Brésil: Bolsonaro repousse les limites du politiquement incorrect

Insultes à répétition, attaques misogynes à caractère sexuel: le président brésilien Jair Bolsonaro multiplie les dérapages que ses détracteurs jugent indignes de sa fonction.

Le chef de l’Etat a provoqué une vague d’indignation sans précédent mardi en insinuant qu’une journaliste du très respecté quotidien Folha de S. Paulo, Patricia Campos Mello, aurait tenté d’obtenir un scoop contre lui en échange de relations sexuelles avec sa source.

En termes de misogynie, Jair Bolsonaro n’en est pas à son coup d’essai. En août 2019, il s’en était pris au physique de Brigitte Macron, épouse du président français, qui l’avait vivement critiqué en raison de la recrudescence des feux de forêt en Amazonie.

« Il est de plus en plus évident que le président a besoin d’un traitement thérapeutique de toute urgence », a estimé Paulo Jeronimo de Sousa, président de l’Association Brésilienne de Presse (ABI), considérant les propos de Jair Bolsonaro « lâches » et « embarrassants ».

« Ce comportement misogyne est indigne de la fonction présidentielle et constitue un affront à la Constitution », a-t-il ajouté, réclamant que le procureur-général « prenne les mesures nécessaires » contre Jair Bolsonaro. Celui-ci avait été élu fin 2018 en se présentant comme un candidat antisystème et « politiquement incorrect ».

Ivar Hartmann, professeur de Droit à la Fondation Getulio Vargas (FGV) considère ces propos « déplorables », mais ne croit pas pour autant qu’ils puissent « entraîner des conséquences légales ».

– « Écran de fumée » –

La loi brésilienne prévoit que « porter atteinte à la dignité et l’honneur » de la fonction présidentielle est passible de destitution.

Mais pour qu’une procédure de destitution aboutisse, elle doit être approuvée par les trois cinquièmes des députés, ce que la plupart des analystes jugent peu probable dans le cas de Jair Bolsonaro.

« La gauche va sûrement argumenter que ces propos portent suffisamment atteinte à la dignité de la fonction pour motiver une destitution (…) mais je ne vois pas le Congrès disposé à aller jusque là », estime Ivar Hartmann.

Depuis le début du mois, le président brésilien a adressé deux bras d’honneur à la presse à Brasilia.

Rodrigo Maia, président de la Chambre des Députés, a tiré la sonnette d’alarme mercredi, craignant que l’agressivité du président n’envoie « un signal négatif aux investisseurs ».

« La présidence est contaminée par les incivilités, l’ignorance et le machisme abject de son occupant », a fustigé Folha de S. Paulo dans un éditorial mercredi.

Dans la chronique politique qu’elle signe au journal Estado de S. Paulo, la journaliste Vera Magalhaes a accusé M. Bolsonaro de « dégrader l’image de la fonction présidentielle pour créer un écran de fumée ».

Les agressions verbales du président sont ainsi vues comme un moyen de détourner l’attention de sujets sensibles.

En décembre, quand un journaliste lui a posé une question sur des accusations de corruption pesant contre son fils aîné, le sénateur Flavio Bolsonaro, il a répondu par un commentaire homophobe, lui lançant: « tu as une tête terrible d’homosexuel! ».

« Quand il n’est pas capable de fournir une réponse rationnelle, il répond avec des blagues, souvent offensantes, pour créer un écran de fumée », renchérit Ivar Hartmann, qui souligne que ce ton agressif « plaît au noyau dur de son électorat »

– « Grossièreté inacceptable » –

En ce moment, le sujet sensible pour la famille Bolsonaro est la mort du chef présumé d’une milice paramilitaire soupçonnée d’avoir orchestré l’assassinat de l’élue de gauche Marielle Franco il y a deux ans.

Ex-capitaine du Bope, bataillon d’élite de la police militaire de Rio de Janeiro, Adriano Magalhães da Nobrega avait été décoré en 2005 à l’initiative de Flavio Bolsonaro, qui avait par ailleurs embauché sa mère et son ex-épouse dans son cabinet.

