Inquiets après l’annonce de Trump, des touristes américains veulent rentrer d’Europe

Fin de vacances dans la confusion: de nombreux touristes américains qui craignent d’être bloqués en Europe se sont précipités jeudi dans plusieurs aéroports européens pour rentrer au pays, après l’annonce surprise de Donald Trump d’interdire l’entrée des Etats-Unis aux Européens pour endiguer le coronavirus.

« C’est confirmé, on a des sièges ? », s’enquiert à Roissy auprès de sa mère Kate Mendhan, une Américaine de 22 ans venue passer une semaine de vacances à Paris pendant le « spring break ». Cette étudiante en droit devait initialement regagner Minneapolis dimanche, mais elle a avancé son départ à vendredi matin.

Aux yeux de Carole Mendhan, la mère de Kate, « si Donald Trump fait ça, c’est juste pour être réélu » en 2020. « C’est politique, c’est tout », dit-elle à l’AFP, dépitée de raccourcir son voyage sans avoir eu le temps de « voir Versailles ».

En cause: l’annonce surprise de Donald Trump d’une suspension pour trente jours de l’entrée aux Etats-Unis des voyageurs ayant récemment séjourné en Europe, afin d’endiguer la pandémie de coronavirus que le président américain a qualifié de « virus étranger ».

La mesure entrera en vigueur vendredi à minuit heure de Washington (04H00 GMT samedi).

Elle s’appliquera à toute personne ayant séjourné dans l’espace Schengen au cours des 14 jours précédant leur arrivée prévue aux Etats-Unis, mais fait une exception pour les Américains et les résidents permanents.

Cela a pourtant semé la confusion parmi les touristes américains, dont des dizaines ont afflué quelques heures après l’annonce dans plusieurs aéroports européens.

« C’est un peu décevant. Il y a plusieurs personnes ici pour qui c’est la première visite à Paris, ça va être triste », déplore ainsi Michelle, touriste originaire de Salt Lake City, qui devait séjourner à Paris et Londres.

– « Repartir tout de suite » –

A l’aéroport londonien d’Heathrow, de longues files d’attente s’étaient formées devant les comptoirs des compagnies American Airlines, Virgin et Delta – qui ont toutes plusieurs vols par jour en direction de villes américaines.

« On vient de sortir de l’avion et on va repartir tout de suite, c’est pas croyable ! », lance Tiara Streng, 29 ans, originaire du Colorado, qui fait la queue pour réserver un vol avec trois amis. « C’est vraiment ridicule », peste-t-elle à propos de l’annonce de Trump.

Son groupe d’amis a voyagé depuis le Colorado dans la nuit pour un séjour de dix jours en Europe, notamment une excursion en Irlande à l’occasion de la Saint Patrick et qui a été annulée.

« On a reçu tous ces messages seulement lorsqu’on a atterri… », témoigne une autre touriste, Brooke Ward, 32 ans. « On s’est demandés si on devait rester. Evidemment, on n’a aucune envie de repartir, mais on s’est dit que c’était préférable… ».

Son compagnon de voyage Deepi, 28 ans, ajoute: « notre famille, British airways, en fait tout le monde nous a conseillé de rentrer; ils disent que c’est mieux », soulignant qu’il craignait aussi que les Etats-Unis « annoncent demain qu’il faut qu’on rentre tous à la maison ».

– « Le plus vite possible » –

« Nos employeurs nous ont déjà dit que l’on devrait être en quarantaine en rentrant », confie Streng, qui voyage avec ses amis Brooke et Deepi. Ils travaillent tous les trois dans un hôpital.

Ils espèrent que la compagnie British Airways échangera leurs billets sans frais.

A l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, des passagers tentaient aussi jeudi de trouver un vol pour les Etats-Unis – certains portant des masques -, faisant notamment la queue devant le comptoir de la compagnie néerlandaise KLM.

« Je devais aller voir ma famille à New York lundi, mais maintenant, je ne sais pas ce que je vais faire… », lâche Morena, 30 ans, qui vit à Rotterdam.

De son côté, Tristan Jensen, 20 ans, originaire de Detroit, explique qu’il essaie de « rentrer chez lui « le plus vite possible ». « Nous devions rester (aux Pays-Bas, NDLR) jusque dimanche, mais il nous faut rentrer ».

A Roissy Charles-de-Gaulle, la fréquentation a déjà chuté à environ 100.000 passagers contre 200.000 à 260.000 habituellement, selon une source aéroportuaire. L’annonce de Trump impacte en particulier quatre compagnies aériennes: Delta, American Airlines, Air France et Norwegian, a précisé cette source.

Plus de 20.000 personnes ont été contaminées par le coronavirus en Europe, et 930 en sont mortes, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles mercredi à 17H00 GMT.

Les Etats-Unis sont aussi touchés avec plus de 900 cas recensés et au moins 28 morts.

Des touristes français, qui devaient se rendre prochainement aux Etats-Unis, se renseignaient aussi à Roissy, décontenancés. « On avait prévu de partir sur New York et voilà (…) On va se renseigner là pour avoir plus d’informations », lance Didier, touriste français, dont le fils étudie à New York.

