souvient lui d’une jeunesse dans les colonies marquée par la volonté d’apprendre l’arabe, de côtoyer des Palestiniens sans enceinte grillagée autour de son implantation.

« Les relations n’étaient pas chaleureuses, mais au moins il y en avait », soutient cet habitant du Goush Etzion, qui veut tisser des liens avec les villages arabes avoisinants.

Depuis la seconde Intifada (soulèvement palestinien) et la construction de la barrière de sécurité entre Israël et la Cisjordanie au début des années 2000, « c’est comme si une barrière avait été plantée dans nos coeurs et nos âmes. Et le défi de partager la terre côte à côte, ensemble, devient de plus en plus difficile… »

Coronavirus en Corée du Sud: BTS annule ses concerts, les cas se multiplient

Les mégastars de la K-pop BTS ont annoncé vendredi l’annulation de concerts géants prévus en avril à Séoul, alors que la Corée du Sud vient d’enregistrer près de 600 nouveaux cas de coronavirus soit bien plus en 24 heures qu’en Chine où était apparue l’épidémie.

Le boys band, à l’heure actuelle l’un des plus grands phénomènes musicaux au monde, avait quatre dates programmées au Stade olympique de Séoul pour promouvoir son dernier album, « Map of the Soul: 7 ».

Au total, plus de 200.000 groupies auraient dû se masser sur quatre soirs dans l’enceinte qui avait accueilli les Jeux de 1988, a indiqué dans un communiqué Big Hit Entertainement, l’agent des sept garçons au look tellement soigné.

Big Hit Entertainement a expliqué que cette annulation était « inévitable » car il est « impossible à ce stade de prédire l’ampleur de l’épidémie » qui génère beaucoup d’incertitude logistique pour l’organisation des concerts, mais aussi pour les spectateurs.

« Nous devons prendre en compte la santé et la sécurité des centaines de milliers de spectateurs et des artistes », a poursuivi Big Hit.

De nombreux événements culturels et sportifs ont été annulés ou reportés en Corée du Sud à cause de l’épidémie, parmi lesquels des matches du championnat national de football ou encore les Mondiaux de tennis de table par équipes.

– Usine Hyundai à l’arrêt –

La reprise des cours après les vacances a été différée et les Etats-Unis, dont 28.500 soldats sont stationnés sur la péninsule, ont ajourné avec leur allié sud-coréen leurs prochains exercices militaires conjoints.

Hyundai Motor, cinquième constructeur automobile mondial en incluant sa filiale Kia, a suspendu l’activité d’une de ses usines d’Ulsan (sud-est), dont un des employés avait été testé positif au coronavirus, rapporte l’agence sud-coréenne Yonhap.

Le groupe avait déjà suspendu la production il y a quelques semaines en raison d’une pénurie de pièces détachées chinoises, conséquence, déjà, de l’épidémie.

Vendredi, Séoul a fait état de 571 nouveaux cas, ce qui porte son total de personnes contaminées à 2.337 –le bilan le plus élevé pour un seul pays, après la Chine.

Pour le deuxième jour consécutif, cette augmentation journalière est en outre supérieure à celle annoncée par la Chine. Cette dernière a fait état vendredi de 327 nouveaux cas.

Treize personnes infectées ont péri en Corée du Sud.

Plus de 90% des nouveaux cas ont été enregistrés à Daegu, la quatrième ville du pays, et dans la province voisine de Gyeongsang du Nord.

Ce bilan devrait continuer de grimper car les autorités ont commencé à effectuer des tests sur au total plus de 275.000 fidèles de l’Eglise Shincheonji de Jésus, une organisation qualifiée de secte par ses détracteurs et qui est directement liée à la moitié des cas de contamination répertoriés dans le pays.

L’épidémie de coronavirus s’est répandue comme une traînée de poudre dans les rangs de ce mouvement à partir d’une de ses fidèles, une femme de 61 ans identifiée comme le patient 31.

Elle a commencé à souffrir de fièvre le 10 février et assisté à au moins quatre offices de Shincheonji à Daegu avant d’être diagnostiquée comme porteuse du virus.

– 68.000 personnes testées –

Le maire de Daegu, Kwon Young-jin, a déclaré que le total des cas dans son agglomération pourrait atteindre les 3.000, selon Yonhap.

Voilà plusieurs jours que les artères de cette ville de 2,5 millions d’habitants sont désertées, beaucoup de magasins et de restaurants ayant fermé leurs portes. Vendredi, les masques de protection étaient à nouveau largement disponibles, selon des journalistes de l’AFP.

Les autorités ont multiplié les consignes, exhortant les habitants à rester chez eux s’ils développaient des symptômes. Mais la 12e économie mondiale n’envisage pas de cordon sanitaire autour de la ville, comme la Chine a pu le faire pour Wuhan d’où est partie l’épidémie en décembre.

La Corée du Sud possède un système médical de pointe, une presse libre et une très forte culture de la transparence, ce qui, selon les observateurs, explique aussi le caractère élevé des chiffres des contaminations. Plus de 68.000 personnes ont déjà été testées.

BTS (abréviation de Bangtan Sonyeondan, qui signifie « Boy scouts résistants aux balles ») est un phénomène musical planétaire.

Il est le premier groupe de K-pop à avoir atteint le sommet des ventes aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne et a enchaîné les concerts à guichets fermés à Los Angeles, Chicago ou Londres, ou encore enflammé en juin un Stade de France plein à craquer.

« Map of the Soul: 7 » est l’album sud-coréen qui a été le plus commandé en préventes, puisque quatre millions de copies avaient été achetées avant sa sortie dans les bacs la semaine dernière.

Benny Gantz, une main de fer dans un gant de velours

Ancien chef de l’armée israélienne, le centriste Benny Gantz affiche une image de « Monsieur Propre » de la politique face à son rival aux élections de lundi, Benjamin Netanyahu inculpé pour corruption, dont il partage toutefois une vision sécuritaire musclée.

A 60 ans, celui qui se veut pragmatique face aux idéologies radicales de la droite va tenter pour la troisième fois en moins d’un an d’obtenir suffisamment de voix pour former une coalition gouvernementale.

Ce père de quatre enfants, à l’attitude décontractée et abordable, n’avait aucune expérience politique lorsqu’il s’est jeté dans l’arène il y a un an pour former un nouveau parti centriste, Kahol Lavan, « Bleu-blanc » en français, les couleurs du drapeau israélien.

Mais en fédérant les opposants au Premier ministre, il a réussi, avec sa liste regroupant des personnalités de gauche et de droite, à terminer ex-aequo avec M. Netanyahu aux législatives d’avril et septembre 2019.

Son message est clair: le but est de chasser Benjamin Netanyahu, au pouvoir sans discontinuer depuis dix ans et dont le procès pour corruption doit s’ouvrir mi-mars.

« Le monde doit savoir que nous sommes pragmatiques et voyons uniquement le bien de l’Etat d’Israël sans se préoccuper d’intérêts personnels », estime celui qui veut restituer un sens de « l’honneur » à la fonction de Premier ministre.

– « Stabilité et honnêteté » –

Pur « sabra » –terme qui désigne les juifs nés en Israël–, ce fils d’immigrants rescapés de la Shoah est né le 9 juin 1959 à Kfar Ahim, un village du sud du pays.

Le jeune Gantz rejoint l’armée en tant que conscrit en 1977. Parachutiste, il gravit les échelons et obtient le grade de général en 2001 avant de devenir chef d’état-major de 2011 à 2015.

Dans un pays où l’armée est fédératrice, cet homme d’1m95 aux yeux bleus bénéficie d’une grande aura conférée par ses faits d’armes et son rang d’ancien commandant des armées.

« Il n’a pas laissé de traces indélébiles dans l’armée, mais a conservé une image de stabilité et d’honnêteté », selon Amos Harel, journaliste spécialiste des affaires militaires au quotidien Haaretz.

S’il propose une vision plus libérale de la société que M. Netanyahu, et souhaite mettre en place un gouvernement laïc favorable au mariage civil, ce qui n’est pas d’usage en Israël, il soigne, comme le Premier ministre, son image de faucon.

Il affirme vouloir conserver le contrôle militaire israélien sur la majeure partie de la Cisjordanie occupée, annexer la vallée du Jourdain et mettre fin aux attaques incessantes à partir de Gaza sur le territoire israélien.

Lors de la dernière guerre à Gaza (2014), c’est d’ailleurs lui qui était aux commandes et s’est targué du nombre de « terroristes » palestiniens tués durant cette guerre dans un clip de campagne, sans évoquer les victimes civiles.

Il a accusé le gouvernement actuel de « faire trop de concessions » et a promis d’imposer « une politique de dissuasion » contre le mouvement islamiste Hamas, à qui Israël a livré trois guerres depuis 2008.

Benny Gantz a fait alliance avec deux autres anciens chefs d’état-major, Moshe Yaalon et Gaby Ashkenazi.

– « Fréquentes bourdes » –

Cultivant son image de « dur à cuire », M. Gantz a multiplié les appels du pied en direction de l’électorat de droite, poussant M. Netanyahu à le qualifier de « pâle imitation » de sa personne.

« Soudain, tout le monde est de droite », a ironisé le Premier ministre.

Le Likoud a publié une vidéo avec des extraits d’interventions de Benny Gantz durant lesquelles il a commis des bourdes, confondant des noms ou bégayant lors de discours de campagne.

Interrogé par un journaliste sur ses « fréquentes bourdes », Benny Gantz a répondu que parfois « il pense plus vite qu’il ne parle ».

« Je ne fais pas carrière à la télévision, je ne suis pas présentateur au journal télévisé, je suis un leader avec derrière lui près de 40 ans de direction dans l’armée », a-t-il encore asséné.

Benny Gantz est titulaire d’une licence d’histoire de l’université de Tel-Aviv, d’un master en Sciences politiques de l’université de Haïfa et d’un master en gestion de ressources nationales de la National Defense University aux Etats-Unis.

Face au brillant orateur qu’est Benjamin Netanyahu, aura-t-il convaincu les électeurs de voter pour lui? La question reste ouverte.

Mais où est Obama? Le grand absent omniprésent face à l’ascension de Sanders

Pour un grand absent, Barack Obama pourrait difficilement être plus présent dans l’âpre bataille que se livrent les candidats à l’investiture démocrate pour la présidentielle.

Cité des dizaines de fois lors des débats, mis en vedette (non consentante) dans des spots de campagne, lui s’en tient strictement à son silence malgré ses avertissements, en coulisses, contre le coup de barre à gauche promis par le favori Bernie Sanders.

« L’establishment panique » ou « Présenter Bernie Sanders contre Trump serait un acte de folie »: les gros titres des médias américains reflètent le désarroi de certains démocrates modérés, qui revendiquent leur filiation avec Obama.

Ils s’inquiètent de voir ce « socialiste » autoproclamé affronter en leur nom le président républicain Donald Trump lors de la présidentielle de novembre.

Après ses bons résultats dans les premiers Etats ayant voté, le sénateur indépendant est, à 78 ans, le grand favori des primaires démocrates.

Et l’avalanche de scrutins prévue mardi pour le « Super Tuesday » pourrait lui offrir une avance pratiquement imparable pour remporter l’investiture du parti.

« La plupart des démocrates initiés sont convaincus qu’il n’y a qu’une façon d’arrêter, ou du moins de freiner, Sanders »: que Barack et Michelle Obama « se rallient derrière un autre candidat »… Et de préférence avant le « Super Tuesday », avançait mardi un éditorialiste de CNN, Chris Cillizza.

En novembre, Barack Obama avait affirmé devant des donateurs démocrates que la bataille électorale se remporterait au centre.

Les Américains ne pensent pas « que nous devons détruire complètement le système et tout recommencer », avait-il déclaré, soulignant que les Etats-Unis n’étaient pas un pays « révolutionnaire ».

