Coronavirus en Italie: Codogno entame sa quarantaine

« Ne vous bousculez pas », dans la file d’un des uniques supermarchés ouverts à Codogno, dans le nord de l’Italie, l’angoisse est palpable alors que la police a commencé à fermer le périmètre autour d’une dizaine de villes des alentours.

Trois voitures surveillent l’entrée de Codogno, petite ville de 15.000 habitants environ à une soixantaine de kilomètres au sud de Milan.

« Nous préparons la mise en place des points de contrôle de la zone de confinement », explique à l’AFP une jeune policière qui commande l’équipe.

« Ce sera d’abord un périmètre relativement étroit, les communes touchées par l’épidémie, mais par la suite le périmètre pourrait s’élargir », dit-elle.

Les forces de l’ordre seront nombreuses à être déployées dans cette zone pour assurer le respect de la décision annoncée samedi soir par le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte: on n’entre pas, on ne sort pas de la zone contaminée, sauf dérogation spéciale.

« Nous sommes au total une dizaine d’équipes de la police criminelle, donc rien à voir avec ce genre de situation, mais on a fait appel à nous, de Bologne, de Turin, de Gênes, pour donner un coup de main », poursuit la policière.

Selon cette même source, ce seront des unités de la police financière (GDF), un autre corps de police, qui s’occuperont par la suite des points de contrôle.

« S’il vous plaît, ne vous bousculez pas, nous avons la volonté de servir tout le monde mais pas en même temps. Je compterai 40 personnes, pas 40 chariots mais 40 personnes, qui pourront entrer, puis au fur et à mesure que des personnes sortent d’autres pourront entrer », annonce un responsable d’un supermarché Lidl à une cinquantaine de personnes plantées devant l’entrée.

– « Eviter le chaos » –

La scène se passe à Casalpusterlengo, une petite commune aux portes de Codogno, considéré comme « l’épicentre du foyer » d’épidémie détecté en Lombardie (région de Milan), devant un supermarché qui n’a ouvert que vers 09H30 GMT (10H30 locales.

« Notre objectif est d’éviter le chaos et de tous se protéger. Tout le monde pourra faire ses courses », ajoute le responsable non identifié.

« C’est inhumain, se battre pour quatre sandwiches c’est tout simplement dégueulasse », se désole Sante, la cinquantaine, assis dans sa voiture sur le parking du supermarché, très remonté contre le gouvernement.

« Je leur souhaite tout le mal possible, si je pouvais j’irais à Rome leur donner des coups de pied aux fesses », ajoute Sante.

Une femme dans la file tente de tranquilliser les gens autour d’elle: « le virus n’est pas mortel, si on s’en occupe à temps, on guérit ».

« Moi j’ai très peur, on vit une situation vraiment pesante », confie à l’AFP-TV Emanuela, une infirmière qui travaille dans la zone et cherche à faire ses courses.

Casalpusterlengo héberge un site de la multinationale Unilever où travaille le cadre de 38 ans, considéré comme le « patient 1 » qui a déclenché l’épidémie dans cette zone.

Sa femme enceinte de 8 mois est contaminée, ainsi qu’un ami avec lequel il jouait au foot, des habitués d’un bar appartenant à la famille de cet ami, des médecins qui l’ont soigné et des patients de l’hôpital de Codogno où il se trouvait de mercredi à samedi.

Environ 52.000 habitants de 11 villes dans le nord de l’Italie sont depuis dimanche en quarantaine, avec interdiction d’entrer et sortir de leur zone, après une brusque multiplication des cas de nouveau coronavirus et les deux premiers décès d’Européens sur le continent.

Le gouvernement a adopté samedi soir un décret-loi très strict qui met à l’isolement 11 villes, 10 en Lombardie autour de Codogno, et 1 à Vo’ Euganeo, près de Padoue en Vénétie (région de Venise, nord-est), où est décédé le tout premier mort italien vendredi soir.

Les 274 rescapés secourus par l’Ocean Viking débarqués en Sicile

Les 274 personnes secourues récemment au large de la Libye par le navire de secours en mer Ocean Viking débarqueront en Sicile où elles seront placées en quarantaine, ont annoncé dimanche l’ONG SOS Méditerranée et le ministère de l’Intérieur italien.

Par mesure de précaution, « les migrants seront maintenus en quarantaine » dans la ville sicilienne de Pozzallo et le personnel du navire isolé à bord « aussi longtemps que nécessaire », a précisé dimanche dans un communiqué le ministère de l’Intérieur italien sans donner davantage de précision.