« Le monde ne va pas s’arrêter de tourner à cause d’une maladie », soupire de son côté à Roissy Melvin Taylor, guitariste de blues renommé qui se produit régulièrement en Europe. Assis face à un tableau d’affichage des vols, guitare à ses pieds, il attend des amis de Chicago. Lui-même a prévu de rester en France jusqu’au 29 mars.

« On ne va pas changer nos plans », assure-t-il, estimant que Donald Trump fait « semblant d’agir » mais qu’il n’a pas de réelle stratégie. Un de ses amis, également musicien, ironise: « Qu’est ce qui peut se passer ? Rester en France ? C’est bien la pire chose qui puisse nous arriver ! ».

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Dans une Italie au ralenti, mode d’emploi à l’heure du coronavirus

Plus de coiffeurs ni de visites chez ses parents, plus de café au comptoir, le jogging est toléré mais en solitaire : mode d’emploi d’un quotidien bouleversé par le coronavirus pour 60 millions d’Italiens.

– Se déplacer –

– Les Italiens peuvent sortir pour le travail, pour des soins de santé ou acheter de la nourriture et des produits de première nécessité. Mais ils doivent justifier leurs déplacements en brandissant une déclaration sur l’honneur, susceptible d’être vérifiée par la police.

– Il n’y a pas de postes fixes pour bloquer les mouvements des personnes, mais des contrôles dans les rues silencieuses, effectués par des policiers dûment équipés de masques. Jeudi, le nombre des patrouilles avait été revu à la hausse à Rome. Giuliano, 68 ans, lisait comme à son habitude le journal devant le Panthéon à Rome. Contrôlé, il a dû rentrer chez lui, a constaté l’AFPTV.

– Les transports en commun et les taxis ne sont pas soumis à des restrictions, mais ils étaient encore plus vides jeudi après la fermeture de la plupart des commerces.

– Aucune limitation pour le transport de marchandises, le transport d’animaux, l’acheminement de paquets, qui s’apparentent à du travail.

– On a le droit de faire de l’exercice dehors, mais seul, pas en groupe. Les promeneurs de chien ont un excellent alibi pour sortir.

– Travailler, étudier –

– Les casaniers sont à l’honneur car rester chez soi est « pour le bien de tous », selon le gouvernement. Le télétravail est donc vivement conseillé si possible, tout comme la prise de jours de congés.

– Les usines et les artisans continuent à produire normalement, à condition d’appliquer des précautions d’hygiène strictes.

– Les services administratifs publics restent ouverts, mais le gouvernement conseille d’utiliser les services en ligne.

– Ecoles et universités sont fermées et sont incitées à proposer un enseignement à distance.

– Communiquer –

– Confinés chez eux, les Italiens téléphonent désormais « tout au long de la journée » à partir de leur réseau fixe, qui a enregistré une hausse des communication de 70%, selon le patron de Telecom Italia Luigi Gubitosi.

– Et quand ils ne téléphonent pas, ils regardent la télé : le groupe Mediaset a enregistré une progression « sensible » de son audience.

– Visiter –

Les voyages de tourisme sont « absolument à éviter ». Les vacanciers italiens ou étrangers déjà en Italie doivent limiter leurs déplacements à ce qui est nécessaire pour rentrer chez eux. Encore visibles mercredi, ils étaient très rares jeudi à Rome.

– Sortir –

– Bars, pubs et restaurants sont tous fermés depuis jeudi. Agron, un employé du café Da Claudia à Rome, en profite pour nettoyer la devanture : « La fermeture est-elle logique ? Je ne sais pas, je fais ce qu’on me dit », a-t-il commenté, « mais le plus important c’est la santé ».

– Toutes les manifestations culturelles, sportives, religieuses ou festives sont suspendues. Pas de Calcio donc. Les compétitions organisées par des organismes internationaux se dérouleront à huis clos. La foire du livre jeunesse de Bologne, le plus grand salon de ce genre en Europe, décalée à mai a été finalement annulée.

– Les lieux de culte restent ouverts, à condition de respecter la distance d’un mètre. Mais les cérémonies religieuses (mariage, baptême, funérailles, prières musulmanes du vendredi) sont interdites. Des participants à un cortège funéraire en Sicile ont ainsi été les premiers à s’être vu infliger une amende. Des dizaines d’autres personnes ont depuis été verbalisées et ont dû payer jusqu’à 200 euros.

– Consommer –

– Restent ouverts depuis jeudi les pharmacies et les magasins vendant, outre des biens alimentaires, des produits indispensables, comme le matériel d’éclairage, les articles d’hygiène, l’électroménager, les équipements de télécommunications, les téléviseurs, les journaux, ainsi que les opticiens, les laveries, mais aussi… les bureaux de tabac.

– Tous les autres commerces, jugés non indispensables, vendant par exemple des vêtements, sont fermés, tout comme salons de coiffure. Dès jeudi matin, des chaînes spécialisées dans les vêtements incitaient leurs clients à commander sur internet.

– Dans les supermarchés, dont les entrées sont filtrées pour éviter les foules, le personnel est équipé de gants et de masques.