S’il ne citait personne, tous avaient pensé à Bernie Sanders, qui prône une « révolution » politique.

A l’automne toujours, le site Politico affirmait que l’ex-président comptait s’exprimer publiquement si le sénateur prenait une nette avance dans les primaires, « afin de l’empêcher d’être investi ».

– Comme « Obama l’a dit » –

Barack Obama reste « extrêmement populaire au sein du parti démocrate », souligne Kyle Kondik, politologue à l’université de Virginie.

Sa voix résonnerait donc avec force s’il prenait parti. Mais il y a peu de chances qu’on l’entende.

S’il a « plusieurs amis en lice, y compris, bien entendu, son propre vice-président » Joe Biden, Barack Obama « a dit qu’il ne prévoyait pas de soutenir quelqu’un pendant les primaires », a rappelé mercredi sa directrice de communication, Katie Hill.

« Car il estime que pour que les démocrates gagnent à l’automne, ce sont les électeurs qui doivent choisir leur candidat ».

En 2016, il n’avait ainsi déclaré son soutien à Hillary Clinton qu’une fois qu’elle fut assurée de décrocher l’investiture démocrate.

Mais il s’est impliqué dans des élections à l’étranger, en annonçant son soutien à Emmanuel Macron, en France, et à Justin Trudeau, au Canada, pendant leurs campagnes.

Le rare commentaire de sa directrice de communication venait dénoncer un groupe de soutien à Donald Trump qui a diffusé une « publicité ignoble », dans laquelle d’anciens propos de Barack Obama ont été utilisés « hors de contexte » pour nuire à Joe Biden.

L’ex-président reste en revanche muet sur les nombreux spots de campagne des candidats à l’investiture démocrate qui utilisent ses anciens discours pour laisser entendre qu’ils ont son soutien.

– Sanders privé de discours? –

Joe Biden, mais aussi le milliardaire Michael Bloomberg, la sénatrice progressiste Elizabeth Warren, l’ex-maire Pete Buttigieg: c’est à qui proclamera la meilleure relation, l’entente la plus ancienne, l’héritage le plus évident…

Et tous le citent à l’envi pour appuyer leurs positions.

« Comme Barack Obama l’a dit, nous devons prendre en compte la position des électeurs de ce pays. Or dépenser près de 60.000 milliards de dollars, ce n’est pas ce qu’ils veulent », a ainsi tweeté Amy Klobuchar jeudi pour dénoncer le programme de Bernie Sanders.

A l’exception notable de Bill Clinton, qui avait soutenu son épouse Hillary lors des primaires de 2008 et 2016, « de nombreux ex-présidents ont tenté de rester au-dessus de la mêlée politique », explique Kyle Kondik.

Et il n’y a pour l’heure « aucune indication » que Barack Obama s’apprête à rompre avec la tradition. « Il est peut-être, comme de nombreux autres démocrates, sincèrement indécis », poursuit le politologue.

Mais si Bernie Sanders décrochait l’investiture, « je me demande vraiment si Obama ferait un discours à la convention » démocrate qui officialiserait en juillet la victoire du socialiste.

Israël, puissance majeure au Proche-Orient

L’Etat d’Israël, où des élections législatives sont prévues le 2 mars, a été proclamé en mai 1948 à la suite d’un vote de l’ONU sur le partage de la Palestine, et il est depuis devenu une puissance majeure au Proche-Orient.

– Conflits –

Le pays a été confronté à sa première guerre face aux nations arabes dès le lendemain de sa proclamation par David Ben Gourion le 14 mai 1948.

Officiellement, Israël a livré huit guerres, dont celle dite des « Six Jours » en juin 1967, qui aboutit à l’occupation de Jérusalem-Est, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, ainsi que du plateau syrien du Golan et du Sinaï égyptien.

Israël a ensuite unilatéralement annexé Jérusalem-Est, puis le Golan, des décisions dénoncées par la communauté internationale.

La dernière grande opération armée a été menée en 2014 à Gaza.

Deux traités de paix ont été signés avec des pays arabes voisins d’Israël: l’Egypte en 1979 –traité aux termes duquel ce pays a récupéré le Sinaï en 1982– et la Jordanie en 1994.

Israël est considéré comme la première puissance militaire du Proche-Orient et la seule de la région à détenir l’arme nucléaire. Il reçoit près de quatre milliards de dollars d’aide militaire annuelle des Etats-Unis.

– Colonisation –

Israël continue d’occuper la Cisjordanie mais a évacué unilatéralement en 2005 la bande de Gaza, contrôlée depuis 2007 par le mouvement islamiste Hamas.

Plus de 600.000 colons israéliens mènent une coexistence souvent conflictuelle auprès d’environ trois millions de Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.

Israël considère Jérusalem comme sa capitale « unifiée et indivisible ». Mais la communauté internationale ne reconnaît pas l’annexion de la partie orientale occupée de la ville, dont les Palestiniens veulent faire la capitale de l’Etat auquel ils aspirent.

Israël a affronté en 1987 puis en 2000 deux soulèvements (Intifada) des Palestiniens des territoires occupés. Le premier s’est conclu par la signature en 1993 à Washington des accords d’Oslo sur l’autonomie dans les territoires.

– Tensions régionales –

Dès le début de la guerre en Syrie en 2011, Israël –officiellement en état de guerre avec Damas– a veillé à ne pas être aspiré dans le conflit, mais fait campagne contre la présence du mouvement libanais Hezbollah et de l’Iran, alliés du régime de Bachar al-Assad.

Israël a mené des centaines de frappes en Syrie, la plupart visant des cibles iraniennes ou du Hezbollah.

Il n’entretient de relations diplomatiques qu’avec l’Egypte et la Jordanie, mais tente de se rapprocher actuellement d’autres pays arabes comme les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite.

– Appui de Trump –

Dès sa prise de fonctions, le président américain Donald Trump a adopté une politique de soutien sans faille à Israël, rompant avec des décennies de diplomatie américaine.

Après la reconnaissance unilatérale en 2017 de Jérusalem comme capitale d’Israël et celle de la souveraineté de l’Etat hébreu sur le Golan syrien en 2019, il a dévoilé fin janvier un plan de paix controversé pour le Proche-Orient qui accorde de nombreuses concessions à Israël.

– Lois fondamentales –

Israël est régi par des lois fondamentales faisant office de Constitution.

En 2018, le Parlement a adopté une loi définissant le pays comme « l’Etat-nation du peuple juif ». La loi, qui confère aux Juifs le droit « unique » à l’autodétermination en Israël, est dénoncée comme « discriminatoire » notamment par l’opposition et l’importante communauté arabe israélienne.

Les Arabes israéliens sont les descendants des Palestiniens restés sur leurs terres après la création d’Israël.

– « Start-up » –

Avec neuf millions d’habitants, la population a décuplé depuis 1948. Le pays connaît un chômage très bas, une inflation quasi inexistante et une croissance de près de 3%, mais selon l’agence nationale de la sécurité sociale, près de 1,8 million d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

Israël, qui se proclame la « start-up nation », est considéré comme un centre mondial de la haute technologie et dispose d’un terreau d’entreprises très actives dans les secteurs de la cyberdéfense, de l’informatique et des systèmes de surveillance. Le secteur de la high-tech représente plus de 40% des exportations.

Le pays, qui a peu de ressources naturelles, a découvert ces dernières années d’importants gisements de gaz naturel en Méditerranée.

Le tourisme constitue aussi une source de revenus.

La Guinée et son président au-devant d’un référendum sous tension

Le pouvoir en place à Conakry appelle les Guinéens à se prononcer dimanche sur une nouvelle Constitution, après des mois de protestations meurtrières contre ce que l’opposition considère comme une manoeuvre du président Alpha Condé pour rester au pouvoir.

M. Condé assure qu’il s’agit de doter son pays d’une Constitution « moderne ». Elle codifierait l’égalité des sexes, interdirait la circoncision féminine et le mariage des mineurs. Elle veillerait à une plus juste répartition des richesses en faveur des jeunes et des pauvres.

L’opposition n’en croit pas un mot. Pour elle, le projet est le subterfuge d’un ancien opposant historique devenu, à bientôt 82 ans, un autocrate qui entend plier la Constitution à son désir de briguer un troisième mandat à la fin de l’année quand celui en cours aura expiré.

Depuis mi-octobre, la mobilisation anti-Condé donne lieu à des manifestations massives à travers le pays, à des journées villes mortes qui impactent l’économie d’un des pays les plus pauvres de la planète, et à de sévères épisodes de brutalité policière.

Au moins 30 civils et un gendarme ont été tués depuis lors.

Ces tensions, les appels de l’opposition à non seulement boycotter mais empêcher la tenue du référendum et des législatives qui ont lieu aussi dimanche, ainsi que les attaques des derniers jours contre des bureaux ou du matériel de vote font craindre des accès de violence dans un pays coutumier des manifestations et des répressions brutales.

L’armée a été mise en d’alerte depuis mardi. Pure précaution selon les autorités.

Des années d’animosité politique, les soupçons pesant sur le vote, ainsi que le maintien envers et contre tout de ce rendez-vous malgré le boycott et les appels de la communauté internationale à tout faire pour associer l’opposition laissent la place à une campagne très éloignée d’un joyeux exercice démocratique.

– Mission avortée –

Les signes de la campagne étaient rares cette semaine dans la capitale Conakry, au bord de l’Atlantique. Des panneaux portant des slogans tels que « oui à l’égalité » ou « oui à l’investissement dans la jeunesse » surplombent les routes encombrées de voitures. Mais peu ou pas de rassemblements publics en vue.

« Vous ne verrez pas de campagne électorale », assure Sékou Condé, un cadre du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), le parti présidentiel. Les ministres ont fait campagne à l’intérieur du pays, ajoute-t-il.

Le projet soumis à référendum dimanche limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Le président sortant en a déjà deux au compteur. Sauf, redoute l’opposition, que l’adoption d’une nouvelle Constitution lui permettrait de remettre ce compteur à zéro.

« Qui y a-t-il de mal à ça », demande Sékou Condé, le cadre du parti présidentiel. La plupart des Guinéens veulent que le président Condé reste pour développer le pays, assure-t-il.

M. Condé maintient un voile de moins en moins opaque sur ses intentions. C’est son parti qui décidera de son avenir et les Guinéens peuvent aussi bien dire non à la nouvelle Constitution, répète-t-il.

Mais « pourquoi en Guinée il serait impossible de faire trois mandats ? » demandait-il cette semaine dans le quotidien Le Figaro.

La Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a annulé « à la dernière minute » cette semaine une mission en Guinée, composée selon la presse de quatre chefs d’Etat, a indiqué une source officielle nigérienne, dans une possible admission de l’impossibilité d’infléchir le cours des évènements.

L’Organisation internationale de la francophonie (OIF), accompagnatrice du processus électoral en Guinée, a sévèrement remis en cause la crédibilité du vote en jugeant « problématiques » presque 2,5 millions de noms d’électeurs figurant sur les listes.

– Composantes ethniques –

L’OIF a parlé de doublons et de présence sur les listes de personnes décédées. La commission électorale nationale a minimisé les irrégularités.

M. Condé « obtiendra de toute façon le résultat qu’il veut », déplore le leader de l’opposition Cellou Dalein Diallo.

M. Diallo voyage avec une dizaine de militants costauds de son parti, pour sa sécurité. Il assure que la plupart des Guinéens sont contre la consultation et prédit une forte abstention.

Des électeurs interrogés par l’AFP semblent plus polarisés que cela.

Abdouramane Keita par exemple, étudiant en droit, déclare vouloir « voter dans le calme ». Il voudrait aussi voir les partis antagonistes se parler.