Considéré comme un fugitif, l’ancien policier a été tué le 9 février dans l’Etat de Bahia (nord-est), lors d’une fusillade après avoir ouvert le feu sur les agents qui allaient l’arrêter, selon les autorités locales.

Mais Jair Bolsonaro a évoqué une « exécution sommaire » perpétrée selon lui par des policiers à la solde du gouverneur de gauche Rui Costa.

Lundi, une vingtaine de gouverneurs ont fait part de leur indignation, réclamant plus « d’équilibre, de sagesse et de dialogue » de la part du chef de l’Etat.

Mardi, l’ex-président de centre droit Fernando Henrique Cardoso (1995-2002) a estimé que les insinuations de Jair Bolsonaro étaient d’une « grossièreté inacceptable ».

Même quand il n’attaque personne, le président brésilien parvient parfois à détourner l’attention avec des déclarations improbables teintées de vulgarité.

En août, il avait par exemple préconisé de « faire caca un jour sur deux » pour préserver l’environnement.

Israël annonce des milliers de nouveaux logements pour colons à Jérusalem-Est

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé jeudi la construction de milliers de nouveaux logements dans des quartiers de colonisation à Jérusalem-Est, secteur palestinien de la ville, moins de deux semaines avant des législatives lors desquelles il joue sa survie politique.

« Nous ajoutons 2.200 logements à Har Homa », a déclaré le Premier ministre dans une vidéo diffusée par son bureau, dans laquelle il apparait à proximité de ladite colonie.

« J’ai fondé ce quartier en 1997 lorsque j’ai été élu Premier ministre, malgré les objections du monde entier », a-t-il ajouté. « Il y a aujourd’hui 40.000 habitants, et nous en ajoutons 10.000. Har Homa sera composée de 50.000 habitants, comme une ville israélienne moyenne ».

M. Netanyahu, en campagne pour les législatives du 2 mars, les troisièmes en moins d’un an, a aussi annoncé la construction de milliers de logements dans un autre secteur de la partie orientale de Jérusalem.

« Mais la nouvelle encore plus importante aujourd’hui est que j’ai approuvé la construction à Givat Hamatos. Cela signifie 4.000 nouveaux logements, 1.000 pour les habitants arabes de Beit Safafa (secteur palestinien à proximité, NDLR) et 3.000 pour des habitants juifs », a-t-il déclaré.

– « Jérusalem unifiée » –

« La construction à Givat Hamatos est un sérieux coup porté à la solution à deux Etats » (israélien et palestinien, NDLR), a estimé sur Twitter l’ONG israélienne anticolonisation « La paix maintenant ».

« C’est le dernier endroit qui permettrait une continuité territoriale entre Bethléem et Jérusalem-Est », a indiqué l’ONG.

Aujourd’hui, plus de 600.000 personnes habitent dans les colonies en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. La colonisation de ces territoires, occupés depuis 1967 par Israël, s’est accélérée ces dernières années sous l’impulsion de M. Netanyahu et de son allié à Washington, le président Donald Trump.

Ce dernier a présenté fin janvier son plan pour le Proche-Orient qui prévoit notamment de faire de Jérusalem la capitale « indivisible » de l’Etat d’Israël et de créer une capitale d’un Etat palestinien dans des faubourgs de Jérusalem.

Les Palestiniens veulent faire de l’ensemble de Jérusalem-Est leur capitale et rejettent le projet américain, jugé « historique » par Israël.

« Nous connectons toutes les parties de Jérusalem unifiée, je lève toutes les restrictions et Jérusalem se construit avec nous », a ajouté M. Netanyahu jeudi.

Après un bras de fer au sommet, la Tunisie pourrait enfin avoir un gouvernement

Une nouvelle mouture du gouvernement a été dévoilée tard mercredi soir par le Premier ministre Elyes Fakhfakh en Tunisie, écartant a priori le spectre de nouvelles élections, au terme d’un bras de fer entre le président Kais Saied et le parti d’inspiration islamiste Ennahdha.