– La famille –

– Manger chez ses parents n’est pas considéré comme un déplacement nécessaire : c’est donc en théorie interdit. En revanche, les couples divorcés peuvent se déplacer pour voir leurs enfants s’ils sont mineurs. S’occuper de personnes âgées est autorisé, tout en évitant le plus possible les contacts physiques.

Virus: les restrictions américaines, « coup de massue » pour le secteur aérien

La décision américaine d’interdire l’accès des Etats Unis aux Européens est un nouveau « coup de massue » sur une liaison phare pour le secteur aérien, d’ores et déjà l’un des plus éprouvés par la pandémie de nouveau coronavirus.

+ Qui est concerné par l’interdiction?

Toute personne ayant séjourné dans les 26 pays européens de l’espace Schengen au cours des 14 jours précédant leur arrivée prévue aux Etats-Unis, à l’exception des Américains et des résidents permanents aux Etats-Unis. La mesure entre en vigueur pour 30 jours samedi à 03H59 GMT.

C’est aux compagnies aériennes de vérifier qui peut ou non embarquer. Si un passager se voit refuser l’entrée sur le territoire américain, c’est à la compagnie aérienne de le rapatrier à ses frais.

+ Que représente le trafic entre Etats-Unis et Europe continentale?

Le marché nord-américain est crucial pour le trafic long-courrier des compagnies aériennes qui se bousculent, notamment vers la destination reine, New York, alléchées par la régularité du trafic et la part importante de passagers en classe affaires, plus rentable.

Les Etats-Unis représentent par exemple 8,1% du trafic accueilli dans les aéroports parisiens en 2019 (8,7 millions de passagers) contre 2,1% pour la Chine.

+ Quel impact pour les compagnies aériennes et les aéroports?

Les compagnies aériennes sollicitées jeudi s’efforçaient encore d’évaluer l’impact de la décision américaine.

« Nous ne savons pas encore si cela signifie que tous les vols de KLM seront impactés », a déclaré le patron de KLM Pieter Elbers. « Mais il est indéniable que les conséquences sont extrêmement importantes ».

En Islande, qui fait partie de l’espace Schengen, Icelandair a annoncé des restrictions qui « toucheront considérablement les plans de vol ». Elle devait assurer 490 dessertes depuis et vers les États-Unis au cours des 30 prochains jours.

L’interdiction américaine constitue « un nouveau coup de massue pour les compagnies aériennes », affirme Charlie Roberson, économiste en chef chez Renaissance Capital à Londres.

Au point de fermer des aéroports? En Italie, placée en confinement, l’un des deux aéroports de Rome, qui accueille essentiellement des compagnies low cost, fermera à partir de vendredi, l’autre verra son activité réduite.

A Francfort, d’où partent 480 vols par semaine vers les Etats-Unis, l’opérateur aéroportuaire n’évoque « pour le moment aucun plan concret de fermeture des terminaux », tandis qu’à Paris des discussions sont en cours sur l’éventuelle fermeture d’un des terminaux de Charles-de-Gaulle.

+ Quelles conséquences financières?

Les compagnies aériennes européennes Air France, IAG (British Airways) et Lufthansa plongeaient toutes en Bourse jeudi.

L’association internationale du transport aérien (Iata) avait estimé le 5 mars, avant la décision des Etats-Unis, que les pertes de chiffre d’affaires des compagnies pourraient atteindre 113 milliards de dollars si le coronavirus continuait à se répandre.

« Il y a deux questions essentielles, l’une qui est la fin de la crise sanitaire et l’autre qui est comment l’économie va tenir le choc », a commenté Olivier Fainsilber, expert en transport aérien au cabinet Oliver Wyman.

Dans un secteur fragile qui a vu en Europe la faillite récente de plus d’une dizaine de compagnies, le coronavirus risque de faire des dégâts supplémentaires. Pour être rentable, un avion doit voler avec un taux de remplissage d’au moins 70 à 80%.

« C’est la catastrophe (…). Au total, entre les voyages à forfait (hébergement+vols) et les prestations sèches (vols principalement), on estime qu’il y a 100.000 clients concernés au niveau des tour-opérateurs français sur mars et avril », a déploré René-Marc Chikli, président de la fédération française de ce secteur.

+ Y a-t-il eu des précédents?

En septembre 2001, le trafic aérien à destination des Etats-Unis avait été complètement interrompu pendant trois jours.

Au plus fort de l’épidémie de SRAS, qui avait principalement touché la Chine, Hong Kong et Singapour, les revenus des compagnies opérant dans la région Asie-Pacifique avaient chuté en mai 2003 de 35%.

La crise financière avait fait plonger dans le rouge les compagnies aériennes en 2008 et 2009.

Et lors de l’éruption du volcan islandais en avril 2010, plus de 100.000 vols avaient été annulés en 6 jours en raison de la clôture de l’espace aérien européen. Cela s’était traduit par une perte de chiffre d’affaires de 1,8 milliard dollars pour le trafic aérien mondial.

Visite du chef de la diplomatie française à Alger

Le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian s’est rendu jeudi à Alger pour discuter des questions bilatérales et régionales, notamment de la Libye, un dossier sur lequel l’Algérie s’est montrée active ces dernières semaines.