L’Italie fait face à une brusque multiplication des cas de nouveau coronavirus. Une dizaine de villes du nord du pays sont dimanche en quarantaine, avec interdiction d’entrer et de sortir. Le nombre de cas s’élève désormais à « plus de 100 », selon le président de la région Lombardie Attilio Fontana.

« Soulagement à bord de l’OceanViking ce matin alors qu’on annonce aux rescapés – secourus lors de 3 opérations distinctes cette semaine – que l’Italie vient de leur assigner un lieu sûr », a tweeté dimanche SOS Méditerranée, affréteur du navire en partenariat avec Médecins sans frontières.

« Le navire est maintenant en route pour Pozzallo en Sicile pour le débarquement », poursuit l’ONG basée à Marseille.

Mardi au petit matin, l’Ocean Viking avait secouru 84 personnes fuyant la Libye puis 98 autres en fin de journée. Le lendemain le navire avait également porté secours à 92 personnes en détresse dans une embarcation pneumatique.

Présidentielle au Togo: un opposant dénonce des « fraudes » et « irrégularités »

L’opposant togolais Agbéyomé Kodjo, candidat à la présidentielle de samedi au Togo face au président sortant Faure Gnassimgbé en lice pour un 4e mandat, a dénoncé un scrutin « entaché d’irrégularités ».

« Vu les dénonciations de fraudes qui ont émaillé ce scrutin, il est impossible au candidat sortant – le président Faure Gnassingbé – d’être élu au 1er tour », a déclaré M. Kodjo à la presse dans la nuit de samedi à dimanche.

« J’ai la conviction que dans la semaine à venir, je dirigerai ce pays », a-t-il ajouté, dénonçant un scrutin « émaillé de nombreuses irrégularités ».

Candidat du Mouvement patriotique pour le développement et la démocratie (MPDD), M. Kodjo, ancien Premier ministre devenu opposant, a créé la surprise en arrivant largement en tête dans de nombreux bureaux de vote de Lomé, dans les quartiers traditionnellement acquis à l’opposition, selon des résultats partiels.

Il a affirmé avoir une large avance dans les régions Maritime (Sud) et Plateaux (centre-sud), être au coude à coude le parti au pouvoir Union pour la République (Unir) dans le centre et avoir réalisé de très bons scores dans les Savanes (nord).

Considéré comme un outsider, Agbéyomé Kodjo a fait une bonne campagne et a enregistré de nombreux soutiens, dont celui l’ancien archevêque de Lomé, Mgr Kpodzro.

Tous deux ont vu leur domicile encerclé par les forces de l’ordre pendant plusieurs heures après la fermeture des bureaux de vote, le gouvernement assurant agir « pour leur propre sécurité ».

La société civile a relevé quelques bourrages d’urnes et noté que certains représentants de l’opposition n’avaient pas eu accès à plusieurs bureaux de vote.

Internet a en outre été coupé sporadiquement dans le pays, mais le scrutin s’est déroulé dans le calme.

L’opposition s’est présentée en rang divisé et le leader traditionnel de l’opposition, Jean-Pierre Fabre, de l’Alliance nationale pour le changement, a très vite reconnu sa défaite.

Si aucun des candidats n’obtient la majorité des voix, un second tour doit être organisé quinze jours après la déclaration des résultats attendus à partir de lundi, mais ce scénario reste peu probable face à un parti au pouvoir bien implanté dans le pays.

Faure Gnassingbé est arrivé au pouvoir en 2005 après le décès de son père, le général Gnassigbé Eyadéma, qui avait lui-même dirigé le Togo pendant 38 ans.

Procès Fillon: ce qu’il est reproché aux prévenus

François Fillon, son épouse Penelope et son ancien suppléant à l’Assemblée Marc Joulaud sont jugés dès lundi à Paris dans l’affaire des emplois présumés fictifs de la femme de l’ex-Premier ministre.

Voici ce que la justice leur reproche:

– Une « discrète » collaboratrice parlementaire –

François Fillon et son ex-suppléant Marc Joulaud, qui ont salarié Mme Fillon comme collaboratrice permanente lorsqu’ils étaient députés de la Sarthe pour des prestations jugées « fictives ou sur-évaluées », sont renvoyés pour « détournement de fonds publics ». Penelope Fillon est jugée pour complicité et recel de ce délit.

Elle aurait perçu 1,054 million d’euros pour des contrats de 1998 à 2002, 2002 à 2007, puis 2012-2013.