M. Fakhfakh a présenté une liste remaniée par rapport à celle dévoilée quatre jours plus tôt et qui avait été rejetée par Ennahdha. Première force du Parlement avec 54 sièges, cette formation obtient sept portefeuilles mais pas ceux qu’elle escomptait.

Conséquence: plus de quatre mois après la fin des élections, la jeune démocratie tunisienne pourrait enfin être dotée, prochainement, d’un nouveau gouvernement, à la faveur d’un vote à l’Assemblée, où il devra décrocher la majorité de 109 voix (sur 217 sièges).

Quand précisément? Mercredi soir, le chef de l’Etat a adressé un courrier au président du Parlement pour lui demander de fixer une date pour la plénière. Le bureau du Parlement doit se réunir dans les 48 heures après réception de cette correspondance et fixer la date dans un délai ne dépassant par une semaine.

« Enfin, le dénouement! », a titré jeudi le quotidien francophone La Presse, sûr de son fait malgré les multiples rebondissements des derniers mois.

« Si on se réfère aux déclarations des différents partis, il y a une intention d’accorder la confiance », a dit à l’AFP le politologue Selim Kharrat.

– « Tout à fait démocratique » –

Mercredi soir, face aux blocages, des négociations intenses ont continué jusqu’à la dernière minute, avec l’aide de la puissante centrale syndicale UGTT -un médiateur historique-, et l’organisation patronale Utica.

« La période des concertations, malgré ses difficultés et sa complexité, s’est déroulée de façon tout à fait démocratique », a commenté Elyes Fakhfakh.

Alors qu’Ennahdha avait soutenu Kais Saied au second tour de la présidentielle à l’automne dernier, les négociations de l’hiver ont mis au jour de profondes divergences entre les principaux acteurs de la politique tunisienne, tous deux désireux d' »imposer leurs orientations », selon Abdellatif Hannachi, professeur d’histoire contemporaine.

Néophyte en politique mais élu avec un très confortable score, Kaies Saied est un spécialiste du droit constitutionnel très critique du système parlementaire partisan. Il défend notamment une décentralisation radicale du pouvoir.

M. Ghannouchi, lui, est une figure de la classe politique aux commandes depuis la révolution de 2011, qui a toutefois vu son poids électoral s’éroder.

Par pur pragmatisme, il a accédé à la présidence de l’Assemblée (ARP) à la faveur d’une alliance avec son principal adversaire électoral, Qalb Tounes, mené par le sulfureux magnat des médias Nabil Karoui.

– « Lutte pour le pouvoir » –

Dans leur bras de fer, MM. Saied et Ghannouchi ont argué « d’interprétations différentes de la Constitution. Mais, au fond, c’est une lutte pour le pouvoir », avait relevé mardi le quotidien Chourouk.

Saluée lors de son adoption en 2014 comme une avancée majeure sur le chemin de la démocratie, la Constitution tunisienne a en effet donné naissance à un régime hybride, ni parlementaire ni présidentiel, prompt à ce type de blocage.

Au final, si Ennahdha a obtenu sept ministères dans la dernière mouture du gouvernement, il n’a pas eu ceux escomptés, notamment l’Intérieur et la Justice.

Durant le week-end, la formation d’inspiration islamiste avait évoqué une démission de M. Fakhfakh ou une motion de censure contre le gouvernement sortant, deux options lui permettant de proposer une autre figure au poste de Premier ministre.

Mais Kais Saied avait coupé court lundi soir à ces plans, en assénant au passage devant les caméras un cours de droit à un Rached Ghannouchi mal à l’aise. Non sans avoir martelé que l’unique alternative à l’octroi de la confiance au gouvernement Fakhfakh était de se préparer à une dissolution de l’Assemblée.

Ennahdha a justifié mercredi soir sa volte-face par la nécessité de prendre « en considération la situation économique et sociale » du pays et le conflit en Libye voisine.

Les incertitudes politiques des derniers mois pénalisent une économie tunisienne à la fragilité chronique, en laissant de nombreux dossiers en suspens dont celui des négociations avec les bailleurs de fonds.