Cette visite –la deuxième de M. Le Drian à Alger depuis la fin janvier– a eu pour cadre un comité mixte algéro-français de coopération économique (Comefa), selon un communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères.

« Cette réunion a été l’occasion de faire le point sur l’ensemble des dossiers concernant la coopération économique et commerciale liant les deux pays », précise le communiqué qui évoque des « projets de partenariats bilatéraux dans le domaine des finances et de l’investissement, l’industrie automobile, l’industrie pharmaceutique, l’agriculture et l’agroalimentaire ou encore les secteurs des nouvelles technologies et du tourisme ».

Au cours d’un entretien avec son homologue algérien, Sabri Boukadoum, M. Le Drian a également évoqué le dossier libyen, la question du Sahara occidental, la situation au Sahel et au Mali et les derniers développements au Moyen-Orient, selon l’APS.

L’Algérie, qui partage près de 1.000 km de frontière avec la Libye, s’est récemment montrée très active pour tenter d’oeuvrer au règlement politique d’un conflit qui menace la stabilité régionale.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a proposé en janvier d’accueillir un « dialogue » entre toutes les parties libyennes afin de favoriser des négociations visant à sortir la Libye de la crise.

Un ex-ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a été pressenti pour remplacer l’émissaire de l’ONU en Libye, Ghassan Salamé, démissionnaire, selon des sources diplomatiques européennes et africaines.

L’Irak inquiet après la mort de deux Américains et 26 combattants pro-Iran

Trois membres de la coalition internationale, dont deux Américains, ont péri dans une attaque en Irak avant que des raids ne tuent 26 paramilitaires irakiens pro-Iran à la frontière syrienne, de nouvelles violences qui inquiètent jeudi Bagdad et l’ONU.

La mort de deux soldats, un Américain et un Britannique, et d’un sous-traitant américain dans une attaque à la roquette est sans précédent depuis des années en Irak.

Il s’agit aussi du plus lourd bilan pour une attaque visant les paramilitaires irakiens pro-iraniens, avec 26 morts.

Fin 2019, des bombardements aériens américains à la frontière irako-syrienne avaient fait 25 morts dans les rangs des supplétifs irakiens de l’Iran en riposte à la mort d’un sous-traitant américain dans une attaque contre une base du nord du pays.

Mais cette fois, un porte-parole de la coalition antijihadistes, menée par Washington, a affirmé à l’AFP que ni la coalition ni l’aviation américaine n’avait mené de raid mercredi soir contre les combattants pro-iraniens à la frontière syro-irakienne.

Durant l’été 2019, les pro-Iran en Irak avaient accusé Israël de frapper régulièrement leurs bases.

– « Défi sécuritaire » –

L’attaque contre la base en Irak, comme 21 autres contre des intérêts américains dans ce pays depuis la fin octobre, n’a pas non plus été revendiquée.

Mais Washington attribue généralement ce type d’attaques aux factions irakiennes pro-Iran qui, elles, promettent régulièrement de « venger » leur chef, assassiné en janvier à Bagdad par Washington aux côtés du général iranien Qassem Soleimani.

Jeudi, les brigades du Hezbollah, l’une des factions pro-Iran les plus radicales d’Irak, ont salué « ceux qui ont mené cette opération contre les forces d’occupation américaines » sans toutefois la revendiquer. Elles ont appelé à plus d’attaques anti-Américains.

Signe que ces derniers développements inquiètent au plus haut point, le commandement militaire irakien chapeauté par le Premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi a dénoncé l’attaque contre la coalition, qui constitue « un défi sécuritaire très dangereux ».

Le président Barham Saleh et le chef du Parlement Mohammed al-Halboussi ont également condamné l’attaque.

De son côté, la mission de l’ONU en Irak a appelé à « la retenue maximale », estimant que « le risque d’actes voyous de groupes armés est une inquiétude permanente » en Irak qui « n’a vraiment pas besoin de devenir une arène pour les vendettas et les batailles venues d’ailleurs ».

Les autorités irakiennes sont dans une position délicate face à la coalition: elles continuent à mener des opérations avec ses troupes contre les jihadistes mais le Parlement a récemment voté l’expulsion des 5.200 soldats américains du pays et le gouvernement doit maintenant faire appliquer cette décision.

Et alors même que la coalition avait annoncé suspendre ses activités en Irak en raison des tensions entre Téhéran et Washington, dimanche encore, elle a perdu deux hommes –des Américains– dans des combats contre des jihadistes dans le nord irakien.

Dans un Irak en plein marasme politique, au budget mis en danger par la chute des cours du pétrole et qui doit faire face à une épidémie du nouveau coronavirus, les autorités n’ont pas identifié les responsables de l’attaque contre la coalition.

A chaque fois, l’armée irakienne assure retrouver rapidement la base de lancement des roquettes mais les enquêtes ne mènent jamais jusqu’aux auteurs des tirs.

– « Rendre des comptes » –

Deux soldats, l’un américain et l’autre britannique, ainsi qu’un sous-traitant américain, ont été tués mercredi soir dans cette attaque contre la grande base de Taji, dans la banlieue de Bagdad, a indiqué à l’AFP un responsable militaire américain.