Un diplomate occidental, qui requiert l’anonymat pour s’exprimer, est cinglant: « Ce processus électoral, c’est quasiment une blague », n’était le risque de violence, qui est réel et pourrait suivre les lignes d’appartenance ethnique, entre les Malinkés, dont est issu M. Condé, et les Peuls, largement derrière M. Diallo.

Pour autant, ll ne croit pas à un déchaînement « majeur ». Car, pour lui, « le moment de vérité », cela devrait être la présidentielle à la fin de l’année.

Changer la Constitution pour rester au pouvoir, une pratique courante en Afrique

A l’instar du Guinéen Alpha Condé, accusé de manœuvrer pour briguer un troisième mandat, de nombreux chefs d’Etat africains ont tenté – et très souvent réussi- de se maintenir au pouvoir en modifiant la Constitution.

– Tentatives réussies

– COMORES: Un référendum constitutionnel renforce en 2018 les pouvoirs d’Azali Assoumani, lui permettant de briguer deux mandats au lieu d’un. Celui-ci est réélu en 2019 lors d’un scrutin entaché de fraudes.

– RWANDA: Une réforme de la Constitution adoptée fin 2015 permet à Paul Kagame de se présenter pour un nouveau mandat en 2017 et de potentiellement diriger le pays jusqu’en 2034.

– CONGO: Une nouvelle Constitution adoptée par référendum en 2015 fait sauter les verrous qui interdisaient à Denis Sassou Nguesso de briguer un 3e mandat: la limite d’âge et celle du nombre des mandats. Il est réélu en 2016.

– BURUNDI: La candidature de Pierre Nkurunziza à un 3e mandat plonge le pays en 2015 dans une grave crise (au moins 1.200 morts). M. Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, a annoncé en 2018 qu’il ne se présenterait pas à sa succession en 2020, alors que la nouvelle Constitution adoptée par référendum le lui permet.

– ZIMBABWE: Une nouvelle Constitution adoptée en 2013 permet à Robert Mugabe de se porter candidat à la présidentielle. Mais celui-ci est contraint à la démission en 2017, après 37 ans de règne. Il est décédé en 2019.

– DJIBOUTI: Le Parlement, entièrement acquis à la cause d’Ismaël Omar Guelleh, adopte en 2010 une révision constitutionnelle supprimant toute limitation du nombre de mandats présidentiels. Au pouvoir depuis 1999, Omar Guelleh a pu briguer de nouveaux mandats en 2011 et 2016.

– ALGERIE: Le Parlement adopte en 2008 une révision de la Constitution supprimant la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, est réélu en 2009 puis en 2014. Il est poussé à la démission en avril 2019 sous la pression d’une contestation inédite.

– CAMEROUN: Une révision constitutionnelle en 2008 supprime la limitation des mandats présidentiels. Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, est réélu pour un 7e mandat en 2018.

– OUGANDA: Une réforme de la Constitution supprime en 2005 toute restriction du nombre de mandats pour le chef de l’Etat. En 2019, la Cour suprême valide la suppression de la limite d’âge pour la présidence, permettant à Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 1986, de se représenter en 2021.

– TCHAD: Une révision constitutionnelle adoptée lors d’un référendum controversé en 2005 supprime la limitation à deux quinquennats présidentiels. Idriss Deby Itno, au pouvoir depuis 1990, est réélu en 2016 pour un 5e mandat.

– TOGO: Un amendement à la Constitution fait disparaître fin 2002 la limite de deux mandats présidentiels, permettant à Gnassingbé Eyadéma, au pouvoir depuis 1967, de briguer un nouveau mandat en 2003. Son fils, Faure Gnassingbé, qui lui a succédé après son décès en 2005, a été depuis réélu lors de scrutins contestés par l’opposition.

– Tentatives avortées

Au BURKINA FASO, la volonté de Blaise Compaoré de modifier la Constitution afin de briguer un nouveau mandat après plus de 27 ans de pouvoir est à l’origine du soulèvement populaire qui le contraint à l’exil en 2014.

En ZAMBIE, Frederick Chiluba a dû y renoncer en 2001 sous la pression populaire, et au MALAWI, le Parlement s’est opposé en 2002 à ce que Bakili Muluzi brigue un 3e mandat en 2004.

Mexique: près de 15 ans de prison pour l’un des assassins du journaliste Javier Valdez

L’un des assassins d’un journaliste mexicain tué en 2017, Javier Valdez Cardenas, collaborateur de l’AFP, a été condamné jeudi à 14 ans et 8 mois de prison, une première dans le pays pour l’homicide d’un représentant de la presse.

Heriberto Picos Barraza, surnommé le Koala, avait été l’un des auteurs de ce crime commis à Cualiacan (nord-ouest), selon le parquet spécialisé dans les délits contre la liberté d’expression (Feadle).

Il avait servi de chauffeur à deux hommes, Juan Francisco Picos Barrueto et Luis Idelfonso Sanchez, qui avaient abattu l’homme le 15 mai 2017 à la sortie de son bureau.

Le meurtre du cofondateur de l’hebdomadaire Riodoce et collaborateur du quotidien La Jornada, salué pour ses enquêtes sur le trafic de drogue, avait provoqué une vague d’indignation internationale.

Le parquet a ordonné que le condamné paie 9 millions de pesos (environ 420.000 euros) à la famille du journaliste. La somme doit être versée par la Commission exécutive d’attention aux victimes (CEAV), une branche du ministère de l’Intérieur.

L’accusation estime que l’assassinat a été commandité par le fils d’un narcotrafiquant, Damaso Lopez Serrano, furieux d’avoir été critiqué dans un article de Riodoce, et aujourd’hui incarcéré aux Etats-Unis. Lopez Serrano, qui aurait versé 100.000 pesos (près de 4.700 euros) et fourni les armes, a toujours nié.

Juan Francisco Picos Barrueto ayant refusé de plaider coupable en échange d’une peine de 20 ans et 8 mois de prison, il doit être jugé en mars comme principal auteur de l’assassinat.

Wanindara, épicentre de la contestation anti-Condé dans la banlieue de Conakry

L’ami de Mamadou Diallo n’est jamais venu au rendez-vous convenu pour regarder la Ligue des champions de foot après la prière du soir. Il est mort ici à Wanindara, banlieue de Conakry et bastion de l’opposition guinéenne au président Alpha Condé.

C’était en novembre 2018, avant le début de la mobilisation dirigée aujourd’hui contre un éventuel troisième mandat de M. Condé.

L’opposition multipliait alors les journées ville morte et les manifestations autour d’enjeux municipaux. Mamadou Bella Baldé, 30 ans, était tombé en sortant de chez lui sur des militaires, qui avaient « ouvert le feu », avait à l’époque expliqué à l’AFP un membre de sa famille.

Son ami se souvient avoir fondu en larmes en voyant son corps. Il est toujours très ému alors que la Guinée est à nouveau le théâtre de manifestations, parfois durement réprimées, contre le projet prêté au président Condé de chercher à se succéder à lui-même fin 2020.

Depuis mi-octobre, au moins 30 civils et un gendarme ont été tués au cours de ces événements qui inquiètent la communauté internationale, selon un décompte de l’AFP.

Une fois de plus, Wanindara est au coeur de la contestation, à l’approche d’un référendum constitutionnel et de législatives que l’opposition entend boycotter et même empêcher dimanche, faisant craindre de nouvelles violences.

« On tire sur les gens, on arrête les gens, on frappe les vieux, on utilise une femme comme bouclier humain. Dans quel pays cela se passe-t-il ? Il n’y a qu’en Guinée que cela arrive », se lamente Mamadou Diallo.

– Image de la Guinée –

Le quartier qui a vu le jour à la fin des années 1970, pauvre mais pas plus qu’un autre selon les standards guinéens, a des airs de village. Ses petites rues en sable parsemées de nids-de-poule mènent à des maisons aux murs sales. Du linge pend aux fenêtres et des vaches fouillent des tas d’ordures à la recherche de nourriture, pendant que des chiens errants s’abritent du soleil sous les camions. En pagne de wax, des femmes vont puiser de l’eau dans un forage collectif.

Wanindara est un des fiefs les plus turbulents de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), le principal parti d’opposition. Ses habitants dénoncent la persistance de violences policières et de disparitions sous le régime d’Alpha Condé.

« La police vient et tire à balles réelles », dit Ibrahim Barry, en expliquant que son fils a été tué le 13 février en allant jouer au football.

Le gouvernement accuse l’opposition d’être à l’origine des violences, à Wanindara comme ailleurs, et lui reproche d’instrumentaliser les victimes pour « salir l’image la Guinée et de la police ».

Assis dans son bureau climatisé sous un portrait d’Alpha Condé, le ministre de la Sécurité, Albert Damantang Camara, évoque une « guérilla urbaine ». « A qui profitent ces morts-là? Qui a intérêt à ce qu’il y ait des morts et qu’on les mette sur le dos des forces de sécurité ? », déclare-t-il à l’AFP.

Même si les partis s’affirment pluralistes, les affiliations se font largement en fonction de l’origine ethnique. Le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) d’Alpha Condé recrute largement parmi les Malinkés, deuxième ethnie du pays, tandis que l’UFDG est soutenue par de nombreux Peuls, qui se sentent abandonnés par le pouvoir, selon l’analyste Kabinet Fofana.

– Axe du mal ou de la démocratie –

Initialement quartier militaire, Wanindara a connu un afflux de population, principalement peule, à la fin des années 1990, selon un chef de quartier, Abou Bangoura. Son activisme politique a vu le jour sous le régime autoritaire de Lansana Conté (1984-2008) et s’est poursuivi sous la présidence Condé, premier président démocratiquement élu en 2010 après un demi-siècle de régimes autoritaires.

La voie rapide qui jouxte le quartier, la route Le Prince, est surnommée, selon les camps, « l’axe de la démocratie » ou « l’axe du mal ».

Un adolescent a encore été tué la semaine dernière pendant des heurts.

Toutes les manifestations n’ont pas été paisibles, reconnaît le chef de quartier Abou Bangoura. Mais de nombreux jeunes expliquent que, s’ils sont descendus dans la rue et ont lancé des projectiles sur les forces de sécurité, c’est pour empêcher qu’elles « fassent du mal » à leurs parents.

Le ministre de la Sécurité affirme qu’il n’y a pas de preuve de la responsabilité des forces de l’ordre et que des enquêtes sont « systématiquement ouvertes ». Douze membres des forces de sécurité ont également été tués dans les heurts, dit-il, un chiffre que l’AFP n’a pas pu vérifier de source indépendante.

Le comportement des policiers, gendarmes et militaires guinéens est dénoncé de longue date par les défenseurs des droits humains. « Tout pointe vers leur responsabilité », estime François Patuel, d’Amnesty International, en invoquant l’existence d’un nombre « incalculable » de témoins.

Incident diplomatique: l’ambassadeur malien en France rappelé à Bamako

Incident diplomatique entre Paris et Bamako: l’ambassadeur malien en France, qui a accusé mercredi des soldats français de « débordements » dans les quartiers chauds de Bamako, a été rappelé dans son pays après avoir provoqué l’ire des autorités françaises pour des propos « faux et inacceptables ».

Au lendemain des déclarations très mal reçues de l’ambassadeur Toumani Djimé Diallo au Sénat incriminant la Légion étrangère, le Mali a décidé jeudi de rappeler son diplomate et de dépêcher son ministre des Affaires étrangères en France pour arrondir les angles, selon des responsables maliens.

Le ministre malien des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, devait partir jeudi soir pour Paris « pour apaiser la situation », d’après une source proche de la présidence.

« Cette visite rentre dans le cadre du renforcement des relations d’amitié et de coopération entre les deux pays », renchérit un communiqué des Affaires étrangères maliennes.