Penelope Fillon, qui avait commencé à travailler pour son mari dès 1981, gérait son agenda local, le courrier parlementaire et rédigeait des mémos, soutient la défense. Cette collaboration était essentiellement « orale » et les notes manuscrites au fur et à mesure détruites.

Mais aux yeux des juges, les documents présentés comme « preuves » d’un travail effectif s’apparentent davantage aux « faits et gestes banals » d’une « épouse et mère de famille ».

Pour les magistrats, les époux Fillon ont tout fait pour « dissimuler » cette activité, connue d’un tout petit cercle. Ils jugent exagérés « l’argument de la +discrétion+ cultivée par Penelope Fillon ».

Une discrétion revendiquée par cette dernière, qui dans un entretien au « Sunday Telegraph » en 2007 assurait n’avoir « jamais été réellement » l’assistante de son mari « ou quelque chose de ce genre ». Cette mère de cinq enfants regrettait alors que ceux-ci ne la voient que comme une « maman » malgré ses diplômes.

Pire, selon les juges, l’emploi de Penelope Fillon auprès de Marc Joulaud, un fidèle nommé suppléant quand François Fillon était devenu ministre en 2002, n’était qu’une « contrepartie » et un moyen pour les Fillon « d’augmenter leurs revenus ». Elle était d’ailleurs mieux payée que son député.

– Les emplois des enfants –

François Fillon est aussi soupçonné d’avoir « accaparé » les fonds disponibles de son crédit collaborateur en employant successivement, de 2005 à 2007, ses deux aînés Marie et Charles comme assistants parlementaires alors qu’il était sénateur de la Sarthe.

Pour les magistrats, se pose là aussi la question de « la réalité » de leur travail, alors que Marie Fillon cumulait cet emploi avec un stage à plein temps dans un cabinet d’avocats et que son frère rédigeait un mémoire de DEA. Les salaires perçus, évalués à 117.400 euros, étaient reversés en grande partie à François Fillon.

Les enfants Fillon n’ont pas fait l’objet de poursuites. Leur mère est jugée pour recel.

– La conseillère littéraire mystère –

Sur le point de quitter Matignon, au printemps 2012, François Fillon avait sollicité son ami de plus de trente ans Marc Ladreit de Lacharrière, patron de la société Fimalac, pour qu’il emploie son épouse qui « s’ennuyait ».

Le milliardaire avait embauché Mme Fillon comme conseillère littéraire au sein La Revue des deux mondes. Censée réfléchir à la relance de ce titre qui périclitait, elle se proposait aussi de rédiger des notes de lecture. Seules deux seront publiées à l’automne 2012.

Pour les magistrats, cet emploi de conseillère était uniquement destiné à satisfaire la demande d’un « homme politique influent ». Le directeur de la revue et ses salariés ignoraient que Penelope Fillon était rémunérée comme telle et aucune trace de cette activité n’a été retrouvée. Elle la cumulait en outre avec un nouvel emploi d’assistante parlementaire de son époux, élu député de Paris, et avec une reprise d’études.

S’estimant « sous-employée », Penelope Fillon avait démissionné en décembre 2013, peu après avoir mis fin à sa collaboration parlementaire.

Marc Ladreit de Lacharrière a plaidé coupable pour un emploi en partie fictif, rémunéré à hauteur de 135.000 euros. Il a été condamné en décembre 2018 à huit mois d’emprisonnement avec sursis et 375.000 euros d’amende pour abus de biens sociaux.

Les époux Fillon comparaissent pour complicité et recel de ce délit.

– Le prêt « oublié » –

François Fillon est également jugé pour avoir omis de déclarer à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) un prêt de 50.000 euros accordé par Marc Ladreit de Lacharrière en mai 2012.

Ce prêt, destiné à financer des travaux de rénovation de sa maison, avait été remboursé après le déclenchement de l’affaire.

L’ex-député, qui avait déclaré à la HATVP un prêt bancaire d’un même montant et ayant la même finalité, a dit ignorer qu’il fallait déclarer les prêts entre particuliers.

Séisme frontalier: sept morts en Turquie, 25 blessés en Iran

Un séisme de magnitude 5,7 survenu dimanche à la frontière entre l’Iran et la Turquie a tué au moins sept personnes, dont trois enfants, côté turc et en a blessé 25 du côté iranien, ont annoncé les autorités des deux pays.