La coalition internationale a recensé 18 roquettes tirées au total, faisant également état de 12 blessés, sans préciser leur nationalité.

Quelques heures après, « dix explosions » secouaient une zone au sud de la ville syrienne de Boukamal, frontalière de l’Irak, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) qui avait dit que l’attaque était probablement menée par le coalition.

Au moins « 26 combattants irakiens » du Hachd al-Chaabi ont été tués, selon la même source.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo et son homologue britannique Dominic Raab ont exigé que les auteurs des attaques contre la base « rendent des comptes », selon le département d’Etat américain.

Prison centrale de Libreville : Noël Mboumba en liberté provisoire

En liberté conditionné l’ancien Ministre du Pétrole, Noël Mboumba reconnait les faits qui lui sont reprochés notamment le détournement et le blanchissement de capitaux.

Noël Mboumba  a bénéficié le 11 mars dernier d’une liberté conditionnelle après  3 mois de détention préventive à la prison centrale de Libreville  pour détournement de fonds publics, concussion, blanchiment de capitaux  et association de malfaiteurs.

Au cours d’une conférence  tenue mercredi 11 mars dernier, a reconnu les faits qui lui sont reproches. « S’agissant des faits qui me sont reprochés, je tiens à préciser à l’opinion que j’ai reconnu avoir exécuté des instructions malveillantes  de la part des personnes qui ont profité de leur position dominante pour conduire à poser des actes contraires à la loi », a reconnu Mboumba, qui n’a pas révélé les noms des personnes en vers qui il prenait des ordres.

Aussi,   Noël Mboumba a-t-il reconnu la disparition des centaines des milliards de FCFA des caisses de la Société gabonaise de raffinage (SOGARA) et  de Gabon Oil compagny (GOC), entreprise nationale des hydrocarbures.

Italie: face au virus, le sud engagé dans une course contre la montre

C’est une course contre la montre qui s’est engagée à l’hôpital Cardarelli de Naples où est montée une nouvelle unité de soins intensifs: le sud de l’Italie est jusqu’à présent relativement épargné mais beaucoup s’inquiètent de la fragilité de son système sanitaire si la pandémie de coronavirus devait s’étendre à cette région pauvre.

Dans le bâtiment M, rebaptisé « Aile coronavirus », ne restent que quelques brancards qui laisseront bientôt la place à du matériel, des équipements et des médicaments plus sophistiqués dont l’objet sera de sauver des vies.

En Campanie, la région de Naples, l’ambiance est radicalement différente de celle de Milan, dans le nord du pays. Une seule personne y est décédée contre 827 dans l’ensemble du pays, et 154 cas y ont été détectés (sur près de 12.500), selon un bilan publié mercredi. La Calabre, à la pointe de la botte, a recensé 19 cas, la Basilacata voisine huit.

Mais les spécialistes préviennent que le sud n’est pas à l’abri.

Samedi, quelques heures avant l’annonce officielle, les mesures de confinement prises pour le seul nord de l’Italie, ont fuité dans les médias. Des milliers d’Italiens originaires du sud sont alors rentrés en catastrophe chez eux, autant de véhicules potentiels de contagion.

Or dans le Mezzogiorno, les infrastructures hospitalières sont autrement plus fragiles qu’en Lombardie. Si même dans cette région riche qui pèse pour plus de 20% du PIB du pays pour 10% de la population, les structures sanitaires sont sur le point de craquer, comment pourront faire face celles du sud, épuisées par des années de restrictions budgétaires?

– ‘Prix fort’ –

« Le sud est moins préparé et pourrait le payer au prix fort », prévient le directeur de l’hôpital Cardarelli de Naples, Giuseppe Longo 63 ans. « L’Etat nous dit de nous préparer. Nous embauchons des centaines de nouveaux médecins, d’infirmières et de personnel soignant », poursuit-il dans un entretien avec l’AFP.

Les sept régions du sud et les îles (Sicile et Sardaigne) disposent de 1.582 lits en soins intensifs sur les 5.400 du pays, selon un décompte du quotidien La Repubblica. Mercredi, le Premier ministre Giuseppe Conte, a promis des efforts pour la production et la distribution d’équipement spécialisé dans les hôpitaux.

Si les services spécialisés devaient être saturés, l' »aile coronavirus » de Cardarelli entrerait en action. Huit lits de soins intensifs et 12 pour la haute dépendance y sont prévus.

S’ils devaient être occupés à leur tour, d’autres ailes seraient converties. Près des urgences, une tente a été dressée. C’est là que seront faits les tests pour les patients qui se présenteraient avec des symptomes inquiétants.

– ‘Ni les ressources, ni l’équipement’ –

« Le nord a été pris par surprise alors que nous avons eu un peu de temps pour nous préparer. J’espère que cela suffira… », dit à l’AFP Maria De Cristofaro, 65 ans, cheffe du service de soins intensifs de Cardarelli. Les médecins des services de soins intensifs ont été « décrits comme des héros », « mais nous ne pouvons pas faire de miracles », prévient-elle.