Quant aux Tunisiens, une décennie après avoir chassé le dictateur Zine el Abidine Ben Ali, ils attendent toujours un gouvernement à même de s’attaquer aux maux socio-économiques qui rongent leur pays.

Allemagne: montée des attaques xénophobes ces dernières années

L’Allemagne, où neuf personnes ont été tuées mercredi soir dans deux fusillades visant des bars à chicha à Hanau (centre) connaît une recrudescence des attaques racistes et antisémites, dont plusieurs meurtrières ces dernières années.

– Des précédents récents –

Le 9 octobre 2019, deux personnes sont tuées et deux gravement blessées lors d’une tentative d’assaut contre une synagogue à Halle (est) le jour du Yom Kippour.

Après avoir échoué à pénétrer dans l’édifice où se trouvaient une cinquantaine de personnes, Stephan Balliet, extrémiste de droite, abat une passante puis un jeune homme dans un restaurant de kébabs. Il avait publié sur internet un « manifeste » exprimant ses vues antisémites.

Le 2 juin 2019, Walter Lübcke, élu local et haut fonctionnaire territorial pro-migrants, membre du parti de la chancelière Angela Merkel, est tué par balle chez lui dans la banlieue de Kassel (centre). Le meurtrier présumé, Stephan Ernst, est lié à la mouvance néonazie.

Le 26 septembre 2016, Nino Köhler, un sympathisant d’extrême droite, fait exploser deux bombes artisanales devant l’entrée d’une mosquée et sur la terrasse d’un centre de congrès à Dresde (Saxe), sans faire de victime. Il est condamné en août 2018 à près de 10 ans de prison.

Le 22 juillet 2016, David Ali Sonboly, Germano-Iranien de 18 ans lié à l’extrême droite et fasciné par Anders Behring Breivik (auteur du massacre de 77 personnes en Norvège en 2011), tue neuf personnes près d’un centre commercial de Munich, puis se suicide.

– Montée des actes racistes –

En 2018, les actes criminels à caractère xénophobe et antisémite ont augmenté de près de 20%, selon le ministère allemand de l’Intérieur, qui a recensé cette année-là 7.701 actes criminels xénophobes et 1.799 antisémites, commis à près de 90% par des auteurs de milieux d’extrêmes droite.

A Dresde, huit néonazis soupçonnés d’avoir voulu perpétrer des attentats contre des étrangers et des responsables politiques sont jugés depuis septembre. Ils figurent parmi les hooligans, néonazis et skinheads de Chemnitz (Saxe), théâtre en août 2018 de dérapages anti-migrants. Dans ce Land, le nombre d’agressions commises par l’extrême droite a bondi de 38% en 2018.

La semaine dernière, 12 membres d’un groupuscule d’extrême droite ont été arrêtés dans le cadre d’une enquête antiterroriste, soupçonnés d’avoir planifié des attaques de grande ampleur contre des mosquées.

– Meurtres d’immigrés dans les années 2000 –

Entre 2000 et 2007, le pays avait connu une série sans précédent depuis 1945 de meurtres de neuf personnes d’origine immigrée, dont huit Turcs ou personnes d’origine turque, et d’une policière, perpétrés par le trio néonazi « Clandestinité nationale-socialiste » (NSU). La seule survivante du groupuscule, Beate Zschäpe, a été condamnée en juillet 2018 à la prison à perpétuité.

L’affaire a été marquée par une cascade de scandales autour de l’enquête, qui a longtemps suivi la seule piste des « règlements de compte communautaires », ainsi que des services de renseignements intérieurs, censés disposer d’indics dans les milieux néonazis et vivement critiqués pour leur aveuglement.

Gabon : Banques publiques en liquidation, la situation des ex-agents en discussion à la primature

Le chef du gouvernement Julien Nkoghe Bekale, a présidé mercredi à la Primature une séance de travail portant sur la situation des ex-agents des banques publiques placées en situation de liquidation.

Le premier ministre  s’est imprégné  de la gestion des situations administratives des ex agents de ces entités financières publiques en situation de liquidation (BGD, BHG, Postbank), particulièrement les arriérés de salaires.