Le séisme a frappé à 05H23 GMT (09H23 locales) et son épicentre était localisé près du village de Habash-e Olya dans le nord-ouest de l’Iran, à moins de dix kilomètres de la frontière avec la Turquie, selon l’Institut d’études géologiques des Etats-Unis. Sa magnitude était de 5,7 sur l’échelle de magnitude du moment utilisée par l’USGS.

Selon le centre d’étude des séismes de l’Institut de géophysique de l’Université de Téhéran, l’épicentre de la secousse tellurique se situait à une profondeur de 6 km.

En Turquie, sept personnes dont trois enfants ont péri dans la province de Van (est) limitrophe de l’Iran, a annoncé le ministre turc de l’Intérieur Süleyman Soylu, cité par l’agence étatique Anadolu.

Cinq autres personnes ont été blessées et hospitalisées et d’autres personnes se trouveraient piégées sous les décombres, a ajouté M. Soylu précisant que « les efforts de recherches et de secours se poursuivent ».

Le gouverneur de la province de Van, Mehmet Emin Bilmez, a fait état sur Twitter de « dégâts dans plusieurs zones habitées » de sa juridiction.

Selon l’agence Anadolu, le séisme a endommagé plusieurs villages de cette province. Celle-ci a déjà été frappée début février par deux avalanches qui ont tué 41 personnes, dix jours après un puissant séisme dans la province d’Elazig, située également dans l’est de la Turquie, qui a fait aussi 41 morts.

En Iran, le Service national des secours iraniens a fait état de 25 blessés avec des dégâts matériels limités selon les premières estimations. La secousse a touché la province de l’Azerbaïdjan-Occidental.

Mojtaba Khalédi, porte-parole du Service national des secours iraniens, a précisé à l’AFP que sept des 25 personnes blessées ont été hospitalisées.

Le tremblement de terre a également endommagé un nombre encore indéterminé de maisons d’habitation dans quatre villages proches de l’épicentre, a ajouté M. Khalédi.

Nicaragua: la police brutalise des manifestants, selon l’opposition

La police anti-émeutes a harcelé samedi à Managua, selon l’opposition, des manifestants qui réclamaient la libération de 61 opposants au gouvernement du président Daniel Ortega.

Le rassemblement s’inscrivait dans la stratégie adoptée par l’opposition de « manifestations express » tenues sans préavis pour déjouer la vigilance de la police, qui interdit les manifestations anti-gouvernementales sur la voie publique.

« Deux minutes après le début du rassemblement, au moins 20 patrouilles de policiers anti-émeutes sont arrivées, ils ont commencé à nous bousculer et à nous frapper », a déclaré à l’AFP Josué Garay, porte-parole d’une organisation d’opposition, l’Unidad Nacional Azul Blanco (Unab, Unité nationale bleu blanc).

Les faits ont eu lieu devant un supermarché de Plaza España, dans l’ouest de Managua, où les opposants cernés par la police ont passé plus de deux heures, scandant « Liberté pour le Nicaragua », « Liberté pour les prisonniers politiques ».

L’Unab a ensuite déclaré dans un communiqué qu’elle ne renoncerait pas à manifester sur la voie publique.

Elle faite partie d’une coalition d’opposition qui doit se constituer officiellement mardi prochain en vue de l’élection présidentielle prévue en 2021.

Le parti de gauche au pouvoir, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN), envisage de présenter comme candidat à ce scrutin le président Ortega, au pouvoir depuis 2007 et qui briguerait ainsi un quatrième mandat consécutif.

Si la manifestation de l’opposition a été entravée par la police, plusieurs centaines de partisans du pouvoir ont pu défiler librement samedi pour exprimer leur soutien au sandinisme sur une autre avenue de la capitale nicaraguayenne.

« Que le Yankee aille se faire foutre », « A mort les mégots! » (surnom injurieux donné aux opposants), ont crié les manifestants, rassemblés pour marquer le 86e anniversaire de l’assassinat du héros national Augusto Cesar Sandino.

La répression des manifestations antigouvernementales de 2018 a fait au moins 328 morts et 88.000 exilés, selon la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH).

Le président Ortega est accusé par l’opposition de graves violations des droits de l’homme. Le pouvoir soutient que les manifestations de 2018 constituaient une tentative de coup d’Etat soutenu par les Etats-Unis et qualifie les opposants de « semeurs de haine ».