A ses yeux, il est « difficile de justifier » la décision de rentrer chez eux prises par nombreux méridionaux travaillant dans le nord, au risque de « ramener le virus dans leurs maisons, directement à leurs proches ».

Mais à Naples, la plupart comprennent ce réflexe. « Si j’avais été là-bas, j’aurais essayé de revenir », dit Cristina Agosto, 22 ans, venue sur le front de mer regarder le Vésuve de l’autre côté de la baie.

Roberta Fusco, une influenceuse de 26 ans se promène avec sa mère. Elle est récemment revenue de Milan. Elle explique qu’elle s’est isolée une semaine, mais n’en pouvait plus de ne pas voir la mer. « Nous sommes inquiets, mais nous savons qu’il y a beaucoup de gens qui ont lancé des opérations de crowfunding (financement communautaire) pour les hôpitaux, et ça va aider », assure-t-elle.

Lancée par une étudiante en médecine de 23 ans, Federica De Masi, une campagne de ce type a permis de lever plus de 350.000 euros pour l’hôpital Cotugno de Naples, spécialisé dans les maladies infectieuses. « Nous devons nous entraider, parce que nous n’avons pour le moment ni les ressources ni l’équipement nécessaires », résume la jeune femme sur le site gofundme.

Au Maroc, des féministes et associations se mobilisent contre les violences virtuelles

Quand son ex-fiancé a diffusé des photos intimes d’elle sur les réseaux sociaux pour se venger, Loubna, Marocaine de 27 ans, s’est sentie « coupable », sa famille l’a ostracisée, elle a dû démissionner. Et elle a finalement renoncé à poursuivre son harceleur.

Comme elle, au Maroc, sept sur dix victimes de « violences virtuelles » (cyberharcèlement, extorsion en ligne d’actes sexuels, « revenge porn », cyberdiffamation, etc.) préfèrent se taire par honte et peur du rejet social, selon un rapport publié début mars par le réseau « Mobilising for rights associates » (MRA) après plusieurs mois d’enquête.

Pour « briser le tabou », les militantes de Tahadi, une des associations ayant participé à l’étude, viennent de lancer une campagne de sensibilisation et d’aide aux victimes, avec des ateliers d’information pour les mères au foyer et les élèves des quartiers populaires de Casablanca.

Car les violences virtuelles, apparues comme ailleurs avec la popularisation des smartphones et des réseaux sociaux, deviennent « de plus en plus inquiétantes », selon Bouchra Abdou, présidente de Tahadi.

Au Maroc, plus d’une femme sur deux (54%) dit avoir été victime d’une forme de violence, et dans 13,4% des cas de violences liées aux nouvelles technologies, selon des statistiques officielles publiées en mai 2019.

« En réalité, il suffit de poser la question dans une assemblée de femmes pour se rendre compte que ce chiffre est largement sous-estimé: chez les jeunes, on est plutôt autour de 90% », estime Saïda Kouzzi, du réseau MRA.

La campagne « stop au numérique » lancée par Tahadi vise à informer les victimes sur leurs droits, inscrits dans une loi adoptée en 2018 contre les violences faites aux femmes.

Le texte sanctionne le harcèlement sexuel dans les espaces publics, mais aussi dans l’espace virtuel (téléphone, courrier électronique, messages sur les réseaux sociaux, envoi d’images à caractère sexuel ou diffusion d’images portant atteinte à la vie privée). Les peines prévues pour les violences liées au numérique vont jusqu’à trois ans de prison de ferme.

– Blâmée, coupable –

Comme beaucoup, Loubna ignorait les dispositions de cette loi, par ailleurs très critiquée par les mouvements féministes pour ses lacunes. Et personne, dans son entourage, ne l’a encouragée à saisir la justice.

Car dans une société imprégnée de traditions et valeurs religieuses, les femmes violées ou harcelées sont souvent considérées comme les premières coupables: les réactions des familles sont ainsi « le plus souvent faibles à nulles, suivies de sanctions punissant la victime », selon l’étude de MRA.

« Je me disais que tout le monde avait vu les photos, je n’ai pas osé sortir dans la rue pendant des jours, ma famille ne m’a pas soutenue, je me blâmais comme si je méritais ce qui m’arrivait », se souvient Loubna.

Conseillée par l’association « Tahadi », elle a fini par se décider à déposer une plainte contre son ex-fiancé qui avait publié ses images intimes pour « se venger » car elle l’avait quitté. Il a été arrêté mais elle a finalement renoncé aux poursuites « de peur qu’il ne se venge en publiant d’autres photos ».

Rares sont celles qui saisissent les autorités –une sur dix, selon le rapport de MRA–, car le risque est grand d’être soi-même poursuivie.

L’article 490 du code pénal marocain punit en effet d’emprisonnement les relations sexuelles hors mariage et son abrogation n’est pas à l’ordre du jour, malgré la mobilisation des défenseurs des droits humains en ce sens.

Les photos ou vidéos piratées présentées par des victimes qui portent plainte peuvent donc se transformer en preuves de culpabilité si le harceleur n’est pas leur époux.