Après examen, il apparait que les situations varient d’une banque à une autre. Le ministre de l’Économie et des Finances, Jean Marie Ogandaga a indiqué qu’une partie des arriérés de la Banque Gabonaise de développement est apurée.

Il en reste une autre qui fera l’objet d’un paiement dans quelques mois. La Banque de l’habitat du Gabon a, pour ce qui la concerne, des agents pour lesquels un passif nécessite un paiement, tandis que la Postbank connaît un mois d’arriéré.

Gabon- violences en milieu scolaire : « fouilles des élèves, un saupoudrage inefficace » (Marcel Libama)

Marcel Libama leader syndical dans le secteur de l’éducation nationale,  soutient que les fouilles imposées par le ministre de l’Education nationale, Patrick Daouda, à l’entrée de tous les établissements scolaires pour lutter contre les violences en milieu scolaire relèvent d’un saupoudrage inefficace.

« C’est un saupoudrage totalement inefficace », a dit le syndicaliste qui réclame un « véritable plan de guerre » contre ce dangereux phénomène. « Il faut revenir aux méthodes qui ont fait recette dans le passé », suggère le syndicaliste.

Les élèves ne sont plus informés sinon ne connaissent pas le règlement intérieur de leur établissement scolaire. « Du coup, ils se croient tout permis et dans ce cafouillage, les élèves violents terrorisent les autres à volonté », explique M. Libama connaisseur du secteur de l’éducation.

Les plus faibles, selon lui, développent des réflexes personnels de défense d’où la présence des couteaux et autres armes blanches dans les cartables des élèves.

Le président Tebboune promet un « changement radical » en Algérie (média)

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui a succédé en décembre à Abdelaziz Bouteflika, chassé par la rue, réclame du temps pour opérer le « changement radical » promis en matière de fonctionnement de l’Etat, dans un entretien au quotidien français Le Figaro publié jeudi.

C’est la première interview accordée à un média étranger par M. Tebboune depuis son élection le 12 décembre, lors d’une présidentielle refusée par le « Hirak » -le « mouvement » populaire inédit de contestation qui agite l’Algérie depuis un an- et marquée par une abstention record (60%).

« On ne peut pas réformer, réparer, restaurer ce qui a été détruit pendant une décennie en deux mois », explique au Figaro M. Tebboune, plusieurs fois ministre et brièvement Premier ministre -en 2017- durant les 20 ans de présidence de M. Bouteflika.

Le chef de l’Etat qui, après son élection, a « tendu la main » au « Hirak » pour bâtir une « Algérie nouvelle », assure avoir fait des « réformes politiques », et notamment de la révision de la Constitution, sa « priorité ».

« Je suis décidé à aller loin dans le changement radical pour rompre avec les mauvaises pratiques, moraliser la vie politique, et changer de mode de gouvernance », affirme-t-il. « Les limites » sont « celles qui touchent notamment à l’identité nationale et à l’unité nationale. Tout le reste est négociable », promet-il.

« Le deuxième chantier sera celui de la loi électorale » pour, dit-il, donner une légitimité notamment au Parlement, « amené à jouer un plus grand rôle ».

Dans la rue, « les choses commencent à s’apaiser », assure encore M. Tebboune. « Le Hirak a obtenu pratiquement tout ce qu’il voulait »: le départ de M. Bouteflika, des figures de « l’ancien système » et l’arrestation de dirigeants ou hommes d’affaires soupçonnés de corruption…

Si la mobilisation semble avoir baissé depuis décembre, les manifestations continuent de drainer chaque semaine une foule nombreuse réclamant toujours le démantèlement du « système » qui dirige l’Algérie depuis son indépendance en 1962 et dont le chef de l’Etat est perçu comme un pur produit.

Mais M. Tebboune se défend d’être -comme l’ont été tous ses prédécesseurs- un président choisi par l’état-major de l’armée, pilier du régime: « Je ne me sens redevable qu’envers le peuple qui m’a élu en toute liberté et transparence. L’armée a soutenu et accompagné le processus électoral, mais n’a jamais déterminé qui allait être le président », assure-t-il.