L’ambassadeur malien avait été convoqué plus tôt jeudi au ministère français des Affaires étrangères, a appris l’AFP. « On lui a exprimé notre indignation devant ses propos sans fondement et choquants de la part d’un pays allié dans la lutte contre le terrorisme », a-t-on souligné au Quai d’Orsay.

La veille, l’ambassadeur du Mali en France avait dénoncé devant la commission Défense du Sénat français les « problèmes » posés selon lui par la Légion étrangère sur le sol malien.

« Par moments, dans les +Pigalle+ de Bamako, vous les retrouvez, tatoués sur tout le corps, en train de rendre une image qui n’est pas celle que nous connaissons de l’armée (française). Ça fait peur, ça intrigue », avait-il déclaré, mentionnant explicitement les légionnaires, pourtant absents de la capitale malienne selon l’état-major.

Des propos très mal vécus à Paris, alors que la force Barkhane fait face depuis de nombreux mois à la montée d’un sentiment anti-français au Sahel, et qu’elle redouble parallèlement d’efforts ces dernières semaines pour tenter d’enrayer la spirale de violences dans la région.

– Huile sur le feu –

Les militaires français, présents dans la région depuis 2013 pour lutter contre les jihadistes, viennent de voir leur nombre passer de 4.500 à 5.100 face à la recrudescence des attaques.

Ces violences – souvent entremêlées à des conflits intercommunautaires – ont fait 4.000 morts au Mali, au Niger et au Burkina Faso en 2019, cinq fois plus qu’en 2016, selon l’ONU.

La France a elle-même perdu 13 soldats dans un accident entre deux hélicoptères en opération au Mali, en novembre. Et Paris s’était ouvertement agacé, fin 2019, d’un soutien jugé trop timide de la part notamment des autorités sahéliennes, dont le Mali.

Au sommet du 13 janvier à Pau (sud de la France), réunissant le président français et les chefs d’Etat du G5 Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie), les chefs d’Etat africains avaient été ainsi priés par l’Elysée de « clarifier » leur position sur la présence française au Sahel.

Les propos de l’ambassadeur malien ont remis de l’huile sur le feu et provoqué une réaction épidermique jeudi du cabinet de la ministre des Armées, dans une déclaration transmise à l’AFP.

« Plutôt que de véhiculer et de propager de fausses accusations, nous attendons de l’ambassadeur du Mali qu’il mobilise toute son action pour la mise en œuvre des décisions du sommet de Pau et la réussite de tous », a sèchement asséné le cabinet de Florence Parly, rappelant qu’il n’y a « quasiment plus de soldats français stationnés à Bamako » depuis août 2014.

La veille, l’état-major français avait déjà objecté que les légionnaires n’étaient pas « stationnés à Bamako » et qu’il n’avaient pas vocation à y aller. Ils « n’ont ni quartier libre ni temps de repos hors des bases opérationnelles » de Barkhane, situées dans le nord du pays, avait assuré l’armée française.

Le jour de son audition, l’ambassadeur malien avait déjà essuyé un retour plutôt glacial du sénateur Jean-Marc Todeschini, membre de la commission Défense.

« Je ne peux que regretter vos propos. Vous avez stigmatisé l’armée française », avait-il répondu à l’ambassadeur, estimant que ses propos allaient précisément « contribuer » au sentiment anti-français que le Mali s’était engagé à contrer.

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Italie: scènes de vie quotidienne après cinq jours de quarantaine

Le banc de l’abribus sert de point de livraison. Ceux de « l’extérieur » viennent y déposer packs d’eau, cigarettes et papiers administratifs pour leurs proches coincés depuis maintenant cinq jours en « zone rouge », foyer d’infection du coronavirus dans le nord de l’Italie.

Une petite vie sociale s’est peu à peu organisée aux 35 checkpoints qui parsèment la plaine lombarde et ceinturent dix villes et villages, soit plusieurs dizaines de milliers de personnes.

Les quelque 400 militaires et policiers qui surveillent les checkpoints se relaient par équipes toutes les six heures. Quelque peu laxistes les premiers jours, les contrôles se sont durcis, et l’organisation semble désormais bien rodée.

Quant aux habitants de la zone rouge, les « pestiférés », comme se surnomme l’un d’entre eux en riant, ils viennent quotidiennement jusqu’au barrage discuter avec les militaires, respirer la vie de l’extérieur, prendre livraison de paquets divers.

Salvatore, habillé de la tête au pied en tenue de cycliste, plaisante avec les militaires du barrage. Lui-même est carabinier -et pour cette raison refuse de donner son nom de famille-, coincé à Bertonico en zone rouge, où il continue pourtant de patrouiller le soir.

« J’attends mes collègues de Lodi qui vont m’apporter des cigarettes. Dans la zone rouge, à part les magasins d’alimentation et les kiosques à journaux, tout est fermé », explique-t-il.

– « On marche » –

Arrivent ses deux collègues. Les « Ciao » fusent de part et d’autre de l’abribus, où sont déposées les cigarettes. Distance réglementaire de plusieurs mètres entre l’habitant de la zone rouge et les autres. Une fois ses amis éloignés, Salvatore va récupérer le paquet et laisse sur le banc des dizaines d’euros en liquide : « c’est pour la facture à payer à Lodi », explique-t-il.

Toute la matinée, ces scènes se répètent. Une dame vient apporter des provisions à sa belle-soeur et repart en lançant un sonore « Bonne journée à tous » en direction des militaires. Un vétérinaire récupère des médicaments pour ses bovins. Un comptable passe déposer ses factures et ses impôts à payer à Lodi, hors zone rouge.

Après cinq jours de quarantaine, une fois retombée l’adrénaline créée par une situation exceptionnelle, l’ennui pointe son nez. Alors « on marche ». Sous le soleil radieux, on aperçoit derrière le barrage des familles en promenade, des cyclistes, des joggeurs. « Il n’y a rien d’autre à faire. Heureusement que nous ne sommes pas confinés chez nous », raconte Pietro Mola, un jeune comptable venu au checkpoint pour confier à des amis ses factures à payer.

Mais l’inquiétude grandit – « pas à cause du virus, après tout c’est comme une mauvaise grippe, non ? » – mais en raison des répercussions économiques. Pietro Mola travaille pour 16 entreprises: restaurants, boutiques textiles, pierceur, tatoueurs… Tous dans la zone rouge, tous fermés.

« C’est une chaîne. S’ils ne gagnent pas, je ne gagne pas. Les entreprises qui n’ont pas les reins solides ne vont pas s’en sortir », s’inquiète le jeune comptable, en pensant aux dix jours de quarantaine durant lesquels il faut encore tenir.

USA: la chef des démocrates au Congrès lance un avertissement à Bernie Sanders

La présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi a lancé jeudi un avertissement au favori des primaires démocrates Bernie Sanders, en martelant qu’un candidat devrait impérativement obtenir une majorité absolue des voix pour décrocher l’investiture du parti et défier Donald Trump.

Après ses bons résultats dans les trois premiers Etats qui ont voté, le sénateur indépendant est, à 78 ans, en excellente position dans la course à l’investiture démocrate pour représenter le parti lors de la présidentielle américaine de novembre.

Mais la route est encore longue jusqu’à la convention démocrate de juillet, où, selon les règles du parti, un candidat devra afficher une majorité absolue de délégués pour se déclarer vainqueur lors d’un premier tour, et non une majorité simple.

« La personne qui sera nommée sera la personne qui comptera sur une majorité plus un », a souligné la puissante chef des démocrates au Congrès, Nancy Pelosi, lors d’une conférence de presse.

Si elle a martelé que le leitmotiv du parti était « rassemblement, rassemblement, rassemblement » derrière celui ou celle qui sera choisi par le parti démocrate pour briguer la Maison Blanche, ses propos contredisent directement Bernie Sanders.

Ce dernier a en effet affirmé que le candidat « comptant le plus de voix » devrait être désigné pour porter les couleurs démocrates.

« La volonté du peuple devrait l’emporter, oui », a-t-il répondu lors d’un débat démocrate le 19 février, tandis que ses cinq rivaux sur le plateau défendaient les règles du parti, dont l’obligation d’obtenir une majorité absolue.

On dénombre 3.979 délégués qui sont « assignés » aux différents candidats selon leurs résultats dans les primaires.

Si personne n’obtenait la majorité lors d’un premier tour (1.991 voix), ces délégués deviendraient libres de voter pour quelqu’un d’autre. Et quelque 770 « superdélégués », des notables et élus du parti privés de vote au premier tour, entreraient en piste, avec le pouvoir de faire basculer le scrutin.

Les rivaux modérés de Bernie Sanders, qui est trop à gauche à leurs yeux, affirment que sa victoire aux primaires mènerait à un nouveau mandat de Donald Trump.

Les Etats-Unis, un « grand pays », sont assez résistants « pour supporter un mandat de Donald Trump. Mais deux mandats » feraient payer un trop lourd tribut, a mis en garde Nancy Pelosi.

« Il est donc absolument impératif que nous gagnions, et quel que soit notre candidat, il aura notre soutien sans réserve », a-t-elle affirmé.

Nigeria: un soldat tue quatre de ses collègues avant de se suicider

Un soldat stationné dans le nord-est du Nigeria, région au coeur de l’insurrection jihadiste où de nombreux soldats ont perdu la vie au cours des dernières années, a tué quatre de ses collègues avant de se suicider, a annoncé l’armée.

« Le caporal est devenu fou furieux et a tué quatre de ses collègues avant de retourner l’arme contre lui », a déclaré le porte-parole de l’armée Sagir Musa, dans un communiqué publié mercredi soir.

Deux autres soldats grièvement blessés ont été transportés à l’hôpital de Maiduguri, la capitale de l’Etat du Borno, à plus de 200 km de leur base de Malam Fatori, à la frontière avec le Niger.

Les circonstances du drame n’ont pas encore été déterminées, mais M. Musa a affirmé qu’une enquête a été ouverte.

Le quotidien des soldats nigérians stationnés dans le nord-est du pays est particulièrement difficile.

Les troupes se plaignent régulièrement sur les réseaux sociaux de ne pas recevoir leur solde, du manque de moyens mis à leur disposition ou d’absence de permissions pour aller visiter leur famille.

Le groupe de l’Etat Islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), branche de Boko Haram qui a prêté allégeance à l’EI en 2016, mène des attaques ciblées et très régulières contre les troupes stationnées dans le nord-est, qui ont fait des dizaines voire des centaines de morts dans les rangs de l’armée depuis ces dernières années.

En août 2018, des centaines de soldats ont manifesté à l’aéroport de Maiduguri pendant plusieurs heures, réclamant le droit de pouvoir visiter leur famille.

Le conflit entre les forces armées nigérianes et Boko Haram a fait 35.000 morts depuis 2009. Deux millions de personnes ne peuvent toujours pas regagner leurs foyers.

Ce conflit s’est étendu au Niger, au Tchad et au Cameroun voisins.

Bissau: un candidat à la présidentielle se fait investir malgré la contestation

L’un des candidats à la présidentielle en Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embalo, a prévu de se faire investir président jeudi dans un hôtel de luxe de Bissau, malgré la contestation persistante autour du résultat de l’élection dans ce pays à l’histoire tumultueuse.

M. Embalo compte se faire introniser dans un établissement placé sous bonne garde militaire, alors que la Cour suprême est toujours saisie d’un recours de son adversaire au second tour de la présidentielle du 29 décembre.

Le Premier ministre en exercice, Aristides Gomes, reconnu par la communauté internationale, a dénoncé une tentative de « coup d’Etat » de la part de M. Embalo, dans un pays qui en est coutumier.

M. Embalo, ancien général, ex-Premier ministre et candidat de l’opposition au parti historique PAIGC, a été donné vainqueur par la commission nationale électorale avec 53,55% des voix.