A Najaf, la tombe de Mouhandis, nouvelle étape des pèlerins d’Irak et du monde

Au détour d’une allée du plus grand cimetière du monde, un groupe de jeunes filles en noir mitraillent les lieux avec leurs portables. L’objet de leur attention? La tombe d’Abou Mehdi al-Mouhandis, commandant irakien tué par une frappe américaine en janvier.

Au coeur du cimetière de Wadi Salam, véritable cité dans la ville sainte chiite de Najaf, au sud de Bagdad, les jeunes visiteuses rejoignent en pleurant des hommes qui se frappent la poitrine en signe de deuil.

La sépulture érigée pour l’ex-homme de Téhéran à Bagdad, le très puissant chef des paramilitaires du Hachd al-Chaabi, désormais intégrés à l’Etat, est désormais un lieu incontournable pour les anti-Américains.

Le 3 janvier, Abou Mehdi al-Mouhandis est tombé aux côtés du puissant général iranien Qassem Soleimani, bête noire des Etats-Unis.

La tombe, dans l’allée numéro neuf, est ainsi devenue pour des milliers de chiites d’Irak et d’ailleurs une étape du pèlerinage à Najaf, qui reçoit chaque année des millions de chiites du monde entier venant se recueillir dans le mausolée de l’imam Ali, gendre du prophète Mahomet, situé non loin.

– « Remercier le héros » –

« Ce n’est pas simplement une tombe privée, c’est devenu un mausolée public », affirme à l’AFP Abbas Abdel Hussein, en charge de la sécurité du tombeau de celui qui fut durant des décennies l’ennemi numéro un en Irak pour les Etats-Unis.

En plus des Irakiens, « des Iraniens, Libanais, Bahreïnis viennent », assure l’homme, évoquant « un millier de visiteurs chaque jour ».

Un peu plus loin, au pied d’un immense portrait du commandant défunt –barbe blanche taillée courte et saharienne beige–, un jeune homme crie « Dieu nous venge de l’Amérique! » en se frappant la poitrine.

Car en pulvérisant avec un tir de drone les voitures à bord desquelles Soleimani et Mouhandis quittaient l’aéroport de Bagdad, Washington a porté un sérieux coup à la « résistance » que l’Iran et ses alliés disent incarner au Moyen-Orient, de Téhéran à Beyrouth, en passant par l’Irak ou le Yémen.

La mort de Mouhandis a provoqué l’émoi en Irak, où des milliers de personnes ont participé à son cortège funéraire.

Depuis, les factions armées d’Irak –dont les plus radicales sont entraînées et armées par l’Iran– ont multiplié les menaces, promettant « l’enfer » aux 5.200 soldats américains présents en Irak.

Près de deux mois plus tard, la riposte annoncée n’a pas eu lieu, mais la tombe de Mouhandis est devenu un passage obligé.

Oum Hussein n’a pas hésité à faire 450 km depuis Bassora, à la pointe sud de l’Irak, pour visiter Wadi Salam. « A chaque pèlerinage pour l’imam Ali, on passera par la tombe » de Mouhandis, dit-elle à l’AFP. « C’est notre devoir ».

A ses côtés, Souad, la cinquantaine, est venue « remercier » le « héros qui a dégagé le groupe Etat islamique » (EI). « Sa mort nous a porté un coup, comme au Hachd », dit-elle à l’AFP.

– « Pas oublié » –

Le cimetière Wadi Salam a reçu des milliers de corps de combattants du Hachd, tués entre 2014 et 2017 lors de combats acharnés contre les jihadistes de l’EI.

C’est sur ce front que Mouhandis –notamment accusé d’être impliqué dans des attentats meurtriers contre les ambassades de France et des Etats-Unis au Koweït en 1983– s’est mué en homme d’Etat.

Il a organisé les rangs du Hachd et travaillé à son intégration à l’Etat, transformant en troupes régulières ses paramilitaires –pour beaucoup issus des milices de l’époque des affrontements confessionnels entre 2006 et 2008.

Mais certaines factions du Hachd continuent d’agir hors du contrôle de Bagdad. Leurs hommes, accuse Washington, harcèlent à coup de roquettes les soldats et diplomates américains en Irak.

Et ces attaques, affirment les experts, pourraient se multiplier, la disparition de Mouhandis ayant porté un coup au contrôle central du Hachd sur ses troupes.

A Wadi Salam, Reza Abadi, venu de Kerman, ville natale de Soleimani, psalmodie un éloge funéraire devant la tombe de son lieutenant irakien. « C’est notre devoir de présenter nos respects à cet homme cher aux Iraniens et aux Irakiens », assure-t-il à l’AFP.