M. Tebboune est considéré comme un proche du général Ahmed Gaïd Salah, puissant chef d’état-major de l’armée durant 15 ans jusqu’à son décès en décembre. Ce dernier a exercé le pouvoir de fait entre le démission de M. Bouteflika, le 2 avril 2019, et l’élection de M. Tebboune.

Le président algérien assure également dans cette interview vouloir réformer l’économie, qui souffre du faible cours des hydrocarbures et de « l’importation débridée, génératrice de surfacturation, une des sources de la corruption ».

Ouganda: acquittement en appel d’une activiste condamnée pour avoir harcelé Museveni

L’universitaire et militante féministe ougandaise Stella Nyanzi, condamnée à 18 mois de prison en première instance pour avoir harcelé en ligne le président Yoweri Museveni, a été acquittée mercredi en appel.

Mme Nyanzi avait été inculpée et placée en détention en novembre 2018 pour avoir posté sur son compte Facebook des propos jugés « obscènes » à l’encontre du président Museveni et de sa mère, décédée en 2001.

Dans ses commentaires, elle avait fait référence à l’anniversaire du chef de l’État et regretté dans un langage cru que celui-ci ait vu le jour.

En août 2019, elle avait été condamnée à un an et demi de prison pour harcèlement en ligne, même si le tribunal n’avait pas retenu à son encontre l’accusation de « propos offensants ».

En 2017, Mme Nyanzi avait déjà été arrêtée et placée en détention pour avoir notamment comparé le président Museveni, au pouvoir depuis 1986, à une « paire de fesses ».

Le juge Peter Adonyo l’a acquittée mercredi en appel et a également rejeté un appel du parquet concernant l’accusation de « propos offensants ».

L’universitaire s’est adressée aux dizaines de ses partisans réunis devant le tribunal en leur demandant: « Pourquoi étais-je emprisonnée? Pourquoi suis-je restée en prison pendant autant de mois? ».

« Persécution », ont répondu ceux-ci. « Museveni doit partir! Museveni, vous avez été prévenu », a-t-elle ensuite crié, avant que la police n’essaie de disperser ses supporteurs.

Cette initiative a créé la confusion et Mme Nyanzi a semblé s’évanouir. Ses partisans l’ont alors emmenée à l’écart, pendant que les responsables de la prison où elle était détenue exigeaient qu’elles rentrent dans le tribunal pour être formellement relaxée.

Des agents pénitentiaires ont ensuite tenté de l’enlever aux mains de ses soutiens et tiré en l’air à plusieurs reprises, apparemment sans blesser personne, avant que l’universitaire soit finalement évacuée dans une voiture par ses proches.

Chercheuse associée à la prestigieuse université de Makerere à Kampala, Mme Nyanzi est titulaire d’un doctorat sur les sexualités en Afrique.

Interrogée par l’AFP courant 2017, elle justifiait le recours à un vocabulaire cru: « Les paroles dites vulgaires sont parfois la meilleure option pour faire passer un message ».

Ses commentaires sur Facebook, où elle est suivie par plus de 200.000 personnes, divisent la société ougandaise, un pays largement conservateur mais dont une partie de la population, notamment au sein de la jeunesse, souhaite le départ du président.

Le président Museveni dirige le pays d’une main de fer depuis 1986. Ses opposants l’accusent d’être de plus intolérant à toute forme de critiques et la population a peu confiance dans l’indépendance de la justice.

Les Sud-Soudanais « délibérément affamés » par les parties en guerre (ONU)

L’armée gouvernementale sud-soudanaise et les différents groupes rebelles en guerre ont « délibérément affamé » les habitants du pays, en leur refusant l’accès à l’aide humanitaire et en les forçant à quitter leur foyer, selon un rapport de l’ONU publié jeudi.

La publication de ce rapport intervient à deux jours de la date butoir pour la formation d’un gouvernement d’union nationale, prévue par l’accord de paix signé en septembre 2018 à Addis Abeba.