– « Ne pas se taire » –

Une des victimes suivies par Tahadi en a fait la cruelle expérience: cette jeune femme de 26 ans a enduré pendant des mois un chantage financier et sexuel qui a finalement détruit sa vie.

L’homme qu’elle fréquentait l’a menacée de publier des vidéos intimes filmées à son insu pour la forcer à lui céder. Elle a dans un premier temps déposé plainte pour viol, mais il a convaincu la justice qu’elle était consentante. Tous deux ont été condamnés à une peine d’emprisonnement avec sursis pour « débauche ».

Pour l’aider, l’association Tahidi lui a conseillé de déposer une nouvelle plainte pour chantage. La procédure est en cours. En attendant, sa famille l’a expulsée, elle a été obligée de quitter son emploi et a préféré déménager dans une autre ville.

Selon l’étude menée par MRA dans une quarantaine de villes marocaines, les conséquences des violences virtuelles sont tout aussi graves que celles des violences « réelles », avec des cas de suicides, de dépression ou de marginalisation sociale en cas de rejet familial.

Loubna a « fini par se convaincre que ce n’était pas de sa faute » après avoir « eu la chance de bénéficier d’une aide psychologique » grâce à l’association Tahabi. Elle a décidé de participer à la campagne et « conseille à toutes les victimes de ne pas se taire ».

Quand un rescapé de la Shoah se lie d’amitié avec un « gosse de nazi »

L’un est juif et a miraculeusement échappé à la Shoah, l’autre se dit « gosse de nazi », pétri de culpabilité. Deux Belges éprouvés par la tragédie de la Seconde guerre mondiale témoignent désormais côte à côte de leur histoire et de l’amitié profonde qui les unit.

Simon Gronowski et Koenraad Tinel, 88 et 85 ans, doivent recevoir cette année le titre de Docteur honoris causa des Universités libres de Bruxelles, la néerlandophone VUB et la francophone ULB.

« Leur amitié exceptionnelle est un puissant symbole d’espoir, de bonheur et de paix », explique-t-on à la VUB.

Diamétralement opposés au départ, les destins des deux hommes, l’un Bruxellois francophone, l’autre né dans une famille flamande de Gand, se sont croisés en 2012, lorsqu’un militant de l’Union des progressistes juifs de Belgique a eu l’idée de les mettre en contact, expliquent-ils lors d’une rencontre avec l’AFP.

Le jeune homme connaissait leurs deux histoires, dont chacun avait déjà livré un récit poignant.

Simon Gronowski, avocat à la retraite, a raconté dans un livre (« L’Enfant du 20e convoi », 2002) le geste incroyable de sa mère, qui l’a sauvé de la déportation en 1943 en le poussant d’un train en route vers Auschwitz. L’enfant juif, arrêté par la Gestapo à Bruxelles, a alors 11 ans.

Koenraad Tinel, sculpteur et dessinateur, a lui préféré le recueil de dessins (« Scheisseimer », « Seau à merde » en allemand, 2009) pour se décharger du fardeau de la collaboration, dont il a si longtemps porté l’énorme poids. Une oeuvre qu’il a ensuite lui-même transposée sur une scène de théâtre.

Le drame du premier est d’avoir perdu sa soeur et sa mère, jamais revenues des camps nazis. Tandis que le second a dû supporter pendant des décennies l’absence du moindre remords de la part de son père et de ses deux frères ayant combattu pour le IIIe Reich.

« Mon père avait deux idoles, le Christ et Hitler! Essayez de comprendre ça… », lâche Koenraad, les yeux rougis en témoignant au côté de Simon, chez lui à Gammerages dans la campagne du Brabant (centre-ouest).

– L’étreinte et le pardon –

Conséquence des sympathies paternelles: les deux grands frères Tinel sont envoyés, l’aîné sur le front de l’est, le second comme volontaire au côté des Waffen SS flamands.

Et en 1944, à la Libération, poursuit le Flamand, la famille doit fuir vers l’Allemagne: s’ensuivent près de deux années à « se cacher, camper en forêt, avoir faim ». Avant un retour en Belgique synonyme de prison et de dégringolade sociale.

Entre Simon le volubile, habitué à témoigner dans les écoles, y compris à l’étranger, et Koenraad l’émotif, davantage dans la retenue, la connexion a été immédiate lors du premier contact il y a huit ans.

« Quand je lui ai dit que les enfants des coupables ne sont pas coupables, il y a eu un déclic (…) Une grande amitié est née entre nous », dit Simon, qui décrit désormais Koenraad comme son « frère ».

Ce propos sur la culpabilité, « c’était un très beau message pour moi, ça m’a fait un énorme plaisir », souligne le Flamand.

En 2013, l’avocat-auteur et le dessinateur ont cosigné un ouvrage intitulé « Ni victime, ni coupable, enfin libérés ». L’histoire de Simon a aussi inspiré un opéra au compositeur britannique Howard Moody.

Chose encore plus inattendue: le lien noué entre Simon et Koenraad a fini par ébranler les certitudes d’un frère de ce dernier, l’ex « collabo » des SS.

A 88 ans, malade et proche de la mort, ce frère a imploré le pardon de l’ancien enfant juif, dont il avait lui-même été un des geôliers à la caserne Dossin à Malines (nord), d’où est parti le train vers Auschwitz.