La commission crédite de 46,45% des votes son adversaire Domingos Simoes Pereira, président du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap Vert (PAIGC), la formation qui domine la politique de cette ancienne colonie portugaise depuis son indépendance en 1974.

M. Pereira et le PAIGC dénoncent des fraudes, réclament qu’on recompte les bulletins et s’en remettent à la Cour suprême d’une décision finale. La Guinée-Bissau se retrouve ainsi en proie depuis deux mois à un imbroglio post-électoral dont n’a pas besoin ce petit pays pauvre d’environ 1,8 million d’habitants confronté à une multitude de défis.

M. Embalo, 47 ans, qui a fait campagne sur le thème de la rupture avec le PAIGC, dit que la décision n’appartient pas à la Cour suprême et fait valoir que la commission électorale, sommée par la Cour suprême de vérifier les résultats, les a confirmés à plusieurs reprises.

– L’inconnue internationale –

Il a choisi de passer outre l’arrêt attendu de la Cour suprême, mais aussi l’approbation du président en exercice du Parlement. Le déploiement d’un dispositif militaire important dans et autour de l’hôtel où a lieu la cérémonie indique que l’armée, acteur de bien des crises bissau-guinéennes, a choisi de laisser faire.

On ignore la réaction de la communauté internationale. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédeao), partenaire et médiatrice historique dans le pays, a félicité M. Embalo en janvier. Sollicitée à plusieurs reprises pour savoir si M. Embalo serait à présent considéré officiellement comme le président, elle n’a pas répondu.

Egalement interrogé par l’AFP, le département d’Etat américain a renvoyé mercredi aux félicitations adressées en janvier à M. Embalo par les Etats-Unis.

Cet imbroglio est le dernier épisode en date d’une histoire contemporaine chaotique. Depuis l’indépendance, la Guinée-Bissau a connu quatre coups d’Etat et seize tentatives plus ou moins avancées, plus qu’aucun pays dans le monde en dehors de la Somalie, selon un centre de recherche.

Le dernier putsch remonte à 2012. Depuis la présidentielle de 2014, le pays s’est engagé sur la voie d’un retour à l’ordre constitutionnel, ce qui ne l’a pas préservé de turbulences à répétition, mais sans violence, entre le camp du chef de l’Etat sortant José Mario Vaz et celui du chef du PAIGC.

La stabilité est pourtant un enjeu majeur. Le pays est l’un des plus démunis du monde. L’instabilité et la pauvreté y ont favorisé l’implantation de narcotrafiquants, qui utilisent le territoire pour faire transiter la cocaïne d’Amérique latine vers l’Europe, avec la complicité suspectée de cadres de l’armée.

La Guinée-Bissau était classée 172e sur 180 pays en 2018 par Transparency International, ONG spécialisée dans la lutte contre la corruption.

Face à ses maux, le pays a un pressant besoin de réformes auxquelles la paralysie des dernières années ne s’est pas prêtée.

Niger: importantes surfacturations dans des achats d’équipements pour l’armée

Un audit demandé par le président nigérien Mahamadou Issoufou révèle des surfacturations ainsi que des livraisons non-effectuées dans des achats d’équipements pour l’armée, qui combat depuis 2015 les jihadistes dans le sud-est et l’ouest du pays, indique jeudi un communiqué du gouvernement.

Cet audit a relevé « des insuffisances dans les procédures de passation des marchés » ainsi que « dans le suivi de leur exécution », souligne un communiqué lu à la radio publique par le porte-parole du gouvernement, Zakaria Abdourahamane.

« Le gouvernement a décidé de faire rembourser les montants indûment perçus, soit en raison de surfacturation, soit au titre de paiement de services et livraisons non effectuées ou partiellement effectuées », affirme le texte qui ne précise pas les montants concernés, ni les personnalités mises en cause.

Il a également décidé de « transmettre aux tribunaux compétents les dossiers des fournisseurs qui refuseraient de s’exécuter » et « de prendre les sanctions administratives appropriées à l’endroit des agents publics incriminés ».

L’audit a été mené sous la supervision du ministre de la Défense Issoufou Katambé, un proche du chef de l’Etat, nommé à ce poste en septembre 2019. Dès sa prise de service, M. Katambé avait entrepris une tournée d’inspection de plusieurs positions de l’armée, notamment sur les front sud-est, proche du Niger, et ouest, frontalier du Mali et du Burkina.

L’audit a porté sur « la dilapidation » de milliards de FCFA (millions d’euros) « destinés à l’armement et à l’équipement des forces armées nigériennes », impliquant des hommes d’affaires et des responsables gouvernementaux, selon des journaux privés nigériens. Des investigations ont été menées en Russie, en Israël et en Chine et portent sur des achats « de munitions et matériels défectueux » , d’après les journaux.

Entre décembre 2019 et janvier 2020, près de 200 soldats nigériens ont été tués dans des attaques revendiquées par l’Etat islamique (EI) dans la région de Tillabéri, vaste région instable de près de 100.000 km2, riveraine de la zone des trois frontières (Niger, Burkina Faso et Mali).

Tout le Sahel – en particulier le Mali, le Niger et le Burkina – est visé par les assauts de plus en plus audacieux de groupes islamistes, en dépit du renforcement des armées locales et de la présence de 4.500 militaires français de la force antiterroriste Barkhane. Selon l’ONU, les attaques jihadistes au Mali, au Niger et au Burkina ont fait 4.000 morts en 2019.

Nigeria: 24 bébés et des adolescentes enceintes libérées d’une « usine à bébés »

La police nigériane a libéré 24 bébés et quatre adolescentes enceintes d’une maternité illégale dans la ville pétrolière de Port-Harcourt dans le sud du Nigeria, a annoncé mardi un porte-parole de la police.

« Lors d’une opération d’infiltration menée mardi, nos hommes ont découvert une organisation s’adonnant à la traite d’enfants à Woji à Port-Harcourt où 24 bébés âgés entre un et deux ans et quatre adolescentes enceintes ont été secourus », a précisé à l’AFP Nnamdi Omoni.

Il a ajouté que les victimes « fragiles et mal nourries » ont été hospitalisées. Des enquêtes sont en cours pour retrouver les personnes qui ont dirigé cet établissement.

Plusieurs autres « usines à bébés » du même type ont été découvertes ces dernières années par la police nigériane. Dans certains cas, les bébés pourraient faire l’objet de rituels de magie noire.

Les opérations de police visant à fermer ces « usines » sont relativement fréquentes au Nigeria, notamment dans le sud. Des jeunes filles piégées avec des promesses d’emplois se retouvent enceintes et forcées d’accoucher des enfants à « vendre ».

Les bébés garçons sont généralement vendus pour 500.000 nairas (1.400 USD, 1.250 euros) tandis que les filles sont « vendues » pour 300.000 nairas, a indiqué la police dans des cas précédents.

Riche en pétrole, le Nigeria possède une des plus grandes économies d’Afrique, mais il est un des pays au monde qui compte le plus d’habitants vivant dans une pauvreté extrême.

L’Unesco a classé le trafic d’êtres humains en troisième place des crimes les plus fréquents commis au Nigeria, après la corruption et le trafic de drogue.

L’UA voit des divergences avec l’UE sur l’homosexualité et la CPI

Le président de la commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a pointé du doigt jeudi les « différences » entre Africains et Européens sur les questions de justice internationale ou de droits des homosexuels, lors d’un sommet destiné à renforcer les liens entre les deux continents.

« Certainement, nous avons nos différences: la justice criminelle internationale, l’orientation et l’identité sexuelle, la peine de mort, la centralité de l’Union africaine dans certaines crises, etc… », a déclaré M. Faki lors d’une conférence de presse marquant l’ouverture à Addis Abeba d’un sommet UA/UE.

Qualifiant ces différences de « normales », il a estimé qu’Africains et Européens devaient les reconnaître et les accepter pour les surmonter.

Le sommet de jeudi marque la deuxième visite de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, au quartier général de l’UA à Addis Abeba, depuis sa prise de fonction le 1er décembre.

Une semaine après avoir commencé à occuper son poste, elle avait choisi la capitale éthiopienne pour son premier déplacement hors de l’UE, afin de lancer un « fort message politique » sur la force du partenariat entre l’Europe et l’Afrique.

Mme von der Leyen travaille actuellement à l’élaboration d’une nouvelle « stratégie africaine » pour l’UE, qui devrait être dévoilée en mars.

Lors de son discours d’ouverture, elle a affirmé que les deux continents étaient des « partenaires naturels », et a mis l’accent sur les secteurs de coopération potentiels pour eux comme le commerce et la lutte contre le réchauffement climatique.

Puis lors de la conférence de presse, elle a estimé que les deux blocs devraient être en mesure de travailler ensemble malgré les divergences mises en exergue par M. Faki.

« C’est l’essence même d’un bon partenariat et d’une bonne amitié », a-t-elle déclaré. « Vous bâtissez sur des fondations solides avec des projets sur lesquels vous pouvez travailler, et vous êtes capables de dire très clairement quelles sont vos différences ».

« Nous essayons de convaincre, mais nous reconnaissons qu’il y a des positions différentes », a-t-elle ajouté. « Nous ne devons pas nous attendre à ce que l’Union africaine s’adapte à l’Union européenne. »

La majorité des pays africains disposent de législations interdisant ou réprimant l’homosexualité, parfois punie de la peine de mort.

Et plusieurs pays africains ont résisté aux efforts de la Cour pénale internationale (CPI) pour juger des dirigeants du continent, le Burundi devenant même en 2017 le premier pays au monde à s’en retirer.

L’UE cherchera à utiliser le sommet de jeudi pour promouvoir le commerce et la coopération économique, afin de répondre « au flot d’investissements chinois sur le continent », a estimé Mikaela Gavas, experte auprès du Center for Global Development (CGD).

Mais la question des droits de l’homme reste un sujet potentiel de confrontation, a-t-elle mis en garde. « Les pays africains ne voudront pas qu’on leur donne des leçons sur la gouvernance et les droits de l’homme. »

Risque de « crise humanitaire majeure » au Zimbabwe, selon le FMI

Le Zimbabwe est confronté à un risque de « crise humanitaire majeure », selon le Fonds monétaire international (FMI), qui table pour 2020 sur une croissance quasi-nulle de son économie et la persistance d’une grave insécurité alimentaire.

« Dans la perspective d’une nouvelle récolte insuffisante, la croissance devrait tourner autour de zéro et les pénuries de nourriture continuer », a écrit jeudi le FMI.

« Si le budget 2020 (du pays) inclut une hausse significative des dépenses sociales, elle ne suffira probablement pas à satisfaire tous les besoins. Faute d’une hausse de l’aide, les risques d’une crise humanitaire majeure sont élevés », a ajouté l’institution financière après sa dernière inspection dans le pays.

Le Zimbabwe est englué depuis vingt dans une crise économique sans fin, qui s’est récemment aggravée avec le retour de l’hyperinflation, des pénuries de produits de base et des coupures d’électricité généralisées.

Comme le reste de l’Afrique australe, le pays souffre en outre d’une grave sécheresse qui pèse sur les récoltes.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies estime que la moitié de ses 15 millions d’habitants se trouve actuellement en situation de grave insécurité alimentaire.

Malgré ses promesses maintes fois répétées, le président Emmerson Mnangagwa, qui a succédé fin 2017 à l’autocrate Robert Mugabe, ne parvient pas à redresser le pays.

Il y a un an, la hausse des prix de l’essence avait provoqué des émeutes meurtrières, sévèrement réprimées par le régime.

Dans sa déclaration, le FMI a exhorté le Zimbabwe à renouer au plus vite avec la communauté internationale afin d’obtenir la levée des sanctions qui le frappent depuis l’ère Mugabe.