« Le souvenir des deux martyrs ne sera pas oublié », veut-il encore croire.

Non loin de lui, un mouvement fait trembler la longue enfilade de visiteurs. Une femme court derrière un enfant. Pistolet en plastique à la main, il tire tous azimuts.

A la frontière turque, des Syriens rêvent de faire « tomber le mur »

Pour échapper aux combats dans le nord-ouest de la Syrie, Abou Jaber s’est installé au pied du mur de la frontière turque. Et si les forces prorégime devaient encore progresser, il a fabriqué une échelle afin d’escalader la barrière avec ses onze enfants.

Dans le nord de la province d’Idleb, près du village de Kafr Lusin, ils sont nombreux à avoir planté leur tente le plus près possible de la frontière, fuyant l’offensive du régime et de son allié russe contre l’ultime grand bastion jihadiste et rebelle de Syrie.

« Quand j’ai vu que la situation empirait, j’ai décidé de fabriquer une échelle », raconte Abou Jaber, montrant son oeuvre réalisée à partir de tubes en fer rouillé.

Ici, au milieu des oliviers, sur le flanc d’une colline où serpente le mur en béton de la frontière, un camp de déplacés informel s’est transformé en un véritable hameau accueillant des dizaines de familles.

Des cabanes en béton, surmontées de panneaux solaires et de réservoirs d’eau, côtoient les tentes sommaires des nouveaux venus érigées avec des bâches en plastique, où des familles s’entassent à 10 personnes ou plus.

Loin des violences, les enfants jouent tous les jours au pied du mur. Parmi eux, un gamin porte une tenue militaire, frappée d’un écusson turc.

Mais les rêves des déplacés d’une vie meilleure se heurtent à cet imposant mur surmonté de barbelé et doté de miradors. La Turquie qui accueille déjà plus de 3,6 millions de réfugiés syrien et craint un nouvel afflux, garde la frontière fermée.

Si le régime syrien progresse, « on franchira le mur pour protéger la vie des enfants », s’entête Abou Jaber, quadragénaire enveloppé dans un manteau traditionnel noir, la barbe taillée en bouc.

Même si des dizaines civils ont déjà été tués ou blessés par les gardes-frontières turcs en tentant de franchir illégalement la frontière, selon une ONG syrienne.

– « Chauffage, nourriture » –

Originaire de la province de Hama, Abou Jaber a été déplacé plusieurs fois. Depuis six mois, il vit près de Kafr Lusin avec ses onze enfants et ses parents.

L’un de ses enfants, un garçon de dix ans, a dû être amputé d’une main après un bombardement qui lui a aussi coûté un oeil.

« Pour moi, aller en Turquie ce n’est pas un choix. Je veux la sécurité, je veux un abri, du chauffage, de la nourriture », martèle Abou Jaber.

Depuis la reprise en décembre de l’offensive du régime syrien dans la province d’Idleb et des secteurs attenants dans les provinces de Hama, Lattaquié et d’Alep, dominés par les jihadistes et les rebelles, environ 900.000 personnes ont été déplacées selon l’ONU.

Et celles-ci n’ont souvent d’autre choix que de se rapprocher de la frontière.

Face à l’ampleur du drame, le Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a appelé les pays voisins, surtout la Turquie, « à élargir les admissions afin que les personnes en grand danger puissent (y) trouver refuge ».

En 2019, les autorités turques avaient été accusées par des ONG d’avoir renvoyé de force des centaines de réfugiés vers la Syrie. Ankara avait évoqué des retours volontaires.

– « Faire tomber le mur » –

La moitié des trois millions d’habitants de la province d’Idleb, frontalière de la Turquie, sont des déplacés venus d’autres bastions rebelles reconquis ces dernières années par le régime syrien.

Abdel Razak Sallat, lui, est originaire de la petite ville de Binnich, dans la province d’Idleb. Il est arrivé à Kafr Lusin il y a deux semaines, avec ses huit enfants.

Sous la bâche en plastique bleu de sa tente exiguë, il a entassé des affaires, mais aussi des étagères, une gazinière et même un vaisselier. Il partage les lieux avec la famille de sa belle-soeur, soit 19 personnes au total.

L’abri n’est qu’à quelques pas du mur. « On s’est mis ici pour la sécurité », explique le quinquagénaire, installé autour d’un poêle.

La journée, pour avoir un peu de place, la famille empile matelas et couvertures dans un coin.