Simon Gronowski décrit la rencontre: « il me disait +j’ai besoin de votre pardon pour mourir en paix+. Alors je l’ai pris dans mes bras, et je lui ai pardonné. Ce pardon lui a fait beaucoup de bien mais à moi encore plus ».

Bernie Sanders, politicien et chanteur dans ses jeunes années

A 78 ans, le candidat à la présidentielle américaine Bernie Sanders n’hésite pas à donner de la voix sur la scène de ses meetings. Mais en novembre 1987, lorsqu’il s’est mis devant un micro dans un studio de son petit Etat du Vermont, c’était pour chanter.

Alors maire de la petite ville de Burlington, il avait accepté de contribuer à un album folk désormais connu comme le « Bernie Project », avec 30 musiciens locaux.

Avec ses lunettes cerclées de noir et ses sweat-shirt à capuche, le maire de la gauche radicale, 46 ans à l’époque, allait chanter cinq chansons dédiées à la justice sociale.

Todd Lockwood — le propriétaire du studio local White Crow Audio, qui a vu défiler de nombreux groupe, dont Phish, durant ses 15 ans d’existence — avait demandé au maire militant s’il pouvait contribuer au projet.

« Il était très aimé et en fait plutôt efficace comme maire », a indiqué à l’AFP Todd Lockwood, 68 ans. « Il était vif, avec des opinions très marquées, mais c’était un battant ».

« Mais c’est seulement quand on a commencé à discuter que je me suis rendu compte qu’il ne voyait pas les choses comme moi » concernant l’album. « Il le voyait comme l’occasion de faire une déclaration plus importante sur la vie » en général.

– « Pas un chanteur » –

Si la vision de Bernie Sanders était claire, sa voix l’était moins.

« Ce n’est pas un chanteur », dit M. Lockwood, « il n’a pas du tout l’oreille musicale ». M. Sanders lui-même qualifiait alors ses répétitions devant un magnétophone d' »un peu effrayantes ».

« Ce n’est pas une belle voix que nous vendons ici », reconnaissait M. Lockwood devant des journalistes en 1987. « Nous vendons quelqu’un qui a des convictions. »

La solution? Demander au maire de faire du « blues parlé », « une espèce de version reggae » des chansons folk et spirituals telles « This Land is Your Land » et « We Shall Overcome. »

« On peut voir ça comme une espèce de folk rap », dit M. Lockwood.

Comme d’autres vedettes à la voix très particulière — songez, à un autre niveau, à Bob Dylan ou Lou Reed — « Bernie » donna à ces classiques un tour unique.

« L’album fait alternativement rire et pleurer », selon M. Lockwood. « Les gens réagissent avec émotion… surtout les gens qui ont vécu la bataille pour les droits civiques », dans les années 60.

« Mais en même temps, on entend son accent de Brooklyn et ça fait rire », a indiqué le producteur, aujourd’hui portraitiste. « Tout un étrange cocktail d’émotions quand vous écoutez ça ».

– Art pour tous –

Dans sa difficile bataille pour la Maison Blanche, Bernie Sanders a obtenu les soutiens d’artistes très divers, allant de rappeurs comme Cardi B, Chuck D ou Lil Yachty, des stars de la pop comme Ariana Grande, Miley Cyrus et Jason Mraz, ou des légendes du rock comme Neil Young et David Crosby, et d’autres plus alternatifs comme Bon Iver, Vampire Weekend, The Strokes et Jack White.

Bernie Sanders est connu pour avoir encouragé les artistes pendant ses huit ans aux commandes de Burlington, supprimant notamment des ordonnances municipales qui limitaient la musique dans les espaces publics.

« C’est une des premières choses qui ont changé quand Bernie est devenu maire », se souvient M. Lockwood. « Du jour au lendemain, on a eu de la musique dans les parcs ».

La ville de 42.000 habitants compte désormais un festival de jazz respecté et son conseil municipal pour les arts, impulsés par Bernie Sanders.

L’ancien maire « voulait que les arts soient accessibles à tous les niveaux de la société », dit M. Lockwood, « il ne voulait pas que ce soit juste pour les gens qui peuvent se payer de coûteux billets d’entrée ».

Seules quelque 1.000 cassettes audio de l’album folk de Bernie Sanders furent distribuées à la fin des années 80 et le projet tomba dans l’oubli. Jusqu’à ce qu’il annonce sa candidature à la présidentielle de 2016.

M. Lockwood fit remastériser l’enregistrement, le publia en ligne et sous forme de CD… Et le sénateur, très populaire chez les jeunes, se retrouva même au classement des « Nouveaux artistes » du magazine Billboard.

« Nous n’avions jamais imaginé ça », dit Todd Lockwood. Mais ce n’était pas immérité, selon lui: « il a montré beaucoup de culot en studio ».

« A aucun moment il ne s’est inquiété en disant, +Est-ce que je vais avoir l’air idiot?+ Il a eu la confiance de montrer ça au public. »

« Nous commençons petit », disait Bernie Sanders de l’album en 1987. « Aujourd’hui, le Vermont, demain le monde entier ».