Elle coïncide également avec une rencontre jeudi à Juba entre le président Salva Kiir et son rival historique Riek Machar pour s’accorder sur les conditions de la formation de ce gouvernement.

« Aujourd’hui au Soudan du Sud, les civils sont délibérément affamés, systématiquement surveillés et réduits au silence, arbitrairement arrêtés et détenus, et se voient refuser l’accès à toute réelle justice », a indiqué dans ce rapport une commission des droits de l’Homme de l’ONU.

Cette commission a été mise en place en 2016 par le Conseil des droits humains de l’ONU afin de rassembler des preuves qui pourraient être utilisées pour poursuivre en justice des auteurs d’atrocités. Elle a étudié les violations des droits humains commises entre la date de la signature de l’accord de paix et décembre 2019.

Les trois membres de la commission ont incriminé « des élites prédatrices et qui ne rendent aucun compte » à la population, laquelle souffre énormément depuis le déclenchement de la guerre civile en décembre 2013.

La commission a dénoncé les multiples querelles et délais dont le processus de formation d’un gouvernement d’union nationale a fait l’objet, dus selon elle à un « manque de volonté politique ».

« Les élites politiques continuent à négliger l’immense souffrance de millions de civils », a-t-elle observé.

Le Soudan du Sud a sombré dans la guerre civile en 2013, deux ans après son indépendance du Soudan, lorsque M. Kiir, un Dinka, a accusé M. Machar, son ex-vice-président, membre de l’ethnie nuer, de fomenter un coup d’État.

Le conflit, marqué par des affrontements communautaires, des atrocités et le recours au viol comme arme de guerre, a fait plus de 380.000 morts et provoqué une crise humanitaire catastrophique.

– ‘Beaucoup d’inquiétude’ –

L’application de l’accord de paix reste entravée par le recrutement continu d’enfants soldats par les forces gouvernementales et rebelles, par des violences localisées qui ont fait des centaines de mort en 2018 et 2019, par les violences sexuelles et la corruption, a établi la commission.

« La commission remarque avec beaucoup d’inquiétude qu’au-delà des facteurs climatiques, aussi bien les forces gouvernementales que les forces armées ont poursuivi des politiques responsables de la famine de la population à Wau et dans l’État de l’Unité », dans le nord du pays, ajoute le rapport.

« Le refus de laisser accéder l’aide humanitaire et les déplacements forcés, favorisés par des manœuvres illégales, ont aggravé de manière importante la famine en différents endroits du pays, privant des centaines de milliers de civils de droits vitaux, comme l’accès à la nourriture », souligne encore la commission.

L’accord de paix de 2018 est la plus récente tentative de mettre fin au conflit et de pousser MM. Kiir et Machar à gouverner ensemble. Les deux précédentes expériences se sont achevées dans un bain de sang.

La formation de ce gouvernement d’union nationale a déjà été repoussée deux fois en raison de désaccords portant notamment les arrangements sécuritaires, le cantonnement des forces gouvernementales et rebelles, et la question centrale du nombre d’États régionaux.

La commission note encore que les combats continuent dans la région de l’Équateur (sud) entre l’armée gouvernementale et plusieurs groupes rebelles. Ces violences ont causé la mort d’au moins 531 personnes entre février et mai 2019, et favorisé la corruption, selon elle.

« La corruption a rendu plusieurs officiels extrêmement riches aux dépens de millions de civils affamés », indique aussi le rapport, selon lequel des millions de dollars de taxes publiques ont été détournés.

Gouvernement et groupes rebelles ont continué à recruter des enfants soldats: 19.000 pendant la période observée selon la commission.

De même, quelque 2,2 millions d’enfants n’ont pas été scolarisés et 30% des écoles sont restées fermées.

En Syrie, des enfants traumatisés par la guerre et ballottés par l’exil

Moustapha, 12 ans, et Ines, 9 ans, aident leurs parents à charger le pick-up avant de fuir, une nouvelle fois, l’offensive meurtrière du régime dans le nord-ouest de la Syrie. Soudain, un bombardement à quelques rues de là sème la panique.