L’aide humanitaire prise entre deux feux au Cameroun anglophone

Humanitaires kidnappés, convois pillés, civils attaqués lors des distributions alimentaires: au Cameroun anglophone, ravagé par de sanglants combats entre militaires et rebelles indépendantistes mais aussi les exactions et crimes des deux camps, porter assistance aux civils est de plus en plus périlleux.

En une semaine, trois distributions dans les deux régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ont été empêchées, voire endeuillée, selon des témoignages recueillis au téléphone par l’AFP.

Le 19 février, un homme de 29 ans a été tué par balle à Ekona, dans le Sud-Ouest, par des militaires qui ont attaqué des villageois attendant des rations alimentaires d’une ONG partenaire du Programme alimentaire mondial (PAM), selon cette agence de l’ONU et des témoins.

« Nous étions 220 déplacés sortis de la brousse où nous nous cachons, quand dix militaires sont arrivés et nous ont frappés », raconte l’un d’eux, sous couvert de l’anonymat, ajoutant: « Ils ont mis de côté sept hommes, qu’ils suspectaient d’être des séparatistes, et ont tiré dans la jambe d’un jeune, qui s’est vidé de son sang ». Un meurtre confirmé par un autre villageois et le responsable d’une organisation humanitaire régionale.

Ce sont des « tentatives de désinformation » qui visent « à ternir l’image de nos forces », a réagi auprès de l’AFP le porte-parole de l’armée, le colonel Cyrille Atonfack Guemo.

Selon lui, le camion du PAM aurait été pris « accidentellement entre deux feux », militaires contre « terroristes sécessionnistes ». « Il est inconcevable que l’armée, dont la mission est de travailler à l’amélioration des conditions de vie (…), s’oppose en même temps au travail des organisations humanitaires », affirme l’officier.

– Traces de torture –

Selon un des témoins, les « mêmes soldats » avaient déjà attaqué une distribution au même endroit deux mois plus tôt. « Le 24 décembre, un volontaire de l’ONG a été arrêté, retenu dans une gendarmerie, et son corps, présentant des traces de torture, a été retrouvé début janvier », a confirmé à l’AFP un responsable d’un organisation humanitaire, qui ne veut pas être nommé.

Le 20 février, c’est une distribution de Caritas à Bafmeng, dans le Nord-Ouest, qui a essuyé une attaque, d’un groupe armé cette fois. Environ 70 personnes, dont 50 enfants, ont dû se réfugier dans le camion de l’ONG qui a quitté précipitamment les lieux, témoigne son directeur au Cameroun, le père Paul Njokikang.

Le prêtre assure aussi qu’il a été pris en otage par des groupes armés séparatistes à trois reprises au cours d’opérations humanitaires et détenu 24 heures par l’armée.

Dans la même région, en novembre, un humanitaire avait été tué par des hommes armés, selon l’ONU.

L’aide médicale n’est pas épargnée: le 19 février, des militaires ont poursuivi une voiture jusque dans l’enceinte d’un hôpital soutenu par Médecins sans frontière (MSF), dans le Nord-Ouest. Sur le parking réservé aux ambulances, un des militaires a ouvert le feu tuant le conducteur, selon l’ONG.

« Le soldat a été immédiatement mis aux arrêts » et « une enquête aussitôt ouverte », plaide le ministère de la Défense.

MSF a appelé « toutes les parties prenantes (…) au respect absolu des installations médicales, des ambulances, du personnel médical et des patients », rappelant que ses équipes « ont fait l’objet de menaces régulières, notamment d’intimidation armée, de la part des différentes parties ».

« Nous sommes pris entre deux feux », se plaint aussi Ayah Abine, président de l’ONG camerounaise Ayah Foundation.

– Kidnappé trois fois –

« J’ai été menacé par des militaires » en apportant l’aide à des réfugiés, explique-t-il, ajoutant: « des groupes armés ont aussi kidnappé des membres de mon ONG trois fois ».

M. Abine a été convoqué le 20 février chez les gendarmes à Yaoundé, suspecté de livrer des armes aux séparatistes, puis relâché sans poursuites.

Plusieurs responsables d’ONG internationales ont assuré à l’AFP que Ayah Foundation était neutre. « C’est de l’intimidation », commente l’un d’eux.

Il émerge « un sentiment de méfiance vis-à-vis de certaines organisations humanitaires, dont des actes contribuent à installer le doute quant à leur intégrité », réagit le colonel Atonfack. « Des ambulances appartenant à MSF ont été retrouvées transportant des combattants armés ainsi que des armes et munitions », accuse-t-il.

MSF « réfute de la façon la plus catégorique qui soit ce type d’accusations, graves et dangereuses pour nos patients et nos équipes », s’emporte l’ONG internationale auprès de l’AFP, assurant que ses « ambulances ne servent qu’à transporter des patients non armés, ayant besoin de soins immédiats, sans discrimination ».

« Un grand nombre d’incidents contre des humanitaires sont rapportés, des convois pillés, des kidnappings… Or l’aide est déjà en deçà des besoins », s’inquiète Jérôme Fontana, chef des opérations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Cameroun.

Depuis trois ans, le conflit a fait plus de 3.000 mort et forcé près de 700.000 personnes à fuir leur domicile. La majorité des écoles et centres de santé ont fermé. Des villages entiers ont été brûlés.

« Nous vivons dans la peur, dans la brousse avec les animaux sauvages, où des femmes accouchent. Il n’y a ni eau potable, ni nourriture décente », s’émeut un des déplacés d’Ekona, qui a peur se rendre aux distributions d’aide.

Dans les deux régions, seuls 32,17% des besoins humanitaires ont été financés en 2019, selon l’ONU. Mais « le principal obstacle n’est pas financier, c’est le manque de sécurité », assène M. Fontana.

L’Union africaine compte déployer 3.000 soldats au Sahel

L’Union africaine (UA) a annoncé jeudi qu’elle comptait envoyer 3.000 soldats au Sahel, pour tenter d’enrayer la progression du jihadisme et la dégradation de la sécurité dans la région, sans toutefois préciser les modalités et le calendrier exact de ce déploiement.

La décision, prise lors du sommet de l’UA début février, n’avait pas encore été rendue publique. Elle a été annoncée en conférence de presse à Addis Abeba par le commissaire de l’UA à la paix et la sécurité, Smaïl Chergui, dans le cadre d’un sommet UA/UE.

« Sur la décision du sommet de travailler au déploiement d’une force de 3.000 hommes pour aider les pays du Sahel à affaiblir les groupes terroristes, je pense que c’est une décision sur laquelle nous allons travailler avec le G5 Sahel et la Cédéao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest) », a déclaré M. Chergui.

« Cette décision a été prise parce que, comme vous le voyez (…), la menace progresse et devient plus complexe », a-t-il ajouté.

Le G5 Sahel, basé à Nouakchott, et composé de la Mauritanie, du Mali, du Burkina Faso, du Niger et du Tchad, fournit depuis 2014 un cadre de coopération pour la sécurité et le développement de ces cinq pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest.

En 2017, face à la poussée des attaques jihadistes et à la sévère dégradation de la sécurité dans le centre du Mali, ainsi qu’au Burkina Faso et au Niger voisins, le G5 Sahel a réactivé son projet de force conjointe, initialement lancé en 2015.

Cette force, qui doit compter à terme 5.000 hommes pour lutter contre les jihadistes dans les zones frontalières entre les pays membres, peine à monter en puissance.

Les conclusions finales du sommet de l’UA n’ont toujours pas été publiées, mais les diplomates ont confirmé le déploiement prévu.

« Le sommet a décidé de déployer environ 3.000 hommes pour une période de six mois pour aider les pays du Sahel à affronter la menace à laquelle ils font face », a déclaré à l’AFP Edward Xolisa Makaya, l’ambassadeur sud-africain auprès de l’UA.

« C’est juste un signe ou un geste de solidarité avec les peuples du Sahel », a-t-il ajouté, disant espérer que ce déploiement aurait lieu « dans le cours de l’année ».

– Appel à contributions –

Mais certaines modalités restent à régler. Aucun pays ne s’est encore officiellement dit prêt à envoyer des troupes, et le mode de financement du projet n’est pas non plus connu.

« Bien entendu, les États membres ont été incités à faire une offre de contribution, et certains l’ont fait durant les discussions. Mais nous n’avons pas le droit de donner leur nom pour le moment », a précisé M. Makaya.

L’Afrique du Sud a pris lors du dernier sommet la présidence tournante de l’UA et envisage d’accueillir un sommet extraordinaire de l’organisation panafricaine sur les questions sécuritaires en mai.

Elissa Jobson, experte auprès de l’International Crisis group (ICG), a exprimé des doutes sur l’efficacité de l’initiative de l’UA.

« Même si c’est bien de voir que les dirigeants de l’Union africaine montrent un réel intérêt pour le conflit au Sahel et sentent qu’ils doivent faire quelque chose, le déploiement de soldats n’est pas forcément la réponse adéquate », a-t-elle estimé.

Ce déploiement devrait « s’inscrire dans une stratégie politique bien conçue, qui devrait aussi inclure le dialogue avec les groupes jihadistes dans la région », a-t-elle ajouté.

Les violences jihadistes – souvent entremêlées à des conflits intercommunautaires -, ont fait 4.000 morts en 2019 au Burkina Faso, au Mali et au Niger, cinq fois plus qu’en 2016, selon l’ONU, malgré la présence de forces africaines, onusiennes et internationales.

Lors de la même conférence de presse, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a toutefois considéré que la mesure était « très bienvenue ».

« Je pense que nous avons suffisamment de capacité de coordination logistique pour tout gérer ensemble », a-t-il fait valoir.

L’UE et ses États membres ont débloqué quelque 155 millions d’euros pour soutenir la Force conjointe du G5 Sahel depuis sa création, dont près de 70% ont déjà été décaissés.

L’UE a en outre décidé d’un financement additionnel de 138 millions d’euros, confirmé par M. Borrell lors du sommet de Pau entre la France et le G5 Sahel le 13 janvier.

En Caroline du Sud, l’électorat noir a le destin des candidats démocrates en main

Will Jackson a suivi trois des candidats à l’investiture démocrate, mais il n’arrive pas à décider lequel sera capable de battre Donald Trump en novembre. Son vote samedi, comme celui de la communauté noire de Caroline du Sud, sera pourtant un tournant dans la course à la Maison Blanche.

« Mon principal objectif est de voter pour quelqu’un qui battra Trump », souvent perçu par les minorités comme un président raciste ayant libéré la parole des suprémacistes blancs, assure à l’AFP cet ancien combattant de 73 ans.

Après trois scrutins disputés dans des Etats majoritairement blancs (Iowa, New Hampshire) ou à forte minorité hispanique (Nevada), celui de Caroline du Sud est le premier où la communauté afro-américaine aura une influence décisive.

Dans cet Etat, 60% des Noirs votent démocrate et leur soutien est crucial pour devenir l’adversaire du milliardaire républicain à la présidentielle de novembre.

Casquette de l’armée vissée sur la tête, M. Jackson a successivement suivi Pete Buttigieg, premier homosexuel à avoir une réelle chance d’obtenir l’investiture, l’ancien vice-président Joe Biden lors d’une réunion à Georgetown, puis le milliardaire et philanthrope Tom Steyer à Myrtle Beach.

Mais il reste indécis, alors que le scrutin de Caroline du Sud pourrait en outre influencer les résultats du « Super mardi » le 3 mars, quand voteront 14 Etats dont plusieurs avec une démographie similaire.

La Caroline du Sud est « un bon baromètre du vote des électeurs noirs au niveau national », dit à l’AFP Robert Greene, professeur d’histoire à l’Université Claflin. Et historiquement, tous les vainqueurs de la primaire dans l’Etat ont emporté l’investiture, à une exception près en 2004.