Pour M. Sallat, passer en Turquie est la promesse d’une meilleure vie.

« Regardez derrière le mur comme la vie est belle. Notre vie ici est désastreuse. Ne sommes-nous pas des humains? », lâche-t-il avec amertume.

« Si on y est contraint, on va entrer en Turquie. On va faire tomber le mur et entrer. »

En Israël, vers le troisième épisode électoral en un an

Elections israéliennes, prise 3! Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption, et son rival Benny Gantz entament la dernière semaine d’une campagne électorale aux airs de déjà-vu en tentant de mobiliser des électeurs fatigués.

Après des scrutins en avril et septembre 2019 où le Likoud de M. Netanyahu et le parti centriste « Bleu-blanc » de M. Gantz sont arrivés au coude-à-coude, les Israéliens sont appelés le 2 mars à mettre fin à la plus longue crise politique de l’histoire du pays.

Mais du premier scrutin à aujourd’hui, bien des choses ont changé.

N. Netanyahu est ainsi devenu le seul Premier ministre de l’histoire d’Israël inculpé alors qu’il est en fonction: son procès pour corruption s’ouvre à la mi-mars. Et fin janvier, il s’est rendu à Washington pour l’annonce d’un projet de paix pour le Proche-Orient qu’il juge « historique », puis a ramené de Moscou une Israélienne qui y était emprisonnée.

Et pourtant, rien ne bouge.

Les derniers sondages placent les listes de MM. Netanyahu et Gantz à une quasi égalité, et nul camp ne semble en mesure de rallier une majorité de sièges à la Knesset, le Parlement israélien.

M. Netanyahu « réussit toutefois, d’une certaine manière. Il n’attire pas plus d’électeurs, mais il n’en perd pas non plus », en dépit de son inculpation, souligne Gideon Rahat, professeur de sciences politiques à l’Université hébraïque de Jérusalem.

Plus pérenne des chefs de gouvernement de l’histoire d’Israël, avec 14 ans au pouvoir, M. Netanyahu a été inculpé en novembre pour corruption, malversation et abus de confiance dans trois affaires par le procureur Avichaï Mandelblit.

Un dossier, baptisé affaire « 4.000 » ou encore « Bezeq », du nom d’une société israélienne de télécoms, est particulièrement sensible.

La justice soupçonne le Premier ministre d’avoir accordé des faveurs gouvernementales qui pourraient avoir rapporté des millions de dollars au patron de Bezeq en échange d’une couverture médiatique favorable d’un des médias de ce groupe, le site Walla.

M. Netanyahu a dénoncé un « coup d’Etat » ourdi contre lui par la justice et mobilisé ses électeurs contre cette accusation qu’il juge biaisée.

– Participation –

Ces dernières semaines, il a concentré ses attaques contre les partis arabes d’Israël, et des affiches avec le slogan « sans Ahmed Tibi », un ténor de la « Liste unie » des partis arabes, ont fait leur apparition sur les artères du pays.

Lors des dernières élections, les partis arabes avaient causé la surprise en terminant en troisième place et soutenu, sans succès, Benny Gantz, pour le poste de Premier ministre.

Pour M. Netanyahu, le message est clair: « Si le Likoud ne gagne pas, il y aura soit une 4e élection, soit un gouvernement de gauche dirigé par Gantz et dépendant d’Ahmed Tibi et de la +Liste unie+ », a-t-il déclaré dans un entretien au journal Jerusalem Post.

En raison de son inculpation, M. Netanyahu ne pourra pas être simple ministre dans une éventuelle coalition, selon les lois israéliennes. Il peut cependant rester Premier ministre.

D’où la nécessité pour lui de remporter la mise pour faire partie du prochain gouvernement. Mais comme les intentions de vote ne bougent pas, le mot d’ordre reste simple: « Allez voter! ».

« Ailleurs dans le monde, lorsque vous avez trois élections sur une courte période de temps, vous observez une diminution (de la participation). Mais en Israël on ne sait jamais. Lors de la deuxième élection, on s’attendait à un taux en baisse, mais il a été en hausse », souligne M. Rahat.

Il s’agissait d’une hausse légère, de 1,4 point pour une participation d’environ 70%, mais elle reste notable pour cette élection qui s’annonce serrée, selon les dernières projections.

Alors que la dernière ligne droite s’amorce, Benny Gantz s’est retrouvé malgré lui sous les feux de la rampe.