Instinctivement, Moustapha rentre la tête dans les épaules et se précipite dans le véhicule où sont empilés tapis et couvertures, suivi par sa soeur terrorisée qui se bouche les oreilles.

Une scène banale pour cette région, où les tirs d’artillerie et raids aériens du régime et son allié russe ont provoqué depuis deux mois un exode d’une ampleur sans précédent.

« Notre vie se résume à ça: des bombardements et la peur », lâche Abou Mohamed, le père de Moustapha et Inès.

La famille vivait depuis à peine un mois à Daret Ezza, dans la campagne vallonnée de l’ouest de la province d’Alep, un secteur dominé par des jihadistes et des rebelles visés par l’offensive du régime.

Originaire du sud de la province voisine d’Idleb, Abou Mohammed ne compte plus le nombre de fois où sa famille a été déplacée par les violences.

« C’est notre peur pour les enfants qui nous pousse à partir », lâche le quinquagénaire aux cheveux poivre et sel.

– « Elle hurle » –

Lorsque la famille est arrivée à Daret Ezza, elle a pris ce qui se présentait comme hébergement: un atelier aux murs noircis, où l’unique pièce était séparée de la cour par une bâche déchirée.

« C’est tout ce qu’on pouvait s’offrir », explique Abou Mohamed, qui raconte que les enfants, déjà affaiblis, ont souffert de la grippe et d’autres maladies.

Depuis début décembre, près de 900.000 personnes selon l’ONU, en majorité des femmes et des enfants, ont été déplacées par l’offensive du régime lancée contre la province d’Idleb et les territoires limitrophes, ultime grand bastion jihadiste et rebelle de Syrie.

« On ne peut calmer les enfants quand ils entendent le bruit d’un avion ou d’un obus », poursuit Abou Mohamed.

Inès, petite chose emmitouflée dans un anorak sombre et bonnet vert enfoncé sur la tête, est la plus traumatisée des quatre enfants encore à la maison, selon son père.

La nuit, elle met sa tête sous l’oreiller pour ne pas entendre les avions.

« Elle se fige totalement pendant les bombardements », raconte Abou Mohamed. « Je lui bouche les oreilles et je lui dit +n’ai pas peur, c’est loin d’ici, il n’y aura pas de frappes+. Mais elle hurle et elle pleure », soupire le père.

La famille ne sait pas encore où elle va vivre, mais elle va rallier la région d’Aazaz, au nord de Daret Ezza, et considérée comme plus sûre car située à la frontière turque.

« On logera peut-être avec mon cousin qui a pris une tente en partant », dit Abou Mohammed.

Faute de place dans le pick-up, la famille a été contrainte d’abandonner une cuisinière, des bassines, des marmites et une machine à coudre. Et comme la cabine ne peut accueillir tout le monde, certains doivent faire le voyage dans l’arrière du véhicule, juchés sur un tas d’affaires.

– « Comment les calmer? » –

Les organisations humanitaires ne cessent de tirer la sonnette d’alarme sur les traumatismes psychologiques subis en Syrie par les enfants, qui perdent leur maison, leur école, et voient parfois mourir leurs proches.

L’ONG Save the Children, qui a fait état de la mort de sept enfants dans le nord-ouest, dont un bébé, a averti que le nombre de décès pourrait augmenter vu les conditions « inhumaines » dans lesquelles vivent les déplacés.

Plus de 400 civils, dont 112 enfants, ont par ailleurs été tués depuis la mi-décembre dans les bombardements, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

A Daret Ezza, Abou Ahmed se prépare lui aussi à prendre la route avec ses cinq enfants, dont le plus jeune a sept ans.

Aidé par un de ses fils, un rouquin à la silhouette frêle, il charge une camionnette de ses maigres possessions sans savoir où il va aller.

Les enfants sont « terrorisés », par les bombardements, confie-t-il. Il se souvient encore des frappes particulièrement violentes dans la nuit de lundi.

« Les enfants ont couru se réfugier dans les bras de leur mère et dans les miens », raconte-t-il. « Ils hurlaient et ils pleuraient, on ne savait pas comment les calmer ».