– Un candidat qui a ses chances –

« Joe Biden serait un grand président et s’il gagne, cela lancera sa campagne », explique Will Jackson. L’ancien vice-président américain, très populaire parmi la minorité noire, compte sur le scrutin de samedi pour revenir dans la course après des débuts ratés.

Ancien numéro deux de Barack Obama, premier président noir des Etats-Unis, Joe Biden s’est dit cette semaine sûr de sa victoire samedi grâce au soutien de cet électorat, son « pare-feu » comme le qualifie la presse locale.

« C’est la base de mon soutien, durant toute ma carrière. C’est l’une des raisons pour lesquelles Obama m’a choisi », a affirmé mardi M. Biden lors du dernier débat démocrate à Charleston.

A Georgetown, Ama Saran, retraitée d’une soixantaine d’années, fait la queue pour une réunion publique de M. Biden. Elle salue son « expérience » et voit en lui un « guerrier ».

Les autres candidats « ont toute une palette de choses qu’ils espèrent faire, mais qui ne se concrétiseront probablement pas », explique-t-elle.

« Je veux soutenir quelqu’un qui sait ce dont a besoin ce pays et qui a déjà montré qu’il sait comment lui fournir », dit Mme Saran.

La question est de savoir si, à 77 ans et après de multiples gaffes depuis le début de la campagne, M. Biden reste un candidat qui a des chances d’être élu face à Donald Trump.

Pour Kendall Deas, professeur de sciences politiques à l’Université de Charleston, Joe Biden « est connu des électeurs afro-américains (de l’Etat) et cela aide » mais « ils l’ont aussi vu trébucher » lors des premiers scrutins alors qu’il était en tête des sondages nationaux.

Il est donc normal que ces électeurs « considèrent les autres options et regardent qui sont les autres candidats ».

Bernie Sanders, qui fait désormais figure de grand favori malgré son étiquette « socialiste », attire les minorités en promettant un système de santé universel et gratuit.

Tom Steyer, qui finance sa campagne à coups de centaines de millions de dollars, veut lui indemniser les descendants d’esclaves.

La primaire de samedi est aussi cruciale pour Pete Buttigieg qui, à 38 ans, s’est fait critiquer pour sa gestion des problèmes raciaux à South Bend, ville moyenne de l’Indiana dont il a été maire de 2012 à 2020.

« Mayor Pete » a tenté de rassembler cette semaine en rencontrant le très respecté révérend Al Sharpton.

« Je suis conscient que je ne saurai jamais ce que ça fait de marcher dans la rue et de sentir les regards, d’être considéré dangereux à cause de ma couleur de peau », a-t-il déclaré. « Donc le mieux que je puisse faire est d’écouter ceux pour qui c’est le cas (…) et leur demander de construire une vision. »

Grèce: toujours des manifestations anti-migrants, appel au dialogue

Plus d’un millier d’habitants de Lesbos ont manifesté jeudi à Mytilène, chef-lieu de l’île, contre un nouveau camp de migrants, le gouvernement appelant au dialogue au lendemain de violents affrontements entre manifestants et policiers.

Plusieurs associations de commerçants de Lesbos et des syndicats proches du parti communiste grec, à l’origine de la manifestation, ont également appelé à la poursuite de la grève sur l’île. Les magasins étaient fermés jeudi pour la deuxième journée consécutive.

« Ni de camp fermé, ni de camp ouvert sur les îles », scandaient les manifestants qui ont marché pacifiquement.

Sur l’île proche de Chios, des centaines de personnes ont également manifesté jeudi et poursuivi la grève.

L’ambiance était plus calme sur ces îles jeudi après les violents incidents de mercredi ayant fait plus de 60 blessés, la plupart des policiers des forces anti-émeutes.

Après des semaines de pourparlers infructueux avec les autorités locales, le gouvernement avait envoyé lundi par bateau des engins de chantier et la police anti-émeutes, provoquant l’indignation des insulaires et les critiques de l’opposition de gauche.

« L’écrasante majorité des forces anti-émeutes ont quitté jeudi matin les îles et rentreront en Grèce continentale », a confirmé jeudi à l’AFP un porte-parole de la police, Thodoros Chronopoulos.

« 43 policiers ont été blessés légèrement à Lesbos mercredi mais ils sont hors de danger », a-t-il précisé.

Le porte-parole du gouvernement Stelios Petsas a indiqué que « la première phase des travaux de terrassement s’est achevée sur les sites de construction ( des camps à Lesbos et Chios) et que les forces policières devaient rentrer ».

– Face-à-face tendu –

La Grèce est redevenue en 2019 la première porte d’entrée en Europe des demandeurs d’asile. Devant l’augmentation du flux migratoire, le gouvernement conservateur avait annoncé en novembre que les camps surpeuplés de Lesbos, Samos et Chios en mer Egée seraient fermés cette année.

Ils seront remplacés par de nouvelles installations « fermées » d’une capacité d’au moins 5.000 personnes chacune, qui devraient être opérationnelles mi 2020, selon le gouvernement.

Plus de 38.000 demandeurs d’asile s’entassent dans des conditions sordides dans les camps actuels des îles de Lesbos, Samos, Chios, Leros et Kos, officiellement prévus pour 6.200 personnes.

Mais les habitants des îles s’opposent à la construction de nouveaux camps: vivant avec les migrants depuis 2015, année de la grande crise migratoire, ils réclament leur transfert en Grèce continentale et la construction de petits centres d’enregistrement d’un millier de personnes chacun.

« L’île est devenue une immense prison de migrants (…) nous avons exprimé notre solidarité toutes ces années, mais il faut décongestionner les îles », a indiqué Michael Hakas, 47 ans, employé à l’université de Mytilène, qui a manifesté jeudi.

Mercredi à Lesbos, le face-à-face tendu entre habitants et forces anti-émeutes a duré toute la journée: des centaines de personnes rassemblées à Antamanides, un village proche du site de construction d’un nouveau camp, ont jeté des pierres vers la police, qui a riposté avec du gaz lacrymogène, des grenades assourdissantes, un canon à eau et des balles en plastique, selon un photographe de l’AFP.

– Appel au dialogue –

Mercredi soir, environ 2.000 personnes ont manifesté devant une caserne où se trouvaient les policiers avant de tenter d’y pénétrer. La police anti-émeutes a riposté avec du gaz lacrymogène tandis que certains habitants ont tiré avec leurs carabines de chasse, selon un photographe de l’AFP.

A Chios, 2.000 personnes ont aussi manifesté contre la construction d’un nouveau camp. Selon des médias locaux, un groupe de manifestants a fait irruption dans une chambre d’hôtel occupée par des policiers et les a tabassés, en blessant huit.

Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a indiqué jeudi lors d’un conseil des ministres qu’une enquête serait ouverte après les dénonciations sur « l’usage de violence disproportionnée » par des habitants des îles où, selon lui, « il faut isoler les éléments extrêmes ».

Il a appelé les maires des îles à participer à une réunion jeudi soir à Athènes en vue d’apaiser la situation.

« Il faut privilégier le dialogue, la guerre a besoin d’une trêve », a indiqué jeudi Stigmatisé Karmans, le maire de Chios, à la radio RealFm, soulignant qu’il allait se rendre à Athènes pour participer à la réunion avec le Premier ministre.

L’Inde ébranlée par les violences intercommunautaires à Delhi

L’Inde était ébranlée jeudi par les violences intercommunautaires qui ont fait 33 morts à New Delhi, dans un contexte de polarisation croissante du géant d’Asie du Sud gouverné par les nationalistes hindous du Premier ministre Narendra Modi.

Des émeutiers armés de pierres, de sabres et parfois de pistolets ont semé le chaos et la terreur depuis dimanche dans des faubourgs populaires du nord-est de la capitale, éloignés d’une dizaine de kilomètres du centre. Des heurts autour d’une loi controversée sur la citoyenneté ont dégénéré en affrontements communautaires entre hindous et musulmans.

Quelques incidents isolés se sont produits dans la nuit de mercredi à jeudi dans la mégapole, mais aucune nouvelle flambée majeure n’est survenue. Les autorités ont déployé en nombre mercredi des policiers et paramilitaires en lourdes tenues antiémeute.

Sunil Kumar, directeur du principal hôpital de la zone, a indiqué à l’AFP avoir recensé 30 morts dans son établissement. Un autre hôpital a, lui, fait état de trois décès en lien avec ces affrontements.

Plus de 200 personnes ont aussi été blessées, beaucoup par balles. Cette flambée de violences intercommunautaires, pour laquelle la police a interpellé 100 personnes, est la pire à frapper la capitale depuis les massacres de Sikhs en 1984 en représailles à l’assassinat d’Indira Gandhi.

Selon une liste de personnes décédées dans le principal hôpital, que l’AFP a consultée, les victimes semblaient à peu près autant hindoues que musulmanes, à en juger d’après leur nom.

Lors de multiples incidents, des groupes armés hindous s’en sont pris à des lieux et à des personnes identifiés comme musulmans, au cri du slogan religieux « Jai Shri Ram » (« Loué soit le dieu Ram »).

Plusieurs mosquées ont été brûlées dans la zone. Un drapeau hindou, représentant le dieu-singe Hanuman, a été hissé sur le minaret d’une mosquée mise à sac, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« Je m’inquiète des informations faisant état d’inaction de la police devant les attaques contre les musulmans par d’autres groupes », a déclaré jeudi Michelle Bachelet, Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.

– Communauté internationale silencieuse –

Sur place jeudi, la tension restait prégnante et la méfiance régnait. Une équipe de l’AFP a fait face à des réactions extrêmement hostiles de la part d’habitants.

Dans le quartier d’Ashok Nagar, principalement composé d’hindous, les émeutiers ont incendié les maisons des familles musulmanes.

« Personne (des autorités, ndlr) n’est venu nous aider. C’est nos voisins hindous qui nous ont aidés. Ils nous ont assistés pour arroser le feu. Ils ont apporté des seaux d’eau. Ils nous préparent du thé. Ils nous demandent sans cesse si nous avons besoin de quelque chose », a témoigné Bilkis, une mère de sept enfants dont le domicile a été en grande partie endommagé.

Les capitales mondiales sont restées globalement silencieuses sur ces violences, à l’exception d’Ankara. Se posant de longue date en défenseur des musulmans dans le monde, le président turc Recep Tayyip Erdogan a dénoncé jeudi les « massacres » commis selon lui par les hindous contre les musulmans.

En visite d’État en Inde au moment de l’embrasement, le président américain Donald Trump a esquivé en conférence de presse une question sur le sujet, disant ne pas avoir discuté de ces émeutes avec Narendra Modi.

Les violences ont éclaté dimanche soir lorsque des groupes hindous se sont opposés à une manifestation de musulmans contre une loi controversée sur la citoyenneté. Cette législation, jugée discriminatoire pour les musulmans par ses détracteurs, est à l’origine d’un vaste mouvement de contestation qui secoue l’Inde depuis décembre.

La loi controversée a cristallisé les craintes de la minorité musulmane – 200 millions du 1,3 milliard d’Indiens – d’être reléguée au rang de citoyens de seconde classe, dans cette nation où les hindous représentent 80% et sujette à une crispation politico-religieuse ces dernières années.

Les détracteurs de Narendra Modi l’accusent de vouloir transformer l’Inde laïque en un pays purement hindou. Le chef de gouvernement indien, au pouvoir depuis 2014 et largement réélu l’année dernière, a appelé mercredi ses concitoyens à « la paix et la fraternité ».

Ses adversaires politiques pointent toutefois du doigt les discours incendiaires tenus par des responsables de son parti, notamment lors de la campagne pour des élections locales à Delhi au début de l’année.

Des représentants du Bharatiya Janata Party (BJP), avaient assimilé les manifestants contre la loi sur la citoyenneté à des « jihadistes », certains appelant même à les incarcérer ou à les abattre.