Un procureur a lancé cette semaine une enquête criminelle sur l’octroi de fonds publics, sans appel d’offre, d’une valeur d’environ un million d’euros à la société de cybersécurité Fifth Dimension, anciennement présidée par M. Gantz.

Le procureur général Avichaï Mandelblit a rapidement dissipé des soupçons en soutenant que M. Gantz n’était pas inquiété dans cette affaire.

Mais cela n’a pas empêché Benjamin Netanyahu de saisir la balle au bond en demandant à Benny Gantz, dans une vidéo, si « obtenir frauduleusement » un contrat n’était « pas de la corruption de premier ordre. »

Municipales à Paris: les principales propositions d’Agnès Buzyn (LREM)

Une police municipale armée, des « managers de rue » pour la propreté, un « service public du maintien à domicile », plus de végétation, la candidate LREM Agnès Buzyn a dévoilé dimanche dans le JDD ses principales propositions pour les municipales à Paris.

La candidate, qui remplace Benjamin Griveaux, contraint d’abandonner après la diffusion de vidéos intimes, a repris de nombreuses propositions de son prédécesseur, notamment en matière de propreté et de sécurité, ses « deux priorités ».

Elle a aussi apporté des mesures nouvelles, comme celle pour le maintien à domicile des personnes âgées ou sa volonté de verdir les rues, et a retoqué deux idées phare de Benjamin Griveaux: le déplacement de la gare de l’Est pour créer un Central Park parisien et la proposition d’offrir 100.000 euros aux Parisiens pour l’achat d’un appartement.

SECURITE

Agnès Buzyn confirme vouloir une police municipale équipée d’armes létales, comme « 50% des polices municipales ». Cela nécessite une formation, et que ce soit des policiers qui connaissent leur quartier », insiste-t-elle.

Au moins un agent par patrouille portera une caméra-piéton. Nous le devons aux Parisiens qui ont de plus en plus peur pour leur sécurité.

Son premier adjoint aura la charge de la sécurité et de la tranquillité.

PROPRETE

La candidate reprend les propositions de son prédécesseur: création de « managers de rue » dans chaque quartier, augmentation du nombre d’agents de la ville sur le terrain « mobilisés dans les zones les plus sales, déterminées en concertation avec les maires d’arrondissement et les citoyens », le ramassage des déchets confié entièrement au secteur privé, et « la responsabilité de la propreté » donnée aux maires d’arrondissement.

Elle veut aussi « doubler la part des déchets recyclés, qui n’est que de 20% ».

ENVIRONNEMENT

La candidate LREM veut « faire de l’adaptation de la ville au changement climatique une autres de (ses) grandes priorités », jugeant que « Paris n’est pas préparée » à la canicule.

Elle veut établir « une règle verte » qui « aura pour objectif de préserver les espaces verts, planter plus d’arbres, créer des îlots de verdure et une rue-jardin par quartier ».

Elle veut soumettre « pour avis » tous les grands projets de la ville à un conseil scientifique et citoyen, « qui jugera la qualité écologique de chacun d’eux ».

SOCIAL

Mme Buzyn veut s' »attaquer au défi du vieillissement de la population ». Face aux difficultés rencontrées par les personnes âgées qui veulent rester chez elles, l’ancienne ministre de la Santé veut créer « un service public du maintien à domicile, qui centralisera les demandes et travaillera avec toutes les associations ».

TRANSPORTS

La candidate LREM juge qu’il faut « évidemment aller vers plus de transports en commun et plus de vélo ».

Elle prévoit « un plan vélo sécurisé », « plus de véhicules électriques » et « un partenariat avec la Région pour développer les transports en commun ».

Mais elle s’oppose à la promesse d’Anne Hidalgo de supprimer 60.000 places de stationnement », car « c’est de l’écologie punitive », et refuse le « 100% vélo » qui « exclut une grande partie des Parisiens : les femmes enceintes, les personnes âgées, malades ou handicapées ».

LOGEMENT

L’ex-ministre de la Santé veut « remettre sur le marché au moins 20.000 logements vacants, sur les plus de 100.000 existants, au cours de la mandature », « en garantissant le paiement des loyers et en simplifiant les démarches pour les propriétaires ». « Des dispositifs similaires existent, mais ne sont pas suffisamment incitatifs », dit-elle.

Quant aux logements sociaux, elle souhaite « les mettre à disposition des personnes qui travaillent au service des Parisiens », dit-elle, jugeant que « c’est insuffisamment le cas » actuellement pour les infirmières ou les aides-soignantes.