Les émeutes de Delhi « étaient en germe depuis longtemps », a estimé l’éminent intellectuel Pratap Bhanu Mehta dans une tribune publiée jeudi par le quotidien Indian Express.

« Il ne fait aucun doute que l’État aurait pu stopper la violence plus rapidement s’il l’avait voulu », a-t-il affirmé, s’inquiétant que ces événements soient « un prélude à un possible pogrom, ou au moins une ghettoïsation » des musulmans en Inde.

Afghanistan: un accord Etats-Unis/talibans et des incertitudes

Washington et les talibans doivent signer samedi à Doha un accord visant à préparer une sortie des Etats-Unis de la plus longue guerre de leur histoire et à lancer des discussions de paix inter-afghanes.

L’accord sera présenté comme le début d’une nouvelle ère pour l’Afghanistan, pays pauvre ravagé par la guerre depuis 40 ans, et laisse entrevoir la fin de l’intervention américaine lancée le 7 octobre 2001 en réponse aux attentats du 11-Septembre.

Mais personne ne sait de quoi sera fait l’avenir du pays après l’accord, avec des interrogations sur les intentions réelles des talibans et la capacité des protagonistes afghans à mettre fin à la crise politique.

Plus de 100.000 civils afghans ont été tués ou blessés au cours de la dernière décennie, selon l’ONU, et le conflit a coûté aux contribuables américains plus de 1.000 milliards de dollars (environ 914 mds d’euros) en frais militaires et de reconstruction depuis 2001.

Les négociations entre les talibans et les Etats-Unis, avec l’intermédiaire qatari, ont échoué à plusieurs reprises en raison de la violence qui continue de faire rage en Afghanistan.

Bien que le contenu de l’accord n’ait pas été dévoilé, on s’attend à ce que le Pentagone commence à retirer des troupes d’Afghanistan, où sont actuellement basés entre 12.000 et 13.000 hommes. Les Etats-Unis ont déclaré qu’un premier retrait au cours des prochains mois ferait baisser le nombre de soldats présents en Afghanistan à 8.600.

D’autres retraits pourraient suivre. Ils dépendraient des progrès des pourparlers de paix entre le gouvernement du président Ashraf Ghani et les talibans. Pour le moment, ces derniers considèrent le gouvernement comme une marionnette des Américains.

– « Opportunité historique » –

Les insurgés sont également censés garantir que l’Afghanistan ne sera plus utilisé par des groupes jihadistes tels qu’Al-Qaïda et le groupe Etat islamique (EI) pour lancer des attaques à l’étranger.

L’implantation d’Al-Qaïda sur le sol afghan avec la bénédiction des talibans a été la raison principale de l’intervention américaine du pays.

La signature de l’accord programmée pour samedi intervient après une trêve partielle d’une semaine en Afghanistan destinée à instaurer la confiance entre les belligérants et à montrer que les talibans peuvent contrôler leurs forces.

En dépit d’attaques isolées dans les zones rurales, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a estimé mardi que la période de trêve « fonctionnait ». « Nous sommes à l’orée d’une opportunité historique pour la paix », a-t-il déclaré.

Jusqu’à 30 pays devraient être représentés lors de la signature de l’accord à Doha mais le gouvernement afghan n’enverra pas de délégué.

« Le gouvernement n’est pas là, nous ne faisons pas partie de ces négociations. Nous n’avons pas confiance dans les talibans », a expliqué à l’AFP un responsable afghan.

Les problèmes de confiance entre les deux parties afghanes alimentent le climat de crise politique, et les Etats-Unis refusent de soutenir pleinement la réélection d’Ashraf Ghani, des mois après un scrutin entaché d’allégations de fraude.

– « Fatigué de la guerre » –

Donald Trump a promis à plusieurs reprises de ramener les troupes américaines au pays et de mettre fin aux guerres « stupides » de l’Amérique.

Mais les analystes craignent une situation ingérable. Washington « va déclarer la victoire » et, si des problèmes surgissent, « dira +c’est la faute des Afghans+ », a déclaré à l’AFP Colin Clarke, chercheur au centre de réflexion Soufan Center.

« Quel intérêt les talibans ont-ils à respecter l’accord une fois qu’ils auront obtenu ce qu’ils veulent, à savoir le retrait des Etats-Unis ? », s’est-il interrogé.

Les Etats-Unis et les talibans étaient sur le point de s’entendre après la fin d’un neuvième cycle de négociations mais en septembre 2019, Donald Trump a torpillé le processus après la mort d’un militaire américain dans une attaque à Kaboul attribuée aux insurgés.

L’imprévisibilité du président américain pourrait faire échouer l’accord de Doha à la dernière minute, bien qu’il ait promis de mettre son nom sur un accord si la trêve partielle se prolongeait.

De son côté, le chef adjoint des talibans, Sirajuddin Haqqani, a écrit dans un éditorial paru dans le New York Times la semaine dernière que « tout le monde est fatigué de la guerre ».

« Les meurtres et les mutilations doivent cesser », a ajouté cet homme à la tête du réseau Haqqani, un groupe qualifié de terroriste par les États-Unis et considéré comme la branche la plus sanglante des rebelles.

Julian Assange: l’examen de sa demande d’extradition suspendue jusqu’à mai

La justice britannique a suspendu jeudi jusqu’au 18 mai l’examen de la demande d »extradition du fondateur de Wikileaks Julian Assange, réclamé par les Etats-Unis qui veulent le juger pour espionnage après la publication d’une masse de documents confidentiels.

Les audiences, qui ont commencé lundi et s’achèvent avec un jour d’avance sur le calendrier prévu, reprendront pour trois semaines à partir du 18 mai au tribunal de Woolwich (est de Londres) et la décision de la juge Vanessa Baraitser devrait être rendue à l’été.

L’Australien de 48 ans, qui comparaît dans un box vitré, et se plaint de ne pouvoir s’entretenir comme il l’entend avec ses avocats, s’est vu refuser jeudi de pouvoir prendre place à côté d’eux.

« Je ne peux pas leur donner de consignes », a déclaré jeudi Julian Assange.

« Il m’apparaît que vous n’avez aucun mal à attirer l’attention de vos avocats », a répliqué la magistrate, soulignant qu’il existait un éventail de possibilités, notes écrites et suspensions d’audience, qui pouvaient leur permettre de communiquer comme ils l’entendent.

Julian Assange est poursuivi aux Etats-Unis pour avoir diffusé à partir de 2010 plus de 700.000 documents classifiés sur les activités militaires et diplomatiques américaines, notamment en Irak et en Afghanistan. Il risque jusqu’à 175 ans de prison, en vertu des lois anti-espionnage de 1917 et pour piratage informatique.

Les Etats-Unis lui reprochent d’avoir mis en danger des sources des services américains. De leur côté, les avocats d’Assange dénoncent une procédure politique fondée sur des « mensonges ».

Pour statuer sur la demande d’extradition la justice britannique doit notamment s’assurer qu’elle n’est pas disproportionnée ou incompatible avec des droits de l’Homme.

Assange a été arrêté en avril 2019 après sept ans passés reclus à l’ambassade d’Equateur à Londres, où il s’était réfugié après avoir enfreint les conditions de sa liberté sous caution, craignant une extradition vers les Etats-Unis.

Syrie: les rebelles contre-attaquent à Idleb, le régime avance malgré tout

Jihadistes et rebelles ont repris jeudi aux forces du régime une ville stratégique de la province d’Idleb, infligeant un revers au régime de Bachar al-Assad dans son offensive dévastatrice contre cette région du nord-ouest du pays en guerre.

Malgré la contre-attaque de leurs adversaires, les forces du régime, aidées de l’allié russe, ont repris 20 localités et villages ailleurs dans la province, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Le Conseil de sécurité de l’ONU doit discuter de la Syrie jeudi mais jusqu’à présent les puissances occidentales se sont montrées incapables de stopper l’offensive du régime contre l’ultime grand bastion jihadiste et rebelle du pays.

Depuis décembre, plus de 400 civils ont péri dans l’assaut selon l’OSDH et plus de 948.000 personnes, dont plus de la moitié sont des enfants, ont été déplacées d’après l’ONU.

Les rebelles sont entrés le matin dans Saraqeb, une ville de l’est de la province d’Idleb, selon un correspondant de l’AFP les accompagnant. La ville est totalement vidée de ses habitants et les destructions sont énormes.

Les insurgés se sont déployés en grand nombre dans les rues. De violentes explosions sont entendues en provenance de la périphérie de la ville, où des affrontements opposent insurgés et jihadistes aux prorégime.

La ville de Saraqeb, qui avait été reconquise le 8 février par le régime, se trouve à la jonction de deux autoroutes que le pouvoir veut sécuriser pour consolider son emprise dans le nord su pays. En reprenant Saraqeb, jihadistes et rebelles coupent l’autoroute M5 reliant la capitale Damas à la métropole d’Alep (nord).

– « Assaut contre les civils » –

L’OSDH a fait état également de la reprise « par les jihadistes et les rebelles » de Saraqeb. Des raids aériens russes sont menés aux abords de la ville, a ajouté l’ONG.

A Damas, l’agence de presse officielle Sana a rapporté « des affrontements violents » entre l’armée et « des groupes terroristes sur l’axe de Saraqeb ».

Sana a accusé des forces de la Turquie, qui soutient certains rebelles et déploie des troupes à Idleb, d’apporter aux insurgés un appui militaire.

L’OSDH a affirmé que l’artillerie turque appuyaient des groupes rebelles.

La Turquie continue d’envoyer des renforts dans le nord-ouest syrien, réclamant un arrêt de l’offensive du régime.

Les affrontements sont devenus quasi-routiniers entre soldats turcs et forces syriennes. Jeudi, le ministère turc de la Défense a annoncé la mort de deux soldats à Idleb, tués dans une frappe aérienne.

Même s’ils appuient des parties rivales, des discussions sont prévues jeudi à Ankara entre militaires et diplomates de Russie et de Turquie sur la Syrie.

Mardi encore, plusieurs écoles ont été touchées par des bombardements qui ont tué 20 civils, selon l’OSDH.

« Cette crise réclame l’attention urgente des dirigeants du monde », a plaidé jeudi le Comité international de Secours, réclamant une trêve à Idleb et une intervention concrète du Conseil de sécurité. « Les parties en conflit doivent ressentir la pression pour mettre fin à cet assaut contre les civils. »

– Progression du régime –

Ce sont les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda) qui dominent encore la moitié de la province d’Idleb et des secteurs attenants dans celles d’Alep, de Hama et de Lattaquié.

A la faveur de son offensive, le régime a reconquis des dizaines de villes et localités de ce bastion.

Jeudi, il a poursuivi sa progression reprenant 20 localités et villages dans le sud d’Idleb, selon l’OSDH.

« Le régime contrôle tout le sud de la province d’Idleb, de Maaret al-Noomane jusqu’au sud de Jisr al-Choughour », a indiqué à l’AFP le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane.

« Cette progression rapproche le régime de Jisr al-Choughour, mais aussi d’une reconquête de tous les territoires rebelles de Hama », selon lui.

Néanmoins pour des experts, la bataille de Jisr al-Choughour risque de s’avérer ardue pour le régime.

La ville est dominée par les jihadistes du Parti islamique du Turkestan (TIP), dont les membres appartiennent majoritairement à la minorité musulmane ouïghoure de Chine.

Avec le soutien de l’allié russe, de l’Iran et du Hezbollah libanais dans le conflit, le pouvoir syrien a multiplié les victoires ces dernières années jusqu’à reprendre le contrôle de plus de 70% du pays.

Déclenchée en mars 2011 par la répression de manifestations pacifiques, la guerre en Syrie s’est complexifiée avec l’intervention d’acteurs régionaux et internationaux, outre celle de groupes jihadistes. Elle a fait plus de 380.000 morts.